C O U R D ' A P P E L D ' A I X - E N - P R O V E N C E
AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS
ARRÊT /2006
12o chambre
ARRÊT DE LA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION DU 09 MARS 2006 La chambre de l'instruction de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, réunie en Chambre
du Conseil, à l'audience du VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE SIX ; Vu la procédure d'information suivie devant le Tribunal de Grande Instance de NICE contre : X... TÉMOIN ASSISTÉ Mikhal AMSELLEM né le 24 Juin 1958 CASABLANCA (MAROC) demeurant :Chez Me SZEPETOWSKI - 6 rue de Rothschild 06000 - NICE AYANT POUR AVOCAT : Me SZEPETOWSKI, 6, rue Rothschild - 06000 NICE DES CHEFS DE : marchandage et prêt illicite de main d'oeuvre.
PARTIE CIVILE POURSUIVANTE X... Didier2 Boulevard Dubouchage - 06045 NICE CEDEX 1 AYANT POUR AVOCATS Me REBIBOU, 4 rue Alexandre Mari - 06300 NICE - Me DEUR, 2 Boulevard Dubouchage - 06045 NICE CEDEX 1
[* COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE Madame BERNARD, président de chambre de l'instruction Monsieur HURON, conseiller Monsieur GRISON, conseiller Tous trois désignés à ces fonctions, conformément aux dispositions de l'article 191 du code de Procédure Pénale, AU PRONONCÉ, Madame BERNARD, Président, a donné lecture de l'arrêt conformément aux dispositions de l'article 199 alinéa 4 du code de procédure pénale GREFFIER aux débats et au prononcé de l'arrêt Monsieur REYNAUD MINISTÈRE Y... : représenté aux débats et au prononcé de l'arrêt par Monsieur Z..., Substitut Général
*] Vu l'ordonnance de non-lieu rendue le 06 Juillet 2005 par le juge d'instruction de NICE et notifiée par lettres recommandées adressées le même jour à la partie civile et à leur conseil ; Vu l'appel interjeté le 08 Juillet 2005 par le conseil de la partie civile suivant déclaration au greffe du Tribunal de Grande Instance de NICE ; Vu les pièces de la procédure ; Vu le réquisitoire écrit de Monsieur le Procureur Général en date du 10 janvier 2006 ; Vu l'attestation de Monsieur le Procureur Général dont il résulte
qu'avis, par lettres recommandées en date du 10 janvier 2006, ont été envoyés aux parties intéressées et aux avocats, conformément à l'article 197 du Code de procédure pénale ; Considérant qu'il a été satisfait aux formes et délais prescrits par ledit article ;
[* Vu le mémoire adressé par Me SZEPETOWSKI au Greffe de la Chambre de l'Instruction le 25 janvier 2006 à 13 heures et visé par le Greffier ; Vu le mémoire adressé par Me REBIBOU au Greffe de la Chambre de l'Instruction le 25 janvier 2006 à 11 heures 30 et visé par le Greffier ;
*] Monsieur GRISON, conseiller, entendu en son rapport ; Monsieur le Procureur Général, entendu en ses réquisitions ; Me REBIBOU, conseil de Didier X..., partie civile, a sur sa demande présenté des observations sommaires, conformément à la loi ; Me SZEPETOWSKI, conseil de Mikhal AMSELLEM, a sur sa demande présenté des observations sommaires, conformément à la loi et a eu la parole en dernier ; Madame le Président a déclaré que l'arrêt serait rendu à l'audience du NEUF MARS DEUX MILLE SIX ; Les débats étant terminés, la Chambre de l'instruction, en Chambre du Conseil, en a délibéré hors la présence du Procureur Général, des parties, du Greffier et des avocats ; Madame le Président a prononcé l'arrêt suivant en Chambre du Conseil, à l'audience de ce jour ; FAITS - PROCÉDURE - MOYENS
Didier X... a été engagé le 4 septembre 1995, en qualité de consultant, par la société AMS Fiduciaire, société d'expertise comptable dont Mikhal AMSELLEM est le gérant. D'abord assistant d'un collaborateur de la société AMS détaché à la villa Léopolda, domaine sis à Villefranche sur Mer, appartenant aux époux A... et employant une quarantaine de personnes, Didier X... remplacera ce dernier en mai 1998. Didier X... sera licencié par la société AMS, pour faute lourde, le 15 mai 2002.
[* Le 20 janvier 2003, Didier X... déposait plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction du Tribunal de grande instance de Grasse contre Lily A..., Mikhal AMSELLEM et la société AMS Fiduciaire des chefs de travail dissimulé, marchandage et prêt illicite de main d'oeuvre. Didier X... exposait que les heures de travail qu'il avait effectuées au service de Lily A..., dont il recevait directement des ordres et aux instructions de laquelle il devait se conformer, étaient beaucoup plus importantes que celles portées sur ses bulletins de paye et payées par la société AMS, que la société AMS a réalisé un bénéfice considérable en refacturant à Lily A... des sommes supérieures aux salaires réglés, qu'il a été privé de ses droits à congés les plus élémentaires ainsi que des garanties dues par Lily A... en cas de licenciement. Didier X... précisait que Lily A... et la société AMS avait déposé plainte avec constitution de partie civile contre lui du chef d'abus de confiance afin de paralyser l'instance prud'homale qu'il avait engagée à leur encontre. Une information était ouverte le 8 avril 2003.
*] Consulté par la magistrat instructeur, le directeur départemental du travail estimait que Madame A... et la société AMS pouvaient être poursuivis pour prêt de main d'oeuvre à but lucratif dans la mesure où Monsieur X... recevait des ordres directement de Madame A... et que la société AMS réalisait un bénéfice en facturant la prestation de Monsieur X... à un prix nettement supérieur au coût total réel de la main d'oeuvre. Mikhal AMSELLEM déclarait que le détachement de Didier X... à la villa Léopolda s'inscrivait dans le cadre de la mission d'administration sociale, comptable, juridique et fiscale qui avait été confiée par les époux A... à la société AMS ; que la fonction de Didier X... était de relayer sur place le cabinet d'expert comptable et qu'il ne possédait
aucun pouvoir propre, devant lui rendre compte quotidiennement de ses instructions ; que d'ailleurs, aux termes de la lettre de mission du 16 janvier 1995, les époux A... s'interdisaient tout acte pouvant porter atteinte à l'indépendance du cabinet et de ses collaborateurs ; que ce détachement n'était donc pas l'objet exclusif du contrat passé entre la société AMS et les époux A... ; que les deux attestations produites par Didier X..., émanaient l'une d'une salariée intérimaire qui n'avait passé que quelques jours au standard et l'autre d'une salariée employée à GENEVE, ne démontraient nullement que le plaignant recevait directement ses ordres de Lily A... A l'issue de son audition par le magistrat instructeur, Mikhal AMSELLEM bénéficiait du statut de témoin assité. Didier X... maintenait que Lily A... se conduisait comme si elle était son employeur et contestait avoir été soumis à l'autorité hiérarchique de Mikhal AMSELLEM. Le prêt de main d'oeuvre illicite permettait à la société AMS de minimiser ses horaires pour surfacturer sa prestation et d'éviter à Lily A... de payer la taxe sur les salaires qui aurait été due si un directeur avait été en fonction à la villa. Les infractions dénoncées l'avaient empêché d'évoluer en termes de carrière et de bénéficier des conventions collectives que ce soit celle des gens de maison ou celle des experts comptables. Trois témoins étaient entendus par le juge d'instruction : Didier FIXOIS ne pouvait pas dire si Didier X... recevait ses ordres de Lily A... ou de Mikhal AMSELLEM. Pieternella ANTON savait que Didier X... dépendait du cabinet AMSELLEM mais précisait qu'il répondait, au quotidien, aux demandes de Lily A... Hélène PETIT était plutôt d'avis que Didier X... était aux ordres de Lily A... mais elle ne se souvenait pas avoir été témoin d'ordres ou instructions données par celle-ci à celui-là. Le 6 juillet 2005, le juge d'instruction rendait l'ordonnance de non lieu aujourd'hui déférée à la Cour.
[* Le Ministère Y... requiert la confirmation de l'ordonnance déférée.
*] Par mémoire régulièrement adressé au greffe de la Chambre de l'Instruction, invoquant l'avis technique délivré par le directeur départemental du travail et les témoignages des personnes entendues par le juge d'instruction, faisant valoir qu'au cours de la confrontation organisée dans le cadre d'une autre procédure, Mikhal AMSELLEM avait prétendu que Didier X... avait toute latitude au sein de la villa Léopolda, qu'il a été démontré que Didier X... recevait des ordres de Lily A... auprès de laquelle il prenait ses consignes et en référait pour la gestion quotidienne de la villa, qu'il était à son service exclusif ainsi que peuvent le confirmer tous les fournisseurs auxquels il commandait les travaux et les achats, qu'il aurait été naturel d'entendre Lily A... ainsi qu'il l'avait en vain demandé au juge d'instruction, le conseil de l'appelant demande à la Cour : - infirmer l'ordonnance ; - ordonner la poursuite de l'information et le retour du dossier au juge d'instruction ; - subsidiairement, renvoyer Mikhal AMSELLEM devant le tribunal correctionnel de Nice. Par mémoire régulièrement adressé au greffe de la Chambre de l'Instruction, évoquant les diverses procédures engagées par Didier X... tant contre la société AMS que contre Lily A..., contestant les allégations de Didier X..., rappelant que ce dernier était placé sous l'autorité hiérarchique de la société AMS qui l'a détaché à la ville Léopolda pour remplir la mission qui lui a été confiée par les époux A..., lesquels n'occupant la villa que deux mois à deux mois et demi par an, que cette mission excédait largement la prétendue simple mise à disposition d'un salarié et n'avait donc pas pour objet un prêt exclusif de main d'oeuvre, qu'enfin Didier X... ne peut se
prévaloir d'aucun préjudice dans la mesure où sa qualité d'employé de la société AMS lui permettait de bénéficier de la convention collective des experts comptables, convention beaucoup plus favorable que celle des employés de maison, le conseil de Mikhal AMSELLEM demande à la Cour de confirmer l'ordonnance de non lieu.e Mikhal AMSELLEM demande à la Cour de confirmer l'ordonnance de non lieu. CECI ÉTANT EXPOSÉ
Considérant que l'appel, régulier en la forme, a été interjeté dans le délai légal ; Considérant que l'avis formulé par le directeur départemental du travail ne lie pas le juge ; qu'il convient en outre d'observer que cet avis a été formulé au vu de la seule plainte de Didier X... ; Considérant que Mikhal AMSELLEM a justifié de la mission qui lui a été confiée par Edmond A... puis par Lily A... ; que cette mission de gestion et d'administration sociale, comptable, juridique et fiscale de la villa Léopolda excède très largement la simple mise à disposition d'un salarié ; que le fait que Didier X... ait pu recevoir ses instructions de Lily A... ne suffit pas à démontrer un transfert de lien de subordination dès lors qu'il était astreint à rendre compte de son activité à la société AMS ;Considérant que l'existence d'une fourniture ou d'un prêt de main d'oeuvre ne saurait se déduire du détachement de Didier X... sur le site de la villa Léopolda pour relayer sur place le cabinet comptable et assurer sous sa supervision, au quotidien, l'administration du domaine ; Considérant, de surcroît, qu'il n'a pas été établi que le détachement de Didier X... à la villa Léopolda ait eu pour but ou pour effet de lui causer un quelconque préjudice ou d'éluder l'application de dispositions légales ou conventionnelles qui lui soient favorables ; que ce détachement n'était pas l'objet exclusif de la mission confiée par les époux A... à la société AMS suivant lettre du 16 janvier 1995 définissant de manière détaillée
les prestations de services assurées par le cabinet comptable et les obligations respectives des parties ; Considérant que les éléments constitutifs des délits de marchandage et de prêt illicite de main d'oeuvre ne sont pas réunis ; Considérant qu'il n'a pas non plus été établi que le nombre des heures de travail portées par la société AMS sur les bulletins de paye de Didier X... ait été inférieur à celui des heures qu'il a effectivement accomplies ; que le délit de travail dissimulé ne saurait être retenu ; Considérant qu'il ne résulte pas de l'information de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits dénoncés par la partie civile ni toute autre infraction pénalement qualifiée et réprimée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR Vu les articles 177, 184, 194, 200 et suivants du code de procédure pénale ; EN LA FORME, Déclare l'appel recevable ; AU FOND, Confirme l'ordonnance déférée ; Ordonne que le présent arrêt sera exécuté à la diligence de Monsieur le Procureur général LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT, Les conseils des parties ont été avisés du présent arrêt, par lettre recommandée. LE GREFFIER.