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10/01/2012 | FRANCE | N°10/23189

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 10 janvier 2012, 10/23189


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 10 JANVIER 2012



N°2011/48

YR













Rôle N° 10/23189







[L] [D]





C/



SA AMBULANCES HIPPOCRATE













































Grosse délivrée le :



à :



Me MASSA, avocat au barreau de GRAS

SE



Me POLI, avocat au barreau de NICE



Copie certifiée conforme délivrée le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NICE en date du 17 Novembre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 08/872.





APPELANT



Monsieur [L] [D], demeurant [Adresse 3]



représenté par Me Florence...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 10 JANVIER 2012

N°2011/48

YR

Rôle N° 10/23189

[L] [D]

C/

SA AMBULANCES HIPPOCRATE

Grosse délivrée le :

à :

Me MASSA, avocat au barreau de GRASSE

Me POLI, avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NICE en date du 17 Novembre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 08/872.

APPELANT

Monsieur [L] [D], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Florence MASSA, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Marie-France GERAUD-TONELLOT, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

SA AMBULANCES HIPPOCRATE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean-pierre POLI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Yves ROUSSEL, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Brigitte PELTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Monique LE CHATELIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2012

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Monique LE CHATELIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [D] a été embauché par la SA AMBULANCES HIPPOCRATE en qualité d'ambulancier BNS par contrat à durée indéterminée en date du 25 mars 2001, laquelle emploie habituellement plus de onze salariés, la convention collective applicable étant la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Il a saisi le conseil de prud'hommes de Nice de différentes demandes. Par jugement en date du 17 novembre 2010, celles-ci ont été rejetées.

Appelant, Monsieur [D] expose qu'au premier trimestre de l'année 2006, lui-même ainsi que plusieurs autres salariés ont réclamé le paiement d'heures supplémentaires et des repos compensateurs pour la période de 2002 à 2006 ; que l'employeur n'a pas répondu favorablement à cette demande ; que l'inspection du travail a été alertée sur l'existence d'infractions aux jours de repos hebdomadaire, aux congés payés et à la durée des repos ; que des manquements ont été pointés ; que ses relations avec son employeur se sont alors dégradées et qu'il a donc été contraint de donner sa démission le 6 mai 2006.

Il sollicite l'infirmation du jugement, la condamnation de la Société AMBULANCES HIPPOCRATE à lui verser 2.345,25 euros à titre de rappel de salaire sur le défaut d'entretien des tenues vestimentaires, 12.567,13 euros à titre de rappel de salaire sur prime panier, 2.282,43 euros à titre de rappel de salaire sur le temps d'habillage et de déshabillage, 11.567,00 euros au titre des heures supplémentaires et congés payés y afférent, 10.217,34 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour le travail dissimulé, 6.215,15 euros au titre des repos compensateurs et congés payés y afférent, 6.215,15 euros à titre de dommages et intérêts eu égard au manquement à la législation des repos compensateurs, 2.619,15 euros à titre de rappel de salaire sur le calcul des heures supplémentaires majorées en intégrant les primes dans le salaire, 20.434,76 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, 2.000,00 euros au titre de l'article 700 du CPC pour la procédure de première instance , les intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, le 24 mai 2006, avec capitalisation, 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile pour la procédure d'appel, outre les dépens et le rejet des demandes de la société AMBULANCES HIPPOCRATE de ses demandes reconventionnelles.

La société AMBULANCES HIPPOCRATE fait valoir que contrairement à ce que soutient le salarié, elle est une société indépendante et gérée distinctement de la société d'ambulance ESCULAPE; que Monsieur [H] [Z] présidait le conseil d'administration de la SA AMBULANCES ESCULAPE et Madame [N] [Z], le conseil d'administration de la SA AMBULANCES HIPPOCRATE ; que les moyens matériels de ces deux sociétés étaient distincts et qu'il n'existait aucune permutation de leur personnel; que le salarié se prévaut de pièces relatives à une période bien postérieure à son départ de l'entreprise et qui concernent seulement la société AMBULANCES ESCULAPE.

Elle affirme avoir toujours répondu de manière précise aux réclamations de M. [D] et indique que la lettre écrite par ce dernier le 6 mai 2006, contenait sa démission dénuée d'ambiguïté, exprimant sa volonté claire de démissionner.

Elle conclut au rejet des demandes, à la confirmation du jugement dont appel et à la condamnation de M.[D] à lui payer 3000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3000 € sur le fondement de l'article 700 du C.P.C, outre les dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure et aux conclusions des parties, oralement reprises dans le respect des dispositions de l'article 440 du Code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

M. [D] évoque les liens existant entre les sociétés d'ambulances HIPPOCRATE et ESCULAPE, indiquant qu'elles étaient dirigées par les mêmes personnes physiques ; qu'elles ont les mêmes associés et que les salariés des deux entreprises, qui ont des revendications identiques, ont alerté l'inspection du travail qui a diligenté plusieurs contrôles.

La SA AMBULANCES HIPPOCRATE réplique que les deux sociétés bien que domiciliée à la même adresse disposent de locaux séparés ; que chacune d'elles dispose d'une entrée distincte ; qu'elles sont des entités juridiques distinctes immatriculées au registre du commerce et des sociétés sous des numéros différents ; qu'elles ont un numéro d'agrément pour l'exercice de leur activité qui leur est propre ; que leurs dirigeants ne sont pas les mêmes puisque le conseil d'administration de la SA AMBULANCES ESCULAPE a été dirigé par Monsieur [H] [Z] et le conseil d'administration de la SA AMBULANCES HIPPOCRATE a été dirigé par Madame [N] [Z] ; que chaque société dispose de son personnel propre, de son parc d'ambulances propre et qu'il n'existe aucune permutation du personnel d'une société vers l'autre.

Mais, le contrôleur du travail a énoncé dans le compte-rendu d'un contrôle effectué au sein de la SA AMBULANCES ESCULAPE SOS adressé le 12 septembre 2007 à Monsieur [R] [I], délégué du personnel, qu'il existait « la plus étroite imbrication des établissements ».

Il a également mis en évidence le fait que « le responsable opérationnel travaille indifféremment pour les deux entreprises », ou encore que « une salariée qui figure dans le registre unique du personnel de l'entreprise Hippocrate se retrouve sur le planning de l'entreprise Esculape... ».

De plus, dans le cadre d'un rapport d'enquête rédigé le 1er septembre 2010 par les conseillers prud'hommes, rapporteurs dans la présente affaire, est mentionnée la présence lors de l'audition de l'employeur le 9 mars 2010, de Madame [N] [Z], ancienne gérante, et de Monsieur [H] [Z], PDG de la SA AMBULANCES ESCULAPE.

Dès lors, les liens entre ces deux sociétés sont patents, en sorte que les pièces versées par le salarié en lien avec la SA AMBULANCES ESCULAPE SOS seront lues comme révélatrices de conditions de travail comparables existant au sein de la SA AMBULANCES HIPPOCRATE.

Sur le défaut d'entretien des tenues par l'employeur,

La société HIPPOCRATE ne conteste pas l'applicabilité de l'article 22 bis de l'accord du 16 juin 1961 concernant les ouvriers des entreprises de transport routier qui précise que : « La présentation et la tenue du personnel ambulancier doivent être particulièrement soignées. Cette tenue comporte obligatoirement une blouse blanche. Les blouses ( 3 au minimum par salarié) sont fournies et entretenues par l'entreprise qui renouvellera une blouse chaque année ».

Elle indique qu'elle a fait établir un devis par le PRESSING GORBELLA pour l'entretien des blouses des salariés deux fois par semaine; que ce devis était affiché sur le panneau d'information de l'entreprise; que les salariés étaient informés de la possibilité pour eux de déposer leur blouses à ce pressing sans frais pour eux; que Madame [M], exploitante du Pressing Gorbella atteste que « la société AMBULANCES HIPPOCRATE a été notre cliente depuis 1993 pour l'entretien du linge des ambulances mais aussi pour les blouses du personnel qu'ils venaient régulièrement apporter eux même quand la société était domiciliée au [Adresse 2] de 1991 à 2000.En outre je précise , le compte des ambulances HIPPOCRATE est toujours resté ouvert, jusqu'en septembre 2006 »; que Monsieur [D], qui fonde sa demande sur un simple devis et sur des éléments postérieurs à son départ de l'entreprise ainsi que sur des attestations de salariés de la société AMBULANCES ESCULAPE, n'est ainsi pas fondé à réclamer des rappels sur l'entretien des tenues.

Mais, Monsieur [K] [B], salarié de la société AMBULANCES ESCULAPE, dont les liens et les pratiques communes avec la société AMBULANCES HIPPOCRATE ont été mis en évidence, atteste : « depuis mon entrée le 16 février 2001 la direction ne s'est jamais chargée de l'entretien de nos tenues de travail ».

Par ailleurs, le seul justificatif produit par l'employeur est un devis du PRESSING GORBELLA et non une facture, alors que s'il avait véritablement supporté la charge de la dépense il serait en mesure de présenter une facture ou une trace de la comptabilisation du paiement.

M. [D] appuie sa demande sur un devis pour réclamer la somme de 10,60 euros par semaine.

Il dit avoir été absent durant 3 mois en 2005 pour un congé de formation et réclame 2.345,25 euros pour 4 ans et 11 mois de travail.

Son calcul est justifié. En conséquence, le jugement sera infirmé et il lui sera accordé la somme de 2345,25 euros, au titre de l'entretien des tenues.

Sur les primes panier,

L'article 8 du protocole du 30 avril 1974 relatif au repas hors du lieu de travail concernant les déplacements des ouvriers des entreprises de transport prévoit que : « 1) Le personnel qui se trouve, en raison d'un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail, perçoit une indemnité de repas unique, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, sauf taux plus élevé résultant des usages. Toutefois, lorsque le personnel n'a pas été averti au moins la veille et au plus tard à midi d'un déplacement effectué en dehors de ses conditions habituelles de travail, l'indemnité de repas unique qui lui est allouée est égale au montant de l'indemnité de repas dont le taux est également fixé par le tableau joint au présent protocole. Enfin, dans le cas où, par suite d'un dépassement de l'horaire régulier, la fin de service se situe après 21 h 30, le personnel intéressé reçoit pour son repas du soir une indemnité de repas.2) Ne peut prétendre à l'indemnité de repas unique :a) le personnel dont l'amplitude de la journée de travail ne couvre pas entièrement la période comprise soit entre 11 h et 14 h30, soit entre 18 h 30 et 22 h ;b) le personnel qui dispose à son lieu de travail d'une coupure, ou d'une fraction de coupure, d'une durée ininterrompue d'au moins une heure, soit entre 11 h et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 h. Toutefois, si le personnel dispose à son lieu de travail d'une coupure d'une durée ininterrompue d'au moins une heure et dont une fraction au moins égale à 30 minutes est comprise soit entre 11 h et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 h, une indemnité spéciale, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, lui est attribuée. »

M. [D] prétend que le nombre de tickets restaurant que l'employeur lui a remis ne correspond pas au nombre de repas pour lesquels ils devait bénéficier de la prime panier; que le personnel n'a jamais disposé à son lieu de travail d'une coupure ininterrompue d'une heure; qu'il ne disposait que de quinze minutes durant lesquelles il allait s'acheter le plus souvent un sandwich qu'il mangeait dans l'ambulance; que ce manquement a été constaté par l'inspection du travail; que des salariés attestent qu'il était «strictement impossible de prendre les repas au domicile (...). A chaque fois nous bénéficions d'environ une demi-heure, voir parfois I/4 d'heure pour manger »; que ceci est prouvé par les « feuilles de route » instituées depuis le 30 janvier 2006, sur lesquelles la durée du temps de pause déjeuner n'est jamais supérieure à 30 minutes; que de plus ces documents font apparaitre que le lieu de pause diverge chaque jour, en sorte que les salariés ont toujours eu une pause inférieure à 30 minutes, à l'extérieur de leur lieu de travail, sans être avertis la veille; que ces conditions cumulatives ont pour conséquences l'octroi de l'indemnité de repas d'un montant de 10,83 euros.

Il verse les attestations de Messieurs [P] ,[V] et [B], qui relatent que les temps de repas étaient très réduits ( « à chaque fois nous bénéficions d'environ une demi-heure, parfois un quart d'heure pour manger. Et ce, dès que nous déposions un patient. Autant dire qu'en réalité nous disposions de 10 minutes pour avaler un sandwich (...) Le temps de repas était décompté à partir du moment où le régulateur nous disait de manger ce qui ne nous laissait pas la possibilité de rentrer manger à la maison et le temps de manger en était réduit, vu la circulation dans cette tranche horaire »).

Si Monsieur [A] [F], salarié dans la même société que lui, atteste du contraire ( « faisant équipage avec Messieurs [O] et [D], ambulanciers comme moi, et étant collègues dans la même société que nous avons bénéficié lors des pauses repas de tickets restaurant d'une valeur de 7,62 euros lorsque le temps imparti était d'une demi heure ,soit lorsque les repas étaient d'une durée d'une heure de temps ininterrompue, on s'arrangeait toujours pour se trouver à côté de nos domiciles respectifs afin de déjeuner chez nous et se détendre afin de reprendre notre service. Les heures de repas que nous disposions, bien que variables étaient toujours pris entre 11h et 14h30 » - Pièce 10), de même que Monsieur [T] : « Nous avons bénéficié lors des pauses repas soit d'un ticket restaurant d'une valeur de 7,62 euros lorsque le temps imparti était d'une demi heure. Soit lorsque les repas étaient d'une durée d'une heure de temps ininterrompue, il s'avérait que quand on se trouvait près du domicile de mes coéquipiers respectifs, ces derniers rentraient déjeuner chez eux et me retrouvaient à la fin de la pause dans l'ambulance où je déjeunais et les attendais ». (Pièce 11), ces attestations ne sont guère probantes, puisque, en effet, les témoins ne précisent pas comment ils pouvaient « s'arranger » pour arrêter leur dernière mission de transport d'un patient à proximité des domiciles de Messieurs [O] et [D].

Il est certes mentionné sur les feuilles de route tenue à partir de 2006 (pièce 22) que le salarié disposait d'une coupure de repas d'une demi-heure.

Mais ces pièces montrent que cette interruption d'une demi-heure n'était pas consacrée en totalité à la pause repas, compte tenu de ce que l'arrêt est décompté à partir la fin de la prise en charge du dernier malade, quel que soit le quartier (mention sur les feuilles de route du lieu : [J], [C], [X],), et que le salarié devait ensuite, dans le laps de temps restant, se transporter à son domicile ou sur son lieu de travail pour déjeuner.

La même constatation vaut, pour les jours où la durée de la pause atteignait 1h00, puisqu'en effet le temps disponible pour la pause repas doit être amputé de la durée des trajets, ainsi qu'il vient d'être dit.

Dès lors, la demande est fondée, sur le principe, Monsieur [D] produisant par ailleurs un décompte dans lequel il tient compte du nombre de tickets restaurant distribués par l'employeur.

Mais, il ne peut prétendre qu'il effectuait des déplacements en dehors de ses conditions habituelles de travail compte tenu qu'il ressort des pièces produites qu'il travaillait principalement sur la commune de [Localité 4].

Dès lors, tous ses déplacements professionnels s'accomplissant dans des conditions habituelles de travail, le salarié ne peut réclamer que le paiement de l'indemnité de repas unique, qui sera fixée au vu du protocole 30 avril 1974, soit le calcul suivant :

2001 : 8 mois : 127 jours travaillés x 6,26 € = 795,02 €- 38 TR soit 289,67 € = 505,35 €

2002 : 12 mois : 201 jours x 6,26 € = 1258,26 - 82 TR soit 625,09 €= 633,17 €

2003 : 12 mois : 186 jours x 6,52 € = 1212,72- 63 TR soit 487,82 €, = 724, 90 €

2004 : 11 mois : 197 jours x 6,68 € = 1315,96 - 89 TR soit 678,39 € = 637,57 €

2005 : 9 mois : 146 jours x 6,70 € = 978,20 € - 83 TR soit 632,67 € = 345,53 €

Soit au total la somme de 2630,84 €, au titre des primes panier.

Sur le rappel de salaire après application des coefficients de réduction,

Aux termes des dispositions de l'article 3 de l'Accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire, pour le décompte du temps de travail des personnels ambulanciers roulants, il est tenu compte d'un pourcentage du cumul hebdomadaire des amplitudes journalières d'activité, pourcentage qui diffère selon le nombre de permanences assurées par le salarié dans l'année.

Les services de permanences assurés la nuit, les samedis, dimanches et jours fériés doivent avoir une amplitude minimale de 10 heures, en vertu des dispositions de l'article 2 de l'Accord-cadre.

Monsieur [D] soutient qu'il a assuré moins de 11 permanences par an et que la durée de travail effectif devait donc être décomptée selon les pourcentages suivants : en 2001, 87 % de la durée du cumul des amplitudes de travail ; en 2002, 89 % de la durée du cumul des amplitudes de travail et à compter du 1er janvier 2003, 90 % de la durée du cumul des amplitudes de travail ;

Il indique que son employeur considère qu'il effectuait entre 11 et 21 permanences dans l'année en comptabilisant les samedis travaillés alors même qu'il effectuait moins de 10 heures de travail les samedis et qu'il n'a jamais été rémunéré sur la base de 10 heures par samedi travaillé.

Il s'appuie sur des attestations de salariés .

La SA AMBULANCES HIPPOCRATE réplique qu'il a été rémunéré sur la base de 10 heures de travail les samedis travaillés et qu'il a effectué en 2001 : 21 permanences, en 2002 : 18 permanences, en 2003 : 13 permanences, en 2004 : 14 permanences, en 2005 : 11 permanences, et que son temps de travail effectif doit être décompté sur la base de 83 % du cumul hebdomadaire des amplitudes journalières d'activité en 2001, de 84 % en 2002 et de 85 % en 2003, 2004 et 2005.

Elle produit des tableaux récapitulatifs établis par son expert-comptable, le cabinet GIOANNI INTERNATIONAL, à partir des fiches de facturation de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, lesdits tableaux mentionnant jour par jour, de janvier 2001 à décembre 2005, l'heure de prise de service, l'heure de départ de chez le dernier patient, l'amplitude journalière d'activité du salarié calculée en fonction des heures de prise en charge des patients, le cumul hebdomadaire des amplitudes journalières, le cumul mensuel des amplitudes du salarié et le nombre d'heures de travail payées dans le mois.

Les permanences des samedis travaillés y sont comptabilisées au quantum de 10 heures d'amplitude d'activité ( pièce 16).

Elle produit aussi le relevé des fiches de facturation CPAM (pièce 17) et les récapitulatifs de missions accomplies par Monsieur [D] sur la période de janvier 2001 à décembre 2005, récapitulatifs informatiques destinés à la facturation des prestations.

Ces récapitulatifs mentionnent la date des missions, les numéros des factures, les noms des clients, l'adresse et l'heure de prise en charge des clients ainsi que l'adresse de destination et l'heure d'arrivée.

L'examen de ces pièces, en particulier celui du relevé numéro 16, révèle la comptabilisation répétée de moins 15 minutes de travail supplémentaire en début de journée, par rapport à la prise en charge du premier client et la même chose après la fin de la dernière prise en charge ( c'est le cas notamment les 2 février 2001 ,2 mars 2001, 31 mai 2001, 4 janvier 2002, 21 mars 2002, 18 octobre 2002, 16 juillet 2003, 2 septembre 2003, 25 novembre 2003, 30 janvier 2004, 30 juillet 2004, 11 octobre 2004, 4 janvier 2005).

Il est admis que ce temps supplémentaire représente le temps passé par le salarié à des activités annexes et préparatoires à la prise en charge du malade à transporter, tel le temps d'habillage et de déshabillage et celui consacré à la préparation du véhicule, ainsi que le temps de déplacement pour se rendre au domicile du premier patient, le temps de retour au siège de la société après le dernier malade et l'accomplissement des tâches complémentaires au retour en fin de journée.

Mais l'employeur ne peut sérieusement prétendre que l'ensemble de ces tâches étaient réalisable dans moins de quinze minutes de temps, à l'aller et au retour, en sorte que les pièces présentées à la cour contiennent un décompte artificiel et non réel des heures travaillées.

De plus, pour n'avoir mis en place les feuilles de route qu'en 2006, la SA AMBULANCES HIPPOCRATE a manqué au respect des dispositions de l'article 7 du titre II de l'Accord-cadre du 4 mai 2000 prescrivant l'établissement desdites feuilles de route, outre la délivrance d'un document annexé au bulletin de paie et présentant le décompte des heures réellement effectuées par le salarié.

Pourtant, ces documents, dont l'absence est donc imputable à la carence de l'employeur, auraient permis un décompte plus fiable du temps de travail.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il est établi que les permanences ne correspondaient pas à une amplitude de travail de 10 heures, en sorte que les coefficients réducteurs doivent être appliqués en tenant compte de ce que le salarié a assuré moins de 11 permanences par an.

Monsieur [D] présente un calcul des rappels de salaire réclamés en appliquant le coefficient de 0,87 en 2001, de 0,89 en 2002 et de 0,90 à partir de 2003 sur le nombre d'heures mentionnées sur les bulletins de paie.

Ces coefficients sont conformes à ceux prévus par les dispositions de l'article 3.1 de l'Accord-cadre du 4 mai 2000 pour un nombre de permanences inférieur à 11, les éléments du calcul présenté par le salarié n'étant pas discutées.

Avalisant son décompte détaillé, la cour lui accordera la somme de 11.567 € qu'il réclame, à titre de rappel de salaire et congés payés y afférents.

Sur les repos compensateurs,

Monsieur [D] présente un décompte des repos compensateurs qui lui étaient dus sur les années 2001 à 2005 calculés sur les heures de travail correspondant à 87 % du cumul des amplitudes mensuelles d'activité en 2001, à 89 % en 2002 et à 90 % du cumul des amplitudes mensuelles d'activité en 2003, 2004 et 2005.

La SA AMBULANCES HIPPOCRATE s'oppose à la demande, estimant avoir réglé son dû à M.[D], par application d'un taux réduit de 0,83 % du fait des samedis travaillés comptabilisés par elle en permanences assurées par le salarié.

Mais ce mode de calcul doit être écarté pour les motifs qui viennent d'être énoncés.

Quant aux éléments du décompte proposé par le salarié, la SA AMBULANCES HIPPOCRATE n'élève aucune contestation sérieuse à leur sujet.

Il sera donc fait droit à la demande justifiée de M. [D], en sorte que ses droits seront liquidés à la somme de 6215,15 euros, au titre des repos compensateurs, après déduction de la somme de 2022,65 euros, déjà versée par l'employeur.

Monsieur [D] réclame une somme complémentaire à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant des manquements de l'employeur qui a omis de l'informer sur ses droits et ne lui a pas demandé de prendre ses repos compensateurs. Il ne justifie cependant pas d'un préjudice autre que celui indemnisé par l'indemnité de repos compensateurs allouée ci-dessus. Il convient, en conséquence, de le débouter de sa demanded'indemnisation complémentaire.

Sur le temps d'habillage et de déshabillage,

L'employeur ne conteste pas la quantification du temps d'habillage et de déshabillage, soit 15 minutes le jour et le fait que ce temps devait être rémunéré.

Mais pour s'opposer à la demande en paiement de la somme de 2282,43 € à titre de contrepartie financière, il fait valoir que ce temps était bien compris dans le temps de travail effectif des salariés et rémunéré comme tel ; que cela résulte du tableau récapitulatif de la durée du travail du salarié établi par ses soins à partir des fiches de facturation CPAM et que lorsque les salariés préféraient s'habiller et se déshabiller à leur domicile, un temps de travail supplémentaire était toujours rémunéré.

Or, les documents sur lesquels il s'appuie ne font pas cette preuve, ainsi que cela a été dit précédemment.

Dès lors, la SA AMBULANCES HIPPOCRATE ne justifie pas qu'elle a respecté son obligation conventionnelle de décompter les temps nécessaires à l'habillage et au déshabillage dans l'amplitude de la journée de travail (article 2 b de l'Accord-cadre du 4.05.2000).

Les éléments du calcul chiffré par Monsieur [D] de ce qui lui est dû ne sont pas sérieusement contestés par l'employeur.

Dès lors, l'indemnité compensatrice sera calculée sur la base de 22 jours par mois et de 264 jours par an, dont à déduire 5 semaines congés payés, d'où un solde de 236 jours, ce qui produit les sommes suivantes :

22 jours x 15 minutes = 330 minutes / 60 = 5,5 heures par mois

236 jours x 15 minutes =3.540 minutes 160 = 59 heures par an

2001 : 6,66 (taux horaire) x 33 heures 219,78 euros

2002 : 7,35 (taux horaire) x 59 heures 433,65 euros

2003 : 8,00 (taux horaire) x 59 heures 472,00 euros

2004 : 8,50 (taux horaire) x 59 heures 501,50 euros

2005 : 9,50 (taux horaire) x 44 heures (formation 3 mois) = 418,00 euros

2006 : 9,50 (taux horaire) x 25 heures 237,50 euros

En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé, la cour allouant à Monsieur [D] la somme de 2.282,43 euros à titre de contrepartie financière du temps d'habillage de déshabillage.

Sur le rappel de salaire relatif au taux horaire,

M. [D] fait valoir que la majoration de salaire doit être calculée sur le salaire de base, c'est-à-dire le salaire versé en contrepartie directe du travail fourni ; que toutes les primes inhérentes à la nature du travail doivent être prises en compte pour le calcul de la majoration des heures supplémentaires ; qu'en l'espèce la SA AMBULANCES HIPPOCRATE a seulement retenu le salaire brut de base ; qu'il est donc fondé à réclamer le paiement de la différence entre les heures majorées payées par l'employeur et les heures majorées prenant en compte les diverses primes réintégrées.

Il indique qu'il a saisi le Conseil de Prud'hommes de NICE le 25 mai 2006, en sorte, que pour la période non prescrite, il formule sa demande à compter du 25 mai 2001.

Il réclame la somme de 2.619,15 €.

La SA AMBULANCES HIPPOCRATE relève que le décompte du salarié ne mentionne pas les modalités de calcul du nouveau taux horaire et que la prime d'ancienneté et la prime d'assiduité ne doivent pas être prises en compte. Elle considère que la demande est injustifiée.

Mais, les primes inhérentes à la nature du travail doivent être prises en compte dans l'assiette de calcul des majorations pour heures supplémentaires, sauf, effectivement, à écarter la prime d'ancienneté du calcul des majorations pour heures supplémentaires, ainsi que la prime d'assiduité.

C'est en tenant exactement compte de ces paramètres, que le salarié a établi des tableaux de calcul détaillés qui font l'objet de la pièce 23 a, dans laquelle apparaissent le salaire horaire augmenté des primes à inclure , les coefficients de majoration applicables et les sommes déjà payées et calculées sur la base d'un salaire horaire de base non majorée des primes.

Il sera donc alloué à M. [D], ainsi qu'il le réclame, la somme de 2619,15 euros pour la période non prescrite, débutant le 25 mai 2001, au titre du rappel de salaire relatif au taux horaire.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé,

M. [D] considère que l'indemnité légale lui est due, puisque l'employeur n'a pas mentionné sur le bulletin de paie le nombre d'heures de travail réellement effectué et réclame la somme de 10.217,34 euros correspondant à 6 mois de salaires.

Mais, s'il peut être reproché à l'employeur de ne pas avoir établi au sein de l'entreprise les documents permettant d'enregistrer le temps de travail des salariés, il n'est pas pour autant démontré qu'il a intentionnellement mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.

Il convient, par conséquent, de débouter M. [D] de sa demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Sur la prise d'acte,

Pour s'opposer aux demandes de M. [D], la SA AMBULANCES HIPPOCRATE fait valoir que sa lettre de démission était pure et simple et non motivée ; que ce n'est que dans le cadre de la communication de ses écritures au mois de mai 2008, soit deux ans après sa saisine du conseil de prud'hommes, qu'il a fait état pour la première fois d'une demande au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il n'est pas fondé en sa demande puisque la société employeur a parfaitement respecté ses obligations contractuelles ; que la véritable raison de la démission de M.[D] est d'avoir voulu créer sa propre société d'ambulances et qu'il a d'ailleurs commencé ses démarches très tôt, soit dès le mois de décembre 2006.

Mais, les griefs que développe Monsieur [D] contre son employeur et dont il explique qu'ils ont précédé l'envoi d'une lettre de démission, sont réels.

Ainsi que cela a été vu auparavant, il est fondé à soutenir que son employeur a omis, malgré ses réclamations justifiées, de lui verser l'intégralité de la rémunération à laquelle il avait droit et de lui octroyer les repos compensateurs correspondant. Ces carences de l'employeur ont duré plusieurs années.

Si le salarié n'a formulé aucune revendication dans sa lettre de démission du 6 mai 2006, il n'en reste pas moins qu'en l'état de l'importance de ses réclamations restées sans réponse de la part de l'employeur et eu égard à la proximité dans le temps de ses réclamations avec le courrier de rupture, la démission de Monsieur M. [D] est équivoque , ce dont il résulte que le courrier de démission constitue une prise d'acte de rupture par lui de son contrat de travail.

Au vu des graves et constants manquements de l'employeur à ses obligations contractuelles et notamment à son obligation de verser au salarié sa rémunération intégrale, le courrier de prise d'acte de rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Eu égard à l'ancienneté du salarié supérieure à deux ans dans l'entreprise occupant plus de 10 salariés, la Cour alloue à Monsieur M. [D] 10.217,34 € d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à six mois de salaire.

Sur la résistance abusive de l'employeur et le préjudice moral du salarié,

Monsieur [D] indique avoir subi un préjudice moral du fait de la résistance abusive de son employeur face à ses demandes légitimes et réclame 3.000,00 euros, à titre de dommages-intérêts.

Il a été vu que la SA AMBULANCES HIPPOCRATE a manqué à ses obligations légales et conventionnelles quant à l'établissement des feuilles de route et du décompte des heures de travail effectivement réalisées, quant à l'entretien des tenues de travail et quant au paiement des indemnités de repas, des repos compensateurs et de l'intégralité du salaire dû à Monsieur [L] [D].

La résistance opposée par l'employeur aux réclamations du salarié, lui cause nécessairement un préjudice qui sera exactement indemnisé par l'allocation de 500 € à titre de dommages-intérêts.

Il sera accordé au salarié 2000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, pour l'ensemble des frais de procédure.

Les demandes de la société AMBULANCES HIPPOCRATE ne sont pas fondées, la procédure n'étant pas abusive.

La société AMBULANCES HIPPOCRATE succombe. Elle sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

RECOIT l'appel,

INFIRMANT partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau,

CONDAMNE la société AMBULANCES HIPPOCRATE à payer à Monsieur [L] [D], les sommes de 2345,25 euros, au titre de l'entretien des tenues, de 2630,84 €, au titre des primes panier, de 11.567 €, à titre de rappel de salaire et congés payés y afférents, de 6215,15 euros, au titre des repos compensateurs, de 2.282,43 euros à titre de contrepartie financière du temps d'habillage de déshabillage, de 2619,15 euros, à titre du rappel de salaire relatif au taux horaire, de 10.217,34 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 500 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, de 2000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

DIT QUE les créances de nature salariale produiront des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, soit à compter du 24 mai 2006, avec capitalisation des intérêts échus et dus pour plus d'une année à compter de la demande formée en cause d'appel,

CONFIRME les autres dispositions du jugement,

CONDAMNE la société AMBULANCES HIPPOCRATE aux dépens,

REJETTE toute autre demande,

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 10/23189
Date de la décision : 10/01/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°10/23189 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-10;10.23189 ?
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