COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 11 OCTOBRE 2011
N°2011/780
Rôle N° 11/04636
[I] [D] [C]
C/
[X] [P]
CGEA AGS DE [Localité 4]
Grosse délivrée le :
à :
Me Michel LABORDE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Me Roland GRAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Me Josette PIQUET, avocat au barreau de TOULON
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS en date du 02 Février 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/190.
APPELANT
Maître [I] [D] [C] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SMTTP, demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Michel LABORDE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMÉ
Monsieur [X] [P], demeurant [Adresse 3]
comparant en personne, assisté de Me Roland GRAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
CGEA AGS DE [Localité 4], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Josette PIQUET, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 23 Juin 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise JACQUEMIN, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Jacques MALLET, Président
Madame Françoise JACQUEMIN, Conseiller
Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Lydie BERENGUIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Octobre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Octobre 2011
Signé par Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller, pour le Président empêché, et Madame Lydie BERENGUIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur [X] [P] a fait citer la SARL MÉDITERRANÉENNE DE TERRASSEMENT (SMTTP), exposant avoir été embauché, en qualité de conducteur de travaux, par contrat verbal, le 18 janvier 2006.
La SARL MÉDITERRANÉENNE DE TERRASSEMENT a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire en date du 9 mars 2010.
Il a été licencié par courrier RAR du 19 mars 2010 pour raison économique par Maître [C], mandataire liquidateur de la société.
Le Conseil de Prud'hommes de FRÉJUS, par jugement du 2 février 2011, lui a reconnu la qualité de salarié et fixé sa créance aux sommes de :
4.463,16 € à titre de rappel de salaire de janvier, février et mars 2010
4.671,41 € au titre de l'indemnité de préavis
4.088,78 € au titre des congés payés
2.840,12 € au titre de l'irrégularité de procédure
2.840,12 € pour non proposition à la CRP.
Maître [C], ès qualités, a relevé appel de cette décision demandant à la Cour de constater que le requérant ne démontre pas l'existence d'un lien de subordination essentiel à l'existence d'un contrat de travail, de le débouter de ses demandes et le condamner au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
L'UNEDIC AGS, mis en cause, a conclu au débouté du salarié en ses demandes et subsidiairement à la limitation de sa garantie dans le respect des conditions fixées à l' article L. 3253-17 du code du travail et par le décret du 24 juillet 2003 modifiant l'article D. 3253-5 du code du travail.
Dans ses écritures soutenues sur l'audience, Monsieur [P] s'oppose aux moyens soulevés, sollicite la confirmation du jugement, et 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
MOTIFS
La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.
Au soutien de son appel, la société SMTTP, représentée par Maître [C] fait valoir:
Que le 20 novembre 2004, le requérant a constitué cette société dans le capital de laquelle il disposait de 250 parts et était désigné en qualité de gérant statutaire
Que le 15 avril 2005, il a cédé à Mme [B], déjà associée, 200 des parts qu'il détenait et démissionné de ses fonctions de gérant
Qu'il n'a jamais cessé d'administrer la société
Que Mme [B], a indiqué qu'elle s'opposait au paiement des salaires à son profit au motif qu'il était gérant de fait
Qu'il rédigeait lui même ses bulletins de salaire
Qu'il a procuration sur les comptes et rédige les chèques
Que le 24 mai 2005, il s'est porté caution personnelle de la société au profit du crédit agricole
Qu'il a contracté le 3 février 2007 un contrat de crédit bail auprès de CNH CAPITAL EUROPE pour l'achat d'une pelle mécanique et s'est porté caution personnelle du contrat
Qu'il a signé un contrat de sous traitance pour le compte de la société avec l'entreprise VALERIAN
Qu'il a acquis le 3 mars 2007, un véhicule Renault Kangoo pour le compte de la société
Qu'il a ouvert le 2 janvier 2007 un compte professionnel auprès de la société DISTEL COM pour le compte de la société
Que le 14 octobre 2005, il a contracté assurance pour la société auprès de CNH CAPITAL EUROPE et rempli le questionnaire médical d'assurance le concernant personnellement alors qu'il s'agit d'un contrat au profit de la société
Que le 27 septembre 2007, il a contracté pour le lot concernant le terrassement auprès d'une SCI pour le compte de la société
Que le 1er février 2007, il a signé un contrat de maintenance d'un véhicule utilitaire pour le compte de la société
Que le 1er août 2007, il acquiert un camion pour le compte de la société
Qu'il a géré un contentieux contre la société E2M pour le compte de la société aux termes d'une lettre de son avocat du 20 juin 2008 et d'un dire d'expert du 18 juin 2008
Le requérant soutient:
Qu'il justifie de bulletins de salaire et d'une prestation de travail
Que soit les documents censés l'engager personnellement financièrement au titre de la société ne sont pas datés et peuvent avoir été établis avant le 15 avril 2005, lorsqu'il était gérant de la société, soit la signature apposée ne correspond pas à la sienne
Que la SARL SMTTP ne justifie pas qu'il travaillait avec son propre matériel
Qu'il n'avait qu'une compétence technique dans le suivi et la conduite des chantiers et travaillait sur le terrain sous les directives de Mme [B]
Attendu qu'en l'absence de contrat de travail, la charge de la preuve de la réalité d'une relation salariale revient à celui qui s'en prévaut
Que, nonobstant la qualification que les parties ont entendu donner à leur relation, qu'au delà de l'apparence résultant de l'émission de bulletins de paye et de la fourniture d'une prestation de travail, il convient d'examiner la réalité de cette relation.
Que l'autorité et le contrôle de l'employeur constituent l'élément décisif du lien de subordination caractérisant le contrat de travail
Que certes le requérant verse aux débats des attestations de salariés, fournisseurs, ou clients de la société qui viennent témoigner de ce qu'ils avaient affaire à Mme [B] pour tout ce qui concernait surtout la gestion financière de la société (règlement de factures, impayés, retards de paiement) pour démontrer que celle-ci était la seule gérante de la société
Que cependant ces attestations sont utilement contredites par celles, produites par l' appelant, de témoins qui indiquent 'avoir en 2007, loué des locaux à la société, ...n'avoir jamais eu à faire avec Madame [B] puisque Monsieur [P] a toujours prétendu être le patron de la société SMTTP' (M.[T]) 'avoir été embauché par M.[P] le 14 janvier 2009, avoir reçu directives et ordres de travail de celui ci uniquement, et avoir été payé par lui, argent emprunté à sa mère selon ses dires, pour payer les salaires de janvier (M.[O]) ' (mon)salaire de janvier 2010 (a été)complété par monsieur [P]' (M.[F]) 'avoir été démarché par Monsieur [P] pour la réalisation de travaux, je n'ai entendu Mme [B] qu'au téléphone à titre de comptable '(M.[R])
Que le Directeur du Crédit Agricole atteste que Monsieur [P] avait procuration avec madame [B] et Melle [P] sur le compte de la société ouvert le 9 mars 2010
Que le 24 mai 2005, alors qu'il avait démissionné de ses fonctions de gérant depuis le 15 avril, il s'est porté caution personnelle solidaire avec Mme [B] de la société au profit du Crédit Agricole
Qu'une demande d'ouverture de compte professionnel à DISTELCOM le 2 janvier 2007 est ainsi renseignée 'nom du contact Mr [P], nom du signataire Mr [P] fonction gérante associée'
Que le contrat de crédit bail pour l'achat d'une pelle mécanique à chenille en date du 29 janvier 2007 est signé du 'co gérant [P] [X]'
Qu'il n'est justifié par le requérant d'aucune directive écrite qui aurait pu lui être donnée par la gérante en titre Mme [B] qui s'est opposée au paiement des salaires à son profit au motif qu'il était gérant de fait
Attendu qu'il résulte des pièces aux débats que Monsieur [P] a signé de nombreux contrats engageant la société, ouvert un compte à son nom et géré un contentieux la concernant, qu'il a signé des demandes de congé du personnel, payé partie de leur salaire sur ses deniers personnels et se présentait en qualité de responsable de la société
Que le requérant ne justifiant pas de la qualité de salarié, il y a lieu de réformer le jugement entrepris et de le débouter de l'intégralité de ses demandes
Aucun élément tiré de l'équité ne justifie en la cause l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Monsieur [P], qui succombe, sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe,
REÇOIT l'appel
INFIRME le jugement entrepris
CONSTATE que Monsieur [P] ne justifie pas de l'existence d'un lien de subordination essentiel à l'existence d'un contrat de travail
Le DÉBOUTE de ses demandes en rappel de salaire, préavis, congés payés, article 700 du code de procédure civile
LE CONDAMNE à restituer les sommes avancées par le CGEA/AGS
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
LE CONDAMNE aux dépens de première instance et d'appel recouvrés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
LE GREFFIER.LE CONSEILLER.
POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