15o Chambre A
ARRÊT AU FOND DU 28 MARS 2008
No 2008 /
Rôle No 07 / 04599
MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD
C /
S. C. I. LA PIGNE
Michèle Ginette Georgette X...
Grosse délivrée à : COHEN MAGNAN
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 15 Février 2007 enregistré au répertoire général sous le no 07 / 00002.
APPELANTE
MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège sis10 Boulevard Alexandre Oyon-72030 LE MANS CEDEX 9
représentée par la SCP COHEN- GUEDJ, avoués à la Cour, assistée de la SELARL DRAILLARD, avocats au barreau de GRASSE substituée par Me Muriel MANENT, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
INTIMEES
S. C. I. LA PIGNE prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège sis Les Mercuriales No387-83440 SEILLANS
défaillante
Mademoiselle Michèle X... née le 24 Août 1950 à LE CANNET ROCHEVILLE (06), demeurant... ou à... ..., et actuellement...
représentée par Me Paul MAGNAN, avoué à la Cour, assistée de la SCP CADJI ET ASSOCIES, substituée par Me Delphine DURANCEAU (associée), avocats au barreau d'AIX EN PROVENCE
*- *- *- *- * COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 13 Février 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Olivier BRUE, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Denis JARDEL, Président Monsieur Christian COUCHET, Conseiller Monsieur Olivier BRUE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Véronique DEVOGELAERE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2008.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2008,
Signé par Monsieur Denis JARDEL, Président et Madame Véronique DEVOGELAERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*** FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par acte notarié du 27 juin 2006, Madame Michèle X... a vendu à la SCI LA PIGNE un bien immobilier sis à CANNES.
Par actes du 2 novembre 2006, et du 1er décembre 2006, LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD, créancier hypothécaire de premier rang, ont fait signifier à Madame Michèle X... et la SCI LA PIGNE, avec dénonce aux autres créanciers inscrits, des réquisitions de surenchère, ainsi qu'une assignation à jour fixe.
L'assignation en surenchère du dixième a été notifiée le 5 janvier 2007.
Par jugement du 15 février 2007, le Tribunal de Grande Instance de GRASSE a déclaré LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD irrecevables à former surenchère du dixième et à notifier des réquisitions afin de mise aux enchères, en l'absence d'intérêt et les a condamnées à payer à Madame Michèle X... la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par assignation valant appel motivé du 8 mars 2007 et déclaration au greffe de la Cour en date du 15 mars 2007, LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD ont relevé appel de cette décision.
LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD sollicitent que leur surenchère soit déclarée régulière est valable, que la somme consignée soit déclarée suffisante, qu'il soit ordonné la vente sur surenchère des immeubles en cause, aux enchères publiques, sur la mise à prix de 214 500 €, en sus des charges, et qu'elles soient déclarées acquéreur des immeubles surenchéris, à charge pour elles de déposer au greffe du tribunal l'expédition de leur acte d'acquisition. Elles réclament la condamnation de Mademoiselle X... à leur payer la somme de 6 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD exposent avoir, en leur qualité d'assureur, réglé une dette de la SCI RÉSIDENCE LES OLIVADES, avoir entrepris une action en remboursement à l'encontre de ses associés, et ainsi pris une hypothèque judiciaire conservatoire sur un immeuble appartenant aux époux C.... Elles précisent que par jugement du 14 août 1991, le Tribunal de Grande Instance de GRASSE a condamné les époux C... à payer la somme de 120 000 F (15 % de la créance) et Madame Michèle X... à payer 680 000 F (85 % de la créance), cette décision ayant été confirmée par arrêt de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE du 22 février 2001, ayant précisé que Madame Jeanne C... et Madame Michèle X... se trouvaient solidairement tenues des sommes mises à la charge des époux C..., ce, en qualité d'héritières.
Elles ajoutent que le 31 mai 1994, Madame Jeanne C... a vendu à sa fille Madame Michèle X... le bien ainsi hypothéqué, sans qu'elles en aient été avisées, malgré leur qualité de créancier de premier rang.
LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD indiquent avoir découvert par la notification de purge que le bien avait été vendu à l'amiable à la SCI LA PIGNE pour un prix dérisoire, sans qu'elle ait été préalablement informée, d'où la procédure de surenchère.
Elles affirment que la contestation de la surenchère par Madame Michèle X... est irrecevable, d'une part, pour défaut d'intérêt à agir, dans la mesure où un débiteur malheureux et de bonne foi ne s'oppose pas à la vente de son bien plus cher que le prix qui lui a été proposé et précise d'autre part que l'obligation de garantie vis- à- vis de l'acquéreur pour la différence de prix, invoquée par la débitrice, n'est appuyée sur aucun texte. Elles ajoutent que l'article 2486 du Code civil ne s'applique que lorsque l'adjudicataire sur surenchère est le même que l'acquéreur initial.
LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD estiment de plus que l'action est irrecevable, en vertu de l'adage « la fraude corrompt tout », considérant que la vente du bien à la SCI LA PIGNE est manifestement une manoeuvre pour échapper aux créanciers.
Elles soulignent que leur intérêt à agir résulte dans le risque de devoir payer une nouvelle indemnisation expliquant la recherche du paiement intégral du créancier et affirment avoir agi dans le délai de 40 jours, à compter de la notification de la vente par le nouveau propriétaire, prévu par l'article 2480 du Code civil, dans le cadre d'une délégation régulière de pouvoirs.
LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD soutiennent que l'article 1281-14 du Code de procédure civile n'est pas applicable en la cause, la procédure ayant été engagée avant le 1er janvier 2007. Elles précisent qu'en tout état de cause leur solvabilité leur permettra de payer le montant des charges.
Elles ajoutent qu'aucune nullité de procédure ne pourra être prononcée en l'absence de grief réellement subi par Madame Michèle X....
Madame Michèle X... conclut à la confirmation du jugement ayant déclaré LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD irrecevables à former surenchère du dixième et à notifier la réquisition afin de mise aux enchères, en l'absence d'intérêt et subsidiairement à l'annulation de la réquisition de mise aux enchères notifiée le 5 janvier 2007. Elle conclut à leur condamnation à lui payer une indemnité de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Madame Michèle X... soulève l'irrecevabilité de l'appel, en application des articles 900 et 901 du Code de procédure civile et précise que celui- ci aurait dû être régularisé par une déclaration et non par assignation.
Elle estime que LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD n'ont pas intérêt à pratiquer une surenchère, dans la mesure où le prix de vente est suffisant pour régler leur créance hypothécaire.
Madame Michèle X... affirme que la notification afin de purge du 1er décembre 2006 au domicile élu dans le cadre de l'inscription d'hypothèque définitive ne fait pas courir un nouveau délai, en l'état de la notification réalisée aux mêmes fins le 2 novembre 2006, au domicile élu par le créancier dans le cadre de l'hypothèque provisoire.
Selon elle, l'annulation de la surenchère est encourue, en l'absence du pouvoir spécial prévu par l'article 2480-4 du Code civil, et qu'elle a subi un grief, n'ayant pas pu vérifier si le mandataire avait effectivement qualité pour décider de formaliser la surenchère de 10 % du prix de vente de l'immeuble.
Madame Michèle X... invoque l'absence de consignation du prix des charges, prévue à peine de nullité par les articles 2480-5 du Code civil et 1281-14 du Code de procédure civile.
