COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 28 MARS 2011
N°2011/
MV/FP-D
Rôle N° 10/03437
INSTITUT AVENIR PROVENCE
C/
[V] [Y]
Grosse délivrée le :
à :
Me Marie-Claude DELISLE, avocat au barreau D'AIX-EN-
PROVENCE
Me Philippe TRAVERT, avocat au barreau d'AIX-EN-
PROVENCE
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 28 Janvier 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/1520.
APPELANTE
INSTITUT AVENIR PROVENCE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Marie-Claude DELISLE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
Madame [V] [Y], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assistée de Me Philippe TRAVERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 01 Février 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président
Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller
Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé(e) par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2011
Signé par Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Madame [V] [Y] a été engagée le 1er juillet 2002 par l'INSTITUT AVENIR PROVENCE, association de promotion sociale et de développement professionnel , en qualité de Chef de Service moyennant la rémunération mensuelle brute en dernier lieu de 3177,05 € en ce compris les avantages en nature.
Le 17 octobre 2007 elle était convoquée à un entretien préalable fixé au 24 octobre 2007 et le 9 novembre 2007 elle était au terme d'une lettre de quatre pages licenciée pour «cause personnelle - motif réel et sérieux ».
Estimant son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et vexatoire Madame [Y] a saisi initialement le 6 mars 2008 le Conseil des Prud'hommes d'Aix-en-Provence qui s'est déclaré incompétent au profit du Conseil des Prud'hommes de MANOSQUE lequel a transféré le dossier au Conseil des Prud'hommes de DIGNE lequel a renvoyé le dossier devant le Conseil des Prud'hommes de NICE, lequel, par jugement du 28 janvier 2010, a dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, a condamné l'INSTITUT AVENIR PROVENCE à verser à Madame [Y] les sommes de :
27 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
500 € retenus à tort sur le bulletin de salaire,
1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
a rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,
a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
a débouté les parties de leurs autres demandes et condamné l'INSTITUT AVENIR PROVENCE aux dépens.
Ayant le 17 février 2010 régulièrement relevé appel de cette décision l'INSTITUT AVENIR PROVENCE conclut à son infirmation aux fins de voir débouter Mme [Y] de ses demandes et de la condamner à lui verser en application des articles 1382 et 1383 du code civil la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rétention depuis 2007 d'informations relatives à la gestion du Restaurant La Braise, et, subsidiairement, au cas où la Cour le condamnerait à restituer à Madame [Y] la somme de 500 € prélevée sur son dernier salaire de porter le montant des dommages et intérêts sollicités à la somme de 10 500 €.
Il sollicite en outre la condamnation de Mme [Y] à lui verser la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir que Mme [Y] a été licenciée pour motif personnel et qu'en conséquence l'article 33 de La Convention Collective relatif aux conditions générales de discipline n'avait pas lieu de s'appliquer ; qu'à son départ Madame [Y] a emporté un ordinateur Toshiba appartenant à l'INSTITUT AVENIR PROVENCE contenant d'importantes informations concernant le Restaurant La Braise.
Mme [Y], au visa de l'article 1382 du code civil conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail était dépourvue de motif réel et sérieux et à sa réformation en ce qu'il a fixé à 27 000 € le montant des dommages et intérêts qu'elle demande d'élever à la somme de 97 099,20 € ainsi qu'en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire. Elle sollicite ce titre la somme de 10 000 €.
Elle sollicite la confirmation de jugement en ce qu'il a condamné l'INSTITUT AVENIR PROVENCE à lui verser la somme de 500 € retenue à tort sur son bulletin de salaire.
Elle demande de débouter l'INSTITUT AVENIR PROVENCE de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles et de le condamner à lui verser la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de confirmer la somme de 1500 € allouée sur ce fondement en première instance.
Elle fait valoir qu'elle vivait en union libre avec M. [K], Directeur de l'INSTITUT AVENIR PROVENCE et ce depuis le 1er avril 1995 ; que la rupture de son contrat de travail à l'initiative de l'employeur a été consommée le jour où elle s'est séparée de ce dernier ; qu'a été mise en place à son encontre une procédure de licenciement pour faute tel que cela est mentionné au sein de la lettre de convocation à l'entretien préalable ; que n'ayant pas été licenciée pour faute grave les dispositions de l'article 33 de la Convention Collective devaient s'appliquer ce qui n'a pas été le cas ; qu'en toute hypothèse son licenciement ne repose sur aucun motif réel ni sérieux ; que la somme de 500 € retenue sur son dernier bulletin de salaire correspond à un ordinateur qui n'était pas la propriété de l'INSTITUT AVENIR PROVENCE mais la sienne puisqu'il lui avait été offert par M.[K].
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du Conseil de Prud'hommes et aux écritures déposées, oralement reprises.
Sur ce,
Sur le licenciement,
Attendu que seule la lettre de licenciement fixe les limites du litige de sorte qu'il importe peu en l'espèce que le courrier de convocation à l'entretien préalable ait mentionné que l'INSTITUT AVENIR PROVENCE « envisageait » une mesure de « licenciement pour faute » seul devant être pris en compte le motif réel du licenciement tel qu'énoncé au courrier de rupture ;
Attendu qu'en l'espèce le courrier de licenciement reprend en détail certains éléments consécutifs à la rupture intervenue début août 2007 entre M. [K], Directeur de l'INSTITUT AVENIR PROVENCE et Mme [Y] et les conséquences diverses de cette rupture et se termine par les paragraphes suivants :
« nous avons volontairement décidé de ne pas qualifier votre comportement ou vos agissements et par suite de ne porter aucune appréciation. Cependant, nous considérons que ces faits, leur répétitivité sur quatre mois, leur cumul, génèrent, tant au sein du personnel que des jeunes que nous accueillons, des troubles graves de nature à perturber l'organisation de l'entreprise et à nuire au fonctionnement de la structure et constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.
L'ensemble de ces faits rendent impossible la poursuite de votre contrat de travail.
Votre préavis, d'une durée de quatre mois, débutera à la date de présentation de cette lettre.
Nous entendons vous dispenser de votre préavis, votre rémunération vous sera réglée aux échéances habituelles... » ;
Attendu que les articles 16 et 33 de la Convention Collective des Établissements et des Services pour Personnes Inadaptées et Handicapées du 15 mars 1966, applicable à la relation de travail, disposent quant à eux :
« Article 16 - RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL - DÉLAI CONGÉ
sauf dispositions particulières aux cadres, en cas de résiliation du contrat de travail à durée indéterminée par l'une des deux parties contractantes, la durée du délai congé est fixée...
Par ailleurs, les dispositions des deux alinéas précédents ne sont pas applicables en cas de licenciement pour faute grave.
La dispense à l'initiative de l'employeur, de l'exécution du travail pendant le délai congé...
Sauf en cas de force majeure ou d' accord entre les parties, le salarié démissionnaire...
Dans le cas de licenciement, le salarié peut, s'il trouve un emploi avant l'expiration du délai congé...
Pendant la période du délai congé...
Lorsqu'il s'agit d'un licenciement... »
Article 33 - CONDITIONS GÉNÉRALES DE DISCIPLINE
Les mesures disciplinaires applicables aux personnels des établissements ou services s'exercent sous les formes suivantes :
- l'observation,
- l'avertissement,
- la mise à pied avec ou sans salaire pour un maximum de trois jours,
- le licenciement.
...
Sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins deux des sanctions citées ci-dessus, prises dans le cadre de la procédure légale.... » ;
Attendu que Mme [Y] soutient qu'ayant fait l'objet d'un licenciement disciplinaire, non qualifié de faute grave, et n'ayant pas été l'objet de deux sanctions préalables, son licenciement est nécessairement dénué de cause réelle et sérieuse alors qu'il apparaît que contrairement à ce qu'elle soutient elle n'a nullement fait l'objet d'un licenciement pour manquement à la discipline mais d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse justifié par le trouble objectif causé à l'entreprise à la suite de sa rupture avec M.[K] et de sa liaison avec M.[P], Veilleur de nuit à l'INSTITUT AVENIR PROVENCE et des répercussions de cette situation sur le personnel et les jeunes gens en difficulté présents dans l'institution ;
Attendu que l'article 16 susvisé traite de la rupture du contrat de travail en général et ne comporte aucune clause limitant le licenciement alors que l'article 33 de cette même convention, intitulé « conditions générales de discipline » énumère les sanctions disciplinaires applicables, au nombre desquels, le licenciement et soumet cette dernière mesure, sauf en cas de faute grave, à la condition que le salarié ait fait l'objet de deux sanctions précédentes de sorte qu'il apparaît que cet article n'est applicable qu'au licenciement disciplinaire ;
Attendu en conséquence que contrairement à ce qu'a jugé le Conseil de Prud'hommes l'article 33 de la Convention Collective n'a pas lieu à s'appliquer au licenciement prononcé à l'encontre de Mme [Y] puisqu'il ne s'agit par d' un licenciement disciplinaire ;
Attendu qu'il ressort des nombreuses attestations ou courriers produits aux débats par l'INSTITUT AVENIR PROVENCE, à savoir ceux émanant de M.[G], Chef de service éducatif, de M. [A], Cuisinier, de M.[D], Chef de cuisine, de M.[I], Directeur adjoint de l'INSTITUT AVENIR PROVENCE, de Mlle [J], Comptable, de Mme [U], Secrétaire, de Mme [M], Secrétaire, de M. [N] [E], salarié, de Mme [X] [E], Comptable et de Mme [C], Secrétaire, non sérieusement contestés par Mme [Y] qui de son côté n'en produit aucun, de même que des comptes-rendus des conseils d'administration du 18 septembre et du 24 octobre 2007 ainsi que du rapport en date du 16 octobre 2007 des administrateurs enquêteurs nommés le 18 septembre 2007 par le conseil d'administration de l'INSTITUT AVENIR PROVENCE qu'un trouble objectif caractérisé, en relation directe avec la rupture intervenue entre Mme [Y] et M. [K] et la liaison entretenue entre Mme [Y] et le veilleur de nuit de l'établissement , a affecté gravement les conditions de travail dans l'association et l'efficacité de l'action de cette dernière ;
Attendu qu'ainsi il ressort notamment de ces diverses attestations, courriers ou rapports les éléments suivants :
«... L'ambiance était mauvaise... Les jeunes m'ont parlé que [V] et [R] avait niqué au foyer... » (M.[A])
«... Malaise provoqué par cette situation au sein de l'institution, des jeunes pris en charge et de mon personnel éducatif... Je rappelais à l'ensemble de l'équipe éducative les règles d'éthique et de professionnalisme après avoir entendu leurs réactions et leurs émotions sincères. Celui-ci cite : « pourquoi respecter l'éthique alors qu'en face il n'y en a pas ! »... Le climat malsain qui s'installe depuis me paraît nuire au bon fonctionnement de l'entreprise et à l'état d'esprit professionnel que nous devons avoir... J'ai été surpris de constater que Mme [Y] avait refusé de rejoindre l'ensemble des cadres s'en dissociant publiquement en privilégiant d'être auprès de M. [P] tenant des mimiques narquoises constantes... Sa posture très tactique et complice à l'égard de M.[P] et devant l'ensemble du personnel... Chuchotement ainsi que moquerie... Attitudes déplacées et provocantes dans sa fonction... relation ambivalente, affichée et provocatrice entre Mme [Y] et M.[P] ... J'ai entendu les cris de M. [K] en présence de certains membres du personnel : «arrête-toi » disait-il à Mme [Y] que j'aperçois dans un deuxième temps en furie ! ! M. [K] appelait à l'aide sans que personne ne puisse bouger tant nous étions sidérés par ce qui se passait ! ! Certains membres de l'équipe éducative ont vu la situation, bouleversés et choqués ! Ces événements ont consécutivement créé un réel malaise tant au sein de l'équipe éducative qu'au sein du personnel et des services généraux... L'ensemble de l'équipe éducative a exprimé l'impossibilité de travailler dans un tel climat décrit comme malsain soulignant ce qu'ils avaient vu et observé entre Mme [Y] et M. [P], sans retenue progressivement voire sans réserve... Les adolescents du foyer, déjà au courant de cette situation très ambivalente, n'hésitaient plus à dire pour ceux qui travaillaient au restaurant d'application qu'ils allaient à... « la baise ! » Cette situation, en tant que chef de service, devenait intenable, ingérable... Le personnel étant dans la colère... Multiples difficultés supplémentaires... Suite à ces faits, l'attitude de Mme [Y], tant à l'égard du directeur adjoint, de M. le directeur qu'à mon égard s'est considérablement durcie. Très critique, tyrannique,... Mme [Y] mettait en danger notre mission et la qualité de prise en charge de nos jeunes... J'ai formellement exprimé mon droit de réserve... dénonçant le danger qu'une telle situation exprimée de façon publique pouvait engendrer dans un établissement à caractère social nécessitant un minimum d'éthique, de respect, de cohérence qui impose une exemplarité » (M.[G]),
« j'atteste avoir eu connaissance de la liaison de Mme [Y] [V] avec [R] [P] dès le mois de juin et juillet 2007. ... Les jeunes de l'IAP ont fait état également de cette relation ne laissant donc aucun doute sur ce qui se passait... J'ai. et l'équipe a ressenti les répercussions dramatiques sur le travail et les services de la Braise » (M.[D]),
«... J'ai noté divers incidents qui sont de nature à désorganiser sérieusement le fonctionnement de l'établissement et la prise en charge des jeunes... J'ai également appris des propos tenus par les jeunes à l'égard de la relation entre Mlle [Y] et M. [P] et les sobriquets sur le mur du restaurant d'application « la baise » au lieu de « la Braise». Le comportement de Mlle [Y] s'est totalement transformé depuis la rentrée... Sans doute très perturbée par sa relation et se sentant jugée par ses pairs elle a commencé à faire de la rétention d'informations, critiquer ouvertement en réunion les décisions de la direction dont celles de M. [K], refuser de rendre compte de son travail...» (M. [I]),
«... Lors de la réunion de rentrée, avec M. [P], veilleur de nuit, elle s'est moquée du directeur devant tout le monde, c'était un défi de son autorité. Puis j'ai appris qu'il y avait eu une altercation entre eux et j'ai très mal vécu cela parce que je me suis demandé où on allait. À partir de ce moment-là, elle ne venait plus au siège quand le directeur y était... J'ai appris sa liaison avec M. [P] et sa séparation avec M. [K]. Elle n'était pas discrète. J'ai été très choqué de l'affichage et de l'image qu'elle avait donnée à l'IAP... Plus rien ne fonctionnait bien... L'autorité du directeur était directement mise en cause... » (Mlle [J]),
«... Mlle [Y] et M. [P] ont affiché une grande complicité en souriant ironiquement aux propos tenus par M. [K] en discutant ou en se moquant de lui. Je trouvais leurs attitudes choquantes... Mauvaise ambiance qui régnait dans l'établissement... Les rumeurs qui circulaient par les jeunes ont été très mal perçues par tout le monde... » (Madame [U]),
«... Nous avons été choqués par l'affichage et la notoriété, tant auprès des jeunes que des adultes au sein de l'établissement, que par sa liaison qui aurait pu rester discrète et qui lui était personnelle... Situation devenue insupportable pour tous... » (Mme [M]),
« mauvais climat au sein de l'institution... » (M. [E]),
«... Mlle [V] [Y] et M. [P] auraient eu une attitude nette de provocation à l'égard de la Direction... Mlle [Y] aurait agressé physiquement M. [K]... Relâchement dans le travail de Mlle [Y] et attitude rapportée comme très agressive, notamment avec les cadres... Inquiétude de l'encadrement face à ces dérives » (conseil d'administration du 18 septembre 2007),
«... Lors des réunions éducatives et techniques, le lundi après-midi Mlle [Y] se montre agressive et contestataire en particulier envers les cadres et la direction... Mlle [Y] a cru devoir prendre de l'autorité, se mêlant de problèmes qui ne la concernent pas, critiquant systématiquement les éducateurs et cherchant à donner des leçons alors que ce n'est ni son service ni dans ses compétences, elle crée ainsi un climat de polémique. Certains déclarent même qu'elle met systématiquement « les bâtons dans les roues »... Climat délétère... Les cadres de l'établissement estiment l'ambiance déprimante et chaotique et cherchent à éviter Mlle [Y]. Ils estiment qu'elle est en grand dérapage et que les jeunes de l'IAP le perçoivent sans doute encore plus fortement... » (Rapport des administrateurs enquêteurs) ;
Attendu que les faits tels que relatés par ces différents témoins sont incontestablement de nature à générer un trouble persistant ne permettant plus à l'association, au regard notamment de son objet social, de fonctionner normalement ;
Attendu qu'après avoir repris l'ensemble de ces comportements et dysfonctionnements tels que relatés par les documents concordants susvisés démontrant que le maintien de Mme [Y] au sein de la structure n'était plus possible le licenciement de cette dernière a donc à juste titre été prononcé en raison du trouble grave en résultant qui était de nature à perturber l'objet social même de l'association et à nuire au fonctionnement de cette dernière ;
Attendu qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement déféré, de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de débouter Mme [Y] de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;
Attendu que le licenciement n'a par ailleurs revêtu aucun caractère vexatoire de sorte que c'est à juste titre que le jugement a rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts présentée sur ce fondement ;
Sur la somme de 500 € retenue sur le bulletin de salaire,
Attendu que Mme [Y], inversant la charge de la preuve, soutient que l'ordinateur qui se trouvait sur le lieu de travail et qu'elle a emporté lors de la rupture serait sa propriété personnelle pour lui avoir été offert par M. [K], ce qu'elle n'établit pas, de sorte que cet ordinateur est réputé être la propriété de l'employeur puisqu'il se trouvait sur le lieu de travail, précision faite que l'INSTITUT AVENIR PROVENCE démontre tant par la production de la facture de cet ordinateur en date du 27 mars 2007 à l'ordre de M.[F], que par l'attestation de ce dernier (« j'ai vendu cet ordinateur au prix de 500 € qui m'ont été intégralement payés par l'IAP... ») , que par les attestations de la SA FIDUCIAIRE DE LA DURANCE (« la facture de M.[F], relative à la cession de l'ordinateur portable de marque Toshiba et d'un montant de 500 € a été payée par l'association IAP au cours de l'exercice 2008 ») et de Mme [E], comptable , (« j'ai bien effectué le paiement de la somme de 500 € pour l'acquisition d'un ordinateur portable de marque Toshiba dont ci-joint facture et ceci après plusieurs relances de l'intéressé ») qu'elle était bien propriétaire du matériel en question ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 3251.2 du code du travail et par dérogation aux dispositions de l'article L. 3251. 1 du même code, « une compensation entre le montant des salaires et les sommes qui seraient dues à l'employeur peut être opérée dans les cas de fournitures suivants :
1° outils et instruments nécessaires au travail ;
2° matières ou matériaux dont le salarié à la charge ou l'usage ;
3° sommes avancées pour l'acquisition de ces mêmes objets »,
de sorte que c'est à juste titre que l'INSTITUT AVENIR PROVENCE a pu procéder à une retenue de 500 € sur le dernier bulletin de salaire de Mme [Y] en raison de la non restitution par cette dernière du matériel qui lui avait été fourni pour procéder à l'exécution de son travail ;
Attendu que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a condamné l'INSTITUT AVENIR PROVENCE à restituer cette somme à Mme [Y] ;
Sur la demande reconventionnelle formée par l'INSTITUT AVENIR PROVENCE,
Attendu que Mme [E], comptable, a attesté de ce qu'« à la suite de la non restitution de cet ordinateur par Mlle [Y], M. [K], le Directeur, m'a demandé de refaire le logiciel d'analyse des coûts mis en oeuvre sur le Restaurant d'application la Braise et qui permettait de suivre la gestion de cette unité, de vérifier les marges brutes et de suivre l'évolution du chiffre d'affaires. J'ai également été dans l'obligation de refaire les plannings horaires et le logiciel de calcul de l'annualisation du temps de travail », de sorte que l'INSTITUT AVENIR PROVENCE démontre avoir subi un préjudice financier par le fait même que sa comptable a été rémunérée pour un travail supplémentaire rendu nécessaire par la rétention par Mme [Y] des données diverses contenues dans ledit ordinateur, l'intéressée ne démontrant nullement comme elle soutient que le disque dur de l' ordinateur ait été sauvegardé régulièrement par l'INSTITUT AVENIR PROVENCE ni que l'intégralité des informations aient été en possession de ce dernier ;
Attendu qu'il y a lieu de condamner Mme [Y] à verser à l'INSTITUT AVENIR PROVENCE en réparation du préjudice ainsi subi par ce dernier une somme que la Cour fixe à 500 € ;
Attendu qu'il y a lieu de condamner Mme [Y] à verser à l'INSTITUT AVENIR PROVENCE la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [Y] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,
Réforme pour le surplus,
Et statuant à nouveau ,
Dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,
Déboute Mme [Y] de toutes ses demandes,
Condamne Mme [Y] à payer à l'INSTITUT AVENIR PROVENCE la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive des informations relatives à la gestion du Restaurant la Braise,
Rejette toute demande plus ample ou contraire,
Condamne Mme [Y] aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu' à payer à l'INSTITUT AVENIR PROVENCE la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT