COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 1 Chambre A ARRÊT AU FOND DU 01 MARS 2005 RD/J. VEYRE No 2005/ Rôle No 03/11242 X... Marie Y... épouse LEFEBVRE DE Z... Jean LEFEBVRE DE Z... A.../ Société AGENCE COSTEBLEUE SARL Marie Odile B... Friedmann C... Gudrun D... épouse C... E... délivrée le : à : réf Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 15 Mai 2003 enregistré au répertoire général sous le no 00/05269. APPELANTS Madame X... Marie Y... épouse LEFEBVRE DE Z... née le 19 Janvier 1941 à MONTGERON (91230), Monsieur Jean LEFEBVRE DE Z... né le 31 Août 1935 à BAR LE DUC (55000), demeurant tous deux 34 avenue du Président Wilson - 75016 PARIS représentés par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour, plaidant par Me Véronique HENDI, avocat au barreau de PARIS INTIMES Société AGENCE COSTEBLEUE,SARL, prise en la personne de son gérant en exercice, domiciliée 414 avenue Commandant Houot - 83130 LA GARDE Madame Marie Odile B... née le 27 Janvier 1941 à BORDEAUX (33000), demeurant A.../O AGENCE COSTEBLEUE - 414 Avenue Commandant Houot - 83130 LA GARDE Monsieur Friedmann C... né le 30 Octobre 1941 à VIENNE/AUTRICHE (99), demeurant Onkel Tom Strass 17 - 10777 BERLIN Madame Gudrun D... épouse C... née le 04 Janvier 1949 à DUISBOURG (99), demeurant Onkel Tom Strass 17 - 10777 BERLIN ALLEMAGNE représentés par la SCP SIDER, avoués à la Cour, plaidant par Me Patrick SERIES, avocat au barreau de TOULON
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COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 01 Février 2005 en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Gérard LAMBREY, Président Monsieur Jean VEYRE, Conseiller Monsieur Jean Noùl GAGNAUX, Conseiller qui en ont délibéré. Greffier lors des débats :
Madame Radegonde DAMOUR. F... parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 01 Mars 2005. ARRÊT Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Mars 2005, Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Madame Radegonde DAMOUR, greffier présent lors de la mise à disposition au greffe de la décision. ***
Vu le jugement rendu le 15 mai 2003 par le Tribunal de Grande Instance de TOULON dans le procès opposant la Société AGENCE COSTEBLEUE, Mme Marie Odile B... et M. Friedmann C... et son épouse née Gudrun D... à M. Jean LEFEBVRE DE Z... et son épouse née X... Marie Y...,
Vu la déclaration d'appel de M et Mme LEFEBVRE DE Z... du 19 juin 2003,
Vu les conclusions déposées par les intimés le 11 janvier 2005,
Vu les conclusions récapitulatives déposées par les appelants le 25 janvier 2005, SUR CE
Attendu que suivant acte sous seing privé du 6 juillet 2000, Mme X... LEFEBVRE DE Z... a donné mandat de vendre sans exclusivité à L'AGENCE COSTEBLEUE de la GARDE une propriété sise lieudit La Coustière au BRUSC, commune de SIX FOURS F... PLAGES, au prix de 686.020,58 euros ; que cet acte stipule que le mandant charge le mandataire de vendre le bien ci-dessus dont il est propriétaire, que le mandataire a le pouvoir d'établir tous actes sous seing privé au prix, charges et conditions des présentes ainsi que de recueillir la signature de l'acquéreur, et que le mandant s'engage "de convention expresse et à titre de condition essentielle", à signer
aux prix, charges et conditions convenues, toutes promesses de vente ou tout compromis avec tout acquéreur présenté par le mandataire ;
Que le 21 juillet 2000, M. C... a adressé à L'AGENCE COSTEBLEUE le courrier suivant :
"Je vous confirme par ce courrier notre acquisition de la propriété de Madame X... de Z... située au Brusc au prix de votre mandat de vente soit quatre millions cinq cent mille francs (4.500.000 F).
Je demande à mon notaire de prendre contact avec celui de Madame de Z...
Je fais le nécessaire dès lundi pour adresser au notaire du vendeur la somme de deux cent vingt cinq mille francs (225.000 F) correspondant à 5% du prix de vente.
Cette acquisition a lieu sans condition suspensive."
Que Mme LEFEBVRE DE Z... s'est ultérieurement refusé à réaliser la vente ;
Attendu sur le moyen tiré de la loi sur le démarchage à domicile, que l'article L-121-21 du Code de la Consommation dispose :
"Est soumis aux dispositions de la présente section quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage, au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d'achat de bien ou la fourniture de services".
Attendu que les appelants indiquent que M. G... de L'AGENCE COSTEBLEUE, s'est déplacé à leur résidence afin d'obtenir la signature du mandat de vente litigieux, ce qui n'est pas contesté par les intimés, qui ajoutent que c'est à la demande de Mme LEFEBVRE DE Z... que les deux responsables de L'AGENCE COSTEBLEUE se son rendus dans la propriété de celle-ci pour lui faire signer le mandat
;
Attendu qu'à supposer que les responsables de L'AGENCE COSTEBLEUE se soient rendus au domicile de l'appelante à la demande de cette dernière, cela n'exclut pas l'application des dispositions précitées ; qu'il s'ensuit que le mandat litigieux, qui ne comprend notamment pas la faculté de renonciation prévue à l'article L 121-25 du Code de la Consommation et ne répond pas aux exigences de l'article L 121-23 du même Code, est nul par application de ce texte ;
Attendu par ailleurs, sur le moyen tiré du caractère commun de l'immeuble objet du mandat, que par jugement en date du 4 novembre 1994, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a homologué la convention reçue le 16 mai 1994 par Maître LOMBARD, ès qualités de notaire à PARIS, par laquelle les époux LEFEBVRE DE Z... ont déclaré adopté le régime de la communauté universelle, telle qu'établie par l'article 1526 du Code Civil, comportant une clause d'attribution intégrale de communauté à l'époux survivant ; que cet acte précise notamment :
"F... comparants adoptent, pour base de leur régime matrimonial, la communauté universelle de biens meubles et immeubles présents et à venir, tel qu'il est établi par l'article 1526 du Code Civil, assorti des clauses particulières prévues au présent contrat.
En conséquence, la communauté comprendra tous les biens meubles et immeubles que les époux possèdent ou posséderont ou qu'ils acquerront par la suite, ensemble ou séparément, ou qui leur adviendront à quelque titre que ce soit, notamment par la succession, donations, legs ou autrement, y compris les biens que l'article 1404 du Code Civil déclare propres par nature.
Elle sera tenue de supporter toutes les dettes des époux, présentes ou futures.
Seront seuls exclus de la communauté et resteront propres à chaque
époux, sauf récompense s'il y a lieu : les biens donnés ou légués avec la condition qu'ils n'entreront pas en communauté ainsi que les biens acquis à titre d'emploi ou de remploi de biens propres".
Attendu qu'il résulte de la combinaison des stipulations du 2o et du 4o des paragraphes précités que seuls sont exclus de la communauté les biens donnés ou légués à la condition qu'ils n'entreront pas en communauté, ainsi que les biens acquis à titre d'emploi ou de remploi de ces mêmes biens propres, qui sont les seuls des biens donnés ou légués à être exclus de la communauté ; qu'il est constant que le bien litigieux n'avait pas été donné ou légué avec la condition qu'il n'entrerait pas en communauté ni acquis à titre d'emploi ou de remploi d'un bien donné ou légué sous cette condition, et qu'il faisait en conséquence partie de la communauté existant entre les époux LEFEBVRE DE Z... ;
Attendu qu l'opposabilité aux tiers de tout changement de régime matrimonial résulte des formalités imposées par l'article 1397 alinéa 3 du Code Civil aux termes duquel :
"Le changement homologué a effet entre les parties à dater du jugement et , à l'égard des tiers, trois mois après que la mention en aura été portée en marge de l'un et de l'autre exemplaire de l'acte de mariage".
Qu'il est justifié que le changement de régime matrimonial des époux LEFEBVRE DE Z... a bien fait l'objet d'une part d'une mention sur l'acte de mariage et d'autre part d'une publicité dans un journal d'annonces légales en décembre 1994 ; qu'il était en conséquence opposable aux tiers ;
Attendu qu'il appartenait à L'AGENCE COSTEBLEUE, professionnel de l'immobilier, de s'informer de la situation juridique du bien, et qu'elle n'est pas fondée à reprocher à Mme LEFEBVRE DE Z..., qui a pu de bonne foi commettre une erreur à ce sujet, de ne pas
l'avoir exactement informée sur ce point ;
Attendu que M. LEFEBVRE DE Z... est dès lors fondé à se prévaloir de la nullité du mandat donné par son épouse hors des limites de ses pouvoirs, conformément aux dispositions de l'article 1427 du Code Civil ;
Attendu enfin que le recours à
Attendu enfin que le recours à la notion de mandat apparent ne peut permettre d'éluder les conséquences de la nullité de l'acte du 6 juillet 2000 pour violation des dispositions sur le démarchage à domicile ;
Attendu qu'ayant conclu avec Mme LEFEBVRE DE Z... un mandat de vente entaché de nullité, la SARL AGENCE COSTEBLEUE ne peut qu'être déboutée de la demande en dommages-intérêts contre cette dernière, et lui rembourser la somme de 30.489,80 euros versée en exécution du jugement entrepris ;
Attendu qu'ayant eux-mêmes contracté avec la SARL AGENCE COSTEBLEUE, qui n'avait pas de mandat de vendre régulier de Mme LEFEBVRE DE Z..., M et Mme C... doivent être déboutés de l'ensemble des demandes qu'ils ont formées contre celle-ci ;
Attendu que la SARL AGENCE COSTEBLEUE, qui succombe sur l'essentiel du litige, doit supporter les dépens ; qu'aucune considération d'équité ou d'ordre économique ne commande de faire application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Réformant le jugement entrepris,
Déboute les intimés de l'ensemble de leurs demandes ;
Condamne la SARL AGENCE COSTEBLEUE à rembourser à M et Mme LEFEBVRE DE Z... la somme de 30.489,80 euros versée en exécution du
jugement entrepris ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne la SARL AGENCE COSTEBLEUE aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile . LE GREFFIER,
LE PRESIDENT.