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17/04/2012 | FRANCE | N°09/22381

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 17 avril 2012, 09/22381


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 17 AVRIL 2012



N° 2012/

JMC/FP-D











Rôle N° 09/22381





[O] [H]





C/



SAS HYPER GRASSE

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Marie ROUSSEL, avocat au barreau de NICE>


Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 02 Novembre 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 09/547.







APPELANTE



Madame [O] [H], demeurant [Adresse 1]



représentée p...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 17 AVRIL 2012

N° 2012/

JMC/FP-D

Rôle N° 09/22381

[O] [H]

C/

SAS HYPER GRASSE

Grosse délivrée

le :

à :

Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Marie ROUSSEL, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 02 Novembre 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 09/547.

APPELANTE

Madame [O] [H], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Marie ROUSSEL, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SAS HYPER GRASSE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 28 Novembre 2011 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame [R] HERMEREL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Février 2012 prorogé successivement au 28 février, 27 mars, 3 avril puis 17 avril 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 avril 2012.

Signé par Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La SAS HYPER GRASSE exploite à GRASSE, un hypermarché sous l'enseigne E LECLERC. Elle a un effectif moyen de 189 salariés.

[O] [H] a été embauchée par cette société, selon contrat à durée indéterminée, le 11 septembre 2002, à compter du 1er octobre suivant, en qualité d'Employée commerciale, niveau 2B, catégorie employés, moyennant un salaire mensuel brut de 1 300,00€ pour 151,67 heures de travail effectif.

Par un avenant, en date du 1er juillet 2004, la salariée a « bénéficié » d'une « promotion à l'essai » au poste d'employée principale au titre de laquelle elle bénéficiait d'une formation du 1er juillet 2004 au 31 décembre 2004. Cette période d'essai a été renouvelée pour six mois, du 1er janvier 2005 au 30 juin 2005. Par un second avenant du 1er juillet 2005 elle a promue aux fonctions d'Employé Principal, niveau III, échelon A. Par un troisième avenant en date du 8 août 2005 elle a « bénéficié »  d'une autre nouvelle « promotion à l'essai », prévoyant une formation, du 8 août 2005 au 7 août 2006, au poste de Responsable Charcuterie Libre Service- Volailles. Par un dernier avenant en date du 5 août 2006 elle a été promue Responsable du rayon Charcuterie LS et Volailles, niveau V, échelon A, moyennant un salaire mensuel brut de 1 830€, ledit contrat énonçant « Votre salaire comprend forfaitairement les dépassements d'horaire que vous pourrez être amené à effectuer et ce dans la limite d'un horaire mensuel de 172,90 heures, ce qui correspond, compte tenu des pauses conventionnelles rémunérées, à 164,26 heures de travail effectif par mois./ Nous vous précisons que, compte tenu de la nature de vos fonctions et des responsabilités qui vous sont confiées, vous ne subirez aucun contrôle horaire et serez libre d'organiser votre travail et par voie de conséquence votre temps de travail effectif dans la limite horaire ci-dessus fixée./ Nous vous rappelons que tout dépassement de cet horaire doit faire l'objet d'une autorisation écrite et préalable de la Direction./ Cependant, si la Direction constate une mauvaise organisation du service, elle se réserve le droit de vous imposer des horaires ».

Elle faisait l'objet de plusieurs avertissements tant oraux qu'écrits, le dernier étant du 8 octobre 2008.

Le 4 novembre 2008 [O] [H] s'est trouvée en arrêt maladie. Cet arrêt de travail a été prolongé plusieurs fois.

Prétendant avoir été victime d'un harcèlement moral et avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires non payées elle a, le 10 décembre 2008, saisi le conseil de prud'hommes de GRASSE de demandes tendant au paiement de diverses sommes et indemnités.

Lors de la première visite de reprise, le 10 février 2009, le médecin du travail indiquait « Inapte temporairement à son poste de travail. A revoir le 3 mars 2009 pour une probable inaptitude définitive (article R 4624-31 du CT). Pourrait occuper un poste équivalent dans une autre entreprise ».

Lors de la seconde visite, ayant eu lieu le3 mars 2009, le Médecin du travail concluait ainsi « Inapte définitivement à travailler dans cette société. Pourrait occuper un poste équivalent dans un autre établissement (article R 4624-31 du CT) ».

[O] [H] étant déléguée du personnel l'employeur a saisi l'inspection du travail d'une demande d'autorisation de licenciement. Par une décision du 19 juin 2009, sur avis favorable du comité d'entreprise du 11 mai 2009, l'Inspecteur du travail a autorisé le licenciement d'[O] [H].

Par un courrier recommandé en date du 29 juin 2009 [O] [H] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

[O] [H] ayant additionnellement demandé que la rupture du contrat de travail soit déclarée imputable à l'employeur comme reposant sur le harcèlement moral et le défaut de recherche loyale de reclassement et modifié ses demandes tendant à l'octroi de diverses sommes et indemnités, les parties n'ayant pu se concilier et la société sus visée s'étant opposée aux différentes demandes le conseil de prud'hommes précité, par un jugement rendu le 2 novembre 2009, a :

Condamné la SAS HYPER GRASSE LECLERC à payer à [O] [H] la somme de 1 490,36€ au titre des salaires de février et mars, congés payés inclus et déduction faite des indemnités journalières de sécurité sociale ;

Débouté [O] [H] de ses autres demandes ;

Condamné la SAS HYPER GRASSE aux dépens.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 10 décembre 2009, reçue au greffe de cette cour le 11 décembre suivant, [O] [H], à laquelle ce jugement n'a pu être notifié, en a relevé appel.

