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22/11/2011 | FRANCE | N°10/19590

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 22 novembre 2011, 10/19590


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 22 NOVEMBRE 2011



N°2011/



BP











Rôle N° 10/19590







CGCA AUTO CHOC





C/



[U] [J]



Selarl GAUTHIER-SOHM

[B]



























Grosse délivrée le :



à :



Me POLI, avocat au barreau de NICE



Me COHEN SCALI, avoc

at au barreau de GRASSE

Maître [B]



Selarl GAUTHIER-SOHM



Copie certifiée conforme délivrée le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 15 Juin 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/1536.





APPELANTE



S.A.S. CGCA AUTO CHOC sous p...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 22 NOVEMBRE 2011

N°2011/

BP

Rôle N° 10/19590

CGCA AUTO CHOC

C/

[U] [J]

Selarl GAUTHIER-SOHM

[B]

Grosse délivrée le :

à :

Me POLI, avocat au barreau de NICE

Me COHEN SCALI, avocat au barreau de GRASSE

Maître [B]

Selarl GAUTHIER-SOHM

Copie certifiée conforme délivrée le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 15 Juin 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/1536.

APPELANTE

S.A.S. CGCA AUTO CHOC sous procédure de sauvegarde, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Jean-pierre POLI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Frédéric MORISSET, avocat au barreau de NICE

INTIME

Monsieur [U] [J], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Sandrine COHEN SCALI, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Eve MUZZIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

PARTIES INTERVENANTES

Selarl GAUTHIER-SOHM agissant en qualité de mandataire judiciaire de la SAS CGCA AUTO CHOC, demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Jean-Jérôme MONDOLONI substituant Me POLI, avocat au barreau de NICE

Maître [B] agissant en qualité d'administrateur judiciaire de la SAS CGCA AUTO CHOC, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jean-Jérôme MONDOLONI substituant Me POLI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 Octobre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte PELTIER, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Brigitte PELTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Monique LE CHATELIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2011.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2011

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Monique LE CHATELIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les conclusions des parties, déposées et développées oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions ;

M. [U] [J] a été engagé par la société AUTO CHOC, exerçant en matière de réparation automobile, en qualité d'assistant chef de base (catégorie employés niveau II échelon 3) à compter du 1er octobre 2001 ; à compter du 1er avril 2004, il était promu 1er adjoint de base (catégorie employés hautement qualifiés échelon 11) ; il a fait l'objet d'une rétrogradation aux fonctions de préparateur sur parc (catégorie employés non qualifiés, échelon 3) le 21 septembre 2007 prononcée au motif de « fautes professionnelles graves » ; puis après convocation à un entretien préalable de licenciement, il été licencié pour « insuffisance professionnelle avérée » par courrier du 29 octobre 2007 ;

Contestant la cause réelle et sérieuse de ce licenciement, il a saisi le conseil de prud'hommes de Grasse, lequel par jugement en date du 15 juin 2009, a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la société AUTO CHOC au paiement des sommes de 17.000 euros, 3.000 euros, 291,08 euros et 1.000 euros au titre respectivement de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité pour procédure vexatoire, rappel de primes de performances, article 700 du code de procédure civile, tout en déboutant les parties de plus amples demandes.

Par déclaration en date du 10 juillet 2009, la société AUTO CHOC a interjeté appel de cette décision ;

Après convocation des parties, et appel du dossier à l'audience du 13 septembre 2010, l'affaire, non en état, a été radiée par ordonnance du même jour ;

Par courrier du 3 novembre 2010, l'appelant a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle ;

La société AUTO CHOC conclut à l'infirmation de la décision déférée en ce qu'elle l'a condamné au paiement des sommes de 17.000 et 3.000 euros au titre respectivement de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et indemnité pour procédure vexatoire et sollicite condamnation de M. [J] au paiement d'une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens.

M. [J] conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse de licenciement et sollicite paiement des sommes suivantes :

- 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse - 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'emploi de procédés vexatoires
- 12.645,65 euros de dommages et intérêts pour travail dissimulé
- 4.851,76 euros au titre du délai congé, outre 612 euros de congés payés afférents
- 1.345 euros au titre du droit individuel à la formation
- 133,66 euros à titre de rappel de prime de performance pour le mois de septembre 2007
- 3.633,28 euros à titre de rappel de salaire sur astreintes effectuées du 1er mars 2004 au 31 novembre 2007, outre 363,13 euros au titre des congés payés y afférents
- 5.000 euros à titre de rappel de primes en compensation des astreintes sur la même période
- 3.965,45euros à titre de rappels de salaire pour non respect des minima conventionnels au titre de la période du 1er juin 2003 au 30 juin 2007 outre 396,54 euros au titre des congés payés y afférents
- 1.066,74 euros à titre de rappels de salaire au titre de la période du 1er juillet 2007 au 30 décembre 2007 outre 106,70 euros au titre des congés payés y afférents

- 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de droit et non respect de l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail
- 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la règle « à travail égal salaire égal »
- 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens.
Enfin, il demande que soit ordonné, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, la délivrance des bulletins de salaire conforme à l'arrêt à intervenir

Pôle Emploi, intervenant volontairement, déclare s'en rapporter.

SUR CE

Sur le motif du licenciement :

La société AUTO CHOC expose :

avoir convoqué le salarié « en vue d'un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement » puis, après entretien, l'avoir informé par courrier du 21 septembre 2007 de sa rétrogradation, avec baisse de salaire, à compter du 15 octobre suivant, prononcée du chef de différents manquements constatés dans l'exercice de ses fonctions

après contestation de cette décision par le salarié, avoir convoqué ce dernier en vue d'un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement puis, après entretien, lui avoir notifié son licenciement par courrier du 29 octobre 2007 pour cause réelle et sérieuse

M. [J] fait valoir d'une part que l'insuffisance professionnelle ne peut être constitutive d'une faute, d'autre part que lorsque le salarié a refusé une sanction disciplinaire constitutive d'une modification de ses fonctions, l'employeur ne peut procéder à un licenciement qu'en se fondant sur les griefs ayant motivé la sanction disciplinaire refusée ;

De fait, en l'espèce, la lettre de convocation à l'entretien préalable fixé au 17 octobre 2007, qui fait suite au courrier en date du 4 octobre 2007, par lequel M. [J] notifie son refus de voir modifier les conditions d'exécution de son contrat de travail, invite le salarié à se présenter « en vue de la mise à l'étude d'une sanction disciplinaire pouvant déboucher éventuellement sur un licenciement » ; cependant, la lettre de licenciement : « nous avons décidé de vous licencier aux motifs : insuffisance professionnelle avérée, cause réelle et sérieuse de licenciement (...) » ;

Dès lors, si le salarié observe à juste titre qu'une insuffisance professionnelle ne constitue pas une faute, il ressort toutefois des termes mêmes de la lettre de licenciement, laquelle fixe les limites du litige, que celui-ci a été prononcé, comme il a été dit, pour « insuffisance professionnelle avérée, cause réelle et sérieuse de licenciement (...) » ;

Il convient en conséquence, d'examiner les griefs retenus ;

La lettre de licenciement reprend les mêmes griefs que ceux ayant fait l'objet de la rétrogradation prononcée le 21 septembre 2007 au titre de « fautes professionnelles importantes » résultant de quatre « évènements » survenus le 10 juillet, le 24 juillet, 3 septembre et le 17 septembre 2007 en y ajoutant une circonstance survenue le 9 octobre et résultant du fait qu'à « l'occasion de la visite annuelle de contrôle de sécurité des portes mécaniques (') deux portes étaient en panne du système (') dont l'une ne disposait plus de manivelle que [M. [J]] a en vain cherché durant quinze minutes » ;

Toutefois, s'agissant d'un licenciement prononcé en suite d'un refus d'une modification substantielle du contrat de travail notifiée au titre d'une rétrogradation disciplinaire, ce dernier grief, comme le soutient M. [J], ne peut qu'être écarté ;

Par ailleurs, c'est également à juste titre que M. [J] fait valoir que l'employeur ne pouvait valablement motiver la dite sanction de rétrogradation en se fondant sur un fait survenu le 17 septembre 2007, soit postérieurement à l'entretien préalable fixé au 14 septembre 2007 ; il s'ensuit que ce grief ne peut pas plus fonder le licenciement prononcé en suite du refus de la rétrogradation disciplinaire et qu'ainsi les trois seuls premiers griefs doivent être examinés ;

En premier lieu, l'employeur indique « avoir constaté et découvert avec stupeur » « le 10 juillet, à l'occasion d'une inspection technique en votre compagnie (') que la salle de chaufferie dont vous avez l'entière charge de surveillance était dans un état de saleté générale et de décrépitude, par manque de nettoyage et d'initiative préventive à toute dégradation (...) » et produit en ce sens un rapport émanant du responsable sécurité en date du 9 juillet 2007 ;

Toutefois, M. [J] conteste la réalité de ce grief ; Il observe que celui-ci, bien que qualifié de « faute professionnelle importante » dans la lettre notifiant la rétrogradation, n'a fait l'objet d'aucun avertissement immédiat, ni même note de service et qu'aucune décrépitude ne lui a été reprochée ; Il soutient que le rapport, dont il n'a eu connaissance que dans le cadre de l'instance, a été établi pour les besoins de la cause ; Il observe qu'en tout état de cause, et contrairement aux allégations de l'employeur, le rapport ne fait aucunement état de « présence d'huile sur le sol, de fuel, d'eau, de graisse sur le sol » ;

De fait, et même si la société AUTO CHOC ne reprend pas devant la cour cette affirmation reproduite en page 10 des conclusions de 1ère instance, il convient d'admettre :

d'une part que ce « compte-rendu d'inspection » (pièce 13), dont il n'est produit au débat qu'une photocopie ne permettant pas d'en vérifier l'authenticité, composé de dix lignes en ce qui concerne la base 4, ne fait état au titre « du point le plus critique » que « d'une épaisse couche de poussière », « de toiles d'araignées »  et ajoute que «la rigole de collecte des eaux est complètement obturée par des saletés » ;

d'autre part que ni la lettre de licenciement, ni celle au demeurant notifiant la rétrogradation disciplinaire, ne fait état de ce rapport lequel, en toute hypothèse n'est pas revêtu du paraphe de M. [J], alors que l'inspection aurait eu lieu en sa présence ;

En second lieu, la lettre de licenciement énonce : « alors que vous étiez parti en congé la veille au soir, j'ai fait le mardi 24 juillet à 10 h en présence de Mme [N], l'inspection d'un lot de 8 voitures que vous aviez en sa compagnie préparé avant votre départ (') nous avons constaté que 7 véhicules étaient dans un état esthétique lamentable (') » ;

Toutefois, M. [J] conteste la réalité de ce grief en observant qu'il se trouvait en congés payés depuis la veille au soir et qu'il ne peut dès lors lui être reproché un fait survenu en son absence ; Il constate que curieusement, aucun avertissement ne lui a été adressé de ce chef, alors cependant que Mme [N] a reçu un avertissement au motif qu'elle avait livré huit voitures « très sales extérieurement » (pièce 31) ;

De fait, force est d'admettre que l'imputabilité de ce grief, constaté en l'absence autorisé du salarié, et ayant donné lieu à un avertissement notifié à Mme [N] par lettre du 1er août 2007, n'est également fondée sur aucune pièce opposable à M. [J] ;

En troisième lieu, l'employeur fait grief au salarié d'avoir laissé partir, après chargement d'un camion, deux véhicules sans bordereau, ce qui a été à l'origine d'un retard important dans la livraison, outre un risque financier, faute de transfert de responsabilité au transporteur ;

Toutefois, M. [J] fait valoir que la préparation des bons de livraison n'entre pas dans ses fonctions et que le salarié en charge de cette responsabilité a reçu un avertissement pour ces faits ;

De fait, la société AUTO CHOC ne conteste pas la pré-existence d'une faute commise par un autre salarié ; Par suite et même si elle soutient qu'il appartenait à M. [J] « de vérifier le contenu du chargement de ce camion et sa conformité avec les documents nécessaires au transport », force est d'admettre qu'elle ne justifie pas, au titre des griefs énoncés, d'une circonstance susceptible de fonder un licenciement sur une cause réelle et sérieuse ;

Le jugement déféré énonce : « en l'espèce, l'employeur fait état de nombreux griefs (') les motifs invoqués doivent être objectifs et matériellement vérifiables (') il est à remarquer que tant par ses conclusions (') que par l'absence de pièce pouvant étayer la réalité et le sérieux du licenciement, l'employeur est défaillant à démontrer, par la preuve, que le licenciement (') est fondé sur une cause avérée » ;

En conséquence, il suit de ce qui précède que c'est par une juste appréciation des faits de la cause, que les 1ers juges, après avoir rappelé que « les motifs invoqués doivent être objectifs et matériellement vérifiables », ont déclaré le licenciement disciplinaire de M. [J] non fondé sur une cause réelle et sérieuse ; par ailleurs, cette conclusion ayant été adoptée, au vu des pièces et conclusions déposées par les parties, en l'état de la carence de l'employeur de l'administration de la preuve, et après qu'il ait été rappelé que « le juge forme sa conviction au vu des éléments (..) qui viennent corroborer les motifs invoqués dans la lettre de licenciement » la société AUTO CHOC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont refusé de prendre en compte les pièces communiquées par l'employeur ;

Sur les demandes en paiement :

En ce qui concerne le licenciement sans cause réelle et sérieuse :

En application de l'article 1235-3 du code du travail : « Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, (...) le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9. » ;

Au cas d'espèce, le conseil de prud'hommes a alloué à M. [J] une somme de 17.000  euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

M. [J] fait valoir que cette indemnité ne correspond pas à la réalité de son préjudice alors qu'il totalisait six années d'ancienneté lors de la rupture de son contrat de travail et qu'il perçoit un salaire inférieur à celui dont il bénéficiait ;

Toutefois, les bulletins de salaire produits au dossiers démontrent qu'il perçoit désormais un salaire de base de 1.500 euros soit légèrement supérieur au salaire de base dont il bénéficiait hors primes et heures supplémentaires ;

Il convient dès lors, de limiter le montant alloué à la somme de 10.200 euros ;

En ce qui concerne l'emploi de procédés vexatoires :

Le conseil de prud'hommes en visant l'article L.1222-1 du code du travail qui énonce : « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi. », a alloué à M. [J] une indemnité de 3.000 euros en observant, tout en le déboutant de prétentions plus amples, « que le [l'employeur] a fait preuve, dans le cadre de l'organisation du licenciement de M. [J] dont la naissance est à la date de la première convocation à entretien préalable, soit le 3 septembre 2007, de méthodes qui ne relèvent pas de l'exécution de la relation contractuelle de bonne foi » ;

De fait, il ressort de l'examen des griefs ci-avant énoncés que M. [J], 1er adjoint chef des bases 1, 2, 3 et 4 (aux dires mêmes de l'employeur) relevant de la catégorie employés hautement qualifiés échelon 11, a fait l'objet d'une sanction disciplinaire particulièrement vexatoire puisque entraînant sa rétrogradation aux fonctions de préparateur sur parc, catégorie employés non qualifiés, échelon 3, et ce, au titre de griefs qu'il a lui-même considérés comme non susceptible de légitimer un licenciement pour faute ; or, et comme il vient d'être dit, ces griefs ne caractérisent également pas une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Il convient donc de confirmer le jugement déféré de ce chef, étant observé pour le surplus des prétentions que l'emploi de procédés vexatoires ne résulte pas des deux griefs énoncés par le salarié et tirés pour le premier de la communication de la procédure disciplinaire aux deux « responsables ayant constaté les manquements du salarié », outre le délégué syndical, et pour le second, de la mention erronée relative à la signature par le salarié du compte rendu de l'entretien ;

En ce qui concerne l'abus de droit et non respect de l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail :

M. [J] soutient que la société AUTO CHOC a commis un abus de droit d'une part en adressant régulièrement à ses salariés des commentaires ou réflexions idéologiques en raison desquels il n'a pu prendre son congé de paternité, d'autre part en exigeant des salariés leur présence non rémunéré à des réunions de travail ;

Or, il convient bien d'admettre qu'il est produit au dossier (pièce 38) une note dont l'authenticité n'est pas contestée au terme de laquelle les salariés sont « conviés à la réunion annuelle sur la sécurité (') / vendredi 16 novembre 2007 à 12 heures / durée prévisible : 1 heure, l'Orateur sera le Président (') / Le temps que vous passerez ne sera ni payé, ni récupéré. / Votre présence est fortement souhaitable. »

Dès, lors les attestations contraires versées par l'employeur ne peuvent qu'être écartées ;

Par ailleurs, si le bulletin de salaire du mois de décembre 2004 établit, comme le soutient l'employeur, que M. [J] a bénéficié du congé légal attribué au titre de la naissance d'un enfant, force est d'admettre en revanche que les notes de l'employeur, telles que produites au dossier visant d'une manière générale (pièces 12, 17, 19, 23 à stigmatiser et culpabiliser les salariés dans la mise en 'uvre des droits reconnus par la législation (35 h, congé de paternité), et susceptibles, plus particulièrement, d'avoir encouragé M. [J] à renoncer au congé paternité, justifie l'allocation de ce chef d'une somme de 2.000 euros ;

En ce qui concerne le travail dissimulé :

Au terme de L.324-10 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'époque des faits : « La mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué constitue, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord conclu en application du chapitre II du titre Ier du livre II du présent code, une dissimulation d'emploi salarié. » ; Par ailleurs et en application de l'article L.324-11-1 du même code : « le salarié auquel un employeur a eu recours en violation des dispositions de l'article L. 324-10 a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, à moins que l'application d'autres règles légales ou de stipulations conventionnelles ne conduise à une solution plus favorable. »

M. [J] soutient qu'il a reçu l'ordre de « dépointer » tous les jeudi après-midi ou en fin de mois alors qu'il était en poste ;

Le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de la demande formée de ce chef au motif qu'il était défaillant à démontrer avoir effectué des heures supplémentaires non payées ;

En cause d'appel, M. [J] ne produit aucun élément nouveau ; il en résulte, alors que les bulletins de salaire produits au dossier démontrent que le salarié effectuait de nombreuses heures supplémentaires, que le jugement ne peut qu'être confirmé ;

En ce qui concerne la prime de performance :

M. [J] expose en premier lieu qu'il lui a été alloué à compter du 1er janvier 2004, une prime de performance et de résultat égale à 10 % de son salaire mensuel de base (courrier 19 septembre 2003) mais que celle versée a été inférieure, à compter du 1er avril 2004, au montant due à concurrence de la somme totale de 290,98 euros ;

Toutefois, la société AUTO CHOC qui admet avoir commis une erreur expose avoir adressé un chèque correspondant au montant dû et de fait, M. [J] ne réclame plus paiement de cette somme mais seulement celle de 133,66 euros correspondant à la suppression de la dite prime pour le mois de septembre 2007 ;

La société AUTO CHOC fait valoir qu'au regard des manquements constatés au mois de septembre 2007, cette suppression était légitime ;

Toutefois, le licenciement a été déclaré sans cause réelle et sérieuse ;

En outre et en dépit des procédures disciplinaires engagées, l'employeur ne démontre, aucune baisse de « résultats et performance » pour le mois de septembre 2007 ; il convient en conséquence d'accueillir la demande formée de ce chef à concurrence de la somme de 133,66 euros ;

En ce qui concerne le non respect des minima conventionnels :

En application de l'article 1.16 de la convention collective nationale des services de l'automobile dans sa version applicable au litige : « pour vérifier si le salarié perçoit bien un salaire égal au minimum, il conviendra d'exclure seulement les majorations pour heures supplémentaires et travaux exceptionnels, les indemnités de déplacement professionnel visées à l'article 1.09 ter, les primes de formation-qualification visées à l'article 2.05, les primes d'assiduité, les primes d'habillage visées à l'article 1.09 a, les primes de panier, les libéralités et autres gratifications bénévoles, les sommes versées au titre de l'intéressement et de la participation, les indemnités ayant un caractère de remboursement de frais » ;

Il en résulte que les primes contractuelles sont seules prises en compte pour vérifier si la rémunération du salarié correspond bien au minimum prévu par sa convention collective.

M. [J] qui soutient que son salaire de base a été inférieur au minimum conventionnel, réclame de ce chef, paiement d'une somme de 2.898,71 euros outre celle de 289,88 euros au titre des congés payés y afférents  ;

La société AUTO CHOC fait valoir que la « prime différentielle accord réduction du temps de travail » et la « prime de performance et de résultats » qui ne sont pas expressément citées par l'article sus visé n'ont pas à être déduites ;

Toutefois, si l'employeur est fondé à prendre en compte la prime différentielle accord réduction du temps de travail qui est contractuelle, il ne l'est pas en revanche, s'agissant de la prime dite « aléatoire de performance et de résultat» laquelle, ne peut que relever du régime des libéralités en l'état des débats ;

Cependant, et compte tenu de la « prime différentielle accord réduction du temps de travail », le jugement déféré, en ce qu'il a débouté M. [J] de cette prétention, doit être confirmé ;

En ce qui concerne le paiement des astreintes et rappel de prime y afférent :

Le conseil de prud'hommes a débouté M. [J] de sa demande formée de ce chef au motif qu'il ressort des pièces du dossier qu'il était payé au titre des heures passées en rondes de fins de semaine au moyen d'une majoration de 200 % et qu'en dehors de ces visites, il n'était pas à la disposition de l'employeur ;

Devant la cour, M. [J] en justifie pas plus de sa prétention au regard notamment de l'attestation régulière en la forme émanant de M. [C] en charge de la même mission (pièce 33) ;

En ce qui concerne la qualification :

En application de l'article 3B01 de la convention collective applicable : « Tous les salariés qui mettent en 'uvre une ou plusieurs activités complexes et qui sont éventuellement chargés de superviser le travail d'autres salariés selon les critères et conditions du présent chapitre sont obligatoirement classés selon les dispositions ci-après, quels que soient la forme, la durée et l'objet de leur contrat de travail.. » ;

M. [J] soutient qu'en sa qualité de responsable des bases 1, 2 et 3 sises à [Localité 4] et [Localité 3], ayant autorité sur tous les personnels en fonction sur ces 3 bases, il aurait dû bénéficier de la qualification d'agent de maîtrise, au demeurant reconnu à différents salariés placés sous son autorité (M. [N] et Mme [F]) ;

La société AUTO CHOC fait valoir qu'il était normal que des salariés disposant d'une ancienneté supérieure à celle de M. [J] bénéficient d'une rémunération plus élevée ;

Ce faisant, l'employeur ne démontre pas que ces deux salariés n'étaient pas agents de maîtrise ; Or, M. [J] produit la liste électorale du personnel de laquelle il résulte que M. [N] et Mme [F] et M. [C] avaient bien la qualification d'agents de maîtrise, laquelle ne peut résulter que de l'ancienneté, outre un organigramme de la société daté de l'année 2005 établissant sa qualité de supérieur hiérarchique de ces trois salariés ;

Il convient en conséquence d'accueillir la demande en paiement à concurrence d'une somme de 3.000 euros ;

En ce qui concerne l'annulation de l'avertissement du 22 novembre 2006 :

M. [J] soutient que les véhicules, objets de dégâts ayant motivé le dit avertissement se situaient sur la base 1 laquelle ne relevait pas de sa responsabilité ;

L'employeur fait valoir qu'il résulte de l'attestation établie par Mme [P] que M. [J] était bien chef adjoint des bases 1, 2 et 4, ce qui au demeurant correspond bien aux mentions portées sur l'organigramme visé dans la cadre de la précédente demande ;

Il en résulte que M. [J] ne peut qu'être débouté de cette demande ;

En ce qui concerne les autres demandes :

M. [J] sera débouté de ses demandes formées, au terme du dispositif de ses conclusions, du chef du délai congé et du droit individuel à formation mais cependant ni explicitées, ni justifiées ;

Enfin, et au regard de la nature des indemnités allouées, il n'y a pas lieu d'accueillir la demande à fin de rectification sous astreinte des bulletins de salaire ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La cause réelle et sérieuse du licenciement n'ayant pas été retenue, les dépens seront supportés par la société AUTO CHOC ;

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile : « Comme il est dit au I de l'article 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; Ces dispositions font obstacle à ce que l'intimée qui n'est ni tenue aux dépens, ni partie perdante, soit condamnée à payer à l'appelant les sommes réclamées par lui au titre des frais irrépétibles ; En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la société AUTO CHOC la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'application de l'article 1235-4 du code du travail :

En application de l'article 1235-4 du code du travail : « Dans les cas prévus aux articles L1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. / Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées. »

Il convient en conséquence d'ordonner ce remboursement dans la limite de la somme de 10.000 euros ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse, et a condamné la société AUTO CHOC au paiement d'une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure vexatoire, et 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le réformant pour le surplus

Condamne la société AUTO CHOC à payer à [U] [J] les sommes de :

- 10.200 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2.000  euros à titre de dommages et intérêts pour abus de droit,

- 133,66 euros en remboursement de la prime de performance du mois de septembre 2007

- 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la qualification

Condamne la société AUTO CHOC à payer à [U] [J] la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ordonne le remboursement par la société AUTO CHOC des indemnités de chômage versées à [U] [J] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de la somme de 10.000 euros ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.

Condamne la société AUTO CHOC aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 10/19590
Date de la décision : 22/11/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°10/19590 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-22;10.19590 ?
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