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30/06/2011 | FRANCE | N°10/00635

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 30 juin 2011, 10/00635


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2011



N°2011/















Rôle N° 10/00635







[J] [F]





C/



SAS DERICHEBOURG PROPRETE

























Grosse délivrée le :



à :



Me Sylvain JACQUES, avocat au barreau de GRASSE



Me Grégoire LUGAGNE-DELPON, avocat au barreau de MARSEILLE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 11 Juillet 2008, enregistré au répertoire général sous le n° 07/783.





APPELANTE



Madame [J] [F], demeurant [Adresse 1]



comparant en personne, assistée de Me Grégoire LUGAGNE-D...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2011

N°2011/

Rôle N° 10/00635

[J] [F]

C/

SAS DERICHEBOURG PROPRETE

Grosse délivrée le :

à :

Me Sylvain JACQUES, avocat au barreau de GRASSE

Me Grégoire LUGAGNE-DELPON, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 11 Juillet 2008, enregistré au répertoire général sous le n° 07/783.

APPELANTE

Madame [J] [F], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assistée de Me Grégoire LUGAGNE-DELPON, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS DERICHEBOURG PROPRETE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Sylvain JACQUES, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 04 Mai 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte BERTI, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Alain BLANC, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Brigitte BERTI, Conseiller

Madame Françoise GAUDIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011

Signé par Madame Brigitte BERTI, Conseiller et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [F] a été employée par la société ONET en qualité d'ouvrière nettoyeuse à compter du 28 septembre 1987 suivant contrat de travail à durée indéterminée puis de chef d'équipe, contrat de travail transféré à la société DERICHEBOURG PROPRETE. Elle a été licenciée le 5 septembre 2007 pour une cause réelle et sérieuse.

Suivant jugement rendu le 11 juillet 2008 le Conseil de Prud'hommes de MARTIGUES a :

Dit le licenciement de Mme [F] sans cause réelle et sérieuse

Condamné la société DERICHEBOURG PROPRETE à payer à Mme [F] les sommes de :

- 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail

- 15.400 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1.200 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Débouté les parties pour le surplus et autres demandes

Ordonné le remboursement par la société DERICHEBOURG PROPRETE des indemnités de chômage payées à Mme [F] à compter de son licenciement dans la limite de six mois

Mme [F] a relevé appel de cette décision par acte du 1er août 2008 dont la régularité n'est pas contestée.

L'affaire a fait l'objet d'un arrêt de radiation le 23 septembre 2009 et a été de nouveau inscrite au rôle de ladite Cour à la requête de Mme [F] en date du 7 janvier 2010.

Vu les conclusions de Mme [F] développées oralement à l'audience par lesquelles il est demandé à la Cour de :

« Dire et juger que la société DERICHEBOURG n'a pas saisi la commission de conciliation visée par l'article 6 de l'accord du 1er juillet 1994 contrairement à ses affirmations,

Dire et juger que ce mensonge est à l'origine d'une perte de chance pour Madame [F] d'être transféré au sein de la société VEOLIA,

Condamner à ce titre la société DERICHEBOURG à payer à Madame [F] la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts,

Dire et juger que la décision de licencier Madame [F] était prise avant même la tenue de l'entretien préalable du 30 août 2007.

Dire et juger que la demande de transfert du contrat de travail de Madame [F] sur le site de [Localité 6] constitue une modification essentielle de son contrat de travail,

Constater que le refus opposé par Madame [F] est légitime,

En conséquence,

Dire et juger que le licenciement de Madame [F] est sans cause réelle et sérieuse et confirmer en ce sens la décision de première instance.

Condamner la société SAS DERICHEBOURG PROPRETE au paiement de 48.000,00 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L122-14-4 du Code du Travail.

Dire et juger que l'employeur a violé son obligation de fournir du travail.

Dire et juger que Madame [F] a subi de ce fait un préjudice moral et un préjudice professionnel.

En conséquence,

Condamner la SAS DERICHEBOURG PROPRETE :

- au paiement de 30.000,00 € de dommages et intérêt pour préjudice moral;

- au paiement de 12.000,00 € de dommages et intérêt pour préjudice et professionnel.

Condamner enfin la SAS DERICHEBOURG PROPRETE au versement de 3000,00 € en application de l'article 700 du NCPC »

Vu les conclusions de la société DERICHEBOURG PROPRETE développées oralement à l'audience par lesquelles il est demandé à la Cour de :

« CONSTATER que la mobilité est inhérente aux métiers de la branche d'activité de la Propreté,

CONSTATER que Mme [F] a refusé d'accepter un simple changement temporaire de ses conditions de travail,

PAR CONSEQUENT,

INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Martigues,

DIRE le licenciement pour cause et réelle et sérieuse fondé

DEBOUTER Mme [F] de ses demandes

CONDAMNER Mme [F] à verser à la société DERICHEBOURG PROPRETE la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du CPC »

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes de dommages et intérêts :

Mme [F] était affectée sur le site d'EUROCOPTER à [Localité 5] ;

Le 30 septembre 2006, la société ENCI L'ETINCELLE (DERICHEBOURG PROPRETE) a perdu le marché EUROCOPTER au profit de la société RENOSOL/VEOLIA ;

Cette dernière société a refusé le transfert du contrat de travail de l'intéressée compte tenu de la qualification d'agent de maîtrise MP3 de celle-ci et ce, en application des dispositions de l'annexe 7 de la convention collective applicable ;

Mme [F] soutient que la société DERICHEBOURG PROPRETE a prétendu avoir saisi la commission d'arbitrage des entreprises de propreté de cette difficulté et qu'en conséquence, elle-même s'est abstenue de le faire ;

Mme [F] ajoute qu'elle a appris le 7 novembre 2007 que ladite commission n'avait jamais été saisie ;

Mme [F] estime qu'elle a ainsi été privée d'une chance d'être transférée au sein d'un groupe d'importance mondial, la société VEOLIA, en raison du mensonge de son employeur ;

Dans un courrier adressé le 19 décembre 2007 à Mme [F], l'inspectrice du travail relate que lors de l'enquête menée le 18 septembre 2006, la représentante de la société DERICHEBOURG PROPRETE lui a indiqué que la commission d'arbitrage susvisée avait été saisie « mais elle ne me l'a pas confirmé par écrit. » ;

L'inspectrice du travail ajoute « En outre, il ressortait de cet entretien que la position développée à votre égard par l'entreprise entrante sur le marché, la société RENOSOL-VEOLIA ' à savoir que votre qualification d'agent de maîtrise MP3 ne vous faisait pas entrer dans le champ d'application de l'annexe 7 ' n'était en fait pas contestée par votre employeur. » ;

Par courrier en date du 7 novembre 2007, la commission précitée a confirmé à Mme [F] n'avoir pas été saisie, indiquant « Cependant il est possible que les conditions de votre transfert n'étaient pas remplies, ce qui a pu être confirmé par le service juridique. » ;

Au vu de ces éléments d'information, étant précisé que le caractère probant du témoignage de Mme [E] est affecté par le fait qu'il y manque une page, qui révèlent la position de la société DERICHEBOURG PROPRETE quant à l'opportunité de la démarche, l'argument de Mme [F] selon lequel son employeur aurait clairement exprimé une décision arrêtée de saisir du cas de celle-ci la commission de conciliation en cause n'est nullement avéré ;

Dès lors, la perte de chance telle qu'alléguée ne saurait être mise à charge de la société DERICHEBOURG PROPRETE ;

Le 15 novembre 2006, Mme [F] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement pour motif économique ;

La société DERICHEBOURG PROPRETE a renoncé à la procédure de licenciement ;

Mme [F] a été rémunérée durant neuf mois sans travailler, la société DERICHEBOURG PROPRETE précisant à cet égard ne pas disposer alors d'un chantier permettant l'affectation de l'intéressée compte tenu de son temps de travail ainsi que de sa qualification mais se trouver dans une situation évolutive, dans l'attente d'une réorganisation du groupe ;

Mme [F] s'estime bien fondée à réclamer 30.000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral outre 12.000 € pour préjudice professionnel faisant valoir que son employeur a manqué à une de ses obligations essentielles en ne lui donnant aucun travail ;

Elle ajoute que la société DERICHEBOURG PROPRETE avait envisagé des mesures de reclassement dès octobre 2006 qui ne lui ont jamais été proposées ;

Toutefois, il ressort du procès-verbal du comité d'entreprise du 31 octobre 2006, au cours duquel a été évoquée la question du licenciement éventuel de l'intéressée pour motif économique, que les recherches de reclassement se sont révélées vaines à cette date ;

Et, aucune faute n'est caractérisée à l'encontre de la société DERICHEBOURG PROPRETE au regard de la non fourniture de travail durant la période considérée ;

Doit en découler le débouté de Mme [F] et l'infirmation du jugement entrepris ;

Sur le licenciement :

En application des dispositions de l'article L 1235-1 du Code du Travail, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, au vu des éléments fournis par les parties ;

En l'espèce, la lettre de rupture du 5 septembre 2007 est ainsi libellée :

« Par conséquent, nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse en raison des griefs ci-dessous exposés :

- Le courrier que nous vous avons adressé en date du 1er Août 2007 stipulait votre affectation le Lundi 13 Août 2007 à 08H00 sur le site de la [Adresse 3]. Cette affectation constituait une modification des conditions de travail à laquelle vous étiez tenues de satisfaire. Votre absence sur votre nouveau lieu d'affectation a entraîné de graves perturbations pour l'entreprise ainsi qu'une importante désorganisation au sein de ce chantier.

Le licenciement prend donc effet immédiatement à la date de première présentation de cette lettre.

Vous percevrez vos indemnités conventionnelles de licenciement ainsi que le paiement de la période de préavis de deux mois que nous vous dispensons d'effectuer. »

Mme [F] soutient que la décision de la licencier avait été prise avant même l'entretien préalable, le directeur des relations humaines lui ayant demandé de restituer le véhicule de service ainsi que la carte d'essence mis à sa disposition, comme le révèlent, selon elle, l'attestation délivrée à l'issue dudit entretien confirmant cette restitution et le remboursement de ses frais de déplacement pour regagner son domicile ;

La société DERICHEBOURG PROPRETE rétorque que ces outils ont été spontanément rendus par Mme [F], témoignant ainsi, selon elle, d'une précipitation évidente pour terminer sa relation contractuelle avec son employeur ;

En tout état de cause, aucun élément objectif ne permet de retenir que Mme [F] a répondu à une demande de son employeur aux fins de restituer les éléments précités ;

La réalité d'un licenciement verbal n'est donc pas établie ;

Mme [F] fait valoir que depuis 1987, elle a toujours été affectée sur le site d'EUROCOPTER ; que son lieu de travail a été précisé sur les avenants successifs à son contrat de travail qu'elle a signés ;

Mme [F] souligne qu'au 1er janvier 2002, les parties ont expressément exclu la possibilité d'une mobilité ou d'un changement d'affectation en écartant la clause de mobilité mentionnée au contrat-type ; qu'elle n'était pas tenue de satisfaire à sa nouvelle affectation ;

Toutefois, le contrat de travail ne spécifie pas que Mme [F] exécutera son travail exclusivement sur le site d'EUROCOPTER ;

Mme [B] et M. [P], agents de maîtrise MP3 attestent de leurs déplacements sur les divers sites gérés par la société DERICHEBOURG PROPRETE dans le secteur de [Localité 4] au sein de plusieurs départements ;

Mme [F] a été affectée sur le site de [Localité 6] atteignable en une heure d'autoroute, étant rappelé que l'intéressée bénéficiait d'un véhicule de service, durant des heures de faible affluence ;

Dans ces conditions, l'affectation de Mme [F] sur un lieu de travail situé dans le même secteur géographique ne constitue pas une modification du contrat de travail mais un changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur ;

Dès lors, le refus de Mme [F] de se rendre sur son lieu d'affectation constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Doit en découler le débouté de Mme [F] et l'infirmation du jugement entrepris.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

- Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

- Dit le licenciement de Mme [F] fondé pour cause réelle et sérieuse,

- Déboute Mme [F] de l'ensemble de ses demandes,

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Condamne Mme [F] aux entiers dépens.

Le GreffierPour le Président empêché

Madame Brigitte BERTI, Conseiller

En ayant délibéré


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 10/00635
Date de la décision : 30/06/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°10/00635 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-30;10.00635 ?
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