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22/03/2011 | FRANCE | N°10/16347

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre a, 22 mars 2011, 10/16347


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2011

G.L.

N° 2011/













Rôle N° 10/16347







[S] [L]

[A] [F]

SNC LE PARISIEN LIBERE





C/



[R] [N]

SARL DISSUASION INTERVENTION PROTECTION - DIP

LE PROCUREUR GENERAL





















Grosse délivrée

le :

à :la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN

la SCP ERME

NEUX CHAMPLY-LEVAIQUE













réf





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 30 Juillet 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 10/02493.



APPELANTS



Madame [S] [L], prise en sa qualité de Directeur de la Publication du jou...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2011

G.L.

N° 2011/

Rôle N° 10/16347

[S] [L]

[A] [F]

SNC LE PARISIEN LIBERE

C/

[R] [N]

SARL DISSUASION INTERVENTION PROTECTION - DIP

LE PROCUREUR GENERAL

Grosse délivrée

le :

à :la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN

la SCP ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 30 Juillet 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 10/02493.

APPELANTS

Madame [S] [L], prise en sa qualité de Directeur de la Publication du journal Le Parisien

née le [Date naissance 4] 1940 à [Localité 10], demeurant [Adresse 5]

représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,

assistée par Me Basile ADER, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Amélie TRIPET, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [A] [F], journaliste du Parisien, demeurant [Adresse 5]

représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,

assisté par Me Basile ADER, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Amélie TRIPET, avocat au barreau de PARIS

S.N.C. LE PARISIEN LIBERE, agissant par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège social,[Adresse 5]

représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,

assistée par Me Basile ADER, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Amélie TRIPET, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [R] [N]

né le [Date naissance 1] 1938 à [Localité 8], demeurant [Adresse 7]

représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour,

assisté par Me Gérard BAUDOUX, avocat au barreau de NICE substitué par Me Charles-Pierre BRUN, avocat au barreau de NICE

S.A.R.L DISSUASION INTERVENTION PROTECTION - DIP, agissant par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège social, [Adresse 6]

représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour,

assistée par Me Gérard BAUDOUX, avocat au barreau de NICE substitué par Me Charles-Pierre BRUN, avocat au barreau de NICE

LE PROCUREUR GENERAL,

Cour d'Appel - [Adresse 3]

[Localité 2]

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Février 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.LAMBREY, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Gérard LAMBREY, Président

Monsieur Jean VEYRE, Conseiller

Monsieur Bernard ROUSSEAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2011.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé(e) par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2011,

Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement rendu le 30 juillet 2010 par le Tribunal de Grande Instance de NICE entre [R] [N] et la Société MISSUASION INTERVENTOIN PROTECTION (DIP) contre [S] [L], [A] [F] et la SNC LE PARISIEN LIBERE,

Vu l'appel interjeté le 7 septembre 2010 par [S] [L], [A] [F] et la SNC LE PARISIEN LIBERE,

Vu les conclusions récapitulatives déposées par les appelants le 11 janvier 2011,

Vu les conclusions récapitulatives déposées par les intimés le 17 février 2011 contenant appel incident,

Vu la communication au Ministère Public et son visa du 9 février 2011,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 22 février 2011,

SUR CE

Sur la procédure

Attendu que les assignations des 16 et 27 avril 2010 visant exclusivement sous l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 des écrits diffamatoires sans aucun cumul de qualification, c'est à juste titre que le premier juge a rejeté l'exception de nullité relative à l'omission de la loi répressive applicable à la demande, celle-ci ne pouvant faire grief aux défendeurs auxquels il est seulement réclamé des dommages et intérêts ;

Sur le fond

1. Attendu que le PARISIEN LIBERE a publié dans son quotidien AUJOURD'HUI en FRANCE du 4 février 2010 en page 13, rubrique 'faits divers Justice' un article intitulé 'les curieux transferts de fonds du patron de casinos' avec une photographie plein cadre 15 x 13 cm de [E] [T], à propos d'une enquête menée par la police dans le cadre d'une commission rogatoire le soupçonnant d'abus de biens sociaux, au travers notamment de surfacturation de prestations effectuées par la Société DIP, 'audit en matière de sécurité chargée de la surveillance du Palm Beach à [Localité 9], pouvant s'élever au total à 1.000.000 d'euros par an' ;

Attendu qu'à la question de savoir si [E] [T] a accepté d'acheter sa tranquillité et celle de ses casinos en payant des racketteurs plutôt que de porter plainte, le journaliste [A] [F] le cite en ce qu'il a déclaré ne pas être victime d'extorsion de fonds ;

Attendu que l'article se termine par une citation de son avocat Maître [C] précisant que [E] [T] avait été entendu comme simple témoin et 'qu'il n'y avait pas de procédure ni d'affaire concernant [E] [T]' ;

Attendu qu'au milieu de l'article sont insérées deux paragraphes, allégués de diffamation, relatifs à [R] [N], placé en garde à vue dans le cadre de l'enquête, et sa société DIP, ainsi rédigés :

1/ 'Cette société est en contrat avec le groupe [T] depuis plusieurs années ... Elle assure notamment des audits en matière de sécurité sur l'ensemble des casionos [T] en France et la surveillance du Palm Beach à [Localité 9]. Mais les montants des contrats ne correspondent en rien aux tarifs pratiqués sur ce type de marché, ... DIP facturerait près de 100.000 euros chaque audit et recevrait près d'un million d'euros chaque année du groupe [T] pour assurer la sécurité du seul casino Palm Beach'

2/ '[E] [T] suivait de très près les contrats signés avec la société DIP et [R] [N] avec lequel il entretenait des relations régulières. Cet homme est soupçonné d'avoir remis une partie des sommes versées par le groupe [T] à [I] [B], considéré comme une figure du milieu niçois'.

Attendu qu'en marge de l'article principal relatif essentiellement à [E] [T], figure un petit article intitulé 'une société de sécurité dans le collimateur' imprimé sur fonds de couleur, dont sont extraits les deux autres citations suivantes alléguées de diffamation :

3/ 'Ce dirigeant Monsieur [R] [N] au passé sulfureux - ancien nombre des commandos de l'Organisation armée secrète (OAS), un groupement terroriste opposé à l'indépendance de l'Algérie et soupçonné de deux attentats manqués contre le Général [Y] et [Z] [J] - devait notamment s'expliquer sur la réalité des prestations fournies par sa société au groupe [T].

4/ 'Plusieurs prestations réglées par le groupe [T] semblent n'avoir jamais été honorées par DIP, relate une source proche du dossier. Par ailleurs, [R] [N] est questionné sur plusieurs importantes sorties d'espèce des comptes de sa société'.

2. Attendu que la première information dont la source est prêtée entre guillemets à un proche de l'affaire ([T]) n'insinue nullement la fictivité de contrats avec [E] [T], mais sous un mode conditionnel une facturation supérieure aux tarifs pratiqués sur ce type de marché et encore moins toute insinuation de racket, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a estimé que ces propos ne pouvaient porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne auquel le fait est imputé :

3. Attendu que le second passage, dès lors qu'il impute, même sous un mode d'insinuation, à [R] [N] personnellement des reversements de sommes réclamées au groupe [T] au titre des contrats de surveillance à une figure du milieu niçois, [I] [B] (dont il est expliqué juste après que celui-ci avait été incarcéré en mai 2009 dans le cadre d'une affaire de jeux clandestins et d'extorsion de fonds) constitue une atteinte à l'honneur et à la considération de [R] [N], puisqu'il est présenté comme receleur d'abus de biens sociaux, auteur d'abus de biens sociaux au détriment de sa société DIP et complice possible d'un racquetteur de [E] [T] ;

4. Attendu que le troisième passage est extrait de l'encart spécialement consacré à la société DIP et à son dirigeant [R] [N] ;

Attendu qu'il décrit [R] [N] comme un ancien membre des commandos de l'OAS, que ce fait ne porte pas atteinte à l'honneur ou à la considération du plaignant, l'appartenance à un mouvement historique ayant revendiqué la légitimité pour accomplir l'illicite, quel que soit son idéologie (OAS, Résistance, Frances Tireurs et Partisans, etc...) n'étant pas, à elle seule, susceptible de qualification diffamatoire ;

Attendu que l'allusion au 'passé sulfureux' du dirigeant, ne recouvrant l'imputation d'aucun fait précis et déterminé, à charge du mis en cause, est exclusive de diffamation et insusceptible de requalification éventuelle ;

5. Attendu que la fin du passage incriminé mettant en cause directement la société DIP, présente à son égard un caractère diffamatoire, puisqu'associée aux citations extrinsèques visant son dirigeant déjà qualifiées d'attentatoire à l'honneur et à la considération, cette allégation de non rétrocession de pseudos prestations payées par [E] [T] en faveur d'un de ses présumés racquetteurs présentant les mêmes caractères, ainsi que l'a retenu le premier juge ;

6. Attendu sur la bonne foi que si la légitimité du but poursuivi et l'absence d'animosité personnelle ne font aucun doute, en revanche l'existence d'une enquête sérieuse n'est pas avérée dés lors que lorsqu'un journaliste s'inspire notamment de sources susceptibles d'être tenus au secret de l'instruction, il doit au moins préciser la décision du juge d'instruction qui en l'espèce n'a pas mis en examen [R] [N] où sa société à l'issue de sa comparution devant lui, et manque ainsi à l'objectivité attendue du journaliste, et de la directrice de publication, ainsi qu'à la prudence et la mesure dans l'expression que requiert un domaine sensible ou est indirectement mis en jeu la présomption d'innocence ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu en conséquence de reconnaître le caractère justificatif de la bonne foi au bénéfice des appelants ;

7. Attendu qu'en ce qui concerne le préjudice, étant rappelé que le sujet principal proposé aux lecteurs, portrait à l'appui, est [E] [T], 'soupçonné d'abus de biens sociaux', [R] [N] et la société DIP, qui invoquent un déficit d'image, de marque et une diminution du chiffre d'affaire, pour réclamer respectivement 50.000 euros et 300.000 euros, ne produisent pas le moindre document de nature à étayer leurs affirmations (rupture de contrats en cours, baisse de chiffre d'affaire etc...) de sorte que le montant des dommages et intérêts, surestimé par le premier juge, sera ramené à 3000 euros chacun ;

Attendu que la publication judiciaire s'impose également dans le quotidien AUJOURD'HUI EN FRANCE et dans le quotidien, NICE MATIN compte tenu de l'impact purement régional de la mise en cause des personnes diffamées ;

Attendu que les appelants, succombant sur l'essentiel supporteront les dépens ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf à ramener le montant des dommages et intérêts dûs à [R] [N] et à la SARL DIP à 3000 euros chacun et à supprimer la publication judiciaire dans le quotidien LE MONDE ;

Y ajoutant,

Condamne les appelants à payer à [R] [N] et à la SARL DIP, ensemble, la somme de 5000 euros en application de l'article de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne les appelants aux dépens,

Admet la SCP ERMENEUX-CHAMPLY-LEVAIQUE avoué au bénéfice de l'article 696 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre a
Numéro d'arrêt : 10/16347
Date de la décision : 22/03/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°10/16347 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-22;10.16347 ?
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