COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1ère Chambre C
ARRÊT
DU 15 MARS 2012
N° 2012/253
A. J.
Rôle N° 11/09901
COMMUNE DE [Localité 7]
C/
[E] [O]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP JOURDAN
SCP TOLLINCHI
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 24 Mai 2011 enregistrée au répertoire général sous le N° 10/2341.
APPELANTE :
COMMUNE DE [Localité 7],
agissant par son Maire en exercice
domicilié en cette qualité [Adresse 5]
représentée par la SCP J F JOURDAN - P G WATTECAMPS, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP J F JOURDAN - P G WATTECAMPS, avoués,
plaidant par Maître Katell LE GOFF, avocat au barreau de NICE, substituant laSCP COURTIGNON - PENSA-BEZZINA, avocats au barreau de NICE
INTIMÉ :
Monsieur [E] [O]
né le [Date naissance 2] 1929 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 1]
représenté par la SCP TOLLINCHI VIGNERON TOLLINCHI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP TOLLINCHI VIGNERON TOLLINCHI, avoués,
plaidant par Maître Xavier BECK, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Février 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur André JACQUOT, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Serge KERRAUDREN, Président
Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller
Monsieur André JACQUOT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2012.
ARRÊT :
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2012,
Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, Président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*-*
EXPOSE DU LITIGE :
Selon arrêté du maire de la commune de [Localité 7] en date du 28 septembre 2006, la parcelle cadastrée [Cadastre 3] a été déclarée vacante. Elle a été intégrée au domaine communal par délibération du conseil municipal du 27 avril 2007, et par arrêté du 16 mai 2007 la commune de [Localité 7] en a pris possession.
Le 6 février 2007, Monsieur [E] [O] a été autorisé à aménager une voie existante pour accéder à la parcelle [Cadastre 4] dont il est propriétaire. Ces travaux ont été réalisés en 2007/2008 et la commune de [Localité 7] en a fait constater la teneur par procès verbal de Maître [F], huissier de justice, en date du 8 octobre 2008. La direction départementale de l'équipement a pour sa part dressé un procès verbal d'infraction le 7 octobre 2008 ; enfin les 9 et 24 octobre 2008, la commune de [Localité 7] enjoignait à Monsieur [O] d'interrompre les travaux puis prenait un arrêté de péril imminent.
Le 8 décembre 2009, elle obtenait en référé la désignation de l'expert [J] qui a déposé son rapport le 10 novembre 2010.
Monsieur [O] ayant lui-même saisi le juge du fond pour enclave, l'expert [I] [B], commis dans le cadre de cette procédure déposait un rapport le 20 décembre 2010.
Invoquant un trouble manifestement illicite procédant d'une voie de fait, la commune de [Localité 7] a saisi le juge des référés d'une demande en rétablissement des lieux. Elle a été déboutée par décision contradictoire du 24 mai 2011.
Appelante de l'ordonnance, la commune de [Localité 7] fait valoir dans ses conclusions récapitulatives du 9 février 2012 que :
- Monsieur [O] n'a pas mentionné la parcelle [Cadastre 3] dans sa demande d'autorisation de travaux pour accéder à sa propriété et ne peut se fonder sur une autorisation frauduleuse ;
- les travaux réalisés constituent une violation du droit de propriété de la commune ;
- le rapport du géologue [N] déposé le 24 octobre 2008 établit que ces travaux constituent un risque imminent pour les propriétés aval, les remblais n'étant pas sécurisés;
- la parcelle [Cadastre 4] de Monsieur [O] n'est pas constructible ;
- les agissements de Monsieur [O], ancien maire de la commune sont constitutifs d'un abus de droit.
La commune de [Localité 7] conclut à l'infirmation de l'ordonnance déférée, à la remise en état des lieux sous astreinte et contrôle de l'expert [J] et à la condamnation de Monsieur [O] au paiement des sommes de 10.000,00 euros à titre de dommages intérêts et de 3.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Selon conclusions récapitulatives du 7 février 2012, Monsieur [O] fait valoir en réplique que :
- la commune ne justifie pas de sa propriété sur la parcelle [Cadastre 3];
- des travaux réalisés en vertu d'une autorisation ne peuvent constituer une voie de fait;
- l'expert [J] ne conclut pas à l'existence d'un dommage imminent ;
- l'enlèvement de remblais envisagé par l'expert concerne la parcelle [Cadastre 4] dont la commune n'est pas propriétaire ;
- l'expert [B] reprend le tracé et les aménagements réalisés aux fins de désenclaver la parcelle [Cadastre 4] et l'architecte des bâtiments de France a émis un avis favorable ;
- le rapport du géologue [N] réalisé en dehors de tout contradictoire est inopposable;
- les travaux litigieux constituent l'aménagement d'une piste existante et la commune n'est guère pressée de conclure au fond dans la procédure pendante pour enclave.
Monsieur [O] conclut à la confirmation de l'ordonnance déférée et au paiement par la commune d'une indemnité de 3.000,00 euros pour frais de procédure.
DISCUSSION :
La commune de [Localité 7] justifie de la publication à la conservation des hypothèques le 5 mars 2008 de l'arrêté municipal du 16 mai 2007 portant transfert de propriété de la parcelle [Cadastre 3] à son profit. Au demeurant Monsieur [O] n'en tire aucune conséquence de droit quant à la recevabilité de l'action de la commune.
Sur le fond, il soutient à bon droit que des travaux entrepris sur la base d'une autorisation instruite par les services de l'Etat ne peuvent constituer une voie de fait étant rappelé de surcroît qu'à l'époque de leur réalisation, la commune avait été autorisée à lui céder la parcelle [Cadastre 3].
Ils ne sont pas plus constitutifs d'un péril imminent dans la mesure où l'expert [J] commis à la demande de la commune explique dans son rapport précité du 10 novembre 2010 que :
- les travaux sont intervenus en zone bleue du plan de prévention des risques de la commune ;
- nonobstant les mouvements significatifs de terrains opérés, l'évolution générale des lieux apparaît favorable malgré l'importance des précipitations que la région a subies durant les automnes et hivers 2008 et 2009 ;
- l'état actuel du site n'apparaît pas extrêmement préoccupant.
Les travaux litigieux ne sont pas représentatifs enfin d'un trouble manifestement illicite dès lors que :
- ils aménagent un chemin d'exploitation existant ;
- les remblais les plus importants ont été réalisés sur la parcelle [Cadastre 4] propriété de Monsieur [O] ;
- l'expert [B] commis à l'occasion de la procédure de désenclavement introduite au fond par Monsieur [O], reconnaît dans son rapport du 20 décembre 2010 l'état d'enclave de la parcelle [Cadastre 4] et propose une desserte par la piste réaménagée.
L'ordonnance déférée sera ainsi confirmée.
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Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à Monsieur [O] la charge de ses frais irrépétibles.
En revanche, la commune de [Localité 7] qui succombe sera condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme l'ordonnance déférée,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la commune de [Localité 7] aux dépens et autorise le recouvrement direct au profit de la SCP Tollinchi-Vigneron-Tollinchi, avocats, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT