COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 08 SEPTEMBRE 2011
N° 2011/ 324
Rôle N° 09/05809
[N] [P]
C/
SA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR (BPCA)
Grosse délivrée
le :
à :GIACOMETTI
ST FERREOL
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 22 Janvier 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 07/1576.
APPELANT
Monsieur [N] [P]
né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 4] (09), demeurant [Adresse 2]
représenté par la SCP GIACOMETTI DESOMBRE, avoués à la Cour
INTIMEE
SA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 3]
représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, assistée de Me Valérie SADOUSTY, avocat au barreau de NICE substituant Me Danièle VOLETTI, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président
Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller
Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2011
Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES
Le 12 Avril 2006, Mr [P] [N] s'est porté caution solidaire de tous les engagements de la Sarl Nooky Distribution, envers la Banque Populaire Côte d'Azur, BPCA, à hauteur de la somme de 32 400 €.
La Sarl Nooky Distribution a été placée en redressement judiciaire le 21 Septembre 2006 puis en liquidation judiciaire, le 15 Décembre 2006.
La BPCA a déclaré sa créance au titre du solde débiteur du compte de la société ouvert en ses livres, a mis en demeure la caution de payer, puis l'a assignée devant le Tribunal de Grande Instance de Nice.
Par jugement en date du 22 Janvier 2009, le tribunal a condamné Mr [P] au paiement de la somme de 32 400 € avec intérêts légaux à compter du 15 Février 2007, date de la mise en demeure de payer, a débouté Mr [P] de sa demande de délais de paiement, l'a condamné en outre au paiement de la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.
Selon déclaration du 26 Mars 2009, Mr [P] a relevé appel de cette décision à l'encontre de la BPCA.
Vu les conclusions déposées par l'appelant, le 25 Mai 2011 ;
Vu les conclusions déposées par l'intimée, le 30 Mai 2011 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 7 Juin 2011 ;
MOTIFS
Sur la créance de la BPCA envers Mr [P] :
Attendu que la banque justifie du calcul de sa créance arrêtée au jour de la mise en demeure de payer, le 13 février 2007, à la somme de 32 400 € ;
Attendu que le montant de cette créance sur la Sarl Nooky Distribution n'est pas contesté ;
Sur la disproportion de l'engagement de caution de Mr [P] et le défaut de mise en garde de la BPCA à son égard
Attendu que l'appelant ne se fonde pas sur les dispositions de l'article L 341-4 du Code de la Consommation ;
Attendu que le banquier est tenu d'une obligation de mise en garde dont il lui appartient de justifier qu'il s'en est acquitté ;
Attendu qu'il n'est délié de cette obligation que s'il démontre que la caution était une caution avertie ou l'absence de tout risque ;
Attendu que Mr [P] a signé son engagement de caution le 12 Avril 2006, alors qu'il était cogérant de la Sarl Nooky Distribution depuis le 1er Juillet 2005 ;
Attendu qu'il a démissionné de ces fonctions le 15 Avril 2006 ;
Attendu qu'il était âgé de 23 ans lors de son engagement de caution ;
Attendu que sa seule qualité de gérant pendant 9 mois, afin de substituer la cogérante en congé de maternité, ne caractérise toutefois pas le caractère averti de la caution, eu égard aux circonstances visées ci-dessus ;
Attendu qu'au jour de son engagement Mr [P] justifie qu'il percevait un salaire de 882,77 € ;
Attendu qu'il n'est pas établi qu'il était propriétaire de biens immobiliers ou qu'il bénéficiait d'autres revenus ;
Attendu que la fiche de renseignements versée aux débats par la BPCA faisant état de ses revenus et de sa qualité d'usufruitier d'un appartement sis à [Adresse 3] d'une valeur de 300 000 € est datée du 18 Octobre 2005, et il n'est pas démontré que cette fiche ait été remplie au moment de l'engagement de caution du 12 Avril 2006 ;
Attendu qu'en outre, il apparaît de l'attestation notariale de Maître [M], versée aux débats, que cet appartement a été vendu à la mère de Mr [P], qui en est l'usufruitière, en 1999, et à son fils mineur [N] ;
Attendu que l'engagement de Mr [P], à hauteur de 32 400 € était manifestement disproportionné à ses ressources ;
Attendu que la BPCA aurait du le mettre en garde sur les risques d'endettement suite à son engagement disproportionné, risques certains au moment de l'engagement, et qui se sont révélés ultérieurement ;
Attendu que le non respect par la banque de son obligation de mise en garde a fait perdre à Mr [P] une chance de ne pas s'être engagé en qualité de caution et donc de ne pas être poursuivie suite à la défaillance du débiteur principal ;
Attendu que le préjudice découlant de cette perte de chance n'est qu'à la mesure de la chance perdue, sans qu'il puisse être équivalent à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ;
Attendu qu'en considération des faits de la cause, ce préjudice subi doit être fixé à la somme de 6 000 €, somme réclamée à titre de dommages et intérêts par l'appelant ;
Attendu que le jugement doit être confirmé en ce que le tribunal a condamné Mr [P] au paiement de la somme de 32 400 € outre les intérêts au taux légal, l'indemnité pour frais irrépétibles et les dépens ;
Attendu que cependant les intérêts au taux légal sont dus à compter du 13 Février 2007, et non comme indiqué par erreur dans le jugement, du 15 Février 2007 ;
Attendu que le jugement doit être infirmé pour le surplus, le tribunal ayant jugé que l'engagement de caution n'était pas disproportionné ;
Attendu qu'en appel, l'équité ne commande pas spécialement de faire application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant contradictoirement et publiquement,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions non contraires à celles du présent arrêt,
Infirme pour le surplus et statuant à nouveau,
Condamne Mr [P] au paiement des intérêts au taux légal sur la somme de 32 400 € à compter du 13 février 2007,
Condamne la BPCA à verser à Mr [P] la somme de 6 000 € de dommages et intérêts au titre de la perte de chance,
Ordonne la compensation entre les deux sommes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamne l'appelant aux dépens distraits au profit de la SCP de St Ferréol Touboul.
Le GreffierLe Président