COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
2ème Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 15 NOVEMBRE 2007
No 2007/ 441
Rôle No 07/00871
S.A.S. DISTRIBUTION CASINO FRANCE
C/
S.A. LESAFFRE ET COMPAGNIE
INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE
Monsieur le Procureur Général Près la Cour d'Appel
Grosse délivrée le :
à :LATIL
Me MOATTY (8 rue de l'Odéon-75006 PARIS)
I.N.P.I.
M.P. (M. VIANGALLI)
Décision déférée à la Cour :
Décision de Monsieur le Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle en date du 11 janvier 2007, enregistré au répertoire général sous le no 06/01452
DEMANDERESSE
S.A.S. DISTRIBUTION CASINO FRANCE, venant aux droits de la SAS INTERNATIONAL FRUIT FRANCE (demanderesse)
dont le siège est sis 24 rue de la Montat - B.P. 306 - 42008 SAINT ETIENNE CEDEX 2
représentée par la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER, avoués à la Cour,
plaidant par Me Pierre CUSSAC, avocat au barreau de PARIS
DEFENDEURS
S.A. LESAFFRE ET COMPAGNIE
dont le siège est sis 41 rue Etienne Marcel - 75001 PARIS
représentée par Me Myriam MOATTY, avocat au barreau de PARIS
INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE dont le siège est sis 26 bis rue de Saint Petersbourg - 75800 PARIS CEDEX 08
représentée par Mme Mathilde MECHIN (Chargée de mission) en vertu d'un pouvoir spécial
Monsieur le Procureur Général Près la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE
Palais de Justice - 13616 AIX EN PROVENCE CEDEX 1
représenté par M. André VIANGALLI (Avocat Général)
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 octobre 2007 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Robert SIMON, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur André JACQUOT, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Mireille MASTRANTUONO
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2007.
Ministère Public : Monsieur André VIANGALLI, Avocat Général, lequel a été entendu en ses observations orales.
ARRÊT
Contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2007
Signé par Monsieur Robert SIMON, Président, et Madame Mireille MASTRANTUONO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La S.A.S. International Fruits FRANCE est titulaire de la marque dénominative "CASITALIA" déposée, le 1er février 2005, pour désigner des produits de différentes classes, dont "les farines et préparations faites de céréales, levure, extraits de levure, ferments"... La S.A.S. Distribution Casino FRANCE vient aux droits de la S.A.S. International Fruits FRANCE par suite d'une fusion-absorption.
La S.A. LESAFFRE et Compagnie a déposé, le 29 avril 2005, une demande d'enregistrement au titre d'une marque dénominative relativement au signe "KASTALIA" pour désigner des produits des classes No 9, 21 et 30, dont "les farines et préparations faites de céréales, levure, extraits de levure, ferments"...
Par décision en date du 3 février 2006, Monsieur le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle a rejeté l'opposition formée par la S.A.S. International Fruits FRANCE.
La S.A.S. International Fruits FRANCE a formé, le 3 mars 2006, un recours à l'encontre de cette décision. Par arrêt en date du 11 janvier 2007, la Cour d'Appel de LYON s'est déclarée territorialement incompétente pour connaître du recours et a transmis le dossier de l'affaire à la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE.
Dans des conclusions No 3, la S.A.S. Distribution Casino FRANCE estime que le recours de la S.A. LESAFFRE et Compagnie à l'encontre de la décision du Directeur de l'Institut national de la propriété industrielle n'est pas recevable et, au fond, entend que la décision déférée soit annulée en ce qu'elle a décidé que la comparaison tant visuelle, phonétique que conceptuelle des signes premier et second conduit à conclure qu'aucune confusion n'est possible entre eux. La S.A.S. Distribution Casino FRANCE soutient encore que la décision déférée en ce qu'elle a retenu l'identité et la similitude de certains produits visés à la demande d'enregistrement avec ceux protégés par la marque première doit être entièrement approuvée.
Dans un mémoire d'observations No 2 déposé devant la Cour d'Appel, la S.A. LESAFFRE et Compagnie soutient que son recours a été régulièrement formé dans le respect des dispositions de l'article R 411-21 du Code de la Propriété Intellectuelle, entend rappeler que peu de produits visés dans la demande d'enregistrement de la marque "KASTALIA" sont identiques aux produits faisant l'objet de la protection accordée par la marque première et estime que la comparaison des signes ne permet pas de conclure qu'il existe un risque de confusion entre eux.
Monsieur le Directeur de l'Institut national de la propriété industrielle par deux séries d'observations écrites tend au rejet du recours formé par la S.A.S. International Fruits FRANCE et à l'irrecevabilité des demandes/moyens de la S.A. LESAFFRE et Compagnie en ce qu'elles/ils tendent à la "réformation" de la décision relativement à la comparaison des produits.
Le Ministère Public a été entendu en ses observations orales.
MOTIFS ET DÉCISION
Attendu que le recours formé par la S.A.S. International Fruits FRANCE contre la décision de Monsieur le Directeur de l'Institut national de la propriété industrielle mentionne que la S.A.S. International Fruits FRANCE est "représentée par ses dirigeants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social" de la société ; qu'une telle formulation est conforme aux dispositions de l'article R 411-21 du Code de la Propriété Intellectuelle qui exige que soit mentionné "l'organe qui représente légalement la personne morale" requérante ; que la mention litigieuse est suffisante pour identifier l'organe qui est seul habilité à agir en justice et est désigné par la loi sur les sociétés ;
Attendu que ni la S.A.S. Distribution Casino FRANCE, ni la S.A. LESAFFRE et Compagnie ne contestent qu'au moins certains produits faisant l'objet d'une protection au titre de la marque "CASITALIA" sont identiques à des produits inclus dans la demande d'enregistrement de la marque seconde "KASTALIA" ; qu'il s'ensuit (des produits étant communs à la marque première et à la demande d'enregistrement) qu'il est indifférent que le caractère similaire ou simplement complémentaire de certains produits visés dans la demande d'enregistrement par rapport à des produits visés dans la marque première déposée soit présentement discutée par la S.A. LESAFFRE et Compagnie qui ne remet pas en question la constatation que certains produits sont, en toute hypothèse, communs ;
Attendu que la comparaison des signes pour apprécier les risques de confusion entre eux doit s'effectuer en tenant compte des produits visés aux dépôts et non en tenant compte des conditions de l'utilisation/exploitation de la marque prétendument imitée ;
Attendu que pour être admise, l'imitation implique qu'un risque de confusion certain existe entre les deux signes ; que le risque de confusion s'apprécie globalement en se fondant sur l'impression d'ensemble que procure la comparaison des éléments distinctifs et dominants des deux signes à laquelle un consommateur d'attention moyenne est susceptible de se livrer ; qu'en l'espèce, les signes "CASITALIA" et "KASTALIA" présentent des différences visuelles et phonétiques d'ensemble qui sont affirmées, les séquences d'attaque et finales sont différentes : le graphisme de la lettre d'attaque est différent K et C, celui des lettres finales ne comporte pas de I dans le signe second : "KASTALIA ; que le rythme phonétique est différent : a) quatre temps pour le signe "CASITALIA" et trois temps pour le signe "KASTALIA", b) la sonorité d'attaque est différente fluide et adoucie pour CASI et heurtée (plus dure) pour KASTA ; que, dans le signe "CASITALIA", la voyelle I qui est prononcée en association avec le S qui la précède (ce qui contribue à adoucir la sonorité d'attaque), permet de différencier la séquence finale ITALIA qui a un pouvoir d'évocation d'un pays, effet non obtenu dans le signe "KASTALIA" dont la séquence finale est TALIA ; que, enfin, le signe "CASITALIA" évoque d'emblée dans l'esprit d'un consommateur d'attention moyenne et même non latin, l'Italie alors que le signe "KASTALIA" ne possède pas le pouvoir d'évoquer l'Italie ;
Attendu en définitive que le signe verbal contesté "KASTALIA" et le signe premier "CASITALIA", considérés tous deux séparément et selon l'impression d'ensemble que leurs éléments dominants produisent respectivement, ne présentent pas de similitudes suffisantes faisant craindre qu'un consommateur d'attention moyenne les confonde ; qu'il s'ensuit que le recours formé par la S.A.S. International Fruits FRANCE devenue la S.A.S. Distribution Casino FRANCE contre la décision du Directeur de l'Institut national de la propriété industrielle doit être rejeté ;
Attendu qu'il apparaît équitable en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, d'allouer à la S.A. LESAFFRE et Compagnie la somme de 2.400 Euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant suivant arrêt contradictoire par sa mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour d'Appel,
Déclare recevable le recours formé par la S.A.S. International Fruits FRANCE, devenue la S.A.S. Distribution Casino FRANCE.
Au fond, rejette le recours formé par la S.A.S. International Fruits FRANCE devenue la S.A.S. Distribution Casino FRANCE à l'encontre de la décision de Monsieur le Directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle en date du 3 février 2005.
Dit que le présent arrêt sera notifié aux parties, conformément au Code de la Propriété Intellectuelle
Condamne la S.A.S. Distribution Casino FRANCE à porter et payer à la S.A. LESAFFRE et Compagnie la somme de 2.400 _ au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Le Greffier Le Président