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28/03/2011 | FRANCE | N°10/02495

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 28 mars 2011, 10/02495


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2011



N°2011/



OG/I.E.











Rôle N° 10/02495







[K] [V]





C/



SAS SFMI MICROMANIA













































Grosse délivrée le :

à :

Me Fabien POMART, avocat au barreau de PARIS


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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 27 Janvier 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/753.





APPELANT



Monsieur [K] [V], demeurant [Adresse 3]



comparant en personne, assisté deMe Fabien POMART, avocat ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2011

N°2011/

OG/I.E.

Rôle N° 10/02495

[K] [V]

C/

SAS SFMI MICROMANIA

Grosse délivrée le :

à :

Me Fabien POMART, avocat au barreau de PARIS

Me Leslie KALFOUN, avocat au barreau de LYON

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 27 Janvier 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/753.

APPELANT

Monsieur [K] [V], demeurant [Adresse 3]

comparant en personne, assisté deMe Fabien POMART, avocat au barreau de PARIS ([Adresse 2]) substitué par Me Jean-Christophe BRUN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SAS SFMI MICROMANIA, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Leslie KALFOUN, avocat au barreau de LYON ([Adresse 1]) substitué par Me Karine TRUB, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 26 Janvier 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Olivier GRAND, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président

Monsieur Olivier GRAND, Conseiller

Madame Martine VERHAEGHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2011

Signé par Monsieur Jean-Marc CROUSIER, Président et Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Engagé à compter du 4 février 2002 en qualité de directeur administratif et financier par la Société MICROMANIA spécialisée dans la vente au détail de logiciels de jeux, Monsieur [K] [V] a été licencié le 30 janvier 2008 pour faute grave.

Il a relevé appel du jugement rendu le 27 janvier 2010 par le Conseil des Prud'hommes de GRASSE qui, considérant que le licenciement était justifié par une faute grave, l'a débouté de ses demandes d'indemnités de rupture et a condamné la société MICROMANIA à lui payer les sommes de 40.000 € à titre de dommages et intérêts pour avoir respecté une clause de non concurrence nulle et de 53.347,20 € bruts au titre du bonus dû pour l'exercice de 2007.

*

* *

A l'appui de son recours, Monsieur [K] [V] fait valoir que les faits reprochés sont prescrits et, tirant argument de diverses correspondances, s'attache à démontrer qu'il n'a en aucune façon contrevenu à ses obligations de loyauté et de fidélité.

Il conclut à l'infirmation du jugement entrepris, à l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement et à la condamnation de la société MICROMANIA à lui payer les sommes suivantes :

- 53.347,20 € bruts au titre du bonus pour l'exercice 2007

- 7.078,91 € bruts à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied

- 707,89 € bruts au titre des congés payés afférents

- 23.303,91 € bruts à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 60.792,81 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 6.079,28 € bruts au titre des congés payés afférents

- 243.171,24 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié

- 182.405,43 € à titre de dommages et intérêts pour respect d'une clause de non concurrence nulle

- 733.146,16 € à titre de dommages et intérêts pour perte d'une chance au titre des actions gratuites, avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2008

- 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, il conclut à l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.

*

* *

La société MICROMANIA , intimée et appelante incidente, reprend son argumentaire antérieur.

Elle conclut à la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a condamnée à verser à Monsieur [K] [V] les sommes de 40.000 € à titre de dommages et intérêts pour respect d'une clause de non concurrence nulle et de 53.347,20 € bruts au titre du bonus pour l'exercice 2007.

Elle sollicite enfin une indemnité de 2.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

*

* *

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure et aux conclusions des parties oralement reprises.

*

* *

La lettre de rupture, qui circonscrit l'examen judiciaire du litige, énonce le grief suivant :

'(...) Dans votre contrat de travail, il est clairement spécifié les missions que vous devez exercer, fixant le cadre de vos fonctions.

A cet égard, votre contrat de travail prévoit expressément votre devoir de rendre compte régulièrement à la direction générale.

Par ailleurs, vous êtes tenu de manière générale à une obligation de loyauté envers votre employeur.

Or, nous avons été amenés à constater que vous avez violé vos obligations contractuelles et professionnelles, et que vous avez adopté un comportement en totale inadéquation avec les responsabilités qui étaient les vôtres, notamment compte-tenu du poste occupé.

En effet, nous avons appris par un mail en date du 20 décembre 2007 qu'entre juillet et octobre 2007, vous avez entretenu à notre insu, ainsi qu'à celui des actionnaires, des conversations suivies avec un fonds d'investissement, des conseils et au moins une banque, en vue de vendre le Groupe MICROMANIA.

Ainsi, entre le 30 octobre et le 10 décembre 2007, l'offre de rachat de ce fonds et de cette banque a été présentée, toujours sans en informer votre direction ni notre actionnaire majoritaire.

Vous avez pendant 5 mois régulièrement informé et impliqué la totalité des directeurs du Groupe, tout en le dissimulant aux actionnaires et à votre direction, déstabilisant particulièrement le fonctionnement du Comité de direction.

En effet, c'est en dehors de tout mandat et en outrepassant largement vos prérogatives que vous avez agi au nom de l'entreprise, dans une opération d'une envergure considérable - la vente de l'entreprise-, en dissimulant l'ensemble de celle-ci à votre employeur, et portant ainsi gravement atteinte au pouvoir de direction de l'entreprise, prérogative essentielle de l'employeur.

De plus, le fait que les tiers impliqués dans l'opération de rachat aient pu formuler une offre à l'actionnaire majoritaire nous laisse penser que ceux-ci ont eu accès à un certain nombre de données au informations confidentielles (...) Vous vous êtes par la même occasion mis en porte à faux vis-à-vis de la ligne stratégique adoptée par l'entreprise (...)'

L'employeur, auquel incombe la preuve de la faute grave, la rapporte en l'espèce par la production de :

a) la lettre d'offre de rachat en date du 26 octobre 2007 émanant du fonds d'investissement contacté par Monsieur [K] [V] (pièce n° 5)

b) l'attestation de M. [D], ancien président de SFMI-MICROMANIA qui explique 'avoir été sollicité par un fonds d'investissement pour céder la société MICROMANIA (...) Monsieur [K] [V] étant l'animateur de cette offre de reprise (...)' (pièce n° 6)

c) la lettre de M. [O] à la société MICROMANIA (pièce n° 9)

d) le compte rendu de l'entretien préalable par le Délégué du Personnel, témoignant que Monsieur [K] [V] a dit 'si c'était à refaire, je le referais' (pièce n° 3 de l'appelant), ce qui équivaut à reconnaître ses agissements.

Toutes ces pièces confirment très exactement le déroulement des faits tel qu'il est minutieusement rapporté dans la lettre de licenciement ci-dessus retranscrite. Ainsi, le fait que le processus de vente de l'entreprise de l'employeur à l'insu de ce dernier était déjà engagé, et très avancé, résulte des termes-mêmes de l'offre de rachat du Fonds d'Investissement : 'Nous avons déjà pris contact et mandaté des conseils afin de mener à bien les travaux de validation (...)'.

Il est dérisoire pour Monsieur [K] [V] de prétendre ne pas avoir violé l'obligation de confidentialité car il est inconcevable que l'auteur de la proposition de rachat n'ait pas préalablement disposé d'une multitude d'informations financières confidentielles sur l'entreprise qu'il voulait acquérir, dont seul Monsieur [K] [V], parmi les salariés, avait une connaissance exhaustive.

Quant à la violation de l'obligation de loyauté, elle est patente car, comme l'ont justement relevé les premiers juges, les cadres dirigeants ont pour mission d'appliquer la politique générale définie par le chef d'entreprise, et, partant, il est nécessaire qu'existe entre ceux-ci et l'employeur une unité de vue sur les orientations financières et commerciales à mettre en oeuvre.

Certes Monsieur [K] [V] allègue devant la Cour que M. [O] avait été mis au courant du projet qu'il avait concocté, mais ce dernier le nie catégoriquement, et l'appelant ne rapporte pas la preuve de ses allégations qui apparaissent dès lors gratuites.

Or, constitue une faute grave le fait pour un cadre supérieur, tenu en raison de ses fonctions à une obligation de discrétion à l'égard de la société qui l'emploie, d'avoir divulgué des renseignements dont il avait connaissance en raison desdites fonctions, alors surtout que cette divulgation s'est accompagnée de l'initiative, prise à l'insu de l'employeur, de vendre la société au mépris de son obligation de loyauté.

Il s'ensuit que Monsieur [K] [V] doit être débouté de toutes ses demandes d'indemnités de rupture et de sa demande de rappel de salaire pendant la période de mise à pied.

Le licenciement étant fondé, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande du salarié en paiement de la somme de 733.146,12 € au titre de la perte d'une chance de céder les actions gratuites. En effet, Monsieur [K] [V] fait à tort, sur ce point, un amalgame entre les stocks options et l'attribution d'actions gratuites.

En ce qui regarde la clause de non concurrence, dont la nullité n'est pas contestée par les parties en raison de l'absence de contrepartie financière, Monsieur [K] [V] sollicite la somme de 182.405,43 € pour l'avoir à tort respectée.

A l'encontre de ce que soutient l'employeur, le préjudice du salarié est évident puisque la clause nulle a porté atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle, aucune violation de l'interdiction n'étant établie.

Compte-tenu des circonstances de l'espèce, les premiers juges ont correctement évalué à 40.000 € le préjudice subi par le salarié de ce chef.

Concernant le rappel de salaire sollicité au titre du bonus de l'exercice 2007, il apparaît fondé au vu de la résolution du Conseil de Surveillance du 22 mars 2007. En effet, à la clôture de l'dxercice du 31 mars 2008 il apparaît que l' 'EBITDA' réalisé par société MICROMANIA a atteint le montant de 34.693.765 €, ce dont il résulte pour Monsieur [K] [V] le droit de percevoir un bonus égal à 30 % de sa rémunération annuelle brute.

Etant donné que l'employeur ne démontre pas que l'attribution du bonus était subordonnée à l'atteinte de critères qualitatifs, c'est à bon droit que le Conseil des Prud'hommes lui a alloué de ce chef la somme revendiquée de 53.347,20 € bruts.

Le jugement querellé sera donc confirmé dans toutes ses dispositions.

Echouant dans son recours, Monsieur [K] [V] doit être condamné aux dépens d'appel et au paiement d'une indemnité de 1.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en matière prud'homale,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [K] [V] aux dépens d'appel et au paiement d'une indemnité de 1.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel,

Rejette toutes autres conclusions contraires ou plus amples des parties.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 10/02495
Date de la décision : 28/03/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°10/02495 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-28;10.02495 ?
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