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13/03/2012 | FRANCE | N°10/18132

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre a, 13 mars 2012, 10/18132


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A



ARRET SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 13 MARS 2012

A.V.

N°2012/















Rôle N° 10/18132







[C] [O] épouse [G]





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Arrêt en date du 13 Mars 2012 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 15/06/2010, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 144 rendu le 05/03/2009 par la Cour d'Appel d 'AIX EN PROVENCE ( 1ère Chambre B).





DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION



Madame [C] [O] épouse [G] venant aux droits de l...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 13 MARS 2012

A.V.

N°2012/

Rôle N° 10/18132

[C] [O] épouse [G]

C/

DIRECTION GENERALE DES IMPOTS

Grosse délivrée

le :

à :boulan

desombre

Arrêt en date du 13 Mars 2012 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 15/06/2010, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 144 rendu le 05/03/2009 par la Cour d'Appel d 'AIX EN PROVENCE ( 1ère Chambre B).

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

Madame [C] [O] épouse [G] venant aux droits de la SOCIETE COMIFEX

née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 5] (SUISSE)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]

représentée par la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP

BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués

assistée par Me Christian LAROCHE, avocat au barreau de NICE

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

DIRECTION GENERALE DES IMPOTS, représentée par le Directeur des Services Fiscaux des Alpes-Maritimes,[Adresse 2]

représentée par la SCP Martine et Julien DESOMBRE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP GIACOMETTI - DESOMBRE avoués

ayant pour avocat Me Jean-Max VIALATTE, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 06 Février 2012 en audience publique .Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.LACROIX-ANDRIVET, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président,

Monsieur Jean VEYRE, Conseiller

Madame Anne VIDAL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mars 2012..

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mars 2012

Signé par Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Suivant assignation en date du 9 juin 2006, Mme [O] épouse [G], venant aux droits de la Société COMIFEX, liquidée en 1994, a fait assigner la direction générale des impôts devant le tribunal de grande instance de Grasse pour contester l'avis de mise en recouvrement délivré par l'administration fiscale à l'encontre de cette société au titre de la taxe de 3% sur un appartement situé à [Adresse 2], pour les années 1989 à 1997, faisant valoir, pour l'essentiel, que les droits d'enregistrement ne pouvaient faire l'objet d'une procédure de vérification, que la société ne pouvait faire l'objet d'une vérification de comptabilité et que le siège de la société se situant en Suisse, celle-ci échappait au régime de la taxe de 3%.

Par jugement en date du 20 décembre 2007, le tribunal de grande instance de Grasse a considéré que la procédure de vérification n'encourait pas la nullité et que la dissolution de la Société COMIFEX n'avait pas d'effet en France à l'égard des tiers avant sa publication dans un journal d'annonces légales et l'inscription modificative au registre du commerce et des sociétés. Il a constaté que la transmission du bien immobilier par la Société COMIFEX à Mme [O] épouse [G] n'avait donné lieu à un acte de mutation que le 20 octobre 2000 et que ce n'est qu'à la suite de sa publication à la conservation des hypothèques que cette mutation était devenue opposable à l'administration. Il a enfin retenu que le siège social de la Société COMIFEX était situé à Vaduz au Liechtenstein et non en Suisse et que la valeur du bien retenue par l'administration fiscale avait été calculée conformément aux principes retenus par la cour de cassation. Il a donc rejeté les demandes de Mme [O] épouse [G] et prononcé sa condamnation à payer à la direction générale des impôts une somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant décision en date du 5 mars 2009, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, après avoir donné acte à la direction générale des impôts de ce que, par suite du dégrèvement partiel, la somme effectivement réclamée à la Société COMIFEX était de 253.824 €, sauf à déduire les majorations de retard, a confirmé le jugement déféré, sauf en ce qu'il avait débouté Mme [O] épouse [G] de sa demande au titre des majorations de 40% pour retard des déclarations au titre de l'article 990 D du Code général des impôts pour les années 1989, 1990, 1991, 1992, 1993, 1995 et 1996.

Cet arrêt a été cassé par la cour de cassation, suivant décision en date du 15 juin 2010, la cour de cassation considérant que la cour d'appel n'avait pas répondu aux conclusions de Mme [O] épouse [G] qui faisaient valoir que la Société COMIFEX ne pouvait être soumise à une vérification de comptabilité, dès lors qu'elle n'était soumise à aucune obligation comptable, n'exerçant aucune activité de nature industrielle ou commerciale en France. La cause et les parties ont donc été renvoyées, dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé, devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

La cour d'appel d'Aix-en-Provence a été saisie par déclaration déposée par Mme [O] épouse [G] le 11 octobre 2010.

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Mme [O] épouse [G], aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 20 janvier 2012, demande à la cour :

d'infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 20 décembre 2007,

d'annuler la décision de rejet du Directeur des services fiscaux des Alpes Maritimes,

d'ordonner la restitution de l'ensemble des rappels de taxe de 3% et des pénalités de retard acquittées, soit respectivement 929.967 F et 809.094 F, sommes laissées à la charge de la Société COMIFEX sur l'imprimé d'acceptation partielle du 22 mars 2006,

à défaut de dire que les sommes laissées à la charge de la Société COMIFEX doivent être diminuées de 74.089 F (soit 11.294,80 €),

de condamner la direction générale des finances publiques aux dépens et au paiement d'une somme de 30.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle présente les moyens suivants :

Moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de vérification de comptabilité : aux termes de la jurisprudence de la cour de cassation, les droits d'enregistrement ne peuvent en eux-mêmes faire l'objet d'une procédure de vérification de comptabilité que s'ils procèdent d'une activité professionnelle obligeant le contribuable à la tenue d'une comptabilité ou s'ils sont assis sur les éléments comptables d'une telle activité ; or, la Société COMIFEX n'a jamais eu d'activité professionnelle, ni en France, ni à l'étranger, et ne pouvait être soumise à aucune obligation comptable puisqu'elle n'exerçait aucune activité de nature industrielle ou commerciale et ne percevait aucun loyer ; c'est la raison pour laquelle les sociétés étrangères qui sont seulement propriétaires d'immeubles mis à la disposition d'un actionnaire ne peuvent faire l'objet d'une vérification de comptabilité ;

Moyen tiré de la prescription pour les années 1986 à 1994 : la prescription décennale ne trouve pas à s'appliquer, les énonciations contenues dans la déclaration de 1994 permettant de révéler l'exigibilité de la taxe sans qu'il soit nécessaire de recourir à des recherches ultérieures ; en conséquence, l'année 1994 était bien atteinte par la prescription triennale lors de l'intervention du vérificateur en 1998 ;

Moyen relatif au lieu d'envoi de la mise en demeure du 26 mars 1998 : la procédure de taxation d'office n'est pas régulière puisque prenant appui sur une mise en demeure qui a été adressée au Canada, alors que la Société COMIFEX n'y avait pas véritablement établi son siège social en 1998 et que le vérificateur avait le choix d'adresser sa mise en demeure soit au Liechtenstein, siège social supposé par l'administration fiscale, soit en Suisse, siège de direction effective de la société :

Moyen de fond selon lequel l'administration ne peut pas à la fois admettre l'attribution du bien à Mme [O] épouse [G] en 1994 en acceptant l'impôt sur la plus-value en découlant (soit des droits de 414.749 F, outre 262.329 F de pénalités) et continuer à prétendre que la Société COMIFEX est redevable de la taxe de 3% au delà de 1994 : en assortissant les droits dus par Mme [O] épouse [G] de pénalités de retard, l'administration a entériné le transfert de propriété rétroactivement à compter du 3 septembre 1994 au profit de celle-ci ;

Moyen relatif à la détermination des valeurs vénales retenues pour les années 1989 à 1997 : le vérificateur n'a cité aucun terme de comparaison, alors qu'il est reconnu que le marché immobilier s'est effondré sur la côte d'azur à partir du 4ème trimestre 1991 pour ne reprendre que début 1998 ;

Moyen relatif à l'opposabilité aux tiers de la dissolution de la société : la Société COMIFEX n'était tenue à aucune obligation de publicité au registre du commerce et des sociétés en France et en tout état de cause, l'administration ne pouvait considérer que la Société COMIFEX subsistait pour la seule exigibilité de la taxe de 3% en France, alors même qu'elle avait admis que le bien immobilier emportant cette exigibilité avait été transmis à Mme [O] épouse [G] avec effet en 1994 ;

Moyen relatif à la détermination du siège de direction effective de la Société COMIFEX, situé en Suisse, où se trouvaient à la fois l'administrateur, M. [B] [E], et l'unique actionnaire, Mme [O] épouse [G], à l'époque domiciliée à Zurich ; il ne peut être soutenu que le siège social statutaire était situé au Liechtenstein alors que la société avait été radiée ; dès lors, la Société COMIFEX peut bénéficier de l'exonération prévue par l'article 990 E 3° du code général des impôts, au regard de son siège de direction effective et de l'indication du nom de son actionnaire unique, révélé le 1er juin 1994 ;

Moyen relatif au quantum de la dette : les rappels de taxe de 3% et de pénalités mis en recouvrement le 10 décembre 1998 ont été prélevés sur le prix de vente de l'immeuble en 2000 à hauteur de 2.065.380 F et après le dégrèvement partiel admis le 22 mars 2006, il existe un différentiel de 74.089 F, hors l'abandon des majorations de 40% décidé par la cour d'appel ;

Moyen relatif aux majorations de 40% : ces majorations ne sont pas fondées dans la mesure où la mise en demeure ne peut être considérée comme régulière, et ce d'autant que la Société COMIFEX pouvait se prévaloir de la révélation du bénéficiaire économique faite à première demande, le 1er juin 1994 ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile : la cour doit préserver le droit de propriété face à ce qui peut apparaître comme une véritable spoliation, la totalité des droits réclamés sur l'immeuble s'élevant, d'après l'administration fiscale, à 2.885.950 F, soit 82,46% du prix de vente de l'immeuble.

La direction générale des finances publiques, en l'état de ses écritures déposées le 13 septembre 2011, conclut à la confirmation du jugement du tribunal de grande instance de Grasse en ce qu'il a déclaré la demande de Mme [O] épouse [G] infondée, au rejet de la demande de l'appelante sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à sa condamnation aux dépens, outre 2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle répond comme suit aux moyens présentés par l'appelante :

Sur l'assujettissement à la plus-value : la dissolution de la société et l'attribution du bien immobilier à Mme [O] épouse [G] n'ont été constatées que par acte notarié du 20 octobre 2000, de sorte qu'il n'y a pas de contradiction à réclamer la taxe de 3% à la société pour les années 1995 à 1997 ; la plus-value payée ne pouvait se rapporter à l'année 1994 puisque la Société COMIFEX a bénéficié d'un dégrèvement partiel en mars 2001 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition et de la vérification de comptabilité : le grief relatif à l'absence d'activité professionnelle de la société en France et à l'impossibilité de procéder à une vérification de comptabilité est sans fondement, dès lors que la Société COMIFEX a présenté spontanément sa comptabilité et qu'au demeurant, l'activité de mise à disposition à titre gratuit de l'appartement dont elle est propriétaire à ses associés entre dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés ; la procédure de vérification de comptabilité est applicable à tous les contribuables astreints à la tenue d'une comptabilité ; la cour de cassation admet que, si les droits d'enregistrement ne peuvent faire l'objet d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale peut cependant recueillir, lors de cette vérification, les éléments susceptibles de motiver un redressement portant sur ces droits et que la mention des droits d'enregistrement sur l'avis de vérification n'établit pas à elle seule que cette vérification a effectivement porté sur cette catégorie d'impôt ; en l'espèce, c'est de l'inscription de l'immeuble en comptabilité de la société que l'administration a pu déduire l'exigibilité de la taxe de 3% ;

Sur l'opposabilité à l'administration fiscale de la dissolution de la Société COMIFEX : la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de sa clôture et la dissolution n'a d'effet à l'égard des tiers qu'après la publication ; l'attribution de l'immeuble à Mme [O] épouse [G] n'est opposable à l'égard des tiers qu'à compter de la formalité de publicité ; or, l'acte de mutation au profit de Mme [O] épouse [G] n'a été dressé que le 20 octobre 2000 et publié ensuite à la conservation des hypothèques ; ainsi, pour l'administration fiscale, le bien immobilier était toujours la propriété de la Société COMIFEX ;

Sur la notion de siège de direction effective : il résulte de l'instruction consacrée à la taxe de 3% qu'aucune personne morale ayant son siège statutaire dans un état non lié à la France par une convention comportant une clause de non-discrimination selon la nationalité, ne peut se prévaloir d'une différence de situation entre son siège de direction effective et son siège statutaire pour bénéficier d'une convention fiscale plus favorable ; en l'espèce, le siège statutaire de la Société COMIFEX est au Liechtenstein et Mme [O] épouse [G] n'apporte pas d'éléments permettant de retenir que le siège de la société serait au Canada ou en Suisse (pas d'immatriculation dans ces pays, pas de convocation du conseil d'administration..) ;

Sur la valeur vénale : la procédure suivie à l'égard de la Société COMIFEX est la taxation d'office et dès lors, il revient à l'administration d'établir l'imposition à partir de la valeur apparente des biens à cette date, le contribuable ne pouvant en obtenir décharge ou réduction qu'en apportant la preuve de l'exagération de cette imposition et en donnant des justifications présentant des garanties suffisantes d'exactitude ; or, la Société COMIFEX n'a pas apporté d'éléments de comparaison de nature à établir une valeur inférieure à celle retenue par l'administration ;

Sur la majoration de 40% : aucune déclaration n'ayant été souscrite par le contribuable dans le délai de 30 jours suivant la mise en demeure adressée le 26 mars 1998, la majoration de 40% est applicable au titre des années 1989 à 1993 et 1995 à 1996.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 6 février 2012.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que la société COMIFEX, créée à Vaduz (Liechtenstein) en 1979, a acquis, le 26 novembre 1982, un appartement situé à [Adresse 3] ;

Que l'administration fiscale lui a demandé le 1er juin 1994 de donner tous renseignements utiles concernant la taxe annuelle de 3% due par les personnes morales possédant des biens immobiliers en France et que la société lui a répondu n'être pas redevable, étant une société de droit canadien et son actionnaire unique, Mme [O] épouse [G], ayant sa résidence fiscale en Suisse ;

Que l'administration lui a notifié, le 2 février 1998, à son adresse à Toronto, un avis de vérification de comptabilité concernant l'ensemble des opérations susceptibles d'être vérifiées et portant sur les années 1995 et 1996, sauf prescription décennale en matière de droits d'enregistrement, et le 28 mars 1998, toujours à Toronto, une mise en demeure d'avoir à déposer les déclarations 2746 relatives à la taxe de 3% pour l'année 1997 ;

Qu'à l'issue de la procédure de vérification de comptabilité, l'administration a adressé à la Société COMIFEX, le 14 septembre 1998, un avis de redressement au titre de la taxe de 3%, selon la procédure de taxation contradictoire pour l'année 1994, et selon la procédure de taxation d'office pour les années 1989 à 1993 et les années 1995 et 1996 ; qu'elle lui a également notifié, le 14 septembre 1998, un second avis de redressement au titre de la taxation d'office pour l'année 1997 ;

Que ces rappels de taxes ont été confirmés par le vérificateur le 23 octobre 1998 et ont donné lieu à la délivrance d'un avis de mise en recouvrement en date du 10 décembre 1998 pour avoir paiement des sommes de 1.177.998 F (179.584 €) de droits et de 975.378 F (148.695 €) de pénalités ;

Qu'à la suite de la réclamation opposée par la Société COMIFEX, le directeur des services fiscaux a, par décision en date du 22 mars 2006, accepté un dégrèvement partiel, portant les droits à 929.967 F (141.772 €) et les pénalités à 735.009 F (112.051 €) ;

Qu'entretemps, Mme [O] épouse [G] a déclaré que la Société COMIFEX était liquidée depuis le 3 septembre 1994 et qu'elle était devenue attributaire de l'immeuble de [Adresse 3], attribution constatée par acte notarié du 20 octobre 2000 avec effet rétroactif au 3 septembre 1994 ;

Qu'elle a saisi le tribunal de grande instance pour obtenir le dégrèvement total des sommes réclamées ;

Sur la régularité de la procédure de redressement au titre des années 1989 à 1996 :

Attendu que Mme [O] épouse [G] conteste la validité de la procédure de vérification de comptabilité dont la Société COMIFEX a été l'objet et qui a donné lieu au redressement opéré au titre de la taxe de 3% pour les années 1989 à 1996 ;

Qu'il convient de rappeler que la vérification de comptabilité est prévue par l'article L 13 du livre des procédures fiscales qui énonce : 'Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables.' ;

Qu'il en ressort que l'administration, dans le cadre de son pouvoir général de contrôle, ne peut avoir recours à la vérification de comptabilité que lorsque le contribuable est astreint à la tenue d'une comptabilité, ce qui est le cas quand ses revenus ou résultats sont déterminés à partir d'une comptabilité ; que la cour de cassation a ainsi retenu, en clarifiant sa jurisprudence sur la question, que 'lorsque le contribuable est astreint à tenir et présenter des documents comptables à raison de son activité professionnelle, l'administration fiscale peut, dans le cadre de la vérification de cette comptabilité, contrôler les droits d'enregistrement et taxes assimilées dus à l'occasion de l'exercice de cette activité, qui apparaissent ou devraient apparaître en comptabilité.' ;

Qu'au contraire, est irrégulière une procédure d'imposition alors que le redressement est fondé sur des renseignements obtenus au cours d'une vérification de comptabilité d'un contribuable qui n'est pas soumis à l'obligation de tenir une comptabilité ; que tel est le cas d'une société civile ayant pour seule activité la mise à disposition de son bien immobilier et pour seules recettes les revenus de son immeuble, les activités génératrices de revenus fonciers n'étant pas soumises à l'obligation de tenir une comptabilité ;

Que force est de constater, en l'espèce, que la Société COMIFEX, société qui n'avait aucune activité professionnelle et dont l'objet était la mise à disposition à titre gratuit au profit de son associée unique de l'appartement de [Adresse 3] dont elle était propriétaire, n'était pas astreinte à l'obligation de tenir une comptabilité et ne pouvait donc faire l'objet d'une vérification de comptabilité ; que dès lors, il y a lieu de constater que, le redressement étant fondé sur les renseignements obtenus au cours de cette vérification de comptabilité, la procédure d'imposition au titre des années 1989 à 1996 est irrégulière ;

Sur le redressement au titre de l'année 1997 :

Attendu que ce redressement a été opéré selon la procédure de la taxation d'office, à défaut de réponse du contribuable à la mise en demeure adressée à la Société COMIFEX le 26 mars 1998 ;

Que Mme [O] épouse [G] prétend que la procédure ne serait pas régulière comme prenant appui sur une mise en demeure dont elle soutient qu'elle ne pouvait produire d'effets car envoyée au Canada, alors, dit-elle, 'que le vérificateur savait parfaitement en 1998 que COMIFEX n'avait pas véritablement établi son siège social au Canada par suite d'une négligence de l'administrateur sur le plan juridique' ; mais que la cour observe que la société STERLING SERVICES, mandataire en France de la Société COMIFEX, avait informé l'administration fiscale, par lettre en date du 27 mai 1994, que sa mandante avait son siège social au Canada, et que c'est au regard de cette information que la direction générale des impôts a adressé la mise en demeure à l'adresse canadienne qui lui avait été indiquée ;

Attendu que Mme [O] épouse [G] fait toutefois justement observer, sur le fond, que l'administration fiscale a encaissé la taxe sur la plus-value déclarée dans l'acte du 20 octobre 2000 portant constatation du transfert de propriété du bien immobilier de la Société COMIFEX à son profit depuis le 3 septembre 1994, assortie des pénalités de retard, reconnaissant ainsi que l'immeuble de [Adresse 3] n'appartenait plus, rétroactivement à compter du 3 septembre 1994, à la Société COMIFEX ; qu'elle ne peut donc réclamer, postérieurement à cette reconnaissance, le paiement de la taxe de 3% au titre des années 1995 et suivantes, et notamment au titre de l'année 1997, objet de la taxation d'office ;

Qu'il y a lieu en conséquence de décharger la Société COMIFEX des droits et pénalités réclamés par l'avis de mise en recouvrement du 10 décembre 1998 pour l'année 1997 ;

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'article 696 du Code de Procédure Civile,

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement,

sur renvoi de la Cour de cassation,

contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 20 décembre 2007 ;

Vu l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 5 mars 2009 ;

Vu l'arrêt de la cour de cassation en date du 15 juin 2010 ;

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Grasse ;

Constate que la procédure d'imposition tendant au rappel de taxe de 3% pour les années 1989 à 1996 est irrégulière comme résultant d'un redressement fondé sur des renseignements provenant d'une vérification de comptabilité de la Société COMIFEX qui n'était pas astreinte à la tenue d'une comptabilité ;

Ordonne la décharge des droits et pénalités réclamés à la Société COMIFEX par l'avis de mise en recouvrement du 10 décembre 1998 au titre de la taxe de 3% pour l'année 1997 ;

Ordonne la restitution des rappels de taxe et des pénalités acquittés par la Société COMIFEX en exécution de l'avis de mise en recouvrement du 10 décembre 1998 et du dégrèvement partiel résultant de la décision du 22 mars 2006 ;

Condamne la direction générale des finances publiques à verser à Mme [O] épouse [G] une somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamne aux dépens de première instance et aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés dans les formes et conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre a
Numéro d'arrêt : 10/18132
Date de la décision : 13/03/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°10/18132 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-13;10.18132 ?
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