COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 13 OCTOBRE 2011
N°2011/
Rôle N° 09/10618
[V] [O]
C/
OFFICE NATIONAL DES FORETS
Grosse délivrée le :
à :
Me Claudie HUBERT, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
Me Yves-Henri CANOVAS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
Copie certifiée conforme délivrée le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 12 Mai 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/1112.
APPELANT
Monsieur [V] [O], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Claudie HUBERT, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
OFFICE NATIONAL DES FORETS, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Yves-Henri CANOVAS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise GAUDIN, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre
Madame Brigitte BERTI, Conseiller
Madame Françoise GAUDIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Octobre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Octobre 2011
Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES
L'Office national des forêts (O.N.F) a lancé une campagne de recrutement d'auxiliaires de protection de la forêt méditerranéenne (A.P.F.M) à compter du 30 avril 2004.
Monsieur [O] s'étant porté candidat, l'ANPE de [Localité 5] lui a annoncé le 5 mai 2004 que sa candidature avait été présélectionnée et Monsieur [O] a passé les tests de sélection.
Par courrier en date du 16 juin 2004, l'Office National des Forêts a indiqué à M. [O] que sa candidature avait été retenue sur le site de l'Equipe APFM de Cucuron et que son contrat de travail débuterait le 30 juin 2004.
Cet engagement n'ayant pas été suivi d'exécution, Monsieur [O] saisissait le Conseil de prud'hommes d'AIX en PROVENCE pour faire juger que le non-respect de la promesse d'embauche s'analysait en une rupture abusive et obtenir le versement de dommages et intérêts.
Par jugement du 12 mai 2009, l'Office National des Forêts était condamné à payer à Monsieur [O] une somme de 589 euros au titre de l'indemnité de préavis et celle de 900 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
que la créance indemnitaire allouée à l'intéressée résultait d'un manquement de l'employeur à son engagement contractuel intervenu antérieurement à l'ouverture d'une procédure collective et que la rupture de cet engagement s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Monsieur [O] a régulièrement formé appel de ladite décision et dans ses dernières conclusions soutient que :
-- on est en présence d'une promesse d'embauche,
- - la dite promesse d'embauche a été rompue abusivement par l'O.N.F et conformément à la jurisprudence de la cour de cassation, le salarié est fondé à solliciter des dommages et intérêts et même une indemnité de préavis.
-
Il demande en conséquence à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que le courrier du 16 juin 2004 constituait une promesse d'embauche,
de le réformer pour le surplus et de condamner l'O.N.F au paiement des sommes suivantes :
-- 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de la promesse d'embauche,
-- 1.154,20 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents de 115,42 euros,
-- 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'O.N.F conclut à l'infirmation du jugement en en toutes ses dispositions et au débouté des demandes de Monsieur [O], outre sa condamnation au paiement d'une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient que le courrier du 16 juin 2004 ne constitue qu'une offre d'emploi et non une promesse d'embauche, subsidiairement que le motif invoqué pour justifier sa rétractation était légitime, en application de l'article L.4121-1 du Code du Travail et que ladite promesse était nulle pour erreur sur la personne.
MOTIFS
Sur la nature du courrier en date du 16 juin 2004
Attendu que le courrier litigieux de l'O.N.F est libellé ainsi:
« La Commission administrative de validation, qui s'est réunie le mardi 15 juin 2004, à la Préfecture des Bouches du Rhône, a arrêté définitivement la liste des candidats recrutés par site d'activité.
Votre candidature a été retenue pour le site mentionné sur la liste jointe. (Equipe APFM de Cucuron).
(..) Votre contrat de travail débutera le mercredi 30 juin 2004. Aussi, vous voudrez bien vous présenter le mardi 29 juin 2004, à 15 heures, dans les locaux de l'Office National des Forêts en [Localité 3] (..) pour la signature de votre dossier d'embauche et un entretien collectif avec un membre de la direction de l'Agence.. »
Qu'en annexe dudit courrier, figurait la liste des candidats par site et sur le site de [Localité 4], le nom de Monsieur [O] avec la qualification: ouvrier.
Que dès lors, selon la jurisprudence de la Cour de Cassation, constitue une promesse d'embauche valant contrat de travail, l'écrit qui précise l'emploi proposé ( ouvrier au sein d'une équipe d'APFM) et la date d'entrée en fonctions (30 juin 2004).
Sur l'exception de nullité
Attendu que l'O.N.F invoque la nullité de ladite promesse pour erreur sur la personne de Monsieur [O], en application de l'article 1110 du Code civil.
Attendu que l'O.N.F fait valoir qu'au moment de la conclusion de celle-ci, il a commis une erreur sur le candidat, lui prêtant des qualités substantielles qu'il n'avait pas: moralité et absence de pulsions violentes et délictuelles.
Que cependant, l'ONF a reconnu dans ses écritures qu'ayant demandé un extrait du casier judiciaire n°3 de l'intéresse, et celui-ci étant vierge, l'Office pensait contracter avec une personne offrant toutes les garanties nécessaires.
Qu'il n'y a donc pas eu d'erreur concomitante à la promesse d'embauche.
Sur le bien fondé de la rupture
Attendu que par courrier du 22 juin 2004, l'O.N.F avisait Monsieur [O] qu'il ne pouvait maintenir sa proposition d'embauche en précisant « Nous avons été informés de différents agissements de votre part, dans le passé, caractérisés par des faits violents à l'encontre d'ouvriers de l'équipe APFM de Cucuron.
Vous comprendrez dans ces circonstances, que nous ne pouvons pas maintenir notre proposition d'embauche pour compléter l'équipe APFM de Cucuron... »
Que selon le jugement attaqué, la rupture de la promesse d'embauche a un motif légitime tiré de l'article L. 4121-1 du Code du travail.
Qu'en vertu dudit article, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.
Qu'il est établi par les pièces du dossier que Monsieur [O] a été condamné par la Tribunal Correctionnel le 9 mars 1995 , confirmé en appel, à 1 an de prison pour violences volontaires (blessures avec arme blanche) commises en 1992 sur la personne de Monsieur [T] [H], lequel a été embauché par l'O.N.F en 1999 et affecté comme ouvrier forestier dans l'équipe APFM de Cucuron depuis.
Que peu importe que ce dernier ait également été condamné dans la même décision pour violences réciproques, il s'évince de ce contexte que l'employeur ne pouvait mettre dans la même équipe de travail deux salariés qui avaient eu un tel différent sans les exposer à un risque certain.
Que l'employeur se doit de prendre des mesures, en l'espèce préventives, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Qu'il a eu conscience du danger auquel aurait été exposé un de ses salariés de l'équipe de [Localité 4] et a légitimement mis un terme à la proposition d'embauche.
Qu'il convient de dire, à l'instar du jugement déférée, que la rupture de la promesse d'embauche était dès lors justifiée et de débouter Monsieur [O] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour conséquences préjudiciables de celle-ci.
Que cependant un contrat de travail avait été formé entre les parties et que la circonstance que ledit contrat ait été rompu avant tout commencement d'exécution n'exclut pas que le salarié puisse prétendre au paiement d'une indemnité de préavis et des congés payés y afférents.
Que dès à lors, c'est à juste titre que le jugement attaqué a fait droit à cette demande sur le principe.
Que la rémunération prévue étant égale au SMIC, le montant de l'indemnité de préavis doit être égale à un mois de salaire, soit la somme de 1.154,42 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis et aux congés payés y afférents, de 115,42 euros;
Qu'il y a lieu à réformation sur ce point.
Qu'aucune considération d'équité ne commande l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
Attendu qu'il paraît équitable que chacune des parties supporte ses frais exposés en appel non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré, sauf sur le montant de l'indemnité compensatrice de préavis et son incidence congés payés;
Statuant à nouveau de ces seuls chefs,
Condamne l'Office National des Forêts à payer à Monsieur [O] [V] la somme de 1.154,42 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et celle de 115,42 euros au titre de congés payés y afférents.
Rejette toute autre demande.
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens en cause d'appel.
Le GreffierLe Président