COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE11o Chambre A
ARRÊT AU FOND DU 04 MARS 2009
No 2009/ 130
Rôle No 05/14654
Marie-Thérèse X... épouse Y...
C/
SOCIETE CLINIQUE DE LA CIOTATSYNDICAT C.G.T.
Grosse délivrée le :à :
SCP BOTTAISCP SIDER
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance de LA CIOTAT en date du 24 Juin 2005 enregistré au répertoire général sous le no 15-05-55.
APPELANTE
Madame Marie-Thérèse X... épouse Y...demeurant ...comparant en personne,Assistée de la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour
INTIMEES
SOCIETE CLINIQUE DE LA CIOTATagissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège sis, demeurant 4/6 avenue Frédéric Mistral - 13600 LA CIOTATreprésentée par la SCP SIDER, avoués à la CourAssistée de Maître Patrick BANNWARTH, du barreau de MARSEILLE
SYNDICAT C.G.T. Syndicat de Personnels des Etablissements Sainte-Marguerite agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège sis, demeurant 40 rue Grognard - 83000 TOULONreprésentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 14 Janvier 2009 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Robert PARNEIX, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Robert PARNEIX, PrésidentMadame Danielle VEYRE, ConseillerMadame Michèle RAJBAUT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Mars 2009.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Mars 2009,
Signé par Monsieur Robert PARNEIX, Président et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 mai 2005, le syndicat CGT des personnels des Établissements Sainte-Marguerite (le SPESM CGT) a désigné Mme Y... en qualité de déléguée syndicale centrale d'une unité économique et sociale incluant la société Clinique de La Ciotat.
Saisi en contestation de cette désignation, le tribunal d'instance de La Ciotat, par jugement du 24 juin 2005, rendu en matière électorale et en dernier ressort, a rejeté les exceptions d'incompétence et de litispendance soulevées par Mme Y... et le SPESM CGT, annulé la désignation de Mme Y..., débouté le SPESM CGT et Mme Y... de leur demande reconventionnelle en reconnaissance d'une unité économique et sociale comprenant la société Clinique de La Ciotat et condamné solidairement les défendeurs au paiement d'une indemnité de750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 12 juillet 2005, Mme Y... a interjeté appel de ce jugement à l'encontre du SPESM CGT et de la société Clinique de La Ciotat.
Dans ses dernières écritures déposées le 19 avril 2008, elle demande à la cour :
1) Ã titre principal de :
-déclarer régulière sa désignation en qualité de déléguée syndicale de l'unité économique et sociale comprenant les sociétés Clinique Saint-Jean, Clinique Sainte-Marguerite, Clinique Vert Coteau, Clinique de La Ciotat, Financière Sainte-Marguerite, Logemed, la société de gestion Sainte-Marguerite et le Groupement d'intérêt économique Sainte-Marguerite ;
-dire et juger la requête de la société Clinique de La Ciotat nulle et de nul effet par application de l'article 114 du code de procédure civile ;
-réformer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle et dire le tribunal d'instance de La Ciotat incompétent à raison du bien-fondé de la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'appel en la cause par la société Clinique de La Ciotat des autres personnes morales composant l'unité économique et sociale ;
2) à titre subsidiaire, de faire droit à l'exception de litispendance, dire et juger le tribunal d'instance de Toulon seul compétent pour connaître de l'existence d'une unité économique et sociale et dire que ce tribunal devra surseoir à statuer en l'attente de l'arrêt de la cour sur l'appel du jugement du13 décembre 2004 ;
3) en tout état de cause, de condamner la société Clinique de La Ciotat au paiement d'une somme de 1 000 euros, à une amende civile du même montant pour procédure abusive et au versement d'une indemnité de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures déposées le 8 avril 2008, le SPESM CGT, intimé, forme un appel incident et conclut aux mêmes fins que Mme Y....
Les appelants soulèvent, en premier lieu, la nullité de la requête au motif que la société Clinique de La Ciotat n'a pas appelé en cause les sociétés revendiquées comme incluses dans l'unité économique et a dénaturé l'objet du litige en contestant la désignation de Mme Y... comme déléguée d'établissement et non comme déléguée syndicale centrale. Ils invoquent, ensuite, une exception de litispendance au profit du tribunal d'instance de Toulon qui serait, selon eux, seul compétent pour connaître du litige. Ils font également valoir que la société Clinique de la Ciotat est irrecevable en son action au profit de la « société mère » qui détient la majorité des parts sociales de son capital et des droits de vote qui y sont attachés. Enfin, ils estiment que la contestation est abusive et leur cause un préjudice.
Par conclusions déposées le 14 mai 2008, la société Clinique de La Ciotat sollicite la confirmation du jugement, le rejet de toutes les autres demandes et la condamnation de chacun des appelants au versement d'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose qu'en application de l'article 78 du code de procédure civile, la cour ne peut statuer que sur la compétence et ne peut connaître du fond du litige et en particulier de la question de l'existence d'une unité économique et sociale. Elle ajoute que le premier juge a, à juste titre, retenu sa compétence territoriale et écarté l'exception de litispendance.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur les pouvoirs de la cour
Attendu qu'en application de l'article L. 412-15 alinéa 3 du code du travail, devenu l'article L. 2143-5, le jugement qui statue sur la contestation de la désignation d'un délégué syndical n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation ; que selon l'article 78 du de procédure civile : « Si le juge se déclare compétent et statue sur le fond du litige dans un même jugement, celui-ci ne peut être attaqué que par la voie de l'appel, soit dans l'ensemble de ses dispositions s'il est susceptible d'appel, soit du chef de la compétence dans le cas où la décision sur le fond est rendue en premier et dernier ressort » ;
Attendu, en l'espèce, que le tribunal, après avoir rejeté les exceptions d'incompétence et de litispendance, a annulé la désignation de Mme Y... en qualité de déléguée syndicale centrale et a débouté les défendeurs de leur demande de reconnaissance d'une unité économique et sociale ; qu'il s'ensuit que ce jugement, statuant en matière électorale, a été à juste titre rendu en dernier ressort, de sorte que la cour ne peut se prononcer que du chef de la compétence ;
Attendu, en conséquence, que les demandes touchant le fond du litige et tendant à la constatation de la régularité de la désignation de Mme Y... et de l'existence d'une unité économique et sociale sont irrecevables ;
2) Sur l'exception de nullité de la requête introductive d'instance
Vu les articles 74 et 112 du code de procédure civile ;
Attendu que la société Clinique de La Ciotat fait valoir à juste titre dans ses écritures (page 12) que cette exception n'a pas été soulevée avant toute défense au fond ; que, par ailleurs, elle ne constitue pas une exception d'incompétence ; qu'elle est en conséquence doublement irrecevable en cause d'appel ;
3) Sur l'exception de litispendance
Attendu que les appelants ne reprennent pas devant la cour l'exception d'incompétence territoriale du tribunal d'instance de La Ciotat soulevée en première instance et n'invoquent plus que l'exception de litispendance ;
Attendu qu'aux termes de l'article 100 du de procédure civile : « Si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître, la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l'autre si l'une des parties le demande. A défaut, elle peut le faire d'office »;
Attendu, en l'espèce, que, selon les pièces du dossier et les écritures des parties, le SPESM CGT a désigné Mme Y... en qualité de déléguée syndicale centrale de huit sociétés ; que sept de ces désignations ont été contestées devant plusieurs tribunaux d'instance qui tous sont appelés à se prononcer sur l'existence d'une unité économique et sociale entre ces diverses sociétés ; que la société Clinique de La Ciotat, intimée dans la présente procédure est également défenderesse devant le tribunal d'instance de Marseille saisi en premier lieu par requête du 16 mai 2005 ;
Attendu qu'il s'ensuit que le même litige est pendant devant plusieurs juridictions également compétentes pour en connaître ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à l'exception de litispendance au profit du tribunal d'instance de Marseille et non de Toulon, ce dernier, désigné à tort par les appelants, ayant été saisi en second lieu le 17 mai 2005 ; que cette règle de procédure ne peut être mise en échec par le fait que les sociétés composant l'unité économique et sociale revendiquée par les appelants sont juridiquement distinctes ; que le jugement déféré qui a rejeté l'exception de litispendance sera réformé du seul chef de la compétence ;
4) Sur les demandes accessoires
Attendu qu'en contestant la désignation de Mme Y... la société Clinique de La Ciotat n'a fait qu'exercer un droit qui n'a pas dégénéré en abus ; que la demande des appelants tendant à sa condamnation à des dommages et intérêts et à une amende civile sera rejetée ;
Attendu qu'il n'est pas justifié de faire application des dispositions de l'article 700 du de procédure civile ;
Et attendu qu'en application de l'article L 412-15 du code du travail, devenu l'article R. 2143-5, les contestations relatives à la désignation des délégués syndicaux sont tranchées sans frais ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Vu les articles 78 et 100 du de procédure civile ;
Déclare irrecevables l'exception de nullité de la requête introductive d'instance ainsi que les demandes touchant au fond du litige ;
Réforme le jugement du 24 juin 2005 du seul chef de la compétence ;
Déclare le tribunal d'instance de La Ciotat incompétent au profit du tribunal d'instance de Marseille ;
Renvoie la cause devant le tribunal d'instance de Marseille ;
Déboute la société Clinique de La Ciotat de sa demande de dommages et intérêts et de sa demande tendant au prononcé d'une amende civile ;
Déboute les parties de leur demande le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
Dit n'y avoir lieu à dépens ;
Et le président a signé avec la greffière ;
La greffière Le Président