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22/03/2011 | FRANCE | N°10/14633

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 22 mars 2011, 10/14633


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2011



N°2011/285















Rôle N° 10/14633







SCI SILVER SAINT AME





C/



[A] [O]









































Grosse délivrée le :

à :

Me Josette PIQUET, avocat au barreau de TOULON



Me Gordana TEGE

LTIJA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN



réf



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS en date du 02 Juillet 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/501.





APPELANTE



SCI SILVER SAINT AME,

demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Josette PIQUET, avocat au ba...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2011

N°2011/285

Rôle N° 10/14633

SCI SILVER SAINT AME

C/

[A] [O]

Grosse délivrée le :

à :

Me Josette PIQUET, avocat au barreau de TOULON

Me Gordana TEGELTIJA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS en date du 02 Juillet 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/501.

APPELANTE

SCI SILVER SAINT AME,

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Josette PIQUET, avocat au barreau de TOULON

INTIME

Monsieur [A] [O],

(Bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale accordée par la section appel du Bureau d'Aide Juridictionnelle d'[Localité 2] sous le N°B.A.J 2010/013168 le 06/12/2010 )

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Gordana TEGELTIJA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 16 Février 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jacques MALLET, Président

Madame Françoise JACQUEMIN, Conseiller

Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller

Greffier lors des débats : Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé(e) par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2011

Signé par Monsieur Jacques MALLET, Président et Madame Fabienne MICHEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Se prévalant de l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu verbalement avec Monsieur [N] [D] pour le compte de la SCI SILVER SAINT-AMÉ à compter du 1er mai 2007 et rompu selon lui de la même manière à l'initiative de l'employeur le 6 mai 2009, Monsieur [A] [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Fréjus, par requête reçue le 9 septembre 2009 et conclusions additionnelles, afin de voir prononcer la résiliation judiciaire de ce contrat et d'obtenir la condamnation de cette société à lui payer plusieurs sommes à titre d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts en réparation de ses divers préjudices, outre une indemnité pour frais irrépétibles, ainsi qu'à lui remettre sous astreinte des bulletins de paie et les documents sociaux de rupture.

Par jugement du 2 juillet 2010 assorti de l'exécution provisoire, le conseil de prud'hommes a fait droit à ses demandes et a condamné la SCI SILVER SAINT-AMÉ au paiement des sommes suivantes, outre à la remise des documents susvisés sous astreinte de 100 € par jour de retard passé le délai d'un mois suivant la notification de la décision :

dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement 3.681,00 €

dommages-intérêts pour licenciement abusif 22.086,00 €

indemnité compensatrice de préavis 7.362,00 €

congés payés sur préavis 736,20 €

indemnité pour travail dissimulé 22.086,00 €

indemnité compensatrice de congés payés 4.417,20 €

dommages-intérêts pour absence de repos hebdomadaire 2.000,00 €

frais irrépétibles 1.500,00 €

La SCI SILVER SAINT-AMÉ a interjeté appel de ce jugement le 21 juillet 2010, et par décision du 4 octobre 2010, sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire a été rejetée.

Aux motifs, selon ses conclusions écrites soutenues oralement à l'audience, qu'elle a simplement hébergé Monsieur [O], ancien salarié de Monsieur [D], sur sa propriété de [Localité 6], que celui-ci ne rapporte pas la preuve de l'existence du contrat de travail dont il se prévaut et que les attestations qu'il verse aux débats sont irrecevables faute d'être conformes à l'article 202 du code de procédure civile, la société appelante demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter Monsieur [O] de l'ensemble de ses demandes et de le condamner au paiement d'une indemnité de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Exposant, dans ses écritures plaidées à l'audience, qu'il a été engagé au mois de mai 2007 par Monsieur [D] pour le compte de la SCI SILVER SAINT-AMÉ, dans laquelle celui-ci est associé et dont la gérante est son épouse, moyennant une rémunération nette mensuelle de 3.000 €, afin d'effectuer d'importants travaux de rénovation dans la propriété que cette société venait d'acquérir à [Localité 6] et d'occuper en outre des fonctions de jardinier-gardien et de chauffeur, et que le 6 mai 2009, Monsieur [D] lui a demandé de partir sur-le-champ en raison d'un contrôle URSSAF imminent, sans tenir son engagement de lui remettre les documents de fin de contrat, Monsieur [O] sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de la SCI SILVER SAINT-AMÉ à payer à son conseil la somme de 1.500 € pour frais irrépétibles en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

MOTIFS DE L'ARRÊT

- sur la recevabilité de l'appel

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.

.../...

- sur l'existence d'un contrat de travail

Le contrat de travail se caractérise par l'exécution d'un travail, moyennant rémunération, sous l'autorité d'une personne qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution du travail et de sanctionner les manquements de son subordonné. En l'absence d'écrit, il appartient à celui qui invoque l'existence d'un tel contrat d'en rapporter la preuve.

En l'espèce, outre un extrait k-bis de la SCI SILVER SAINT-AMÉ, dont il résulte que cette société a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 21 septembre 2007, qu'elle a son siège social [Adresse 4], que Monsieur [N] [D] en est l'associé et qu'elle a pour gérante Madame [K] [U], dont la société appelante ne conteste pas qu'elle est l'épouse de ce dernier, Monsieur [O] produit plusieurs attestations, la plupart établies par des personnes déclarant avoir été en relation professionnelle avec Monsieur [D] dans le cadre de la 'villa Louise', propriété de la SCI SAINT-AMÉ à [Localité 6] :

- Monsieur [S], responsable de discothèque, déclare qu'au mois de mai 2007, il a présenté Monsieur [O] à Monsieur [D] qui recherchait un chauffeur pour les vacances d'été à St-Tropez, que l'engagement a eu lieu en sa présence, moyennant un salaire net mensuel de 3.000 €, et qu'en 2009, Monsieur [O] 'était toujours au service de Monsieur [D] sur sa propriété de St-Tropez en qualité de régisseur' ;

- Monsieur [E], gérant de société, déclare avoir 'signé un contrat de sécurité gardiennage 24h/24h avec la SCI Saint-Amé par l'intermédiaire de Monsieur [O] [A], régisseur de cette propriété' ;

- Monsieur [C], aide-jardinier sur la propriété courant 2008, déclare qu'il recevait ses ordres et son salaire directement de Monsieur [O], lequel était selon lui 'le responsable des travaux' ;

- Monsieur [G], élagueur-abatteur, déclare avoir 'abattu un pin sur la propriété de Monsieur [D] (villa Louise à [Localité 6])', dont Monsieur [O] 'était le régisseur' ;

- Monsieur [B], co-gérant de la SNC Jardin Exotique chargée des 'espaces verts de la propriété [D] à [Localité 6]', de mars à décembre 2007, déclare que Monsieur [O] vérifiait les travaux et transmettait les ordres de Monsieur [D], dont il était par ailleurs le chauffeur ;

- Monsieur [Z] ayant effectué les travaux d'automatisme des portails et d'électricité sur la propriété 'villa Louise', d'octobre 2007 à décembre 2008, déclare que Monsieur [O] 'faisait office de conducteur de travaux' ;

- Monsieur [V], voiturier, déclare avoir été en relation professionnelle avec Monsieur [O], qui était le chauffeur personnel de Monsieur [D] et le gardien de la 'villa Louise' à [Localité 6] ;

- Monsieur [T], ferronnier, déclare que lorsqu'il est intervenu, entre mars et octobre 2008, pour effectuer des travaux sur cette propriété, Monsieur [O] y était employé ;

- Monsieur [Y], employé de restauration, déclare que Monsieur [O], dont il a fait connaissance au mois de juillet 2007 dans le cadre de son activité professionnelle, 'tenait en fait la fonction de régisseur de la propriété de Monsieur [D] en l'absence de celui-ci' ;

- Madame [L], vendeuse, déclare que Monsieur [O], dont elle a fait connaissance au mois de juillet 2007 et auquel elle a rendu visite à plusieurs reprises, était alors le 'chauffeur de Monsieur [D] [N], ainsi que le coordinateur de travaux et le gardien de la propriété sur laquelle il logeait située villa Louise', à [Localité 6] ;

- Monsieur [I], chauffeur, déclare avoir constaté, à partir du mois de juillet 2007, que Monsieur [O] travaillait pour Monsieur [D], dont il était le chauffeur personnel, et qu'il était en outre 'le gardien ainsi que le responsable de chantier' de la propriété de la 'villa Louise' à [Localité 6] ;

- Madame [R], éducatrice spécialisée, concubine de Monsieur [O], atteste que ce dernier a quitté son domicile à [Localité 5], au mois de mai 2007, 'pour un contrat de chauffeur dans le sud de la France à St-Tropez pour Monsieur [N] [D]', au salaire net mensuel de 3.000 €, et que ce dernier l'a remerciée à plusieurs reprises pour le travail que son mari effectuait sur sa propriété tropézienne.

Quand bien même ces attestations ne sont pas conformes aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, notamment en ce qu'elles ne mentionnent pas qu'elles ont été établies en vue de leur production en justice, ni que leurs auteurs ont eu connaissance des sanctions pénales encourues pour fausse attestation, et qu'en outre la plupart des témoins n'ont pas précisé s'ils avaient un lien avec les parties, il n'en demeure pas moins que ces personnes sont clairement identifiées, que la SCI SAINT-AMÉ ne conteste pas avoir été en relation professionnelle avec certaines d'entre elles, ni ne prétend avoir déposé une quelconque plainte pour fausse attestation, et qu'enfin contrairement aux dires de cette société, les diverses fonctions attribuées à Monsieur [O] ne rendent pas pour autant ces témoignages contradictoires.

Monsieur [O] communique par ailleurs plusieurs factures émises à l'ordre de la SCI SILVER SAINT-AMÉ (notamment KILOUTOU des 15/10/2008, 17/10/2008, 18/12/2008 et 05/01/2009 - Vidange La Rose du 14/01/2009 - Baba Khalid Plomberie - Sanitaire du 21/03/2009 - Vegetech des 29/04/2009 et 22/06/2009), qui mentionnent son nom personnel en qualité de réceptionnaire des matériels et qui sont revêtues de sa signature, ainsi que des attestations justificatives des plaintes qu'il a lui-même déposées à la gendarmerie de St-Tropez, les 25 février 2008 et 21 avril 2008, pour le compte de la SCI SAINT-AMÉ.

Ces pièces ne sont pas discutées par la société appelante, laquelle se borne à affirmer, sans élément de preuve, '(qu') en aucun cas elle n'a embauché Monsieur [O] en qualité de salarié, ce dernier ayant été hébergé sur les recommandations de Monsieur [D] à titre gratuit' et '(qu') en l'absence de rémunération, pour un travail bénévole, il n'y a pas de contrat de travail'.

Enfin, l'intimé communique un courrier manuscrit de Monsieur [D] à la Société Générale, daté du 12 mars 2008, dans lequel celui-ci déclare se porter garant de la probité de Monsieur [O], qui a été '(son) employé pendant plusieurs années'.

Si elle explique que Monsieur [O] a été 'le salarié de Monsieur [D] dans une affaire qui lui appartient à LILLE', la société appelante n'en justifie pas et ne prétend pas que Monsieur [D], son associé, ait embauché Monsieur [O] pour son compte personnel, étant observé que l'examen des pièces versées aux débats révèle qu'outre ses fonctions de chauffeur, Monsieur [O] travaillait pour l'essentiel à la rénovation de la propriété de la SCI SAINT-AMÉ.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments la preuve suffisante de l'existence d'un contrat de travail conclu entre la SCI SILVER SAINT- AMÉ et Monsieur [O] à compter du mois de mai 2007.

Le jugement qui a statué en ce sens sera confirmé.

- sur la rupture du contrat de travail

La SCI SILVER SAINT-AMÉ ne conteste pas avoir mis fin à l'hébergement de Monsieur [O] le 6 mai 2009, lequel déclare avoir en réalité été 'congédié sans motif valable, ni préavis', et sans respect de la procédure de licenciement.

Ces faits sont confirmés par le témoignage de Monsieur [E], assurant que lui-même et son équipe étaient 'présents au portail', le 6 mai 2009, lorsque Monsieur [D] a demandé à Monsieur [O] de quitter les lieux, après avoir regroupé ses effets personnels, en lui indiquant qu'il ne travaillerait plus à son service.

Cette rupture verbale de la relation de travail, sans respect de la procédure de licenciement et sans l'envoi d'une lettre de licenciement motivée, s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en sorte que la demande de résiliation judiciaire postérieure est sans objet.

.../...

Compte tenu du montant du salaire perçu par Monsieur [O], justifié par les témoignages précités et par des éléments bancaires, de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise, du refus de prise en charge qui lui a été opposé par Pôle Emploi après la rupture, faute de produire les documents requis, et de la soustraction nécessairement intentionnelle de l'employeur à son obligation de procéder à la déclaration préalable d'embauche et à la remise des bulletins de paie pendant toute la période d'emploi d'une durée de deux ans, les premiers juges :

- ont à bon droit alloué à Monsieur [O] les diverses indemnités de rupture auxquelles il pouvait prétendre ;

- lui ont accordé, conformément aux dispositions des articles L. 1235-5, L. 8223-1 et L. 3132-1 à L. 3132-3 du code du travail, une juste réparation du préjudice subi pour licenciement abusif et irrégulier, travail dissimulé et violation du repos hebdomadaire ;

- ont à juste titre ordonné la remise des bulletins de paie et des documents sociaux conformes sous astreinte.

Ces dispositions du jugement seront confirmées.

- sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

En équité, le jugement sera confirmé à ce titre et, vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle, la SCI SILVER SAINT-AMÉ sera condamnée à payer à Maître [W] [P] une indemnité de 1.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel, tandis que la demande de cette société au même titre sera rejetée.

Outre ceux de première instance, cette société supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe,

Reçoit l'appel,

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne la SCI SILVER SAINT-AMÉ à payer à Maître [W] [P] une indemnité de 1.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel en application des articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991,

Condamne cette société aux dépens d'appel.

LE GREFFIER.LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 10/14633
Date de la décision : 22/03/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°10/14633 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-22;10.14633 ?
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