La SCI LA PIGNE, assignée par acte remis en son siège, à une personne ayant déclaré être habilitée à le recevoir le 8 mars 2007, n'a pas constitué avoué ni conclu.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu que la SCI LA PIGNE n'a pas constitué avoué, ni conclu, ni comparu à l'audience ; qu'il sera statué par arrêt réputé contradictoire, selon les dispositions de l'article 473 du Code de Procédure Civile ;
Attendu qu'en application des articles 900 et 538 du Code de procédure civile, l'appel est formé par déclaration dans le délai d'un mois ;
Attendu que LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD ont régulièrement formé appel du jugement rendu le 15 février 2007 par le Tribunal de Grande Instance de GRASSE, par déclaration au greffe du 15 mars 2007 ;
Attendu que l'appel doit donc être déclaré recevable ;
Attendu que l'acquéreur du bien vendu par Madame Michèle X... est susceptible, dans l'hypothèse d'une surenchère, d'une part, s'il est rendu adjudicataire, d'exiger du vendeur le remboursement de ce qui excède le prix stipulé, en application de l'article 2486 du Code civil, et d'autre part, dans le cas contraire, d'engager la responsabilité de cette dernière pour son éviction ;
Attendu que l'existence d'une manoeuvre frauduleuse consistant à vendre à la SCI LA PIGNE le bien immobilier litigieux pour un prix dérisoire, ce dans le seul but de nuire aux créanciers, n'est n'est établie par aucun élément concret ; que l'adage " la fraude corrompt tout " ne peut donc être invoqué en l'espèce ;
Que Madame Michèle X... est donc recevable en sa contestation de la procédure de surenchère engagée par LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD ;
Attendu que constitue une fin de non- recevoir, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, notamment pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, ou le défaut d'intérêt ;
Attendu qu'aux termes de l'article 31 du Code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ;
Attendu que les créanciers hypothécaires inscrits qui peuvent être désintéressés avec le produit de la vente amiable initiale n'ont aucun intérêt à surenchérir ;
Attendu qu'en application de l'article 2432 du Code civil, le créancier privilégié dont le titre a été inscrit, ou le créancier hypothécaire inscrit pour un capital produisant intérêts et arrérages a le droit d'être colloqué pour trois années seulement, au même rang que le principal, sans préjudice des inscriptions particulières à prendre, portant hypothèque à compter de leur date, pour les intérêts et arrérages autres que ceux conservés par l'inscriptions primitive ;
Attendu que le bordereau d'inscription d'hypothèque judiciaire établi le 9 avril 2001 au bureau des hypothèques de GRASSE au profit des MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD porte sur la somme de 850 000 F, soit 129 581, 66 € ;
Attendu qu'au vu de l'état hypothécaire du 17 mars 2006, il apparaît que ce créancier, inscrit depuis 22 septembre 1989, bénéficie aujourd'hui du premier rang, du fait de la péremption et de la radiation des inscriptions antérieures ;
Attendu que la vente litigieuse intervenue le 27 juin 2006 a été consentie pour un prix de 195 000 € permettant largement de désintéresser LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD ;
Attendu que le créancier hypothécaire ne peut former surenchère que pour préserver sa créance définie dans le bordereau d'inscription et non pour garantir une créance hypothétique ;
Attendu que par jugement du 27 janvier 2004, le Tribunal de Grande Instance de GRASSE a mis hors de cause LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD, estimant que le notaire avait commis une faute volontaire l'excluant de la garantie du préjudice subi par la banque WOOLWICH du fait de l'absence de purge dans le cadre de la précédente mutation du bien immobilier litigieux ;
Qu'il n'a pas encore été statué sur l'appel relevé contre cette décision ;
Attendu qu'elles ne peuvent se substituer à la banque WOOLWICH qui seule peut défendre ses propres intérêts ;
Attendu qu'il résulte de ces éléments que la surenchère formée par LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD est irrecevable ;
Attendu qu'ayant fait droit à la fin de non recevoir, il n'y a pas lieu d'examiner les moyens relatifs au délai, au pouvoir spécial, ainsi qu'au paiement de l'avance des frais ;
Attendu que le jugement est confirmé ;
Attendu qu'il est équitable d'allouer à Madame Michèle X... la somme de 500 €, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire,
Reçoit l'appel comme régulier en la forme,
Confirme le jugement déféré,
Condamne LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD à payer à Madame Michèle X... la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette les autres demandes,
Condamne LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD aux dépens, ceux d'appel étant distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,