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27/09/2011 | FRANCE | N°11/01872

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre a, 27 septembre 2011, 11/01872


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 27 SEPTEMBRE 2011

B.R.

N° 2011/













Rôle N° 11/01872







SA CLL PHARMA





C/



Société ANAPHARM INC





















Grosse délivrée

le :

à :Me JAUFFRES

la SCP LIBERAS - BUVAT - MICHOTEY

















Décision déférée

à la Cour :



Ordonnance d'exequatur rendue par le Président du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 03 Janvier 2011





APPELANTE



SA CLL PHARMA, poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, dont le siège social est [Adresse 2]



représentée par Me Jean Marie JAUFFRES, avoué à la C...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 27 SEPTEMBRE 2011

B.R.

N° 2011/

Rôle N° 11/01872

SA CLL PHARMA

C/

Société ANAPHARM INC

Grosse délivrée

le :

à :Me JAUFFRES

la SCP LIBERAS - BUVAT - MICHOTEY

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance d'exequatur rendue par le Président du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 03 Janvier 2011

APPELANTE

SA CLL PHARMA, poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par Me Jean Marie JAUFFRES, avoué à la Cour,

assistée par Me Axel CHOQUET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Société ANAPHARM INC, poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, dont le siège social est [Adresse 1] CANADA

représentée par la SCP LIBERAS BUVAT MICHOTEY, avoués à la Cour,

assistée par Me Denis BORGIA, avocat au barreau de BORDEAUX

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 27 Juin 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.VEYRE, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Gérard LAMBREY, Président

Monsieur Jean VEYRE, Conseiller

Monsieur Bernard ROUSSEAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Septembre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Septembre 2011,

Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'ordonnance du 3 janvier 2011 par laquelle le Président du Tribunal de Grande Instance de Nice a ordonné que soit exécutée, selon ses formes et teneur, la sentence arbitrale numéro 15'831/EC/ND, rendue le 8 octobre 2010 devant la Cour internationale d'arbitrage, Chambre de commerce international entre d'une part ANAPHARM Inc. et d'autre part la S.A. CLL PHARMA,

Vu la déclaration d'appel formée le 1er février 2011 par la S.A. CLL PHARMA,

Vu les conclusions régulièrement déposées le 15 juin 2011 par ANAPHARM Inc.,

Vu les conclusions régulièrement déposées le 22 juin 2011 par la S.A. CLL PHARMA,

MOTIFS DE LA DECISION :

Le 13 décembre 2007, ANAPHARM Inc. et la S.A. CLL PHARMA ont conclu un contrat de recherche clinique, bio-analytique et statistique, dans lequel il était prévu que les prestations fournies par ANAPHARM Inc. devaient faire l'objet de factures présentées par ANAPHARM Europe S.L. à la S.A. CLL PHARMA qui devait les régler à celle-ci, étant précisé que ces modalités de paiement avaient été convenues dans la mesure où elles permettaient à la S.A. CLL PHARMA, en réglant une entité ayant son siège social sur le territoire de l'Union européenne, de bénéficier d'un crédit d'impôt de recherche. Le tribunal arbitral saisi concluait que ANAPHARM Inc., en tant que créancier solidaire avec sa filiale, ANAPHARM Europe S.L. était fondée en sa demande de paiement de la somme de 243'010 €.

Pour solliciter l'infirmation de l'ordonnance d'exequatur, la S.A. CLL PHARMA fait valoir que la sentence arbitrale a été rendue en violation du principe de la contradiction, en expliquant que les articles 1197 et 1198 du Code civil ont fondé la sentence alors que ces articles, ni même le principe de la solidarité active entre la ANAPHARM Inc et ARNAPHARM Europe n'avait été soumis au débat entre les parties.

Il y a lieu d'observer en premier lieu que ANAPHARM Inc, dans son mémoire en date du 30 octobre 2009 exposant son argumentation devant la Cour internationale d'arbitrage, rappelle en page 7, la thèse développée par sa directrice des services juridiques, Me [B] [O] au cours de l'audience de fond des 5 et 6 octobre 2009, selon laquelle ANAPHARM Inc et ANAPHARM Europe S.L. 'son co-créancières puisque les sommes payables aux termes de l'entente ne peuvent être dissociées des services que l'on avait convenus de rendre»

Il résulte de cette argumentation que non seulement les deux sociétés seraient co-titulaires des sommes payables selon les termes de la convention, mais que cette créance n'est pas divisible puisque les sommes réclamées rémunèrent les recherches effectuées.

Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la S.A. CLL PHARMA, le tribunal arbitral ne s'est nullement fondé sur les dispositions des articles 1197 et 1198 du Code civil. En effet ce n'est que par un raisonnement propre, en se basant sur ses constatations que le tribunal arbitral a estimé devoir reconnaître la qualité de créancier solidaire de ANAPHARM Inc. et de sa filiale espagnole ANAPHARM Europe S.L..

Le détail de son argumentation le démontre clairement. Après avoir conclu que la S.A. CLL PHARMA était débitrice pour le montant des factures correspondantes au service d'ANAPHARM Inc., le tribunal arbitral relevait que cette conclusion n'équivalait pas forcément à la conclusion que la S.A. CLL PHARMA devait ces montant à ANAPHARM Inc.. Le tribunal poursuivait sa démonstration de la façon suivante :

« L'Entente, telle que conclue par Anapharm (Inc) et la S.A. CLL PHARMA le 13 décembre 2007 prévoyait qu'Anapharm Europe servirait seulement comme agent de la facturation à la CLL PHARMA des services de sa société mère, Anapharm (Inc), le demandeur. Comme noté ci-dessus, la raison pour laquelle les parties ont voulu donner à Anapharm Europe ce rôle dans l'émission et le règlement des factures était de permettre à la CLL PHARMA de justifier une demande de crédits fiscaux auprès du Trésor Public français en montrant que l'étude de bioéquivalence avait un lien suffisant avec une société de la Communauté Européenne. Pourtant, un mois après la signature de l'Entente, les deux parties originales ont adopté un amendement en date du 15 janvier 2008 qui a ajouté Anapharm Europe comme partie à l'Entente de plein droit. L'objet de cet amendement était d'assurer que la structure de l'Entente et le rôle d'Anapharm Europe là-dedans était bien de nature à permettre à CLL PHARMA de justifier sa demande de crédits fiscaux. Anapharm Europe, devenue ainsi partie à l'Entente, gardait son rôle d'agent de facturation et de règlement, mais l'amendement a également précisé que CLL PHARMA devait fournir paiement des factures à Anapharm Europe, et non plus à Anapharm (Inc). V. Amendement, page 3. Puisque, à l'évidence, les parties originales à l'Entente ont voulu donner à leurs nouveau cocontractant, Anapharm Europe les droits et les obligations dans l'exécution de l'Entente qui justifieraient CLL PHARMA dans sa demande éventuelle de crédits fiscaux auprès du Trésor Public, l'arbitre doit reconnaître la nature réelle et substantive de ces dispositions. Anapharm Europe avait l'obligation d'émettre les factures correspondant au travail de sa société mère et, le cas échéant, le droit d'en exiger le règlement. CLL PHARMA avait non seulement l'obligation de régler ces factures entre les mains de la société espagnole mais aussi le droit de faire un tel règlement, car c'est cela qui devait justifier sa demande éventuelle de crédit fiscal. Ainsi, il faut conclure qu'Anapharm en tant que partie à l'Entente et à sa clause compromissoire aurait des droits de recouvrement contre la CLL PHARMA qu'elle pourrait ou qu'elle aurait pu faire valoir en arbitrage. Mais ce n'est pas la fin de l'histoire.

