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08/09/2011 | FRANCE | N°10/14657

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre c, 08 septembre 2011, 10/14657


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE



1ère Chambre C



ARRÊT

DU 08 SEPTEMBRE 2011



N° 2011/713

M.A. V.













Rôle N° 10/14657







[F] [K]



C/



[U] [N] [R]



[V] [O] [B]



MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES







Grosse délivrée

le :

à :







SCP TOUBOUL



SCP COHEN









Décision déférée à la Cour :





Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 25 Juin 2010 enregistrée au répertoire général sous le N° 10/00120.







APPELANT :



Monsieur [F] [K]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 10],

demeurant [Adresse 5]



représenté par la SCP DE...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1ère Chambre C

ARRÊT

DU 08 SEPTEMBRE 2011

N° 2011/713

M.A. V.

Rôle N° 10/14657

[F] [K]

C/

[U] [N] [R]

[V] [O] [B]

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

Grosse délivrée

le :

à :

SCP TOUBOUL

SCP COHEN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 25 Juin 2010 enregistrée au répertoire général sous le N° 10/00120.

APPELANT :

Monsieur [F] [K]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 10],

demeurant [Adresse 5]

représenté par la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués à la Cour,

plaidant par Maître Maryline MOSCONI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Maître [U] [N] [R],

demeurant [Adresse 9]

Maître [V] [O] [B]

né le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 11],

demeurant [Adresse 4]

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES,

dont le siège est [Adresse 3]

[Localité 6]

représentés par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour,

plaidant par Maître Philippe MAGNAN, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Juin 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Marie-Claire FALCONE, Président

Madame Anne VIDAL, Conseiller

Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2011.

ARRÊT:

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2011,

Signé par Madame Marie-Claire FALCONE, Président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*-*-*-*-*-*

RAPPEL DE LA PROCEDURE

Vu l'ordonnance de référé rendue contradictoirement le 25 juin 2010 par le président du tribunal de grande instance de Digne dans l'instance opposant M. [F] [K] à Mme [U] [N] [R], M. [V] [B] et la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ;

Vu la déclaration d'appel déposée par M. [F] [K] le 3 août 2010 ;

Vu les conclusions déposées par Mme [U] [N] [R], M. [V] [B] et la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES le 7 mars 2011 ;

Vu les conclusions déposées par M. [F] [K] le 10 juin 2011 ;

SUR CE :

Sur la genèse du litige

Le 29 janvier 2005, M. [W], en qualité de vendeur et M. [F] [K], promoteur indépendant, en qualité d'acquéreur, ont signé en l'étude de Maître [U] [N] [R], notaire, un avant-contrat portant sur la vente d'un ensemble immobilier sis sur la commune d'[Localité 7], lieudit [Adresse 8], pour un prix de 290 000 euros. Aux termes de cet acte, plusieurs conditions suspensives étaient prévues devant profiter tant au vendeur qu'à l'acquéreur :

- obtention d'une note d'urbanisme ne révélant pas de servitude administrative,

- purge de tous les droits de préemption publics ou privés,

- état hypothécaire ne révélant pas l'existence d'inscription pour un montant supérieur au prix de vente.

Il était encore précisé que la signature de la vente sera réalisée par acte authentique à recevoir par Maître [U] [N] [R] au plus tard le 20 juin 2005.

Par un acte séparé en date du même jour, M. [W] autorisait M. [F] [K] à procéder à toute demande de permis de construire, démolition et de façon générale, à toute démarche administrative sur le bien en cause.

M. [F] [K], qui souhaitait entreprendre sur cet emplacement un programme de construction d'un immeuble à usage d'habitation, de débit de boissons, de restauration et de remise en forme, a signé le 22 février 2005 un contrat avec un architecte, pour la réalisation de ce programme et il est établi que le 6 février 2006, une demande de permis de construire a été déposée en ce sens.

Entre temps, trois avenants à l'avant-contrat de vente ont successivement été signés par les parties le 6 juillet 2005, le 4 décembre 2005 et le 15 janvier 2006, dans le but de retarder la date de la signature de l'acte authentique et de réajuster le prix, alors fixé à la somme de

310 000 euros H.T, la vente étant prévue au 31 janvier suivant.

Postérieurement à la signature de ce troisième avenant, soit le 11 avril 2006, il a été porté à la connaissance de Maître [V] [B], successeur de Mme [U] [N] [R], par Mme [E], propriétaire d'une parcelle voisine, qu'elle était bénéficiaire, aux termes d'un acte de vente reçu par Maître [N], notaire, le 24 octobre 1936, d'une servitude non altus tollendi sur le fonds, objet de la vente, interdisant l'édification d'un immeuble de plus d'un étage sur une largeur de dix mètres en bordure de la ligne de séparation des deux parcelles, ladite servitude n'ayant nullement été mentionnée ni dans l'acte du 29 janvier 2005, ni dans ses trois avenants.

En l'état de la révélation de cette servitude qui remettait en cause son projet, M. [F] [K] a poursuivi des pourparlers avec le vendeur qui n'ont pu aboutir et le 7 juillet 2006, les parties ont signé un procès-verbal de difficultés par lequel il était constaté la non réalisation de la condition suspensive relative à l'absence de servitude et en conséquence, l'abandon de la vente.

Il est constant que M. [V] [B] a procédé, à la demande de M. [F] [K], à une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, restée à ce jour sans effet.

Corrélativement, par acte en date du 3 mai 2010, M. [F] [K] a fait assigner Mme [U] [N] [R] et M. [V] [B] , ainsi que leur assureur, devant le juge des référés aux fins qu'ils soient condamné in solidum à lui payer une provision d'un montant de 200 000 euros à valoir sur la réparation du préjudice directement causé par la faute des deux premiers ainsi qu'à produire sous astreinte copie de la déclaration de sinistre et du contrat d'assurance de groupe des notaires.

Par ordonnance en date du 25 juin 2010, le premier juge a débouté M. [F] [K] de l'ensemble de ses demandes, sauf à ordonner la production par la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES du contrat d'assurance de groupe, en retenant que la preuve du lien de causalité entre la faute invoquée et le préjudice allégué n'était pas établie de façon incontestable.

M. [F] [K] a interjeté appel de cette décision dont il sollicite l'infirmation en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de provision à hauteur de la somme de

200 000 euros et de production de la déclaration de sinistre. Il fait valoir que les deux notaires, en omettant de retranscrire dans le compromis de vente en date du 29 janvier 2005, la servitude grevant le fonds résultant d'un acte du mutation de 1936 et reprise dans un acte de 1963, alors même que ces deux actes étaient conservés en dépôt dans les minutes de leur office notarial, et en sollicitant à plusieurs reprises un état hypothécaire sans vérifier celui-ci, ont commis une faute évidente directement à l'origine du préjudice financier par lui subi alors qu'il faisait l'acquisition du bien en cause pour réaliser une opération de promotion immobilière dont le montage était déjà terminé au jour de la révélation de la servitude. Contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, il soutient qu'il existe un rapport de cause à effet entre l'inefficacité de l'acte reçu par les notaires et la perte de toutes les sommes engagées en vain au titre du montage de cette opération dont il justifie à hauteur de la somme de 170 568,58 euros, à laquelle il convient d'ajouter le gain manqué sur ces sommes investies en pure perte, évalué à 35 000 euros à ce jour.

Il ajoute que la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES en sa qualité d'assureur a fait preuve d'une résistance abusive en employant des moyens fallacieux et dilatoires pour instruire le dossier et en s'abstenant de formuler la moindre réponse à son offre transactionnelle. C'est dans ce contexte qu'il sollicite la communication de la déclaration de sinistre effectuée par M. [V] [B] qui doit nécessairement préciser les conditions de la non-révélation de la servitude litigieuse.

Mme [U] [N] [R], M. [V] [B] et la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES concluent à la confirmation de l'ordonnance déférée au motif que si la faute du notaire n'est effectivement pas contestable, le lien causal entre celle-ci et le préjudice allégué par M. [F] [K], résultant des frais qu'il a pu engager, n'est nullement établi. Ils objectent par ailleurs qu'en sa qualité de promoteur, il se devait de connaître l'existence de la servitude régulièrement publiée à la Conservation des hypothèques et font observer qu'en tout état de cause, celle-ci n'a pas empêché l'exécution d'un autre projet par un tiers qui s'est porté acquéreur du bien au même prix.

Ils s'opposent à la demande de production de la déclaration de sinistre, document interne qui ne saurait apporter aucun élément intéressant au litige dans la mesure où la faute n'est pas contestée, et indiquent avoir produit en cours de procédure la police d'assurance de groupe tel qu'ordonné par le premier juge.

Sur la demande de provision

Le juge des référés peut, dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

Il est certain que commet une faute engageant sa responsabilité professionnelle le notaire qui chargé de la rédaction d'un acte contenant promesse synallagmatique de vente omet de mentionner l'existence d'une servitude grevant le bien, objet de la vente, alors que cette servitude avait fait l'objet d'une publicité foncière et qui plus est, que l'acte l'instituant était conservé en minute dans son office notarial et ce, nonobstant la qualité ou les compétences particulières de l'une ou l'autre des parties.

Cependant pour que cette responsabilité professionnelle puisse être retenue, il est encore nécessaire d'établir l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité directe entre la faute commise par le notaire et ce préjudice.

Au titre de son préjudice, M. [F] [K] fait valoir que faisant l'acquisition de ce bien dans le cadre de l'exercice de sa profession de promoteur, il a rapidement engagé des frais pour mener à bien l'opération envisagée qui consistait en la démolition du chalet existant et la construction d'un ensemble immobilier tant à la fois à usage d'habitation qu'à usage commercial et qui, à terme, se sont révélés inutiles.

Il sera cependant observé à titre liminaire que M. [F] [K] n'avait nullement fait inclure dans l'avant-contrat une condition suspensive relative à l'obtention d'un permis de construire correspondant au projet qu'il comptait réaliser et qu'il a donc entrepris toutes les démarches dont il sollicite l'indemnisation à ses risques et périls, avant la signature de l'acte définitif.

En tout état de cause, il lui appartient de démontrer que la révélation de la servitude non altus tollendi grevant le fonds rendait impossible la réalisation de son projet dans les conditions envisagées et l'a contraint à son abandon.

Force est de constater qu'il ne précise nullement en quoi la servitude qui autorisait néanmoins la construction d'un bâtiment R + 1 en limite du terrain modifiait l'économie de son projet au point que celui-ci n'aurait plus été réalisable, voire rentable.

D'ailleurs, il ressort de la chronologie des faits telle qu'elle résulte des documents versés aux débats que sa révélation n'a pas mis immédiatement fin aux relations entre les parties qui ont poursuivi des pourparlers, la signature d'un quatrième avenant ayant même été envisagée avec une diminution du prix de vente.

Enfin, il est constant que très rapidement après l'établissement du procès-verbal de difficultés en date du 7 juillet 2006, le bien en cause a fait l'objet d'une vente, pour un prix quasi identique, à un tiers qui a pu obtenir un permis de construire pour la réalisation d'un bâtiment de 1 790 m2 de surface hors 'uvre nette.

En l'état, il ressort qu'il existe une contestation sérieuse sur le fait que l'existence de la servitude, révélée avant la signature de l'acte de vente, a pu constituer un élèment déterminant rendant impossible la poursuite de son projet immobilier par M. [F] [K] et en conséquence, la perte des fonds engagés à ce titre.

C'est donc à juste titre que le premier juge a débouté M. [F] [K] de sa demande de provision.

Sur la demande en production de la déclaration de sinistre

Dans la mesure où il n'existe aucune contestation sur la garantie due par la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES en sa qualité d'assureur de la garantie professionnelle des notaires et sur la faute commise par ceux-ci, ce document n'apparaît pas nécessaire aux débats.

En conséquence, l'ordonnance sera confirmée en toutes ses dispositions.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [F] [K] qui succombe supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et en matière de référé,

En la forme,

Reçoit M. [F] [K] en son appel,

Au fond,

Confirme l'ordonnance du 25 juin 2010 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [F] [K] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre c
Numéro d'arrêt : 10/14657
Date de la décision : 08/09/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1C, arrêt n°10/14657 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-08;10.14657 ?
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