COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 06 DECEMBRE 2011
N° 2011/178
YR
Rôle N° 09/15418
[L] [J] épouse [A]
C/
SNC GEMEY MAYBELLINE GARNIER
Grosse délivrée le :
à :
Me FERRATA, avocat au barreau de MARSEILLE
Me SCHWAL, avocat au barreau de NICE
Copie certifiée conforme délivrée le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CANNES en date du 10 Juillet 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/156.
APPELANTE
Madame [L] [J] épouse [A], demeurant [Adresse 9]
représentée par Me Dominique FERRATA, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
SNC GEMEY MAYBELLINE GARNIER, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Cécile SCHWAL, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 25 Octobre 2011 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller
Madame Brigitte PELTIER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Monique LE CHATELIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Décembre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Décembre 2011.
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Monique LE CHATELIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Madame [L] [A] a été embauchée le 3 août 1992, par contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité de VRP, par la Société DIPARCO pour un salaire mensuel de 10.000 francs, plus primes sur objectifs, participation et intéressement. Elle était chargée de vendre des produits cosmétiques dans la grande distribution et sur le secteur des [Localité 2]. En 1993, la Société DIPARCO est devenue la Société GEMEY MAYBELLINE. En 2003, la Société GEMEY MAYBELLINE, appartenant au groupe L'OREAL a fusionné avec la Société GARNIER.
Madame [A] a saisi le Conseil des Prud'hommes de Cannes le 21 mars 2008 de demandes à l'encontre de la Société GEMEY MAYBELLINE GARNIER (GMG), estimant avoir été victime d'actes discriminatoires de la part de son employeur, et a demandé à ce titre la résolution judiciaire de son contrat de travail et l'allocation de dommages et intérêts.
Par Jugement du Conseil de Prud'hommes de Cannes en date du 10 juillet 2009, elle a été déboutée de l'ensemble de ses demandes.
Appelante de ce jugement, elle indique qu'après cinq années de travail fructueuses lui ayant valu une augmentation substantielle de salaire, il était découvert, en avril 1997, qu'elle était atteinte d'une sclérose en plaques, maladie évoluant par poussées favorisées par des périodes de stress ou de fatigue et entraînant une aggravation de la déficience physique ou sensorielle ; qu'elle n'a informé son employeur de sa maladie que lorsque son état de santé l'a obligée à envisager des aménagements de conditions de travail, début 1998 ; que plusieurs salariés en attestent ; qu'un professeur de médecine a recommandé une adaptation de son activité professionnelle dans le sens d'une limitation de ses déplacements ; que la direction de l'époque, a alors aménagé son activité , mais que cet aménagement a été supprimé en 2003, au moment de la fusion entre les Sociétés GEMEY et GARNIER ; qu'elle a donc du reprendre son poste antérieur ; qu'elle a été reconnue comme travailleur handicapé en novembre 2003, puis classée en invalidité 1ère catégorie en novembre 2005, mais que son employeur n'a pris aucune précaution effective et n'a pas envisagé de reclassement dans un autre poste de nature à préserver sa santé ; qu'elle a donc été obligée de poursuivre ses fonctions habituelles malgré son handicap ; qu'elle a été classée en invalidité 2ème catégorie en octobre 2007 puis déclarée définitivement inapte à son poste en Avril 2008 , avant d'être licenciée pour inaptitude le 30 septembre 2009.
Elle estime que la Société GMG a manqué à son obligation de reclassement et de réentrainement au travail et que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, compte tenu des manquements de l'employeur à ses obligations.
Elle sollicite l'infirmation du jugement, et demande à la cour de condamner la Société GMG à lui payer la somme de 50 000€ pour non respect des règles relatives au réentrainement au travail des salariés handicapés, de juger que la Société GMG a manqué à son obligation de reclassement et que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse du fait du manquement à l'obligation de reclassement, de condamner la Société GMG à lui payer la somme de 300 000 € en réparation du préjudice subi, la somme de 3.751,68 € au titre de l'indemnité de préavis, la somme de 375,16 € au titre des congés payés y afférents, la somme de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour lui avoir supprimé l'ensemble de ses droits individuels de formation, la somme de 20.284,78 € au titre de la contrepartie financière relative à sa clause de non concurrence et la somme de 3 000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.
La société GMG indique que, dans un premier temps, la fusion de sociétés n'a entraîné aucun changement dans l'activité des VRP GEMEY-MAYBELLINE qui ont continué à ne représenter que les produits de cette marque; qu'à compter de juillet 2005, il a été demandé aux VRP des deux anciennes sociétés de commercialiser les deux catalogues; que ces derniers ont perçu ce changement comme une amélioration importante de leur activité et en ont témoigné, à titre individuel, devant le comité d'entreprise; que, du fait des périodes de suspension de son contrat de travail, pour cause de maladie et de maternité, Madame [A] n'a pas été concernée par la présentation des deux catalogues; que, quelque jours avant le terme de décembre 2005, Madame [A] a sollicité et obtenu une reprise anticipée de son activité professionnelle, médicalement autorisée; qu'après l'avis émis par le médecin du travail le 9 décembre 2005, a été mise en place une organisation de travail à mi-temps, suivant avenant accepté par la salariée qui n'a jamais dénoncé ses conditions de travail; que la société n'a jamais eu connaissance de la nature de la pathologie affectant Madame [A]; que c'est seulement le 25 avril 2008 que la société a été informée que Madame [A] souffrait d'une sclérose en plaque.
Elle conteste avoir manqué à ses obligations et demande à la cour de juger qu'elle a pris en compte les préconisations du médecin du travail ; que Madame [A] ne peut se prévaloir d'un manquement de la société aux dispositions de l'article L.5213-5 du Code du travail, sur le réentrainement au travail des salariés handicapés ; que le licenciement de Madame [A] est légitime et que ses demandes sont infondées dans leurs principe et injustifiées dans leur montant .
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure et aux conclusions des parties, oralement reprises dans le respect des dispositions de l'article 440 du Code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR,
Sur le non respect allégué des recommandations de la médecine du travail,
Madame [A] fait ici valoir que l'article L 4121-1 du Code du travail) obligeait l'employeur à prendre les mesures nécessaires pour protéger sa santé, mesures incluant la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés à son handicap ; qu'ayant été déclarée inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'elle occupait, l'employeur devait lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé ; que tel n'a pas été le cas; qu'en l'espèce, avant la fusion des Sociétés GEMEY MAYBELLINE et GARNIER, l'ancienne direction, consciente de ses contraintes de santé lui avait aménagé un secteur de gros clients, essentiellement des entrepôts, avec plus de travail administratif à domicile et de rendez-vous assis, et moins de visites en magasins physiquement pénibles ; que cet aménagement du poste a cependant été supprimé sans motif en 2003 lors de la fusion avec la Société GARNIER ; qu'ainsi, la limitation des déplacements n'a pas été respectée, alors que, dès 2003, la médecine du travail a émis des recommandations précises indiquant qu'il était fortement souhaitable de limiter ses déplacements dans une région de 50 Km par rapport à son domicile, tandis que le professeur de médecine qui la suivait à l'hôpital de [5] de [Localité 6] émettait le même avis ; qu'après deux arrêts de travail pour maladie et maternité, elle a été autorisée par le médecin du travail en décembre 2005 à reprendre son poste mais seulement à mi-temps ; qu'en janvier 2006, ce même médecin préconisait à nouveau une limitation des déplacements dans un rayon de 50 Km ; que la direction lui a bien fait signer un avenant à son contrat de travail le 6 janvier 2006 mentionnant les recommandations de la médecine du travail, mais que cet écrit n'a jamais été suivi d'effet, puisque son secteur allait au-delà des 50 km autour de son domicile et que huit magasins éloignés lui étaient affectés, ceci alors que la Société GMG disposait de plus d'une centaine de magasins dans les départements du [Localité 8] et des [Localité 2] et qu'une autre salariée, Madame [Y], qui ne connaissait aucun problème de santé avait un secteur restreint à un périmètre de 32 Km .
Elle reproche aussi à l'employeur de n'avoir pris aucune décision pour lui épargner les travaux de manutention et de travail en hauteur et fait valoir que le 17 janvier 2006, le médecin du travail proscrivait toute manutention de ce type ; que cependant les tâches de VRP qui étaient les siennes impliquaient des manutentions lourdes ( réimplantations de rayons ou de magasins, implantations des nouveaux produits, mise en rayon maquillage, etc..) ; que la Société GMG n'a rien fait pour faciliter ce type de tâche dont elle n'ignorait pas la pénibilité puisque le 22 février 2007, en réunion des délégués, un délégué s'en plaignait ; que si l'employeur prétend avoir respecté les préconisations du médecin du travail de janvier 2006 et se réfère à l'avenant à son contrat précisant qu'elle ne travaillerait désormais que certains jours, ces clauses sont sans valeur au regard de la législation qui dispose que les VRP ne sont pas assujettis à la durée légale du travail ; qu'ainsi , un vrai mi-temps thérapeutique aurait du consister à réduire de moitié son secteur ; qu'au surplus, en matière de travail à temps partiel, seule la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail figurant sur le contrat permet de qualifier le contrat à temps partiel ; qu'en dépit du contrat, sa charge de travail est demeurée égale sinon supérieure à celle de ses collègues de travail à temps plein ; qu'elle avait 25 magasins à visiter dans son secteur, alors qu'une de ses collègues de travail, Madame [Y] en avait 24 magasins pour une activité à temps plein ; qu'en définitive ses objectifs de vente ont été maintenus à 100%, tandis que dans le même temps ses primes sur objectifs ont été réduites illégalement de 50%.
Enfin, elle indique qu'elle a sollicité un entretien auprès de la direction pour s'ouvrir de sa situation; que MM. [I], responsable du personnel, FERRANDIS, chef des ventes national et [Z], chef des ventes régional, l'ont reçue; qu'ils n'ont cependant apporté aucune réponse concrète à ses difficultés, alors même qu'il existait des possibilités de mutation au sein du groupe l'OREAL; que, dès lors, soumise à un climat de stress et d'hostilité permanent, et alors même qu'elle n'avait fait aucune poussée depuis plusieurs années, elle a fait une très forte poussée de sclérose en plaques, fin février 2006, l'obligeant à nouveau à un arrêt maladie.
Elle déduit de ces éléments que la société GMG n'a pas tenu suffisamment compte des recommandations du médecin du travail et qu'il a donc violé son obligation de reclassement.
Toutefois, la société GMG conteste avoir eu connaissance de la pathologie de Madame [A] et aucun des éléments versés aux débats ne donne suffisamment corps à l'affirmation contraire de la salariée, alors même qu'elle produit des attestations.
En effet, parmi les attestations produites et pouvant être retenues, comme répondant à la forme procédurale requise, MM. [G] [B], [W] [Z] et [R] [M], certifient que l'employeur était au courant de l'état de santé de Mme [A] et que celle-ci avait obtenu un aménagement de poste.
Mais, ces attestations sont contredites par l'attestation délivrée par M. [S] [F], directeur des affaires sociales de la société L'Oréal, dénégations d'autant plus crédibles que la société GMG produit le courrier daté du huit août 2005, par lequel Mme [A] informe son employeur avec retard de son statut de travailleur handicapé (« le médecin du service m'a conseillé de vous informer de mon statut de travailleur handicapé. Je vous joins donc la reconnaissance faite par la COTOREP »), la notification de la COTOREP jointe à ce courrier datant, en effet, du 25 novembre 2003, ce qui témoigne de la lenteur avec laquelle elle a communiqué les informations relatives à son état de santé.
En toute hypothèse, Madame [A] ne justifie pas de son affectation quasi-exclusive dans les tâches qu'elle prétend lui avoir été confiées dans le cadre d'un aménagement de son poste pour raisons de santé, même si la pièce n° 12 mentionne qu'elle avait une activité en entrepôt.
Quant aux pièces 13 et 14 relatives à un client [V] elles révèlent seulement que Madame [L] [A] était en charge du suivi de ce client en 2000.
De plus, l'employeur met justement l'accent sur le contenu de pièce adverses produites seulement devant les premiers juges, mais dont il livre le contenu à la cour (n° 42 et 69 ).
Ainsi, Madame [A] écrivait à sa hiérarchie le 4 mai 1998 : « Je tiens, comme je te l'ai dit à [Localité 3], à conserver un contact terrain permanent, qui devra, je pense, dépasser mon propre secteur afin d'entretenir des liens réguliers avec les principaux points de vente dépendant des entrepôts dont j'ai la charge ».
Cet écrit est, à l'évidence, incompatible avec les affirmations de Madame [A] selon lesquelles son poste de travail a été aménagé début 1998 dans les conditions qu'elle décrit. Au contraire même, la liste des clients confiés à Madame [A] en 2002, montre que ces derniers étaient éparpillés sur plusieurs villes des [Localité 2], du [Localité 8] et sur la ville de [Localité 4].
Il résulte, en outre, des propres écrits de Madame [A], qu'elle assumait normalement ses tâches de VRP : (e-mail écrit par elle le 27 décembre 2005 à [N] [H] : « Les deux journées avec [W] se sont bien passées; les réflexes reviennent vite. Elles m'ont permis de commencer à me familiariser avec les gammes de produits que je ne connaissais pas, comme la coloration. La réimplantation du rayon du géant de Mandelieu m'a permis de travailler les marques, les intervenants, les schémas d'implantation, ainsi que le matériel de valorisation. J'ai également passé des commandes maquillage étais couvert ainsi les nombreuses nouveautés. Autre point positif : je retrouve des clients connus, puisque je fais ce secteur depuis plus de 13 ans, ce qui facilite l'approche même si l'on présente de nouvelles collections »).
S'agissant du non-respect allégué de la non limitation de ses déplacements, Madame [A] ne produit pas davantage d'éléments alimentant sérieusement ses griefs.
En effet, si en 2003, le médecin du travail indiquait qu'il était « souhaitable » de limiter ses déplacements dans un rayon de 50 km de son domicile, cette préconisation a été respectée puisque sur les 60 clients du portefeuille confié à Madame [A], 57 clients se situaient dans un rayon de 50 km.
Il en est de même à partir de janvier 2006, où le médecin du travail a jugé «très souhaitable » que les déplacements soient pareillement limités, puisqu'en exécution d'un avenant au contrat de travail l'activité de Madame [L] [A] a été réduite ( nombre plus faible de magasins à visiter et moins souvent car ayant une activité moins intense 'pièce 18), étant observé que la comparaison que Mme [A] fait entre son activité et celle de ses collègues VRP à temps plein n'est guère pertinente, puisque ces derniers avaient en portefeuille un nombre de magasins plus important en volume d'activité et en taille, avec un chiffre d'affaires à réaliser plus élevé.
De plus, tous les magasins situés à proximité du domicile de Madame [L] [A] ne convenaient pas à la nature des activités et restrictions préconisées par le médecin du travail en termes de travaux de manutention lourds ou en hauteur à exécuter.
Quant à l'argumentation de Madame [A] sur la pénibilité des tâches qui lui étaient confiées, elle n'est guère opérante dès lors que le procès-verbal des délégués du personnel ne concerne pas le secteur « maquillage » où elle 'uvrait, du fait de l'intervention d'une société de services dédiée et d'une aide en maintenance.
Au total, Madame [A] s'est vue confier sur la prescription de la direction GMG à [Localité 7] le 5 janvier 2006 17 magasins, de petite dimension avec une activité commerciale moindre que celle des magasins affectés à ses collègues à temps complet (texte des instructions du 5 janvier 2006 aux personnes chargées de les exécuter : « le médecin du travail a considéré [L] [A] aptes à la reprise de son activité avec des restrictions suivantes : « il serait souhaitable que les déplacements s'effectuent dans un rayon de 50 km autour du domicile de Mme [A] et qu'elle obtienne une possibilité de travail à mi-temps ». Je vous remercie de bien vouloir lui aménager son secteur afin qu'il soit compatible avec une activité à mi-temps et tenant compte des restrictions ci-dessus »).
Ces points de ventes ont été sélectionnés de sorte à répondre aux préconisations du médecin du travail, puisque moins exigeants en termes de niveau d'attente du service fourni par les VRP (pièces 3,4,5,6,7), en sorte que, contrairement à ce que Mme [A] soutient, sa charge de travail a été réellement réduite, ceci de manière exempte de critique.
Est tout aussi inopérant le reproche de discrimination fait à l'employeur en matière de versement de la « vitrine de primes », fondée sur la prise en compte de paramètres concourrant aux résultats (chiffre d'affaires, mises en avant des nouveautés, gain de linéaire), puisque Madame [L] [A] ne contredit pas sérieusement l'affirmation de l'employeur qui soutient et justifie de ce que le versement de la moyenne des primes perçues pendant les 12 mois précédent l'arrêt de travail de Mme [L] [A] a été assuré et que les objectifs assignés à celle-ci ne sont pas demeurés les mêmes, eu égard à la réduction du temps de travail.
Sur le non-respect allégué des obligations relatives au réentrainement des salariés,
Mme [A] fait grief à l'employeur de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article L5213-5 du Code du Travail, ledit article disposant que « Tout établissement ou groupe d'établissements appartenant à une même activité professionnelle de plus de 5.000 salariés assure après avis médical, le réentraînement au travail et la rééducation professionnelle de ses salariés malades et blessés », au motif que la société GMG fait partie du Groupe l'OREAL, qui contient lui même plus de 5.000 salariés; qu'elle n'a jamais bénéficié des mesures prévues et détaillées par la loi; qu'il en résulte pour elle un préjudice qui doit être liquidé à 50 000€, même si la rupture du contrat de travail pour inaptitude est jugée légitime
Mais, hormis le fait que la société GMG appartient au groupe de sociétés l'OREAL, dont les activités sont diverses, il n'est établi par aucun élément du dossier que les établissements exploités par la société GMG ont des liens tels avec d'autres établissements appartenant à une même activité professionnelle, qu'ils forment un ensemble entrant dans les prévisions de l'article susvisé, étant observé que le médecin du travail n'a préconisé aucune mesure d'adaptation ou de réentraînement au travail de l'appelante et qu'elle n'a jamais formulé de demande en ce sens.
Dès lors, la demande de Madame [L] [A] sera rejetée.
Sur le licenciement,
A l'issue des deux visites diligentées conformément aux prescriptions du Code du travail, Madame [A] a été déclarée inapte à son poste de travail (« Inapte au poste actuel ; conduite et manutention impossible - un travail à domicile est possible »).
Le 8 septembre 2008, en réponse à ses demandes, le médecin du travail a précisé à la société :« au vu de l'état de santé de Madame [A], elle ne peut occuper qu'un poste à son domicile. Aucun déménagement n'est envisageable ».
La société GMG a alors proposé à Madame [L] [A] un poste « d'attachée commerciale à domicile », avec maintien de sa rémunération antérieure, poste spécifiquement créé pour elle.
Mais, par courrier du 1° juin 2009, Madame [L] [A] a décliné cette proposition.
Elle reproche aujourd'hui à son employeur une absence de loyauté, pour ne lui avoir pas proposé de prendre part aux départs négociés dans le cadre du projet de restructuration en vue de réduire l'effectif des VRP.
Elle fait valoir qu'il a été proposé aux VRP un accompagnement social; que des reclassements ou des départs négociés ont été proposés moyennant indemnisation; qu'au moment de l'application de ces mesures elle-même était dans l'attente d'un reclassement; qu'elle a adressé un courrier en date du 2 avril 2009 à la société dans lequel elle a demandé à bénéficier des mesures prévues par ce projet, mais qu'elle n'a jamais reçu de réponse; qu'il est donc clair que l'employeur n'a pas recherché toutes les possibilités de reclassement et a adopté un comportement discriminatoire dès lors que ce projet correspondait parfaitement à sa situation et aurait pu lui permettre de créer son entreprise à domicile.
Mais, d'une part, ce projet, impliquait une mobilité fonctionnelle et géographique incompatibles avec les préconisations du médecin du travail et, d'autre part, la rupture du contrat de travail de Madame [L] [A] ne pouvait intervenir sur une base autre que la législation d'ordre public protégeant les salariés déclarés inaptes à leur emploi.
Elle n'a donc pas été victime de discrimination, comme elle le soutient, son licenciement pour inaptitude étant parfaitement régulier et fondé, dès lors que l'employeur s'est pleinement acquitté de son obligation de reclassement pour lui avoir proposé un emploi à domicile conforme aux préconisations du médecin du travail.
Lorsque le salarié est inapte à reprendre son emploi, l'employeur se trouve libéré du préavis, dès lors qu'il n'a pas manqué à son obligation de reclassement consécutif à l'inaptitude, comme c'est le cas en l'espèce.
Madame [L] [A] ne peut donc prétendre au versement de l'indemnité de préavis qu'elle réclame et n'est pas fondée à reprocher à l'employeur de l'avoir privée de la possibilité de faire valoir ses droits individuels à la formation, durant la période de préavis.
Dès lors, ses demandes, y compris celle tendant paiement d'une indemnité de congés payés afférente au préavis seront rejetées.
Sur la contrepartie financière de la clause de non concurrence,
Il est exact que, comme le soutient Mme [A], son contrat de travail initial la liant à la société
DIPARCO SNC contenait une clause de non-concurrence et qu'il était prévu, en contrepartie, qu'à la rupture du contrat, elle recevrait une « indemnité qui sera versée mensuellement et qui sera égale au tiers du salaire mensuel du représentant calculé sur la moyenne de la rémunération nette effective des 12 mois précédant la rupture du contrat » et qu'il était prévu une possibilité de renonciation de l'employeur, qui devait être effectuée soit au moment de la notification du licenciement.
Par l'effet du transfert de ce contrat de travail, la société GMG était tenue par ces clauses, qui quoiqu'elle en dise, étaient toujours adaptées aux conditions concrètes de l'emploi exercé par Madame [L] [A] chez GMG.
N'ayant pas notifié à Madame [L] [A] qu'elle renonçait à la clause de non-concurrence, elle est débitrice d'une contrepartie financière envers Madame [L] [A].
La moyenne des salaires des 12 derniers mois de Madame [L] [A] s'est élevée à à la somme de 1267,79 € bruts(pièce n°39 bis).
En sa qualité de VRP, les dispositions de l'accord interprofessionnel du 3 Octobre 1975, sont applicables à la Société GMG et à Madame [L] [A].
Cet accord prévoit à l'article 17 que l'interdiction contractuelle ne peut dépasser 2 ans, et qu'en cas de licenciement, l'indemnité mensuelle se monte à deux tiers de mois si la durée de l'interdiction est supérieure à un an, et à un tiers de mois si la durée de l'interdiction est inférieure ou égale à un an.
Contrairement à ce que soutient Madame [A], la durée de l'interdiction de non concurrence était prévue dans son contrat (« cette clause de non-concurrence est valable pour les territoires que le représentant aura prospectés pour le compte de la société et pendant l'année qui suivra le départ du représentant »).
En conséquence, Madame [L] [A] a droit à une indemnité égale au tiers du salaire mensuel des 12 mois précédant la rupture, pendant la durée de l'interdiction, soit 5071,16 € ([1267,79 € /3] X 12).
L'appel de Madame [L] [A] étant accueilli partiellement, la société GMG devra lui payer la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et sera condamnée aux dépens.
Toute autre demande sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement, en matière prud'homale.
REÇOIT l'appel,
INFIRMANT partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau,
CONDAMNE la société GEMEY-MAYBELLINE-GARNIER à payer à Madame [L] [A] la somme de 5071,16 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,
CONFIRME les autres dispositions du jugement,
CONDAMNE la société GEMEY-MAYBELLINE-GARNIER à payer à Madame [L] [A] la somme de 1500 €, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toute autre demande,
CONDAMNE la société GEMEY-MAYBELLINE-GARNIER aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT