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27/10/2011 | FRANCE | N°11/05201

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 27 octobre 2011, 11/05201


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT MIXTE

DU 27 OCTOBRE 2011

Expertise

N°2011/448













Rôle N° 11/05201







SA LE CREDIT FONCIER DE FRANCE





C/



[S] [R]

[H] [L] divorcée [R]





































Grosse délivrée

le :

à :ERMENEUX

COHEN






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Décisions déférées à la Cour :



Jugements du Tribunal de Grande Instance de NICE en date des 13 mars 2003 (n°03/340) et 28 Octobre 2008 (n° 07/713) enregistrés au répertoire général sous le n° 99/8107.





APPELANTE



S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 2]
...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT MIXTE

DU 27 OCTOBRE 2011

Expertise

N°2011/448

Rôle N° 11/05201

SA LE CREDIT FONCIER DE FRANCE

C/

[S] [R]

[H] [L] divorcée [R]

Grosse délivrée

le :

à :ERMENEUX

COHEN

Décisions déférées à la Cour :

Jugements du Tribunal de Grande Instance de NICE en date des 13 mars 2003 (n°03/340) et 28 Octobre 2008 (n° 07/713) enregistrés au répertoire général sous le n° 99/8107.

APPELANTE

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 2]

représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour

INTIMES

Monsieur [S] [R]

né le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 7], demeurant [Adresse 4]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, assisté de Me Laetitia GERMANETTO, avocat au barreau de NICE substituant Me Philippe SAMAK, avocat au barreau de NICE

Madame [H] [L] divorcée [R]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 6], demeurant [Adresse 5]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, assistée de Me Laetitia GERMANETTO, avocat au barreau de NICE substituant Me Philippe SAMAK, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 Septembre 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président Rapporteur,

et Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller- Rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président

Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller

Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2011.

Rédigé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président,

Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA COUR

En janvier 1985, les époux [S] [R] - [H] [L], actuellement divorcés (ci-après les consorts [R]), ont bénéficié, pour l'acquisition d'un bien immobilier, d'un financement de 500 000F se décomposant en un crédit par anticipation consenti par la Banque La Henin, remboursable en une seule fois, le 1er septembre 1999, et en un crédit différé consenti par la société Cogefimo. Le Crédit foncier de France (le Crédit foncier) se trouve aux droits des organismes prêteurs.

Le financement a donné lieu à l'émission d'une offre de prêt acceptée le 18 décembre 1984, réitérée par acte notarié du 3 janvier 1985.

Le TEG est mentionné pour 16,48% dans l'offre et 16,47% dans l'acte notarié.

A la demande des emprunteurs, le 'taux d'intérêt moyen' a été réduit par lettre du 11 mars 1987 à 10,35%. Le crédit par anticipation a de nouveau été réaménagé à la suite d'une offre du 2 mars 1992, acceptée le 10 mars suivant, pour être transformé en un crédit amortissable. Un remboursement anticipé est intervenu le 29 juin 1994.

Le 16 novembre 1999, les consorts [R], se prévalant du caractère erroné du TEG, ont assigné le Crédit foncier en déchéance du droit aux intérêts. Ils ont ensuite formé une demande additionnelle en nullité de la stipulation de l'intérêt de la convention de prêt.

Par jugement du 13 mars 2003, le tribunal de grande instance de Nice a écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action, a déclaré recevables les demandes des consorts [R] et a ordonné une expertise, confiée à M. [U] [I], aux fins de vérifier l'exactitude des TEG mentionnés sur l'offre de prêt, sur l'acte notarié et sur les actes de réaménagement.

Par jugement au fond du 28 octobre 2008, le tribunal a relevé que le TEG est erroné dans l'offre de prêt, dans l'acte notarié et dans l'acte de renégociation intervenu en 1992. Il a condamné le Crédit foncier à restituer aux consorts [R] la somme de 105 505,66€ avec intérêts au taux légal à compter du jugement. Une indemnité de 6000€ a été allouée aux consorts [R].

Le Crédit foncier est appelant de ces deux jugements.

Fixée à l'audience du 14 décembre 2010, l'affaire a été retirée du rôle à la demande conjointe des avoués sous le motif suivant : 'Pour répondre aux conclusions et pièces du CFF du 2 décembre 2010".

Elle a été remise au rôle le 18 mars 2011.

****

Vu les conclusions déposées le 9 novembre 2009 par les consorts [R] ;

Vu les conclusions déposées le 2 décembre 2010 par le Crédit foncier ;

Vu l'ordonnance de clôture du 7 décembre 2010 ;

Vu les conclusions déposées le 23 mars 2011 par le Crédit foncier et le 16 septembre 2011 par les consorts [R] ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les avoués ont été avisés par écrit (pièces 8 et 8 bis du dossier de la cour) de la fixation de la date de l'ordonnance de clôture au 16 novembre 2010, puis du report de cette date au 7 décembre suivant.

Les consorts [R], qui n'ont pas sollicité un report du prononcé de la clôture pour répliquer aux conclusions déposées le 2 décembre 2010 par le Crédit foncier, sont infondés à demander que ces écritures soient écartées des débats à raison d'une violation du principe de la contradiction, puisque la réplique qu'ils opposent aux éléments nouveaux soulevés par la partie adverse n'est formulée qu'en quelques paragraphes dans leurs conclusions du 16 septembre 2011(page 15), ce qui démontre qu'ils pouvaient répliquer dans le délai de deux jours francs qui leur était imparti entre le 2 et le 7 décembre 2010.

Les conclusions déposées le 23 mars 2011 par le Crédit foncier et le 16 septembre 2011 par les consorts [R], qui ne sont pas assorties d'une demande en révocation de la clôture, sont déclarées irrecevables comme étant postérieures au prononcé de cette mesure.

Sur la demande en nullité pour dol

Les consorts [R], s'ils reconnaissant que les omissions affectant la convention de prêt ne constituent pas en elles-mêmes des 'manoeuvres', font valoir que lors du réaménagement de la convention intervenu en mars 1987 la banque 'a menti' en se prévalant d'une opération avantageuse puisqu'elle leur permettait d'éviter 'des frais de toute nature' et ramenait le taux d'intérêt à 10,35%, alors qu'en réalité elle a prélevé des frais de 'renégociation qui sont de 1 783,82 par mois pendant 20 ans' et que le taux réel était de 16,592% 'bien loin des 10,35%'.

Ils demandent la nullité 'du contrat', sans autre précision.

Mais, en premier lieu, l'allégation de frais de renégociation de 1 783,82F par mois sur une durée de 20 ans manque en fait, dès lors qu'à la suite de la renégociation de 1987 des frais n'ont été prélevés que lors de la première échéance, pour un montant de 1 783,82F, et qu'ensuite les échéances ont été diminuées de 1 145,84€, en sorte que l'aménagement de la convention de prêt représentait un gain pour les consorts [R] de 60 091,54F( expertise pages 36,37 et 38).

En second lieu, les consorts [R] ne démontrent pas que le taux de 10,35%, annoncé comme étant un 'taux moyen' dans un courrier de la banque, était un élément déterminant de leur consentement à l'offre de réaménagement.

Sur la demande en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel

Il résulte de la combinaison des articles L 313-1 et L 313-2 du code de la consommation que le taux effectif global (TEG) doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt et que la détermination de ce taux doit prendre en compte les frais intervenus dans l'octroi du crédit, notamment les émoluments de l'officier ministériel qui reçoit l'acte de prêt et les constitutions de garantie.

Les consorts [R] font valoir que le TEG porté dans l'acte notarié de prêt pour 16,47% est erroné en raison de la minoration des émoluments de l'officier ministériel.

Ces frais, qui se sont élevés à 16 444,69F, ont été pris en compte dans le calcul du TEG pour 0,16% du montant du prêt, ce qui correspondrait, selon le Crédit foncier à la somme de 16 000F (page 14 de ses conclusions '...les frais étaient évalués à 0,16% de 500 000F soit 16 000F').

Mais, 0,16% de 500 000F ne représentent que la somme de 800F, et le montant des émoluments tarifés du notaire était déterminable de la part de prêteurs spécialisés dans le crédit immobilier.

Il s'ensuit que le TEG mentionné dans l'offre de prêt est nécessairement erroné, ainsi que l'expert l'a constaté en fixant son montant à 16,954% après redressement de diverses erreurs.

S'agissant d'un crédit consenti à des non-professionnels, la prescription de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel engagée par l'emprunteur à raison d'une erreur affectant le TEG court, de même que l'exception de nullité d'une telle stipulation contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d'exécution, à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur. Il en résulte que le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou, lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur.

En l'espèce, l'erreur portant sur l'évaluation, selon des règles complexes pour un non-professionnel, des émoluments du notaire ne résultait pas pour les emprunteurs d'un examen de la teneur de la convention.

Il s'ensuit que la prescription quinquennale de la demande en nullité de la stipulation de l'intérêt, qui n'a commencé à courir qu'à compter de la révélation de l'erreur intervenue en septembre 1999 à la suite de l'établissement par le Cabinet AFI d'un rapport d'audit financière sur les conditions du crédit, n'était pas acquise lorsque cette demande a été formée pour la première fois par conclusions déposées le 18 octobre 2001.

La demande en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel est, dès lors, recevable et elle doit être accueillie, en sorte que les prêteurs ne peuvent se prévaloir que d'intérêts calculés au taux légal.

Sur la demande en déchéance du droit aux intérêts

Les consorts [R] demandent, sur le fondement de l'article L 312-33 du code de la consommation, que soit prononcée la déchéance de tous les intérêts.

Bien qu'ils se prévalent de l'irrégularité de l'offre initiale de prêt et de l'absence d'offre préalable au réaménagement intervenu en mars 1987, leur demande ne porte, en vertu du paragraphe VII de leurs conclusions intitulé 'Demande des consorts [R]', que sur les modalités du réaménagement intervenu le 2 mars 1992. Ils invoquent, à la fois, l'absence d'offre préalable et le caractère erroné du TEG porté sur l'offre.

L'action en déchéance du droit aux intérêts prévue à l'article L 312-33 du code de la consommation est soumise, qu'elle soit formée par voie d'action ou d'exception, à la prescription décennale édictée par l'article L 110-4 du code de commerce dans sa rédaction applicable en la cause, antérieure à l'entrée en vigueur de la loi N° 2008-561 du 17 juin 2008.

La prescription, qui a couru à compter de la formation de la convention de réaménagement, n'était pas acquise au jour de la demande en déchéance formée par assignation du 16 novembre 1999.

Mais, en considération de la substitution de l'intérêt au taux légal à l'intérêt conventionnel résultant de la nullité de la stipulation de l'intérêt et du caractère facultatif de la déchéance, la cour estime qu'il n'y a pas lieu de déchoir la banque, fût-ce en partie, des intérêts au taux légal.

Sur le montant de la créance

L'expert a fixé la créance de restitution des consorts [R] à la somme de 70 419,26€, arrêtée à la date du remboursement anticipé (29 juin 1994), dans l'hypothèse d'une application du taux d'intérêt légal.

Le Crédit foncier conteste ce montant en faisant valoir :

- que certaines échéances ont été comptabilisées à tort ;

- que la date réelle des versements n'a pas été prise en compte ;

- que n'ont pas été retenus les 'bons montants aux bonnes dates'.

La cour n'étant pas en mesure de trancher ces contestations, sur lesquelles les consorts [R] ne s'expliquent pas et qui n'avaient pas été soumises à l'expert, ne peut qu'ordonner un complément d'expertise.

Il convient de dire que la nullité de l'obligation aux intérêts conventionnels n'a d'effet ni sur les frais de gestion, ni sur les cotisations d'assurance, ni sur les indemnités de remboursement anticipé, sauf à tenir compte s'il y a lieu d'une diminution de leur montant s'il est corrélé à la charge des intérêts.

Le complément d'expertise ne porte que sur le montant de la créance de restitution arrêtée au jour du remboursement anticipé, sans qu'il y ait lieu de calculer les intérêts postérieurs dont les modalités de calcul seront déterminées par la cour tant en ce qui concerne leur point de départ qu'au regard de la demande tendant à leur capitalisation.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Déclare irrecevables les conclusions déposées les 23 mars et 16 septembre 2011,

Rejette la demande tendant à écarter des débats les conclusions déposées le 2 décembre 2010 par le Crédit foncier de France,

Confirme le jugement du 13 mars 2003 en ce qu'il a déclaré recevables la demande en nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel et la demande en déchéance du droit aux intérêts au titre du réaménagement intervenu en mars 1992,

Rejette la demande en nullité de la convention de prêt,

Prononce la nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel de l'acte de prêt du 3 janvier 1985,

Dit que la nullité emporte, dès l'origine du prêt, substitution de l'intérêt au taux légal à l'intérêt appliqué, et qu'elle ne s'étend ni aux frais de dossiers ou de gestion, ni aux cotisations d'assurance, ni aux indemnités de remboursement anticipé, sauf à tenir compte s'il y a lieu de la diminution de leur montant s'il est corrélé à la charge des intérêts,

Rejette la demande tendant à ce soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts sur le fondement de l'article L 312-33 du code de la consommation,

Sursoit à statuer sur le montant de la créance de restitution de M. [S] [R] et Mme [H] [L],

Ordonne un complément d'expertise,

Désigne pour y procéder M. [U] [I], expert judiciaire inscrit sur la liste de la cour d'appel,

avec mission :

de recalculer la créance de restitution résultant de l'application des intérêts au taux légal en tenant compte, s'il y a lieu, des contestations opposées par le Crédit foncier de France, notamment quant à la prise en compte des sommes effectivement versées par les emprunteurs, et en tenant compte des modalités de la substitution d'intérêts telles qu'énoncées au dispositif du présent arrêt,

dit que l'expert n'a pas à calculer le montant des intérêts au taux légal appliqués à la créance de restitution arrêtée au jour du remboursement par anticipation,

Fixe à 2500€ la provision à valoir sur les honoraires de l'expert que le Crédit foncier de France devra consigner au greffe de la cour dans le mois du présent arrêt,

Fixe à 5 mois à compter de l'avis de consignation le délai imparti à l'expert pour déposer son rapport,

Renvoie l'affaire à l'audience du 26 juin 2012 à 8 heures 40, la clôture étant prononcée le 29 mai 2012.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 11/05201
Date de la décision : 27/10/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°11/05201 : Expertise


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-10-27;11.05201 ?
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