48. Comme nous avons montré ci-dessus, à réception des résultats de l'Etude, CLL PHARMA a déclaré, à tort, c'est-à-dire sans justification juridique, son refus de régler les factures correspondant à ces travaux. Ce refus injustifié a mis fin au droit de CLL PHARMA d'exiger que le règlement soit uniquement en faveur de la société espagnole qui avait émis les factures. Anapharm (Inc) le Demandeur dans cet arbitrage, qui avait fait le travail correspondant aux factures, conservait ses droits de propriété dans les fonds qui devaient se régler au titre des factures. Par conséquent elle conservait un intérêt économique suffisant pour justifier la poursuite juridique qui a résulté en l'arbitrage actuel. L'intérêt économique de la société espagnole, le droit de recevoir les fonds assortis de l'obligation de les transmettre à la société mère, est plus que formel mais n'est pas de nature à justifier une conclusion qu'Anapharm Europe, à elle seule, soit le créancier unique au cas où CLL PHARMA refuse de respecter la structure de facturation qu'elle avait voulu mettre en place. À l'appréciation des termes de l'Entente, lorsque CLL PHARMA a déclaré son refus de payer les factures, Anapharm Inc. a retrouvé ses droits de chercher une voie alternative pour assurer la compensation de son travail. À partir de ce moment Anapharm Inc. et Anapharm Europe sont créanciers solidaires, ayant chacun le droit d'exiger le paiement des montants correspondants aux factures. V. Code Civil arts. 1997, 1198. Dans ce contrat entre commerçants le caractère unitaire et solidaire de la créance est établi avec une clarté suffisante par les termes de l'Entente elle-même, qui démontre que CLL PHARMA est redevable d'une seule dette, celle correspondant à la fois aux factures émises par l'Intervenant, Anapharm Europe, et aux services rendus par le Demandeur, Anapharm Inc.. Le Protocole d'Etude, contrat distinct mais incorporé à l'Entente, établit qu'Anapharm Inc. porte toute la responsabilité des recherches qui seront compensées à la charge de CLL PHARMA. Les factures elles-mêmes font état de l'unité de cette obligation, car elles portent l'en tête d'Anapharm Europe mais se décrivent dans leur texte comme correspondant à l'étude faite par Anapharm Inc. («Anapharm study »). V. CLL Pharma pièce de 8. Il n'est donc pas question de chercher à diviser cette dette entre une fraction qui serait redevable au demandeur et une autre fraction qui serait redevable à l'intervenant. Les Anapharm ayant formulé leur demande conjointement et ayant « laissé à l'arbitre de déterminer si la condamnation serait prononcée au bénéfice des deux entités corporatives ou subsidiairement en faveur de l'une d'entre elles seulement, » l'arbitre conclut que les deux Anapharm sont créanciers solidaires d'une seule dette et CLL PHARMA peut faire éteindre cette dette en payant l'une ou l'autre. ».

Ainsi c'est en analysant les rapports contractuels des parties en se basant sur les dispositions qu'elles avaient stipulées, que l'arbitre en a conclu que les sociétés ANAPHARM Inc. et ANAPHARM Europe S.L. étaient créanciers solidaires de la S.A. CLL PHARMA. Il y a lieu de constater que les articles 1197 et 1998 du Code civil ne servent nullement de fondement à la décision de l'arbitre, mais leur mention figurant dans le texte de la sentence, ne sert que de référence comparative donnée à titre indicatif, sans qu'il en soit tiré aucune conséquence.

Dès lors il convient de constater qu'en citant les articles 1197 et 1198 du Code civil, et en retenant la solidarité active des deux créanciers, le tribunal arbitral n'a nullement violé le principe du contradictoire, étant rappelé que selon mention figurant dans la sentence arbitrale, les deux sociétés ANAPHARM ont formulé leur demande conjointement et 'laissé à l'arbitre de déterminer si la condamnation serait prononcée au bénéfice des deux entités corporatives ou subsidiairement en faveur de l'une d'entre elles seulement », l'arbitre se devant en tout état de cause, de préciser si les deux entités auxquelles il reconnaissait la qualité de créancier, étaient créanciers solidaires ou conjoints. Il apparaît ainsi que tous les éléments fondant la décision de l'arbitre ont pu être débattus contradictoirement.

En conséquence les critiques formulées par la société la S.A. CLL PHARMA à l'égard de la sentence arbitrale sont infondées, et c'est à juste titre que le Président du Tribunal de Grande Instance de Nice a ordonné son exécution.

Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de l'intimée de les frais irrépétibles qu'elle a exposés, il lui sera alloué la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, étant observé que l'appelante sollicitait le double de ce montant au titre de l'indemnisation de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et contradictoirement

Reçoit l'appel,

Confirme l'ordonnance déférée,

Y ajoutant,

Condamne la S.A. CLL PHARMA à payer à la ANAPHARM Inc la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les entiers dépens sont à la charge de la S.A. CLL PHARMA avec distraction au profit de la S.C.P. Liberas-Buvat-Michotey, avoués associés.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre a
Numéro d'arrêt : 11/01872
Date de la décision : 27/09/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°11/01872 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-27;11.01872 ?
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