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23/09/2008 | FRANCE | N°435

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0007, 23 septembre 2008, 435


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1o Chambre A

ARRÊT AU FOND
DU 23 SEPTEMBRE 2008
G. L
No 2008 /

Rôle No 08 / 02263

COMMUNE D'AURIBEAU SUR SIAGNE

C /

Jean-Pierre X...
Claude X...
SOCIETE DES ETABLISSEMENTS JEAN X... SAS

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 24 Janvier 2008 enregistré au répertoire général sous le no 07 / 02042.

APPELANTE

COMMUNE D'AURIBEAU SUR SIAGNE, représentée pa

r son Maire en exercice, demeurant Hôtel de Ville-06810 AURIBEAU SUR SIAGNE

représentée par la SCP LIBERAS-BUVAT-MICHOTEY, avoués à la Cour, assistée pa...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1o Chambre A

ARRÊT AU FOND
DU 23 SEPTEMBRE 2008
G. L
No 2008 /

Rôle No 08 / 02263

COMMUNE D'AURIBEAU SUR SIAGNE

C /

Jean-Pierre X...
Claude X...
SOCIETE DES ETABLISSEMENTS JEAN X... SAS

Grosse délivrée
le :
à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 24 Janvier 2008 enregistré au répertoire général sous le no 07 / 02042.

APPELANTE

COMMUNE D'AURIBEAU SUR SIAGNE, représentée par son Maire en exercice, demeurant Hôtel de Ville-06810 AURIBEAU SUR SIAGNE

représentée par la SCP LIBERAS-BUVAT-MICHOTEY, avoués à la Cour, assistée par Me Frédéric MASQUELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMES

Monsieur Jean-Pierre X... agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Mme X... née Z...

né le 23 Février 1941 à PARIS (15E), demeurant ...

représenté par Me Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
assisté par Me Daniel AMSON, avocat au barreau de PARIS

Monsieur Claude X..., agissant tant en son personnel qu'en sa qualité d'héritier de Mme X... née Z...

né le 17 Mars 1943 à PARIS (15E) (75), demeurant ...

représenté par Me Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
assisté par Me Daniel AMSON, avocat au barreau de PARIS

SOCIETE DES ETABLISSEMENTS JEAN X... SAS, agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège, 37 rue Galilée-75116 PARIS

représentée par Me Paul MAGNAN, avoué à la Cour,
assistée par Me Daniel AMSON, avocat au barreau de PARIS

*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Juin 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M. LAMBREY, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Gérard LAMBREY, Président
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller
Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2008.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2008,

Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement rendu le 24 janvier 2008 par le Tribunal de Grande Instance de GRASSE entre les consorts X..., la S. A. S. SOCIÉTÉ DES ETABLISSEMENTS JEAN X... et la Commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE,

Vu l'appel interjeté le 7 février 2008 par la Commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE,

Vu les conclusions récapitulatives déposées le 13 juin 2008 par l'appelante,

Vu les conclusions déposées le 17 juin 2008 par les intimés,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 24 juin 2008.

SUR CE :

Sur la procédure :

1. Attendu que les consorts X... concluent à l'irrecevabilité et à la nullité de l'appel interjeté le 7 février 2008 par le maire de la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE, sans autorisation du conseil municipal ;

Attendu que d'une part Jacques C..., maire pour la durée de son mandat, bénéficie depuis le 2 avril 2001 d'une délégation générale d'attribution du conseil municipal au maire, l'autorisant notamment à intenter au nom de la commune les actions en justice ou se défendre dans les actions intentées contre elle, spécialement en matière foncière, et dans " toutes les affaires contentieuses et urgentes " ;

Attendu que cette délégation générale lui a été renouvelée le 1er avril 2008 ;

Attendu que par ailleurs le conseil municipal d'AURIBEAU SUR SIAGNE a pris le 5 février 2008 une délibération rendue exécutoire et non attaquée par laquelle son maire était chargé de faire appel de la décision et de continuer à défendre la commune dans l'affaire X... ;

Attendu par conséquent que quelque soit le contenu des informations et opinions manifestées à l'occasion de ces délibérations, le maire d'AURIBEAU SUR SIAGNE avait une autorisation régulière du conseil municipal pour initier et poursuivre la présente procédure de sorte que les intimés seront déboutés de leur incident d'irrecevabilité de l'appel, et des actes de procédure subséquents ;

2. Attendu que les intimés estiment par ailleurs que la procédure d'appel est entachée d'une irrégularité manifeste pour non-respect de l'avis donné aux parties et à l'avoué conformément aux termes de l'article 955-1 du Code de Procédure Civile ;

Attendu que cette formalité s'impose lorsqu'une partie saisit la cour selon la procédure à jour fixe ou par requête conjointe, et non comme en l'espèce par déclaration d'appel, suivie d'une fixation par ordonnance du président de chambre rendue le 3 mars 2008 au visa de l'article 910 du Code de Procédure Civile à l'audience du 24 juin 2008 ;

Attendu que cette exception de nullité n'est pas fondée ;

Sur le fond :

1. Attendu que la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE soutient en premier lieu que faute par les consorts X... de démontrer qu'ils disposaient de la volonté et des moyens financiers nécessaires pour procéder au rachat du terrain en 1992, ils doivent être " déboutés de leur demande indemnitaire " ;

Attendu que l'arrêt de la cour d'appel de céans du 14 juin 2005, devenu irrévocable depuis le rejet du pourvoi par la cour de cassation le 11 octobre 2006, a définitivement jugé que les consorts X... étaient bien fondés en leur demande d'indemnisation compensatoire de leur droit de rétrocession et a fixé au 2 juin 1992 le point de départ à prendre en compte pour l'évaluation de leur préjudice ;

Attendu que par conséquent seul reste à juger la réparation du préjudice sur la base de l'expertise judiciaire confiée à Madame A... déposée le 22 janvier 2007 et des pièces régulièrement versées aux débats ;

2. Attendu en droit que lorsque la rétrocession est devenue impossible l'exproprié est fondé à obtenir la réparation du dommage subi du fait de la privation de la plus-value acquise par le bien exproprié ainsi que de la privation de jouissance dudit bien ;

Attendu que la réparation de la perte de la plus-value acquise par le terrain doit prendre en compte la valeur vénale acquise à la date de la décision qui fixe le montant du préjudice ;

Attendu que la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE, qui revendique comme date d'estimation l'année 2005, fait valoir que depuis l'approbation du plan de prévention des risques naturels d'inondation (PPRI) le 4 novembre 2004 rendu obligatoire par le préfet sur le territoire de la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE, les parcelles litigieuses expropriées sont frappées d'inconstructibilité, ce qui leur fait subir une dévalorisation importante, que son expert privé Monsieur E... a chiffré à 74 € le mètre carré de terrain nu ;

Attendu que l'expert judiciaire A..., qui a calculé conformément à sa mission la plus-value à la date de juin 1992, puis ensuite calculé également la plus-value à la date de 2005, à la demande de la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE, refusant toutefois de souscrire au raisonnement de la commune qui en tirait comme conséquence l'absence de toute plus-value en 2005, et laissant logiquement au tribunal le soin de trancher ce point de droit ;

Attendu que le premier juge a estimé pour retenir l'évaluation de 2005 à 1 781 707 € au lieu de celle de 592 000 € (valeur 1992) qu'il convenait de se baser sur la réalité des constructions qui ont été édifiées sur les propriétés expropriées, et qui ont de fait une valeur économique ;

Attendu qu'il s'agit en réalité d'indemniser des droits à bâtir et non des immeubles expropriés de sorte que l'évaluation du préjudice, à la date actuelle, comporte nécessairement un terme qui se révèle quasiment économiquement nul, puisqu'elle doit prendre en compte un terrain rendu agricole ;

Attendu en revanche que le premier terme de la plus-value, calculé à juin 1992, point de départ de la période à prendre en compte pour évaluer le préjudice subi par l'exproprié doit naturellement être pris en compte, puisque l'indemnité doit permettre à l'exproprié d'obtenir la réparation de la perte de plus-value incontestablement subie par le terrain au moment où la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE a été mise en demeure en vain par l'assignation du 2 juin 1992 de réparer le préjudice lié à l'impossibilité de rétrocession ;

Attendu par conséquent que la date d'évaluation à retenir pour l'évaluation du préjudice financier effectivement subi par les consorts X... est celle de juin 1992 ;

3. Attendu que la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE conteste la base de calcul retenue par l'expert A... qui a raisonné sur la base des droits à bâtir des terrains (estimation à la charge foncière) et non par prix moyen au mètre carré brut sur une superficie de 3 667 m ² ;

Attendu que la méthode d'évaluation retenue par l'expert judiciaire et entérinée par le tribunal est parfaitement adaptée à la situation car les consorts X... voulaient dès l'origine vendre leur propriété pour y accueillir des constructions et que c'est exactement sur le même critère que l'indemnité d'expropriation a été calculée à l'origine et fixée par l'arrêt du 21 décembre 1982 (page 5 paragraphe 2 et 3) ;

Attendu que les autres critiques de la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE ne sont pas de nature à remettre en cause les calculs de l'expert A..., notamment sur la seule déduction des équipements pris en charge par la commune soit 200 693 €, à l'exclusion des équipements pris en charge par l'aménageur, dans le cadre de la convention de ZAC, certes jugé conforme à l'objet de l'expropriation, mais auquel la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE n'est pas fondée à se substituer, ne s'étant pas personnellement appauvrie au profit des consorts X... ;

Attendu que dans la mesure où les parties ne remettent pas en cause, par leur appel, l'évaluation de la perte de revenus consécutifs à la privation de jouissance, calculés de 1992 à 2006 pour un terrain agricole, la cour fixe à la somme globale de 592 000 € + 32 327 € = 624. 327 € le montant de l'indemnité compensatrice du droit à rétrocession dont les consorts X... ont été privé par la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE ;

4. Attendu que la demande de délai de paiement sollicitée par la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE sera écartée par les motifs retenus au jugement, l'absence des provisions que nécessitait la procédure depuis 1992 ressortant de l'imprévision de la débitrice ;

5. Attendu que la lecture du rapport du 23 février 1992 établi dans le cadre du litige ne permet pas de caractériser la mauvaise foi de la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE, qui s'est au contraire justifiée en se considérant " obligée " de favoriser quelques activités commerciales (pharmacie, épicerie, locaux médicaux, etc...) et les logements sociaux (sic) pour équilibrer son projet compte tenu de ses très faibles moyens financiers (sic) ;

Attendu que la longueur excessive des diverses procédures antérieures, qui devaient se reconnaître elles-mêmes frustratoires, et du présent procès, qui ne peut voir la commune substitué à la responsabilité éventuelle de l'Etat, ne peuvent générer de dommages-intérêts ; que l'issue du présent appel, partiellement infirmatif, n'est pas de nature à caractériser un abus du droit d'appel ; de sorte que les intimés seront déboutés de leur demande reconventionnelle accessoire en dommages et intérêts ;

6. Attendu qu'en ce qui concerne le point de départ des intérêts de droit, dans la commune où les intimés concluent à la confirmation du jugement il y sera fait droit par adoptions des motifs du premier juge ;

7. Attendu que succombant sur l'essentiel, la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- Déclare l'appel recevable.

- Rejette l'exception de nullité de la procédure.

- Au fond,

- Confirme partiellement le jugement.

- Statuant à nouveau pour le tout.

- Condamne la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE à payer aux consorts X... et à la Société DES ETABLISSEMENTS JEAN X... la somme de SIX CENT VINGT QUATRE MILLE TROIS CENT VINGT SEPT EUROS (624. 327 €)
(avec déduction éventuelle de la provision de CENT VINGT MILLE EUROS (120 000 €)) en réparation de leur préjudice causé par l'impossibilité d'exercer leur droit de rétrocession sur les terrains expropriés, outre intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2004, avec anatocisme depuis cette date, ainsi que la somme de VINGT CINQ MILLE EUROS (25 000 €) en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

- Condamne la commune d'AURIBEAU SUR SIAGNE aux entiers dépens.

- Autorise SCP MAGNAN, avoués, à recouvrer directement contre celle-ci le montant de ses avances.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0007
Numéro d'arrêt : 435
Date de la décision : 23/09/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Grasse, 24 janvier 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2008-09-23;435 ?
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