Aux termes de ses écritures, déposées et reprises oralement à l'audience par son conseil, [O] [H], rappelant l'ensemble des décisions de première instance intervenues au bénéfice de divers salariés de la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC à l'encontre de cet employeur, fait valoir tout d'abord que c'est par manque de loyauté dans l'exécution de bonne foi du contrat de travail que l'employeur a « procédé » au travail dissimulé pour rendre le salarié taillable et corvéable à merci, sans lui permettre de comptabiliser les heures supplémentaires, a entretenu un harcèlement moral institutionnalisé en utilisant des méthodes de gestion insupportables et a entraîné sa dépression, sa maladie et son inaptitude. Elle soutient à cet égard, en premier lieu, sur le travail dissimulé allégué, que ledit employeur a « procédé » par travail dissimulé selon la définition de l'article L 8221-5 du code du travail, en remettant des éléments de salaire non déclarés pour pallier aux pressions et aux heures supplémentaires non déclarées, en n'indiquant nullement sur les bulletins de salaires les heures accomplies par le salarié telles qu'elles apparaissent des attestations de ses collègues de travail faisant ressortir qu'elle travaillait en moyenne 8 à 10 heures par jour, que ses après-midi étaient données verbalement et non prévues qu'on lui imposait de travailler certains jours fériés, non rémunérés non compensés et qu'elle n'avait jamais pu prendre 2 jours de repos consécutifs, que l'employeur ne s'est pas expliqué sur le détail de la convention de forfait, qu'il a cru pouvoir compenser les nombreux jours de travail et les nombreuses heures imposés, par le versement, par chèques, de primes occultes, qu'il a tenté de maquiller en rectifiant de manière maladroite et absurde des bulletins de paie, qu'il n'indique nullement sur les bulletins de paie la nature et le volume du forfait auquel se rapporte le salaire alors que la rémunération doit être aussi avantageuse pour le salarié que celle qu'il recevrait en l'absence de convention compte tenu des majorations pour heures supplémentaires, que la lettre de Mme [M] adressée en cours de délibéré au conseil de prud'hommes est révélatrice du système mis en place et enfin que si deux ou trois des attestations produites aux débats peuvent paraître critiquables car erronées, cela peut se comprendre en raison du temps écoulé, en revanche, a fortiori, cela implique que tous les autres témoignages sont véridiques et rapportent que la stricte et triste vérité sur les heures supplémentaires effectuées, la cour devant constater, à la lecture des badgeages du 1er octobre 2002 au 1 octobre 2004 et plus particulièrement la semaine du 19 juillet qu'elle effectuait d'ores et déjà quelques 51 heures au lieu de 35.

Sur les heures supplémentaires, reprenant les mêmes observations que ci-dessus, elle soutient essentiellement l'employeur n'étant pas en mesure de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, qu'elle a pour le moins effectué 224 heures supplémentaires et que pour le calcul des sommes qui lui sont dues à ce titre qu'il faut tenir compte, d'une part, que la technique de la convention de forfait permet de mensualiser les heures supplémentaires, par dérogation au principe du décompte hebdomadaire et que, par ailleurs, le concept de semaine, en tant que module d'organisation du temps de travail, n'est pas d'ordre public.

Sur le harcèlement moral allégué, elle prétend que « le corollaire de cet état de fait est, au sens de la Loi Fillon, l'établissement du harcèlement moral en l'application de l'article L1154-1 du Code du Travail », l'employeur ne pouvant en effet pas se contenter de prétendre que de telles contraintes étaient imposées par les impératifs de gestion inhérents à la vie de toute entreprise alors que, vu le nombre de salariés, il lui appartenait d'organiser légalement les horaires de travail de chacun, le repos hebdomadaire, les impératifs afférents aux ouvertures des jours fériés et dimanches, qu'en ayant agi ainsi avec elle l'employeur a non seulement commis le délit de harcèlement mais également celui d'entrave dans la mesure où, imposant ainsi des modifications du contrat de travail sans respect de la protection du statut des délégués du personnel l'employeur a contrevenu à ses obligations d'ordre public et que, en prenant connaissance de tous les dossiers plaidés concomitamment, la Cour constatera un harcèlement «institutionnalisé » et « collectif» auquel l'employeur n'a pas mis fin, nonobstant les injonctions de l'inspecteur du travail, ayant ainsi failli, par défaut de loyauté à l'égard des salariés, à son obligation de sécurité et de résultat, et ce à la lumière de la directive CE 89/391 du 12 janvier 1989 concernant la mise en 'uvre des mesures visant à promouvoir l'amélioration de la santé et de la sécurité des travailleurs faisant référence à l'obligation de sécurité et de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, cette attitude, révélatrice d'un harcèlement institutionnel contrevenant aux dispositions de l'article L 4121-1 du code du travail selon lequel « le chef d'entreprise assure la sécurité et protège la santé des travailleurs en procédant à des actions de prévention des risques professionnels, d'information et de formation, ainsi que la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés », l'employeur ne pouvant en l'occurrence se dédouaner en alléguant un quelconque élément objectif étranger à tout harcèlement et la volonté d'organiser de façon optimale le fonctionnement de l'entreprise pour atteindre les meilleurs résultats économiques n'autorisant pas l'employeur à mettre en péril la dignité, la santé ou la carrière des salariés.

Sur les circonstances de la rupture du contrat de travail [O] [H], rappelant que c'est en raison des circonstances particulièrement oppressantes décrites précédemment qu'elle est tombée gravement malade, que c'est dans ces circonstances que les médecins du travail l'ont déclaré inapte définitivement à travailler « dans cette société » et que c'est également pour ces raisons qu'in fine, l'inspecteur du travail avait autorisé son licenciement prétend que, si l'employeur a beau jeu de brandir la question de la séparation des pouvoirs, si, pendant longtemps, la Cour de cassation a jugé irrecevable le salarié protégé à poursuivre l'action en résiliation de l'action judiciaire en raison de la protection d'ordre public que lui confère son mandat tel n'est plus le cas et si le juge judiciaire n'a pas à se prononcer sur le licenciement autorisé par l'inspecteur du travail, il doit toutefois prendre en compte les griefs invoqués par le salarié à l'appui de sa demande de résiliation et demeure compétent pour allouer des dommages-intérêts au salarié au titre des fautes commises par l'employeur pendant la période antérieure au licenciement. Enumérant les fautes et manquements qu'elle impute à son employeur et excipant d'un préjudice important subi du fait des fautes imputables à l'employeur elle demande par suite à la cour de :

Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la SAS HYPER GRASSE à lui payer la somme de 1 490,36€ au titre des salaires de février et mars congés inclus, et déduction faite des IJSS ;

Réformer le jugement du 2 novembre 2009 sur les points sollicités ;

Constater le travail dissimulé ;

