COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1o Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 20 NOVEMBRE 2008
FG
No 2008 / 679
Rôle No 07 / 17288
Josiane X...
Danièle X...
Marie-Astride X...
Michel X...
C /
Antoine Y...
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 28 Août 2007 enregistré au répertoire général sous le no 06 / 332.
APPELANTS
Madame Josiane X...
demeurant......
Madame Danièle X...
demeurant...
Monsieur Marie-Astride X...
demeurant...-
...
Monsieur Michel X...
demeurant......
représentés par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
plaidant par Me Jean-Pierre BURAVAN, avocat au barreau de TARASCON
INTIMÉ
Monsieur Antoine Y...
né le 04 Août 1956 à BERKAN (MAROC), demeurant...
représenté par la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU, avoués à la Cour,
plaidant par Me Louis SAYN URPAR, avocat au barreau de TARASCON
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 22 Octobre 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Madame Martine ZENATI, Conseiller
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2008,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,
Les 7 et 15 décembre 1998, M. Antoine Y... a fait assigner Mme Josiane X..., Mme Danielle X..., Mme Marie-Astrid X... et M. Michel X... devant le tribunal de grande instance de Tarascon aux fins de les voir condamner à lui payer la somme de 84. 556 francs (12. 890, 48 €) outre 30. 000 francs de dommages et intérêts.
Il exposait avoir été condamné par plusieurs décisions juridictionnelles à payer à titre de caution des sommes dues par la société SOGEBA SARL, alors qu'il avait cédé ses parts dans cette société par acte sous seing privé enregistré le 15 février 1990 à M. Guy X..., né le 26 mai 1942 à Lyon. Ce dernier étant décédé, il assignait ses héritiers Mme Josiane X..., Mme Danielle X..., Mme Marie-Astrid X... et M. Michel X....
Par jugement en date du 10 septembre 1999, le tribunal de grande instance de Tarascon a sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale de faux relative à l'acte de cession de 140 parts sociales de la SOGEBA par M. Antoine Y... à M. Guy X....
Cette procédure pénale s'est soldée par une ordonnance de non-lieu du 16 avril 2003, confirmée par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 16 octobre 2003.
Par jugement en date du 28 août 2007, le tribunal de grande instance de Tarascon a :
- condamné, pour les causes sus-énoncées, in solidum, Mme Josiane X..., Mme Danielle X..., Mme Marie-Astrid X... et M. Michel X... à payer à M. Antoine Y... la somme totale de 12. 890 €, avec intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 1998 et capitalisation des intérêts à compter du 20 février 2004,
- condamné en outre les consorts X... au paiement de la somme 1000 € au profit de
M. Antoine Y..., sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- rejeté la réclamation de M. Antoine Y... à titre de dommages et intérêts supplémentaires,
- débouté les consorts X... des fins de leur demande reconventionnelle,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision dans toutes ses dispositions,
- condamné les consorts X... aux entiers dépens de la procédure qui seront recouvrés selon les modalités de l'aide juridictionnelle.
Par déclaration de la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués, en date du 23 octobre 2007, Mme Josiane X..., Mme Danièle X..., Mme Marie-Astrid X... et M. Michel X... ont relevé appel de ce jugement.
Par leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 6 février 2008, Mme Josiane X..., Mme Danièle X..., Mme Marie-Astrid X... et M. Michel X... demandent à la cour, au visa des articles 1134 et 1315 alinéa 2 du code civil, de l'article 9 du code de procédure civile, de :
- dire que l'acte de cession en date du 15 février 1990 dont fait état M. Y... est un faux, ce qui entraîne sa nullité, voire son inexistence,
- dire que les appelants, venant aux droits de feu Guy X..., ne peuvent être tenus à garantir, en sa qualité d'associé, les engagements pris par M. Y... à l'égard de la société SOVAC,
- en conséquence, réformer le jugement en toutes ses dispositions,
- débouter M. Y... de l'intégralité de ses demandes,
- condamner M. Y... à leur payer la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. Y... aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP BOTTAI GEREUX et BOULAN, avoués.
Les consorts X... estiment que l'acte de cession de parts est un document fabriqué de toute pièce, qu'il s'agit d'un faux.
Ils estiment que l'arrêt du 24 septembre 1996 n'a pas autorité de chose jugée dans le présent litige, alors qu'il n'y a pas identité d'objet ni de cause et que la notion d'autorité de chose interprétée n'existe pas.
Les consorts X... font observer que ni les statuts, ni l'acte de cession ne mentionnent que le cessionnaire devait reprendre les engagements de caution souscrits par M. Y... pour la société SOGEBA. Ils font remarquer que M. Y... était caution à titre personnel et non en qualité d'associé.
Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 27 mars 2008, M. Antoine Y... demande à la cour, au visa des articles 1131, 1134, 1156 et suivants, 1351 et suivants du code civil, vu l'acte de cession de parts du 15 février 1991, vu les arrêts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence des 24 septembre 1996 et 16 octobre 2003, de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, et y ajoutant,
- condamner in solidum les consorts X... à lui payer la somme de 10. 000 € à titre de dommages et intérêts,
- débouter les consorts X... de l'intégralité de leurs demandes reconventionnelles,
- condamner in solidum les consorts X... à lui payer une somme de 4. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les consorts X... aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP BOISSONNET et ROUSSEAU, avoués.
M. Y... expose avoir contracté le 25 mai 1989, alors qu'il travaillait comme artisan en son nom propre, un crédit-bail avec la société SOVAC concernant un véhicule automobile Citroën C 25, et que ce contrat a été repris par la société SOGEBA. Il précise avoir cédé ses parts de la SOGEBA à M. Guy X... le 15 février 1990 et que ce dernier devait faire son affaire de la reprise des engagements de M. Y.... Il expose que le véhicule en crédit-bail a été volé le 29 juin 1990, que la compagnie d'assurances a remboursé la valeur du véhicule mais qu'il restait quatre loyers impayés et de la TVA.
M. Y... rappelle que M. Guy X... a déposé le bilan de la société SOGEBA et qu'il aurait oublié ses engagements. M. Y... expose qu'il a été condamné par jugement du tribunal de commerce d'Arles du 27 mai 1993 à payer 25. 630, 85 francs avec intérêts au taux légal à la SOVAC plus des frais irrépétibles, jugement confirmé par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, et qu'en définitive il a réglé à ce titre 42. 156 francs.
M. Y... explique qu'il avait cautionné les engagements de la société Sogeba pour du matériel micro-informatique par crédit-bail avec la SOVAC le 3 septembre 1990. Il précise qu'à la suite d'impayés, il a dû verser 42. 500 francs en règlement de cette dette.
Il expose que, dans une affaire similaire, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a, par arrêt du 24 septembre 1996, dit que l'acte de cession emportait pour M. Guy X... la reprise de toutes les obligations attachées aux parts sociales.
M. Y... fait valoir que l'accusation de faux n'est pas fondée, compte tenu du résultat de la procédure pénale à ce sujet. Il fait remarquer que M. Guy X... lui-même n'avait jamais prétendu qu'il y aurait eu un faux et a exécuté les termes de l'arrêt du 24 septembre 1996.
M. Y... estime que l'engagement de M. Guy X... le rendait caution de la société SOGEBA et fait observer qu'il a déjà été ainsi jugé le 24 septembre 1996.
L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 24 septembre 2008.
MOTIFS,
- Sur la cession de parts et ses conséquences :
La société à responsabilité limitée Société Générale du Bâtiment SOGEBA au capital de 50. 000 francs a été créée à la suite de statuts datés du 26 juillet 1989 entre M. Jean Z..., M. Antoine Y... et M. Guy X....
Elle comprenait 500 parts réparties à raison de 250 parts pour M. X..., 200 parts pour M. Y... et 50 parts pour M. Z....
A l'article des statuts " droits et obligations attachés aux parts sociales ", il est indiqué que chaque part sociale confère à son propriétaire un droit égal dans les bénéfices de la société et dans tout l'actif social.
Par acte sous seing privé enregistré le 15 février 1990 à la recette des impôts d'Arles, M. Antoine Y... a cédé à M. Guy X... 140 parts sociales numérotées 361 à 500 sur les 500 parts sociales composant le capital social de la société SOGEBA, étant précisé que ces parts ne sont représentées par aucun titre.
Il est précisé dans cet acte de cession que M. Guy X... sera propriétaire des parts cédées à compter du 14 février 1990 et aura seul droit à toute répartition qui pourra être effectuée et que M. Guy X... sera subrogé dans tous les droits et obligations attachés aux parts cédées.
Cette cession n'est pas un faux. L'instruction à ce sujet s'est terminée par un non lieu. Cet acte de cession existe et doit être pris en considération.
Mais il ne peut être donné à cet acte plus d'effets et de portée qu'il n'en a réellement.
S'agissant d'une société à responsabilité limitée chaque associé n'était tenu aux pertes de la société qu'à concurrence de son apport.
La cession de parts sociales n'entraîne pas de reprise des engagements de la société, autrement que par la responsabilité des pertes de la société à concurrence des parts cédées.
Un arrêt n'a autorité de chose jugée que pour son dispositif. Le dispositif de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 24 septembre 1996 dit : confirme le jugement dans les dispositions non contraires à cet arrêt, c'est à dire, condamne M. Guy X... à garantir toutes les sommes en principal, intérêts et frais d'exécution mises à sa charge en vertu du jugement no537 / 90 rendu par le 25 février 1991 par le tribunal d'instance d'Arles. Par ailleurs la cour d'appel statue sur les frais irrépétibles, une demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et sur les dépens.
La cour d'appel n'a pas dit dans son dispositif : M. Guy X... est tenu des engagements de la société SOGEBA ni M. Guy X... est tenu des engagements de M. Antoine Y.... Elle a statué relativement à une somme précise dans un cadre précis.
Il faut noter incidemment que les statuts précisaient que M. Antoine Y... était titulaire de 200 parts. Il en a cédé 140. M. Y... ne dit rien sur les autres 60 parts dont il était titulaire. M. Y... ne prouve pas être sorti de cette société en en ayant cédé toutes ses parts.
- Sur la demande relative à une somme payée au titre d'un crédit bail sur un véhicule :
Par contrat sous seing privé daté du 25 mai 1989 entre S-A / D-J artisan, " association de fait ", la société de crédit-bail SOVAC et la société venderesse Trebon Auto, un véhicule Citroën C 25 a été vendu par la société Trebon Auto à la société CVL SOVAC qui l'a loué en crédit bail à la personne morale dite SOVAC, avec un cautionnement personnel de M. Antoine Y....
Par jugement réputé contradictoire du 27 mai 1993 le tribunal de commerce d'Arles a condamné M. Antoine Y... à payer à la société CVL-SOVAC la somme de 25. 630, 85 francs en tant que caution. A la suite de l'appel de M. Y..., qui ne s'était pas défendu devant le tribunal, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, par arrêt de du 27 février 1997, a confirmé ce jugement du tribunal de commerce d'Arles.
La cour d'appel, dans son arrêt, note : " M. Y... reconnaît dans ses écritures, son impossibilité à démontrer l'acceptation par la SOVAC de la cession du bail du véhicule à la société SOGEBAT. ".
M. Y... a été condamné à titre personnel. Il n'est pas établi que M. Guy X... se serait substitué en tant que caution, avec l'accord de la SOVAC, à M. Y....
Il n'est pas établi que la location en crédit bail de ce véhicule ait été reprise par la société SOGEBA et acceptée par la société SOVAC.
Il n'est donc pas justifié de ce que cette condamnation concerne la société SOGEBA.
Aucun motif ne permet de rechercher M. Guy X... du chef de la condamnation subie par M. Y... par jugement du tribunal de commerce d'Arles du 27 mai 1993 confirmé par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 27 février 1997.
- Sur la demande relative aux sommes payées à la suite d'un crédit bail relatif à du matériel informatique :
Un contrat sous seing privé daté du 3 janvier 1990, a été passé entre la société SOGEBA SARL et la société SOVAC entreprises. Il s'agit d'un crédit bail relatif à du matériel informatique avec 16 loyers. Ce crédit bail faisait l'objet d'un cautionnement personnel de M. Antoine Y....
Suite à des impayés la SOVAC a obtenu une ordonnance d'injonction de payer contre M. Antoine Y..., lui a fait notifier un commandement de payer, a diligenté une procédure de saisie exécution, et M. Antoine Y... a fini par s'acquitter de la somme de 42. 400 francs, restant à devoir 26. 178, 88 francs au vu du décompte de l'huissier du 14 novembre 1998.
La cession de parts du 15 février 1990 n'entraîne pas pour conséquence la reprise des engagements personnels de M. Antoine Y... en tant que caution.
M. Guy X... n'était pas caution. Le débiteur était la société SOGEBA. M. Guy X... n'est tenu des pertes de la société SOGEBA qu'à concurrence de son apport dans le capital social.
Cette action ne repose sur aucun fondement juridique.
M. Y... en sera débouté.
La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive est totalement infondée.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Réforme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 août 2007 par le tribunal de grande instance de Tarascon,
Statuant à nouveau,
Déboute M. Antoine Y... de ses demandes,
Condamne M. Antoine Y... à payer aux consorts X... la somme de 1000 € au sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne M. Antoine Y... aux dépens et autorise la SCP BOTTAI, GEREUX et BOULAN, avoués, à recouvrer directement sur lui, par application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile, les dépens dont ces avoués affirment avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT