4o Chambre B
ARRÊT AU FOND DU 25 JUIN 2007
No 2007 / 283
Thérèse X... épouse Y... Félix X... Richard X...
C /
Jean Z...
Grosse délivrée à : LIBERAS TOUBOUL
réf
Décision déférée à la Cour : F. d.
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 14 Mars 2005 enregistré au répertoire général sous le no 03 / 4140.
APPELANTS
Madame Thérèse X... épouse Y... née le 15 Mai 1932 à TOULON (83000), demeurant...
Monsieur Félix X... né le 23 Juin 1926 à TOULON (83000), demeurant...
Monsieur Richard X... né le 10 Mars 1953 à TOULON (83000), demeurant...
représentés par la SCP LIBERAS- BUVAT- MICHOTEY, avoués à la Cour, Plaidant Me Jean- Martin GUISIANO, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Monsieur Jean Z... (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 05 / 7752 du 20 / 06 / 2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX EN PROVENCE) né le 11 Mars 1941 à RIZZICONI (ITALIE) (99), demeurant...
représenté par la SCP DE SAINT FERREOL- TOUBOUL, avoués à la Cour, Plaidant Me Michel MATTEI, avocat au barreau de TOULON
*- *- *- *- * COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 07 Mai 2007 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, Madame DELORD, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Didier CHALUMEAU, Président Madame Florence DELORD, Conseiller Monsieur Jean- Luc GUERY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Agnès BUCQUET. Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Juin 2007.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Juin 2007,
Signé par Monsieur Didier CHALUMEAU, Président et Madame Agnès BUCQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS PROCEDURE, PRETENTIONS, MOYENS,
Les consorts X... sont propriétaires de la parcelle cadastrée DW No151 à Toulon (Var), voisine de celle de M. Z..., cadastrée DW No49. Les deux fonds sont séparés par un mur de clôture qui sert actuellement au soutènement des terres du fonds Z... et sur lequel sont apparues des fissures.
Par ordonnance de Référé du 19 septembre 2000, M. A... a été désigné en qualité d'expert, par ordonnance du 16 janvier 2001, sa mission a été étendue. Le rapport d'expertise a été remis le 27 janvier 2003.
Par acte du 19 mai 2003, les consorts X... ont assigné M. Z... devant le Tribunal de Grande Instance de Toulon pour qu'il :
- soit condamné sous astreinte à procéder aux travaux de démolition et de reconstruction du mur et à verser des indemnités.
Par jugement du 14 mars 2005, le Tribunal de Grande Instance de Toulon a :
- dit que le mur de clôture séparant les parcelles cadastrées Section DW No49 et DW No 151 à Toulon est mitoyen au sens des dispositions de l'article 653 du Code Civil,
- dit qu'en application des dispositions de l'article 655 du Code Civil, sa réparation et sa reconstruction sont à la charge de tous ceux qui y ont droit, proportionnellement au droit de chacun,
- débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- fais masse des dépens et dits qu'ils seront partagés, par moitié, entre M. Richard X..., M. Félix X..., Mme Thérèse Y..., d'une part, et M. Jean Z... d'autre part.
Par acte du 2 mai 2005, les consorts X... ont fait appel de ce jugement.
Par leurs dernières conclusions déposées le 22 mars 2007, les consorts X... ont demandé à la Cour :
- de réformer le jugement,
Vu les articles 653 et suivants du Code Civil,
- de constater et de juger que le mur litigieux est un mur de soutènement, non mitoyen, propriété exclusive de M. Z... et que les règles de la mitoyenneté sont dès lors sans application à la présente espèce,
Vu les articles 544 et 1384 alinéa 1 du Code Civil :
- de juger que la responsabilité des désordres affectant le mur de soutènement des terres de la propriété de M. Z... incombe à ce dernier en totalité,
- de le condamner en conséquence à procéder aux travaux de démolition et de reconstruction de ce mur, conformément aux préconisations de l'expert,
- de juger que les travaux devront être réalisés dans le mois de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard,
- de condamner M. Z... au paiement de la somme de 5. 000 euros à titre de justes dommages et intérêts, 4. 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.
Par ses dernières conclusions déposées le 22 janvier 2007, M. Z... a demandé à la Cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les consorts X... de l'intégralité de leurs demandes,
- de le réformer en ce qu'il a débouté le concluant de l'intégralité de ses demandes,
- d'y ajouter la condamnation des consorts X..., conjointement, à exécuter les travaux de doublage du mur existant, tels que décrits par l'expert dans sa solution B,
- de dire que ces travaux devront être entrepris dans les deux mois de la signification de la décision à intervenir et terminés deux mois après le début, le tout sous une astreinte de 100 euros par jour de retard, laquelle courra à compter de quatre mois après la signification du jugement à intervenir,
- de condamner les consorts X... conjointement à payer au concluant une somme de 3. 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- de les condamner conjointement au paiement de la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.
L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 7 mai 2007 avant les débats.
MOTIFS DE LA DECISION :
1o- Sur la nature du mur litigieux :
L'article 653 du Nouveau Code de Procédure Civile établit une présomption de mitoyenneté à l'égard des murs de séparation, lorsqu'il n'y a ni titre ni marque du contraire comme en l'espèce.
Cependant, le mur litigieux ne suit pas la ligne divisoire des fonds, mais il est implanté de manière irrégulière, alternativement sur l'un et l'autre fonds puisque le tronçon AB est construit sur la propriété " Z... " ainsi que le montre le plan établi par M. B..., géomètre- expert, sollicité par l'expert judiciaire M. Claude A.... Le mur s'étend sur environ 45 mètres de longueur.
Par ailleurs, il ressort des éléments de fait qu'à l'origine, ce mur séparait les deux propriétés et que celles- ci se trouvaient au même niveau ; ainsi M. X... a produit, outre une photo personnelle de ce mur, le document graphique du POS daté de 1976, approuvé le 28 janvier 2005, qui permet de constater que la cote pour la rue des... est à 22, 35, le ... à 18, 45 et le terrain Z... à 20.
Or, le terrain Z... débouche sur la rue des... en léger surplomb. Le remblai peut donc être évalué à 2, 55 / 2, 65 mètres.
Des photos permettent, en outre, de constater que M. Z... a construit une piscine qui affleure le niveau du sol de sa propriété, et qu'il a laissé se développer un platane à la limite Sud- Est de sa propriété et près du mur, si bien que les racines de cet arbre décollent le mur et le déforment.
Enfin l'expert judiciaire, après avoir constaté que le mur était déformé et fissuré sur toute sa longueur a expressément observé que ce mur servait de soutènement au fonds " Z... " alors qu'il avait été réalisé en agglos de vingt sept centimètres " au lieu d'agglos banchés en voile B. A, et sans barbacanes.
Il résulte des éléments de fait ainsi versés aux débats que le mur litigieux est devenu, par ses diverses reprises, ses rehaussements et sa forme caractéristique, un mur de soutènement des terres du fonds " Z... ", alors qu'à l'origine il ne s'agissait que d'un mur de séparation entre deux terrains de même niveau. Il n'est pas inutile de souligner, d'ailleurs, que M. Z... exerce la profession d'entrepreneur de travaux et qu'il ne pouvait méconnaître la faiblesse du mur en question.
La fonction de soutènement prime sur les présomptions tirées des articles 653, 654 et 666 alinéa 1 er du Code Civil et le mur litigieux doit être rattaché à la propriété du fonds " Z... " dont il soutient les terres.
La Cour, en conséquence rejette le caractère mitoyen du mur séparatif des fonds " X... et Z... ", dit qu'il appartient exclusivement au fonds " Z... " et infirme le jugement entrepris.
2o- Sur les responsabilités encourues :
L'expert a constaté que l'origine des fissures et des dégradations du mur était à rechercher à la fois dans la conception et la technique de réalisation de ce mur, et à la fois dans la poussée exercée contre ce mur par les remblais des terres.
Dans la mesure où le mur n'avait pas été conçu, pour soutenir des terres, mais pour séparer deux fonds, il ne saurait être mis à la charge des consorts X... une quelconque part de responsabilité dans la survenance des dommages, même si M. X... a participé à la construction d'une partie de ce mur dans les années 1968-1969, comme il l'indique dans sa lettre du 23 septembre 1999.
Aucune faute n'est démontrée à la charge des consorts X... et il ressort des éléments relevés par l'expert que M. Z... est seul responsable des dommages.
Il lui incombe, en conséquence, d'assurer seul la charge des travaux préconisés par l'expert, et sous astreinte, comme réclamé par les appelants.
3o- Sur les dommages et intérêts pour troubles de jouissance :
le préjudice des consorts X... durant les travaux de démolition et de reconstruction est en relation directe de causalité avec la faute de M. Z... et la Cour fixe son indemnisation à 5. 000 euros.
4o- Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
La Cour fait droit à la demande des consorts X... uniquement et pour la somme réclamée.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant en audience publique, contradictoirement,
- Infirme le jugement entrepris,
- Dit que le mur situé selon la ligne ABCD figurant au plan annexé au rapport d'expertise de M. A... du 27 janvier 2003, et séparant les parcelles DW No49 et DW No 151, commune de Toulon, n'est pas mitoyen et appartient à M. Jean Z..., propriétaire de la parcelle DW No49,
- Déclare M. Z... seul responsable des désordres affectant ce mur,
- Le condamne à procéder aux travaux de démolition et de reconstruction de ce mur conformément aux préconisations de l'expert judiciaire, et ceci, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de trente jours après la signification du présent arrêt,
- Le condamne en outre à payer aux consorts X... :
1) la somme de 5. 000 euros à titre de dommages et intérêt pour préjudice de jouissance,
2) la somme de 4. 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- Déboute M. Z... de ses demandes,
- Le condamne aux entiers dépens d'instance, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT