COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1ère Chambre C
ARRÊT
DU 13 NOVEMBRE 2008
No 2008/
G. R.
Rôle No 08/08253
S.A.R.L. RC
C/
S.C.I. de L'ARGENS
Grosse délivrée
le :
à :
Maître JAUFFRES
SCP BLANC
réf 088253
Décisions déférées à la Cour :
Ordonnances de référé rendues par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 22 Novembre 2006 enregistrée au répertoire général sous le No 06/08901, et du 27 Décembre 2006 enregistrée sous le No 06/9520.
APPELANTE :
S.A.R.L. RC,
dont le siège est 10/11, Centre Commercial CARREFOUR - Route Nationale 7 83480 PUGET SUR ARGENS
représentée par Maître Jean-Marie JAUFFRES, avoué à la Cour,
plaidant par Maître Philippe TEBOUL, avocat au barreau de NICE
INTIMÉE :
S.C.I. de L'ARGENS,
dont le siège est 576, Avenue des Bigochets - 78670 VILLENNES SUR SEINE
représentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Josiane CARRIERE JOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître Philippe SOMARRIBA, avocat au barreau de PARIS
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COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Octobre 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Guy ROMAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Guy ROMAN, Président
Monsieur Xavier FARJON, Conseiller
Madame Anne FENOT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Novembre 2008.
ARRÊT :
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Novembre 2008,
Signé par Monsieur Guy ROMAN, Président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :
La SCI de L'ARGENS a, par acte notarié du 5 octobre 1994, consenti à la SARL RC un bail portant sur un local commercial situé au Centre Commercial de PUGET SUR ARGENS d'une durée de douze ans, moyennant un loyer annuel de 220.000 Frs avec réfaction de 20% la première année, outre un loyer variable additionnel fixé à 7% du chiffre d'affaires.
Par acte extra-judiciaire du 29 mars 2006 la Société bailleresse a donné congé avec offre de renouvellement à la SARL RC pour la date du 5 octobre 2006, avec un prix du loyer porté à la somme de 70.000 €;
Par acte extra-judiciaire du 2 octobre 2006 la SARL RC a notifié à la SCI de L'ARGENS son acceptation du renouvellement mais a refusé le loyer demandé.
Par acte du 7 novembre 2006 la SCI de L'ARGENS a fait assigner la SARL RC devant le Président du Tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN pour voir désigner un expert afin d'évaluer la valeur locative des locaux et l'indemnité d'éviction susceptible d'être due en application de l'article 145 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 22 novembre 2006, le Président du Tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN a désigné Monsieur B... en qualité d'expert pour fixer l'indemnité d'éviction.
Par une deuxième ordonnance du 27 décembre 2006, la mission de l'expert était étendue à la fixation de la valeur locative.
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Par acte du 6 mai 2008 la SARL RC a interjeté appel des deux ordonnances;
Par déclaration au greffe de la cour en date du 7 mai 2008 la SARL RC a interjeté appel de l'ordonnance du 22 novembre 2006.
Les deux appels ont été joints.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives signifiées le 30 septembre 2008, la SARL RC demande à la cour de réformer l'ordonnance du 22 novembre 2006, de dire n'y avoir lieu à désignation d'un expert et de condamner la SCI de L'ARGENS à lui verser la somme de 3.000 € sur la base de l'article 700 du Code de procédure civile au motif que l'expertise in futurum ne peut être ordonnée que si elle s'inscrit dans le cadre d'un litige potentiel entre les parties ce qui n'est pas le cas en l'espèce dès lors que la SCI n'avait pas exercé son droit d'option prévu à l'article L 145-57 du Code de commerce et qu'elle ne l'exercera que par acte extra-judiciaire du 20 février 2008;
Elle soutient qu'elle n'a pas acquiescé à l'ordonnance de référé qui était exécutoire;
En ce qui concerne l'ordonnance du 27 décembre 2006, elle en demande également la réformation et la condamnation de la SCI au paiement de la somme de 3.000 € au motif qu'en application de l'article 29 du décret du 30 septembre 1953 les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé sont portées, quel que soit le montant du loyer devant le résident du Tribunal de grande instance ou le juge qui le remplace, il est statué sur mémoire, que cette compétence est d'ordre public;
* * *
La SCI de L'ARGENS conclut à la confirmation des deux ordonnances et à la condamnation de la SARL RC à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Elle demande de déclarer irrecevables les demandes de la SARL RC
Elle soutient que :
- le 19 mars 2008 Monsieur B... a déposé son rapport
- le 20 février 2008 elle a notifié à la SARL RC son droit d'option et son refus de renouvellement avec offre d'éviction
- le 11 avril 2008 la SARL RC a été assignée au fond devant le Tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN aux fins de fixation de l'indemnité d'éviction
- devant le juge des référés, la SARL RC avait fait toutes protestations et réserves à la première audience et s'est rapportée à justice lors de la deuxième audience, et est donc irrecevable et mal fondée à agir.
* * *
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que la SCI de L'ARGENS prétend que l'appel de la SARL RC est irrecevable dès lors qu'elle a acquiescé aux expertises ordonnées ;
Attendu qu'en déclarant s'en rapporter à justice et en formant toutes protestations et réserves devant le premier juge, la SARL RC n'a pas manifesté son intention d'accepter les expertises ordonnées mais au contraire a entendu s'y opposer ;
Attendu par ailleurs que les ordonnances entreprises étant exécutoires de plein droit, leur exécution n'emporte pas présomption d'acquiescement ;
* * *
Attendu qu'aux termes de l'article 145 du Code de procédure civile , s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ;
Sur l'ordonnance du 22 Novembre 2006
Attendu que dès lors qu'à la date de la demande d'expertise tendant à déterminer l'indemnité d'éviction, la SCI de l'ARGENS avait donné congé à sa locataire avec offre de renouvellement, elle n'avait aucun motif légitime à solliciter cette mesure en l'absence d'un litige potentiel ; l'acte extra-judiciaire ainsi délivré manifestant la volonté de la bailleresse de renouveler le bail et non d'y mettre fin alors que l'indemnité d'éviction doit être estimée en fonction de la consistance du fonds de commerce à la date du refus de renouvellement et la valeur de ce fonds à la date du départ du locataire ;
Attendu cependant que la SCI de l'ARGENS ayant exercé son droit d'option en vertu de l'article L 145-57 du code du commerce par acte extra-judiciaire du 20 Février 2008, à la date à laquelle la Cour statue, la société bailleresse justifie d'un motif légitime de sorte que l'ordonnance du 22 Novembre 2006 doit être confirmée, le juge du fond ayant été saisi postérieurement ;
Sur l'ordonnance du 27 Décembre 2006
Attendu qu'en l'état de la contestation sur la fixation du prix du loyer les parties étaient tenues de saisir le président du Tribunal de Grande Instance ou le juge qui le remplace selon une procédure spécifique après dépôt de mémoires exclusive de l'application de l'article 145 du Code de procédure civile ;
Attendu qu'il convient en conséquence de réformer les deux ordonnances entreprises ;
Attendu qu'aucune considération liée à l'équité ou à la situation économique des parties ne justifie l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu l'article 696 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort
Reçoit les appels ;
Confirme l'ordonnance du 22 Novembre 2006 ;
Réforme l'ordonnance du 27 Décembre 2006 ;
Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'expertise destinée à fixer le prix du loyer ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne la SCI de L'ARGENS aux dépens de première instance et d'appel, ceux-ci profitant à Maître JAUFFRES avoué en application de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,