Condamner de ce fait la SAS HYPER GRASSE à lui payer la somme de 11 400€ en application de l'article L.8221-3 du Code du Travail ;

Constater les heures supplémentaires ;

Condamner la SAS HYPER GRASSE à lui payer la somme totale de 4 602,40€ bruts à titre de rappel de salaire ;

Constater le harcèlement moral institutionnel ;

Condamner de ce fait la SAS HYPER GRASSE LECLERC à lui payer la somme de 10 000,00€ en réparation du préjudice subi ;

Constater les fautes commises par l'employeur ayant causé la dépression et entraîné l'inaptitude de Mademoiselle [H] et son licenciement ;

Dire que cette situation est imputable à l'employeur ;

Le condamner, de ce fait, au paiement de la somme de 22 800€ en réparation du préjudice subi par elle ;

Condamner la SAS HYPER GRASSE LECLERC à lui payer la somme de 4 000€ au titre de l'article 700 du CPC ;

Faire application de l'article L 101 du livre des procédures fiscales et transmettre la décision à intervenir à l'administration fiscale ;

Faire application de l'article 40 du code de procédure pénale et transmettre la décision à intervenir au Parquet.

Aux termes de ses conclusions écrites, déposées et reprises oralement à l'audience par son conseil, la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC, fait essentiellement valoir, en ce qui concerne le prétendu travail dissimulé, après avoir rappelé les dispositions légales applicables ainsi que les applications jurisprudentielles sur le caractère intentionnel de la dissimulation, que les demandes de [O] [H] sont infondées dès lors que, d'une part, les attestations en justice sur lesquelles il se fonde ont été rédigées par les autres personnes ayant saisi le Conseil de prud'hommes par l'intermédiaire du même avocat et pour formuler exactement les mêmes demandes, [O] [H] ayant elle-même témoigné à son tour pour ses collègues et que ces attestations, qui sont visiblement de complaisance en ce qu'elles sont rédigées de la même façon pour les différents dossiers et contiennent d'évidentes déclarations mensongères, dont le caractère incohérent est par ailleurs, pour partie, reconnu par le demandeur, devront être rejetées intégralement, d'autre part, que la liste des jours fériés durant lesquels le magasin a été ouvert à la clientèle que [O] [H] verse aux débats pour tenter d'établir qu'elle a été amené à travailler certains jours fériés de façon non rémunérée et non compensée, ce qui est faux, ne démontre en rien qu'elle a travaillé durant toutes ces journées, les jours fériés travaillés étant par ailleurs inclus dans le salaire mensuel forfaitaire (article 4 annexe agents de maîtrise), il n'y a pas lieu de prévoir une rémunération particulière excepté en ce qui concerne le 1er mai, non concerné par la réclamation, la liste produite faisant ressortir au reste que le magasin était fermé ce jour là, de sorte que ces jours fériés ne doivent pas entrainer de majoration à 25 ou 50% et de dernière part, en ce qui concerne le paiement de primes constituant, selon l'intéressée, la preuve du travail dissimulé, que celles-ci ont été versées aux salariés non pas en raison des heures accomplies mais simplement pour les gratifier en raison des bons résultats de l'année, ces primes, déclarées comme primes exceptionnelles sur les bulletins de salaire n'ayant donc pas été dissimulées.

Sur les heures supplémentaires prétendues, qui n'étaient d'ailleurs pas réclamées dans les écritures initiales de première instance, la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC, faisant valoir les mêmes moyens que précédemment, soutient, en sus, que les calculs opérés par [O] [H] sont faux, que, en ce qui concerne la période précédant la convention de forfait, l'intéressée a suivi les horaires dits de bureaux à hauteur de 35 h par semaine et systématiquement rémunérée des heures supplémentaires éventuellement effectuées, que, n'ayant pas eu le statut d'agent de maîtrise durant cette partie de la relation de travail et étant alors soumise à l'obligation de pointer, les documents de pointage font apparaître qu'elle faisait effectivement 35 heures par semaine, que, en ce qui concerne la période allant du 5 août 2006 au mois de mars 2008, la convention de forfait prévu au contrat qui satisfait aux exigences légales et jurisprudentielles et qui ne désavantage pas le salarié qui a perçu une rémunération supérieure aux minima conventionnel, est parfaitement valable, le statut de sont faux, que, en ce qui concerne la période allant du mois de mai 2005 au mois de février 2006, que l'intéressée a suivi les horaires dits de bureaux à hauteur de 35 h par semaine et systématiquement rémunérée des heures supplémentaires éventuellement effectuées, que , en ce qui concerne la période allant du 1er février 2006 au mois de mars 2008, la convention de forfait prévu au contrat qui satisfait aux exigences légales et jurisprudentielles et qui ne désavantage pas le salarié qui a perçu une rémunération supérieure aux minima conventionnel, est parfaitement valable, le statut d'[O] [H] ressortant de sa classification impliquant une grande liberté d'organisation et une forte autonomie, ses heures de travail ne dépassant pas 39, 90 heures par semaine, l'intéressé ne travaillant que cinq jours sur sept et son poste de travail ne nécessitant pas que des heures supplémentaires soient accomplies.

Sur le prétendu harcèlement moral, rappelant les dispositions légales et le régime de preuve qui en découle, imposant au salarié d'établir tout d'abord la matérialité des faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement, la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC fait valoir que les éléments invoqués par l'appelante ne permettent pas de présumer de l'existence d'un harcèlement le témoignage dont elle argue n'indiquant en aucune manière qu'elle aurait fait l'objet d'un harcèlement, qu'aucune conséquence ne peut être tirée de l'avis d'inaptitude quant aux causes de la situation, que la salariée ne peut arguer de la décision de l'inspection du travail l'inspecteur n'écrivant rien dans sa décision qui corrobore la thèse du harcèlement moral, que le référence à d'autres salariés déclarés inaptes est sans lien avec sa situation personnelle, que le salarié n'explique pas quelles sont les méthodes de gestion soi-disant harcelantes ni en quoi elles consistent ni quand et où il les aurait subies, que le salarié n'apporte aucun élément de nature à démontrer l'existence d'agissements répétés qui dégraderaient ses conditions de travail et altèreraient sa santé.

Sur la demande d'indemnisation du préjudice subi, qui est une nouvelle demande formulée en cause d'appel, reposant sur une prétendue mauvaise exécution des obligations du contrat de travail par l'employeur, au soutien de laquelle madame [V] reprend encore une fois son argumentaire relatif au prétendu harcèlement « institutionnalisé », elle soutient que celle-ci ne peut solliciter par cet autre biais une nouvelle indemnisation, que par ailleurs, Madame [V] ne peut contester son licenciement par ce biais, alors même qu'il a fait l'objet d'une autorisation par l'Inspecteur du travail, non contestée par la salariée, qu'elle ne peut solliciter une indemnisation à hauteur de 12 mois de salaire alors que, selon ses propres pièces, elle n'a eu que deux mois de période sans emploi.

Sur les compléments de salaire elle soutient que, ayant parfaitement exécuté ses obligations, [O] [H] ne peut qu'être déboutée de ses demandes à ce titre.

Faisant valoir que la procédure que celle-ci avait initiée était abusive elle demande à la cour de :

Confirmer le jugement rendu le 2 novembre 2009 par le Conseil de prud'hommes de GRASSE, excepté en ce qu'il l'a condamnée au versement de compléments de salaire pour maladie ;

Ce faisant,

Débouter [O] [H] de toutes ses demandes ;

Condamner [O] [H] au paiement de la somme de 10 000€ pour procédure abusive ;

Condamner [O] [H] au paiement de la somme de 5 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du NCPC ;

Condamner [O] [H] aux entiers dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties il est renvoyé au jugement déféré, aux pièces de la procédure et aux conclusions des parties.

SUR CE :

Attendu que l'appel, interjetés dans les formes et le délai de la loi, est recevable ;

Attendu que, s'il résulte de l'article L 3171-4 (ancien L 212-1-1) du code du travail, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre en apportant, le cas échéant, ses propres éléments sur les horaires effectivement réalisés ;

Attendu que, pour étayer sa demande au titre des heures supplémentaires [O] [H] verse aux débats, d'une part, des listes relatives à l'ouverture du magasin de la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC les dimanches et jours fériés faisant ressortir que ledit magasin était ouvert, notamment, les lundi 28 mars, lundi 15 août, mardi 1 novembre, vendredi 11 novembre 2005, lundi 17 avril, lundi 8 mai, vendredi 14 juillet, mardi 15 août, dimanche 3 septembre, mercredi 1er novembre, samedi 11 novembre, dimanche 24 décembre et dimanche 31 décembre 2006 ainsi que les lundi 9 avril, mardi 8 mai, jeudi 17 mai, samedi 14 juillet, mercredi 15 août, jeudi 1er novembre, dimanche 23 décembre et dimanche 30 décembre 2007 et les lundi 24 mars, jeudi 8 mai, dimanche 1er juin, lundi 14 juillet, vendredi 15 août, dimanche 31 août, samedi 1er novembre et dimanches 14, 21 et 28 décembre 2008 et d'autre part, des attestations émanant de [W] [M], d'[X] [E] et de [RR] [V] ces scripteurs attestent, en ce qui concerne [O] [H] :

-avoir constaté sa présence «  les jours suivants: le lundi 30 juillet 2007 (soirée agrandissement), dimanche 23 septembre 2007 (foire au vins) dimanche 23 décembre 2007 et dimanche 30 décembre 2007 » (attestation [V]);

-certifie sa présence les « lundi 9 avril 2007, mardi 8 mai 2007, jeudi 17 mai 2007, jeudi 31 mai 2007, samedi 14 juillet 2007, lundi 30 juillet (soirée d'agrandissement), mercredi 31 octobre 2007, jeudi 1er novembre 2007, dimanche 23 décembre 2007, dimanche 31 décembre 2007 » et « certifie qu'elle avait des inventaires mensuels après 20 h jusqu'à 22 h », que « les demi journées de repos étaient supprimées quand elle avait un samedi de repos » et que « elle était présente en moyenne 10 heures par jour » (attestation [E]) ;

-Avoir constaté sa présence «  sur son lieu de travail' les jours suivants : 31 mai 2005 (inventaire), 30 septembre 2005 (inventaire) 11 novembre 2005 (armistice), 31 janvier 2006 (inventaire), 17 avril 2006 (Lundi de Pâques), 31 mai 2006 (inventaire) 14 juillet 2006, 3 septembre 2006 (rentrée de classes), 24 septembre 2006 (foire aux vins), 31 octobre 2006 (inventaire), le 11 novembre 2006, le 24 décembre 2006 (distribution de plateaux repas), 31 décembre 2006 (inventaire), le 9 avril 2007, 17 mai 2007 (Ascension), 31 mai 2007 (inventaire),14 juillet 2007, 30 juillet 2007 (agrandissement), 23 septembre 2007 (Foire aux vins), 31 octobre 2007 (inventaire), jeudi 1er novembre 2007, dimanche 23 décembre 2007, le 7 janvier 2008 (inventaire sup), 24 mars 2008 (Lundi de Pâques) » (attestation [M]) ;

Attendu que ces attestations, identiques émanent de salariés qui sont en conflit avec la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC, [O] [H] attestant elle-même dans les instances les opposant au même employeur, de sorte qu'elles ne peuvent être prises en considération qu'avec précaution et ce d'autant que les salariés en question attestent de faits ordinaires plusieurs années après pour les premiers ([W] [M] attestant le 8 janvier 2009 notamment de faits de 2005) ; Qu'en outre la teneur de plusieurs d'entre elles s'avère inexacte dans la mesure où les scripteurs rapportent des faits qu'ils n'ont pu personnellement constater, [X] [E] par exemple attestant qu'[O] [H] travaillait le 8 mai 2007 alors que les pièces produites par l'employeur font ressortir que ce jour là elle était en congés (congés payés du 7 au 12 mai 2007) ces inexactitudes étant d'ailleurs admises dans les écritures ; Qu'au surplus leur contenu est contredit par l'attestation versée aux débats par l'employeur émanant de [RR] [L], qui indique « en tant que délégué du personnel je côtoie régulièrement les salariés de l'entreprise. Personne ne m'a jamais fait état de difficultés ou en termes d'horaire ou en termes de harcèlement moral », attestations qui, pour émaner d'un témoin encore salarié de l'entreprise, n'a pas pour autant moins de valeur probante que celles d'anciens salariés en conflit avec leur employeur ; Que la demande n'est donc pas étayée par des éléments sérieux, observation étant faite que le versement à [O] [H] les 25 juin 2006, 5 octobre 2007 et ultérieurement, par chèques des sommes de 1 500€, 2 000€ et 1 568,80€, qui n'apparaissent que tardivement sur les bulletin de salaire comme « acompte sur prime de bilan », ne fait pas davantage la démonstration requise du salarié, la lettre adressée en cours de délibéré au conseil de prud'hommes le 24 juin 2008 par [W] [M], elle-même en conflit avec la société précitée, de laquelle celle-ci prétend tirer la preuve de ce que ce paiement correspondrait en réalité au paiement occulte d'heures supplémentaires, étant dépourvue de valeur probante cette salariée faisant partie de ceux présentement en litige avec la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC ;

Que, par ailleurs, en ce qui concerne la période antérieure à la convention de forfait, l'édition des « badgeages » dont il est fait état, produites par l'employeur, allant du 1er octobre 2002 au 21 août 2004, ne fait pas apparaître plus d'heures supplémentaires que celle qui, selon les bulletins de salaire produits, ont été réglées pendant cette période, au-delà des 35 heures en heures supplémentaires aux taux de 125% et 130% (nuit), la seule semaine faisant exception aux 35 heures étant celle comprise entre le 23 avril et le 2 mai 2004, qui mentionne 46h40, au titre de laquelle ont été réglées des heures complémentaires et des heures supplémentaires, à la lecture des bulletins de paie d'avril et de mai 2004 ; Que, en ce qui concerne la période postérieure au 5 août 2006, le dernier contrat de travail d'[O] [H] comporte, en ce qui concerne sa rémunération, les dispositions suivantes: «Vous percevrez un salaire mensuel brut de 1 830,00€/ Votre salaire comprend forfaitairement les dépassements d'horaire que vous pourrez être amené à effectuer et ce dans la limite d'un horaire mensuel de 172,90 heures, ce qui correspond, compte tenu des pauses conventionnelles rémunérées, à 164,26 heures de travail effectif par mois./ Nous vous précisons que, compte tenu de la nature de vos fonctions et des responsabilités qui vous sont confiées, vous ne subirez aucun contrôle horaire et serez libre d'organiser votre travail et par voie de conséquence votre temps de travail effectif dans la limite horaire ci-dessus fixée. Nous vous rappelons que tout dépassement de cet horaire doit faire l'objet d'une autorisation écrite et préalable de la Direction », ces dispositions étant en adéquation formelle avec la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, visée tant par le contrat de travail que par les bulletins de salaire, applicable en l'espèce, qui prévoit, d'une part, en son article 4 que « Les agents de maîtrise peuvent bénéficier d'une rémunération forfaitaire dans les conditions prévues par les dispositions conventionnelles (cf. Art. 5-7)./ L'établissement du salaire forfaitaire doit tenir compte de tous les avantages légaux et conventionnels du travail éventuel du dimanche, des jours fériés et des majorations relatives aux heures supplémentaires./ En application de l'Art. 3-11 de la convention collective nationale, le bulletin de paie des agents de maîtrise devra notamment comporter le nombre d'heures de travail forfaitaires auxquelles correspond la rémunération versée./ Lorsque des circonstances exceptionnelles modifient de façon importante la durée normale du travail, la direction détermine, en accord avec l'intéressé, une compensation en tenant compte des majorations légales et conventionnelles », d'autre part, que chaque salarié « peut, quel que soit son classement hiérarchique et la filière dont il relève, être amené à participer aux opérations d'inventaire » (article 4-6) et, de dernière part, en son article 5-7-4, comportant des dispositions propres aux agents de maîtrise, que « Comme les cadres, certains agents de maîtrise - notamment ceux travaillant en magasins - disposent d'une latitude réelle dans l'organisation de leur temps de travail ; ils doivent organiser leur présence en entreprise et leur temps de travail effectif dans des conditions compatibles avec les nécessités de leurs responsabilités professionnelles et personnelles.

Ils doivent bénéficier d'une réduction de leur durée du travail sous une forme appropriée qui ne remette pas en cause le niveau d'autonomie qui leur est conféré par leur fonction.

Cette réduction pourra notamment s'effectuer selon l'une des modalités suivantes, pouvant être combinées entre elles:

-l'une des modalités applicables dans leur service ou à leur équipe;

-définition d'un forfait assis sur un horaire mensuel dans le respect du contingent annuel d'heures supplémentaires;

-attribution d'un nombre de jours de repos répartis sur l'année (ou période de 12 mois consécutifs).

Si des agents de maîtrise sont amenés à effectuer régulièrement des heures supplémentaires, leur paiement - pour celles non intégralement compensées, majoration comprise, en temps de repos - peut être inclus dans leur rémunération mensuelle sous la forme d'un forfait.

Le nombre d'heures, excédant la durée légale du travail et sur lequel est calculé le forfait, doit être déterminé dans la limite du nombre d'heures prévu par le contingent annuel d'heures supplémentaires ou, exceptionnellement, d'un nombre supérieur autorisé par l'inspecteur du travail.

L'inclusion du paiement des heures supplémentaires dans la rémunération forfaitaire ne se présume pas. Elle doit résulter d'un accord de volonté non équivoque des parties, d'une disposition expresse du contrat de travail ou d'un avenant à celui-ci.

La rémunération forfaitaire convenue doit être au moins égale au salaire minimum conventionnel applicable au salarié, majoré des heures supplémentaires comprises dans l'horaire de travail pour lequel le forfait a été convenu.

En cas de modification de la durée du travail pour lequel le forfait a été convenu, celui-ci doit être adapté au nouvel horaire auquel le salarié se trouve soumis.

Le bulletin de paie de l'intéressé doit faire apparaître le nombre moyen mensuel d'heures de travail, supérieur à la durée légale du travail, sur la base duquel le salaire forfaitaire a été convenu » ;

Qu'en l'occurrence les bulletins de paie afférents à ce dernier contrat portent mention du salaire mensuel forfaitaire convenu (1 830€), de l'horaire mensuel (172,90h) et l'indication du temps de pause inclus dans celui-ci (8,23h) ; Que les pièces produites font ressortir que, du 1er août 2006 au 28 février 2008, le salaire minimum conventionnel pour un agent de maîtrise classé, comme [W] [M], au niveau 5 était, pour 36,75 heures de travail et un taux horaire de 9, 26€ pause de 5% incluse, de 1 475,65€ ; Qu'avec la majoration de 25% pour heures supplémentaires (taux horaire 11,58€) le salaire minimum conventionnel pour 172,90 h mensuelles était de 1 631,30€ ; Que, après le 1er mars 2008, le taux horaire conventionnel étant de 9,83€ (1565€ pour 159,25h) l'avantage subsiste le salaire versé à la salariée étant de 1 900€ ; Que rien ne faisant ressortir que [W] [M] aurait effectué mensuellement des heures de travail au-delà de ces 172,90 heures et l'intéressée recevant une rémunération (1 830€, 1 900€ après le 1er mars 2008) supérieure au salaire qu'il aurait dû recevoir s'il avait perçu son salaire augmenté des majorations pour heures supplémentaires, la convention de forfait et les dispositions contractuelles correspondent aux exigences légales et jurisprudentielles ; Que, par suite, c'est à raison que le premier juge a rejeté la demande relative aux heures supplémentaires et, par voie de conséquence, celle relative à l'indemnité pour travail dissimulé, l'absence de mention immédiate, sur le bulletin de salaire, du versement des sommes indiquées ci-dessus ne suffisant pas, par ailleurs, à démontrer le caractère intentionnel de la dissimulation ;

Attendu que, aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » ; Que, selon l'article L 1152-2 du même code « aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés » ; Que, enfin, en application de l'article L 1154-1 dudit code « lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152 1 à L. 1152 3 et L. 1153 1 à L. 1153 4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement./Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement./Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles » ; Que, dans sa décision du 12 janvier 2002 le Conseil Constitutionnel a considéré que les dispositions législatives insérant dans le code du travail cette dernière disposition, alors codifiée à l'article L 122-52 du code du travail, ne méconnaissaient pas le principe constitutionnel du respect des droits de la défense sous réserve des « strictes réserves d'interprétation » qu'il formulait en retenant, notamment, que l'aménagement de la charge de la preuve pour les litiges portés devant le juge du travail en application du deuxième alinéa du nouvel article L. 122-49 (L 1152-2), relatif au harcèlement moral au travail par l'instauration de règles de preuve plus favorables à la partie demanderesse, ne « saurait dispenser celle-ci d'établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants qu'elle présente au soutien de l'allégation selon laquelle la décision prise à son égard procéderait d'un harcèlement moral », la partie défenderesse étant ainsi, selon la même décision, mise en mesure de s'expliquer sur les agissements qui lui sont reprochés et de prouver que sa décision est motivée, par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Attendu qu'[O] [H] fait état d'un harcèlement « institutionnel » et « collectif », dont elle prétend avoir été personnellement victime, tenant, selon ses écritures reprises oralement à « des agissements répétés» : non-respect des horaires, du repos, du délai de prévenance, à une dégradation des conditions de travail ayant entraîné la rupture sous forme de faute, maladie grave, démission faute, pour l'employeur, d'avoir pris «toutes dispositions nécessaires» au titre de l'article L 1152-4 du Code du Travail et ce même après y avoir été enjoint par l'Inspecteur du Travail » qui, selon les mêmes écritures, seraient établis au vu « des multiples pressions ressenties par le salarié » pour l'établissement desquelles « il suffit de se reporter aux courriers adressés à de nombreuses reprises à Madame [V] lui faisant état de reproches incessants et injustifiés auxquels il a tenté de répondre tant qu'il en avait la force (cf. les pièces adverses), des multiples attestations révélant les pressions lors des visites de l'inspecteur du travail, les soirées et jours fériés imposés en journées de travail, du non respect des prérogatives des délégués du personnel, des horaires imposés et des travaux les jours fériés, des constatations faites par le médecin du travail : sur 8 salariés, 4 ont été licenciés pour inaptitude définitive à la suite de dépressions graves, 3 ont été poussés à la faute et licenciés pour faute et 1 a donné sa démission » ;

Qu'eu égard à la motivation retenue ci-dessus quant aux heures supplémentaires et au travail effectué les dimanches et jours fériés, le non respect des horaires, ceux du repos et du délai de prévenance ainsi que le travail les jours fériés et le dimanche ou en soirée ne peuvent être invoqués comme l'un des éléments constitutif du harcèlement moral allégué ;

Que la cour n'a trouvé trace dans les pièces versées aux débats ni des courriers de reproches que l'employeur aurait adressés à [O] [H] ni d'une injonction que l'Inspection du travail aurait envoyée à l'employeur ;

Que parmi les nombreuses attestations dont il est fait état dans les conclusions on peut lire celle d'[O] [H] elle-même qui écrit « lors de la venue, au mois de mai de M. [C], inspecteur du travail, concernant le dossier de Mlle [V] [RR], DPCE, M. [S] assisté de M.[G] directeur de magasin et de Mlle [J], responsable du personnel, nous a convoqué afin de nous demander de faire attention à nos propos et d'éviter d'en dire trop. Après avoir vu M.[C] nous avons encore été convoqués 'pour savoir précisément ce qui avait été dit et une nouvelle fois encore je me sui rendu compte que mon rôle de DPCE ne signifiait rien au sein de cette entreprise car comme d'habitude je devais me taire en faveur de la direction » ce même témoin indiquant dans une autre attestation que M. [S] lui avait demandé, ainsi qu'à Mlle [T], ce que cette dernière confirme dans une attestation, de venir témoigner contre ses collègues dans la procédure prud'homale, celle de [M] [W] qui indique notamment « je certifie sur l'honneur les dires de Mme [RR] [V], à savoir que les agissements de M. [D] [S], PDG de la SAS HYPER GRASSE sont réels et dénotent son comportement envers ses employés que l'on pourrait qualifier de caractériel, colérique, qu'il abuse de son pouvoir de patron de la société que par ses agissements il fait pression auprès des salariés jusqu'à ce que l'on accepte ses positions et ses idées sans tenir compte de la législation » et celle de [R] [T], datée du 6 janvier 2009, dans laquelle ce témoin écrit « j'atteste que lorsque M. [C] est venu au mois de mai, M. [S] et Mlle [J] ont briffé Mlle [H] [O] et [T] [R], DPCE avant la venue de l'inspecteur du travail nous demandant de faire attention à ce que l'on allait dire et surtout d'en dire le moins possible. Il nous a reconvoqués après le départ de celui-ci pour savoir précisément ce qui avait été dit. C'est à partir de ce jour que les relations ont commencé à devenir de plus en plus tendues pour Mlle [H] et Mlle [T] car elles ont réalisés qu'elles ne pouvaient pas défendre objectivement leurs collègues de travail comme le mandat de DPCE leur permettait. Nous ne voulions plus servir la direction en tant que DPCE à leur fin personnelle » ainsi qu'une lettre que ce même témoin a adressée, le 6 janvier 2009 également, à l'avocat en charge de la défense des salariés dont la teneur est la suivante « Chère maître, veuillez trouver ci-joint ce que j'ai dû subir au sein de l'entreprise Leclerc à [Localité 3]. Travail dimanche et jours fériés non payés. Lorsque nous les responsables avons un jour férié non travaillé ou un samedi de repos une de nos deux après-midi de repos dans la semaine doit ne pas être prise. Manipulations mentales, nous parle comme à des chiens, aucun respect pour son personnel, se sert des DPCE à des fins personnelles pour être contre le personnel. Lors des entretiens en vu de sanctionner quelqu'un les DPCE sont toujours présents et doivent assister sans rien dire aux insultes et aux maltraitances mentales de leurs collègues sous peine de perdre leur propre travail dans l'entreprise. Quand pas d'accord avec la direction les rapports se dégradent très vite et le harcèlement commence. J'ai eu trois chefs qui avaient pour mission de me déstabiliser dans mon travail, me donner des ordres contradictoires, me déranger sans arrêt (appel micro ou téléphone), toujours critiquer mon travail, mes rayons (rupture, propreté, remplissage) idem pour la réserve, me dénigrer, même devant les clients ou/et les employés. Demande à mes employés ce que je fais de mes journées, on leur a même dit que des trains allaient partir mais que ce ne serait sûrement pas eux qui seraient dedans. Inventaire jusqu'à 3h00 du matin, à 7h00 reprise normale du travail, pas de respect d'amplitude horaire, « déboîte » les rayons devant clients et employés. Demande de faire des heures le soir, le jour même à 11h00 du matin par exemple » ;

Que si la teneur de ces attestations et documents paraît, de prime abord, comme accablante à l'égard de la direction de la SAS HYPER GRASSE quant à ses méthodes de management il y a lieu cependant de relever, de première part, que les attestations accusatrices rappelées ci-dessus émanent de salariés qui sont en conflit avec la SAS HYPER GRASSE et qui, dans les instances individuelles les opposant à celle-ci, produisent des attestations croisées tendant à accréditer leurs assertions réciproques, de deuxième part, que la rédaction de l'attestation précitée de [R] [T] donne à penser, ainsi que le fait observer l'appelante, qu'elle n'en est pas la rédactrice et, de troisième part, que dans une attestation ultérieure, en date du 14 janvier 2009, ce même scripteur, revient catégoriquement sur les précédentes en expliquant « alors que j'étais dans un état de santé faible, le groupe qui a mis la SAS HYPER GRASSE aux prud'hommes, et dont j'étais au courant dans la mesure où M. [S] nous en avait parlé lors d'une réunion des délégués du personnel m'a sollicité à plusieurs reprises pour rejoindre et aller à l'encontre de l'entreprise./ J'ai vraiment le sentiment d'avoir été embarquée dans une procédure qui n'est rien d'autre qu'une cavale pour déstabiliser l'entreprise./ J'ai vraiment le sentiment d'avoir été embarquée dans une procédure qui n'est rien d'autre qu'une attaque contre la société HYPERGRASSE./ Ce groupe a monté une stratégie commune qui consiste à dénigrer l'entreprise, à se mettre en maladie pour ensuite monter un dossier d'inaptitude auprès de la médecine du travail pour harcèlement moral, heures de travail dissimulés etc'Ce groupe orchestré par [A] [GB] et [O] [H] ont profité de mon état de santé et de ma position de délégué du personnel pour alerter notamment l'inspection du travail et mener tous ses dossiers devant le conseil de prud'hommes./ Je tiens à attester aujourd'hui que la SAS HYPER GRASSE est une entreprise ou l'on peut librement discuter et échanger sans aucune contrainte. Ce groupe ne cherche qu'à profiter et déstabiliser l'entreprise./ Je me retire de tout engagement ou position que j'aurai pu prendre à un moment de ma vie personnelle déstabilisée par des problèmes qui n'ont rien à voir avec toute cette histoire. / L'entreprise n'est pas du tout concernée par toutes ces attaques. Le Groupe est composé des personnes suivantes : [Y] [K], [A] [GB], [I] [P], [N] [F], [X] [E], [RR] [V], [W] [M]. Je dénonce toute attestation écrite ou exprimée car je n'étais pas dans une situation personnelle pour mesurer les conséquences » ; Que si [O] [H] prétend, en ironisant sur les termes de cette attestation ou ses redondances, que celle-ci serait le résultat d'une ultime manipulation de la part de l'employeur force est de constater, d'une part, qu'il s'agit d'une simple affirmation, aucune des pièces versées aux débats ne démontrant l'existence de la transaction alléguée, mais contestée, dont cette attestation serait la contrepartie, et que, d'autre part, alors qu'il est fait état d'un harcèlement « institutionnel » et « collectif » c'est-à-dire érigé en mode de gouvernance, touchant, selon les écritures, 8 salariés sur un effectif ayant varié jusqu'à 189, dans trois attestations des membres du CHSCT et un délégué du personnel affirment n'avoir eu aucune information ou aucune remontée sur un quelconque harcèlement, [B] [U] écrivant, dans une attestation du 5 décembre 2008 « faisant parie de CHSCT depuis juin 2005, nous réalisons des réunions tous les 3 mois afin d'aborder différents sujets. Cependant aucune remarque ne nous a été remontée concernant un quelconque harcèlement moral subit par un salarié de la SAS HYPER GRASSE», [JC] [J] indiquant, dans une attestation du 4 décembre 2008, « en tant que secrétaire du CHSCT nous n'avons jamais été saisi sur un quelconque signe d'harcèlement que ce soit de la part des employés ou des responsables. Si tel avait été le cas nous aurions traité ce sujet lors de nos réunions et ouvert une enquête » et [RR] [L], salariée depuis 2002, écrivant le 11 décembre 2008 « en tant que délégué du personnel je côtoie régulièrement des salariés de l'entreprise. Personne ne m'a jamais fait état de difficultés en termes d'horaire ou en termes de harcèlement moral. Lors de nos réunions de délégués du personnel nous n'avons jamais été saisis pour ce type de questions » ; Que ni l'avis d'inaptitude du médecin du travail ni l'avis médical du médecin traitant ne sont par ailleurs à même d'établir à eux seuls la matérialité des faits invoqués comme constitutifs d'un harcèlement, les constatations objectives opérées n'impliquant nullement que l'état constaté soit en relation avec un harcèlement les praticiens ne pouvant sur ce point que se référer aux dires du patient n'étant par définition pas témoins de ce qui se passe dans l'entreprise ; Qu'il convient de relever, en outre, que, aux termes mêmes du contrat de travail, il est prévu dans la description des tâches habituelles de la salariée qu'elle « participe aux opérations d'inventaire » et que, de dernière part, le contrat de travail dispose expressément que les fonctions spécifiques décrites en page 1 ne sont pas exhaustives et que sa fonction comporte également « des activités non énumérées qui font néanmoins partie de l'exercice du métier » et qu'elle pourra « être amené à effectuer des tâches correspondant à des fonctions de niveaux inférieurs ou exceptionnellement à réaliser des travaux relevant d'une autre fonction » ; Que, au regard de l'ensemble des éléments analysés ci-dessus la cour considère que ni le harcèlement moral ni l'entrave aux fonctions de délégué du personnel allégués ne sont avérés ;

Attendu que lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée ; Que si cette demande est estimée fondée elle produit ses effets à la date du licenciement ; Que c'est seulement s'il ne l'estime pas fondée qu'il doit statuer sur le licenciement ;

Attendu que le licenciement d'[O] [H], autorisé par l'inspection du travail, n'est pas discuté par la salariée, le principe de la séparation des pouvoirs s'opposant d'ailleurs à toute contestation devant le juge judiciaire sur ce point, la décision prise n'ayant par ailleurs fait l'objet d'aucun recours devant la juridiction administrative ; Qu'en revanche elle soutient que la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur, en raison de faits antérieurs au licenciement, l'employeur ayant, selon elle :

-Tenté de la rendre taillable et corvéable à merci la salarié, pensant pouvoir s'en tirer à bon compte en lui remettant quelques primes occultes, sans l'ombre d'une organisation ;

-Sans l'ombre d'une organisation lui a imposé le travail durant des soirées, des dimanches, des jours fériés, sans délai de prévenance ;

-A, sans vergogne, fait effectuer des heures supplémentaires ;

-N'a eu de cesse de lui adresser des reproches et de faire des pressions sur elle ;

-N'a pas respecté son rôle de déléguée du personnel ;

-A étouffé dans l''uf sa mission, toujours en faisant pression aux moments critiques (visites de l'inspecteur du travail, entretiens avec d'autres salariés, etc.) ;

Attendu que ces manquements, à l'exception de celui afférent aux reproches qui lui ont été adressés, ont été examinés ci-dessus et considérés comme non établis ; Qu'ils ne peuvent donc fonder une résiliation judiciaire du contrat de travail observation étant faite que l'inspecteur du travail qui a autorisé le licenciement après avoir procédé à une enquête n'a ni explicitement ni implicitement retenu un harcèlement et pas davantage une entrave aux fonctions de délégué du personnel ; 

Attendu, les avertissements prononcés tiennent, selon les pièces versées aux débats, à un mauvais taux de casse (3% alors que la taux acceptable est de 0,60 à 0,70%), (avertissement oral du 7 septembre 2007), à des ruptures d'approvisionnement des rayons (avertissement écrit du 27 novembre 2007 accompagnés de photographies montant des rayons peu ou pas approvisionnés), à des dépassements de dates de péremption (avertissement du 8 octobre 2008) ; Que la matérialité des faits qui sont invoqués au soutien de ceux-ci n'est pas contestée, [Z] [H] invoquant seulement, en ce qui concerne le dernier, un manque de personnel ; Qu'étant justifiés ils ne peuvent fonder une résiliation ; Que par suite, le licenciement ayant été par ailleurs autorisé, [Z] [H] ne peut prétendre à une quelconque indemnité ; Que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté l'ensemble de ses demandes ;

Attendu que pour condamner la SAS HYPER GRASSE au paiement de la somme de 1 490,36€ le conseil de prud'hommes a considéré que le mois de février 2009 n'avait pas été payé ; Que la dite société, qui se prétend libéré à ce titre, ne fait pas la preuve du paiement qui lui incombe le bulletin de salaire étant insuffisant pour établir un paiement contesté ; que le jugement déféré sera donc confirmé ;

Attendu que le caractère abusif de la procédure n'est pas avéré ; Que le rejet des prétentions principales de l'appelante entraîne celui des demandes qu'elle formule au titre des articles L101 du livre des procédures fiscales et 40 du code de procédure pénale ;

Que l'équité commande de faire application, en cause d'appel, de l'article 700 au profit de la société intimée ;

Qu'en raison de sa succombance en appel [Z] [H] sera condamnée aux entiers dépens d'appel. ;

PAR CES MOTIFS :

Déclare l'appel recevable.

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de GRASSE le 2 novembre 2009 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamne [Z] [H] à payer à la SAS HYPER GRASSE CENTRE LECLERC, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1 000€ au titre des frais non compris dans les dépens exposés par l'intimée en cause d'appel.

Condamne [Z] [H] aux entiers dépens d'appel.

Déboute les parties de leurs demandes, fins et conclusions autres, plus amples ou contraires.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 09/22381
Date de la décision : 17/04/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°09/22381 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-04-17;09.22381 ?
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