COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 13 DECEMBRE 2011
N°2011/192
GP
Rôle N° 10/19193
jonction N° 10/19285
Société MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN
C/
[E] [N]
Grosse délivrée le :
à :
Me André CHARBIN, avocat au barreau de GRASSE
Me Sarah GHASEM, avocat au barreau de NICE
Copie certifiée conforme délivrée le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 18 Octobre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° F10/520.
APPELANTE
Société MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me André CHARBIN, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Agnès BALLEREAU-BOYER, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEE
Madame [E] [N], demeurant [Adresse 2]
Bénéficie de l'aide juridictionnelle totale n° 2011/000227 du 10.01.2011
représentée par Me Sarah GHASEM, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 11 Octobre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller
Madame Brigitte PELTIER, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Monique LE CHATELIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2011
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Monique LE CHATELIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Madame [E] [N] a été embauchée en qualité d'agent de production le 3 septembre 2001 par la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN, à l'enseigne Elis Riviera.
Elle a été en arrêt de travail à la suite d'un accident du travail survenu le 5 juillet 2006 jusqu'au 1er juillet 2008, puis en arrêt maladie du 2 juillet au 31 octobre 2008.
Par courrier recommandé du 24 novembre 2008, la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN a demandé à Madame [E] [N] de fournir un justificatif des motifs de son absence depuis le 25 octobre 2008.
Madame [E] [N] a transmis le 27 novembre 2008 une copie de la prolongation de son arrêt de travail pour maladie du 25 octobre au 1er novembre 2008 ainsi que la décision de la CPAM des Alpes-Maritimes de lui accorder une pension d'invalidité à compter du 1er novembre 2008.
Par requête du 30 juillet 2009, Madame [E] [N] a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail et en paiement d'indemnités de rupture.
Par jugement du 18 octobre 2010, le Conseil de Prud'hommes de Grasse a constaté le manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles et notamment à son obligation d'organiser la visite de reprise auprès de la médecine du travail, a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail liant les parties, a condamné la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN à payer à Madame [E] [N] les sommes suivantes :
-2685,70 € d'indemnité compensatrice de préavis,
-268,57 € d'indemnité de congés payés sur préavis,
-2282,84 € d'indemnité de licenciement,
-8 057,10 € de dommages-intérêts,
-800 € au titre des frais irrépétibles,
a ordonné la remise des documents sociaux (certificat de travail, attestation ASSEDIC) sous astreinte de 50 € par jour de retard dans le délai du 30ème jour de la notification du jugement, le Conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte, et a condamné la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN aux entiers dépens.
La SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN et Madame [E] [N] ont respectivement interjeté appel du jugement prud'homal par plis recommandés des 25 et 26 octobre 2006. Les deux procédures d'appel enregistrées sous les numéros 10/19193 et 10/19285 doivent être jointes pour qu'il soit statué par le présent arrêt dans l'intérêt d'une bonne justice.
Ayant relevé appel, la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la résolution judiciaire du contrat de travail de Madame [E] [N] et en ce qu'il a dit que la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à ce qu'il soit constaté que Madame [E] [N] n'a pas adressé de prolongation d'arrêt de travail au-delà du 1er novembre 2008, à ce qu'il soit constaté qu'elle a informé son employeur de son impossibilité d'avoir une activité professionnelle du fait de son classement en invalidité de deuxième catégorie, à ce qu'il soit constaté qu'elle n'a pas répondu au courrier du 15 janvier 2009 lui demandant de prendre contact avec le chef du personnel et qu'elle n'a pas sollicité de visite de reprise devant le médecin du travail, en conséquence, au débouté de Madame [E] [N] de l'ensemble de ses réclamations, à titre subsidiaire, à la limitation du montant des condamnations à six mois de salaire à titre de dommages-intérêts et à la condamnation de Madame [E] [N] aux dépens.
Madame [E] [N] conclut à la réformation du jugement entrepris aux fins de voir constater le manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles, celui-ci n'ayant effectué aucune démarche pour organiser la visite médicale de reprise du travail, à la condamnation de la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN à lui verser la somme de 30 000 € à titre de dommages-intérêts, à la confirmation du jugement pour le surplus, à la condamnation de la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN à verser à Maître Sarah GHASEM la somme de 1500 € en vertu des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à charge pour elle de renoncer à percevoir la rétribution de l'État au titre de l'aide
juridictionnelle et à la condamnation de la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure et aux conclusions des parties oralement reprises.
SUR CE :
Attendu que, si la communication le 27 novembre 2008 par Madame [E] [N] à son employeur de son titre de pension d'invalidité ne peut être interprétée comme une manifestation de la salariée de ne pas reprendre le travail, il n'en reste pas moins que celle-ci n'a plus donné de nouvelle à son employeur jusqu'à sa saisine du conseil de prud'hommes ;
Qu'elle n'a transmis aucun certificat de prolongation d'arrêt de travail postérieurement au 1er novembre 2008 alors même que l'employeur lui avait rappelé le 24 novembre 2008 qu'elle était tenue de justifier des motifs de son absence dans les 48 heures ;
Attendu qu'il apparaît que Madame [E] [N] a cru suffisant de transmettre à son employeur la décision de la CPAM de la classer en invalidité, catégorie 2, alors que cette décision de la sécurité sociale ne met pas fin à la suspension du contrat de travail ;
Que la salariée n'a pas adressé à son employeur de certificat de fin d'arrêt de travail, ne lui a pas fait connaître son intention de reprendre le travail et n'a pas demandé l'organisation d'une visite médicale de reprise ;
Attendu que la SA MAJ BLANCHISSERIE DE PANTIN a par ailleurs adressé un courrier le 15 janvier 2009 à Madame [E] [N] pour lui « demander de prendre contact avec M. [L] chef du personnel de la société Elis au [XXXXXXXX01]... » ;
Que la salariée n'a adressé aucune réponse à son employeur et ne lui a toujours pas transmis d'information sur sa situation médicale ni sollicité l'organisation d'une visite médicale de reprise auprès du médecin du travail ;
Attendu qu'à défaut pour la salariée d'avoir informé la SA MAJ de son état de santé et d'avoir sollicité la visite médicale de reprise, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir manqué à ses obligations contractuelles ;
Qu'il convient, par conséquent, d'infirmer le jugement et de débouter Madame [E] [N] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ainsi que de l'ensemble de ses réclamations, étant précisé que le contrat de travail de la salariée est toujours suspendu ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT, EN MATIERE PRUD'HOMALE, PAR ARRET CONTRADICTOIRE,
Ordonne la jonction des procédures d'appel numéros 10/19193 et 10/19285,
Reçoit les appels en la forme,
Infirme le jugement,
Rejette la demande de Madame [E] [N] en résiliation judiciaire du contrat de travail,
Déboute Madame [E] [N] de l'ensemble de ses demandes,
Condamne Madame [E] [N] aux dépens de première instance d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT