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28/07/2011 | FRANCE | N°09/10892

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 28 juillet 2011, 09/10892


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 28 JUILLET 2011



N° 2011/



JMC/FP-D









Rôle N° 09/10892





[B] [S]





C/



SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE

















































Grosse délivrée le :



à :



Me Robin EVRARD, a

vocat au barreau de NICE



Me Jan-Jack SEBAG, avocat au barreau de PARIS





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NICE en date du 13 Mai 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 07/749.







APPELANT



Monsieur [B] [S], demeurant Chez Mme [V] [F] - [Adresse 3]



représenté par Me ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 28 JUILLET 2011

N° 2011/

JMC/FP-D

Rôle N° 09/10892

[B] [S]

C/

SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE

Grosse délivrée le :

à :

Me Robin EVRARD, avocat au barreau de NICE

Me Jan-Jack SEBAG, avocat au barreau de PARIS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NICE en date du 13 Mai 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 07/749.

APPELANT

Monsieur [B] [S], demeurant Chez Mme [V] [F] - [Adresse 3]

représenté par Me Robin EVRARD, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jan-Jack SEBAG, avocat au barreau de PARIS

[Adresse 2]

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 28 Mars 2011 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Monsieur Philippe MARCOVICI, Vice-Président placé

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Monique LE CHATELIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2011 prorogé au 28 juin 2011 puis au 28 juillet 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 juillet 2011.

Signé par Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[B] [S] a été embauché le 22 mai 2005 par la Société CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE en qualité de CAISSIER/ COFFRIER M.A.S, coefficient 115, niveau 2, échelon MASS.

La convention collective applicable est celle des Casinos.

Il a quitté l'entreprise le 31 juillet 2007.

Comparant sa situation salariale à celle de [E] [Y], embauchée le 1er juillet 2005, qui, bien que se trouvant dans la même situation que lui, percevait une rémunération notablement plus élevée, il a, le 29 mai 2007, saisi le conseil de prud'hommes de NICE d'une demande tendant à la condamnation de son employeur, d'une part, au paiement, pour la période passée prise en considération, d'une somme égale à la différence entre son salaire et le salaire de comparaison, d'autre part, à faire porter le montant de son salaire au montant du salaire de comparaison et, en cours d'instance, d'une demande de réparation fondée sur des man'uvres de harcèlement faisant suite à l'instance engagée.

Les parties n'ayant pu se concilier et les conseillers prud'homaux se départager sur ces demandes, auxquelles la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE s'est opposée, le conseil de prud'hommes précité, par un jugement de départage rendu le 13 mai 2009, a débouté [B] [S] de l'intégralité de ses prétentions, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, condamné [B] [S] aux dépens.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 9 juin 2009, reçue au greffe de cette cour le 10 juin suivant, [B] [S], auquel ce jugement a été notifié le 3 juin 2009, en a relevé appel.

Aux termes de ses conclusions, déposées et reprises oralement à l'audience par son conseil, il fait essentiellement valoir que, au regard du principe consacré « A travail égal, salaire égal » en application duquel l'employeur est tenu d'assurer l'égalité des rémunérations entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique, la situation en faveur de [E] [Y] ne se justifie pas, l'emploi occupé, le coefficient, le niveau, l'échelon et le nombre d'heures effectuées étant exactement identiques, seule l'ancienneté, d'ailleurs moindre pour [E] [Y] étant différente, l'employeur, sur lequel pèse la charge de cette preuve, ne rapportant pas la preuve d'éléments objectifs justifiant la différence, l'argument tiré des conditions de recrutement dans l'urgence de [E] [Y] étant inopérant.

Par suite il demande à la cour de :

Vu l'article 23 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948,

Vu les articles L 3221-2, L1152-1 et 4 du Code du Travail,

Vu l'article 1315 du Code Civil,

Vu la jurisprudence,

La recevoir en son appel et l'en déclarer bien fondé ;

Réformer le Jugement entrepris;

Constater que la Société CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE pratique la discrimination salariale en rémunérant différemment des salariés de même coefficient et affectés à la même tâche;

Déclarer que la Société CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE lui a causé un préjudice;

Condamner la Société CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE à lui payer la somme de 11 090,00€ à titre de dommages-intérêts, sur le fondement du principe 'A travail égal salaire égal';

Condamner la Société CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE à lui verser la somme de 1 500,00€ au titre de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par ses écritures, déposées et reprises oralement à l'audience par son conseil, la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE fait essentiellement valoir que l'apparente discrimination positive dont [E] [Y] a bénéficié jusqu'à son départ ensuite de sa démission le 15 juillet 2007 résulte des circonstances particulières de son embauche et donc d'éléments objectifs qui ont justifiés son sort avantageux tenant au fait que, confrontée à la nécessité de disposer de personnel suffisant pour ouvrir elle a dû, pour la convaincre de s'embaucher, accepter les conditions particulières de rémunération qu'elle exigeait et qui dans tous les cas ne pouvait être inférieures à celles dont elle bénéficiait déjà dans son emploi en cours au casino de HYERES, ces raisons objectives et vérifiables étant pleinement de nature à justifier la différence de rémunération entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale, l'argument nouveau tiré de ce que dans son emploi précédent la demanderesse bénéficiait d'une rémunération plus importante ne pouvant prospérer dès lors que, pour accéder à un emploi sur NICE elle avait librement accepté le salaire qui lui était offert et qu'elle ne pouvait revenir sur son consentement.

Déniant les prétendues intimidations et menaces la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE demande à la cour de :

Confirmer le Jugement dont appel ;

Débouter [B] [S] de toutes ses demandes ;

La condamner à lui payer la somme de 500€ au titre de l'article 700 du NCPC et aux entiers dépens.

SUR CE :

Attendu que l'appel, interjeté dans les formes et le délai de la loi, est recevable ;

Attendu que l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ; Que ne méconnaît pas le principe 'à travail égal, salaire égal', dont s'inspire les articles L 2261-22 (anciennement L. 133-5 4°), L 2271-1 8° (anciennement L. 136-2 8°) et L. 3221-2 (anciennement L 140-2 alinéa 1) du Code du travail, l'employeur qui justifie par des raisons objectives et matériellement vérifiables la différence de rémunération entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale ; Qu'il appartient à l'employeur de démontrer que les différences de rémunération reposent sur des considérations objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ;

Attendu que, en l'occurrence, la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE ne discute pas que [B] [S] et [E] [Y], embauchées toutes deux pour exercer des fonctions de Caissier Coffrier machines à sous, niveau II, indice 115 de la grille de la convention collective des casinos, ont la même qualification, la même formation, la même ancienneté et exercent le même travail, la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE, qui indique que, à la date de la demande, il y avait 10 salariés sur un effectif de 141 qui faisaient partie du service de caisse machines à sous et que « la totalité des salariés de ce service répondaient aux mêmes caractéristiques de rémunération que [B] [S] à l'exception de Madame [Y] », dont le salaire était supérieur (1 795,02€), justifiant cette différence de rémunération exclusivement par les circonstances particulières de l'embauche de cette dernière salariée, laquelle travaillait au Casino d'HYERES pour une rémunération mensuelle de 1 700€, dans la mesure où elle s'était trouvée en difficulté pour compléter son effectif lorsqu'elle a été autorisée à commencer son activité, en mai 2005, et que, confrontée à la nécessité de disposer d'un personnel suffisant pour ouvrir elle a dû, pour convaincre cette salariée de s'embaucher, accepter les conditions particulières de rémunération qu'elle exigeait et qui ne pouvaient dans tous les cas pas être inférieures à celles dont elle bénéficiait déjà dans son emploi en cours au Casino d'Hyères, l'intéressée, qui avait annoncé une réorientation professionnelle ayant ensuite de celle-ci démissionné, sa démission prenant effet au 15 juillet 2007 ;

Que force est de constater que la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE ne produit pas le moindre document permettant à la cour, laquelle ne saurait se satisfaire de ses seules assertions, de vérifier concrètement que, de première part, elle a été effectivement contrainte de recruter dans l'urgence afin de pouvoir ouvrir après avoir obtenu une autorisation d'exploitation en mai 2005, de deuxième part, elle s'est trouvée dans l'obligation, pour ce faire, de satisfaire aux exigences salariales de [E] [Y] et ce faisant, fixé le salaire mensuel brut de celle-ci à la somme de 1 795,02€ alors que celui de [B] [S], conforme au salaire prévu par les avenants à la convention collective, s'élevait à la même époque à 1 324,12€, la cour observant au surplus que [E] [Y] a été recrutée non pas en mai 2005, comme [B] [S], mais en juillet 2005 et, de dernière part, qu'il existait ne serait-ce qu'au niveau local, une pénurie d'employés de machine à sous ou encore une quelconque tension sur la main d''uvre de ce secteur d'activité, la mettant à la merci des exigences du salarié ; Qu'il apparaît donc, la différence de salaire n'étant pas objectivement justifiée, que c'est à tort que la demande de [B] [S] tendant au rétablissement de l'égalité entre son salaire et celui de [E] [Y] a été rejetée ;

Que pour la période concernée, qui va du 1er juillet 2005 au 31 juillet 2007, [B] [S] est en droit de prétendre, le fait que [E] [Y] a démissionné le 15 juillet 2007 étant indifférent, d'une part, non pas à des dommages-intérêts mais à des rappels de salaires selon le détail suivant, les salaires de [B] [S] ayant subi des augmentations en avril 2006 et en janvier 2007, en fonction des avenants à la convention collective :

-du 1er juillet 2005 au 31 mars 2006 : (1 795,02€ - 1 324,92€) x 9 mois : 4 230,90€ bruts ;

-du 1er avril 2006 au 31 décembre 2006 : (1 795,02€ ' 1 351,42€) x 9 mois : 3 992,40€ bruts ;

-du 1er janvier 2007 au 31 juillet 2007 : (1 795,02€ - 1 378,45€) x 7 mois : 2915,99€ bruts,

soit au total à la somme en brut de 11 139,29€ brut, supérieure à celle qui est sollicitée; Que, par réformation du jugement, il y a lieu de condamner la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE au paiement de la somme sollicitée;

Que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'appelante ;

Que la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE qui succombe principalement sera condamnée aux entiers dépens ; Que par suite de cette succombance elle ne peut prétendre au bénéfice de ces dernières dispositions.

PAR CES MOTIFS :

Déclare l'appel recevable.

Réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE à payer à [B] [S], à titre de rappels de salaires, en brut, au titre de la période allant du 1er juillet 2005 au 31 juillet 2007 la somme de 11 090€.

Condamne la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE à payer à [B] [S], au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1 000€.

Condamne la SA CASINO DU PALAIS DE LA MEDITERRANEE aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Déboute les parties de leurs demandes, fins et conclusions autres, plus amples ou contraires.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 09/10892
Date de la décision : 28/07/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-07-28;09.10892 ?
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