COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale
ARRÊT DU 17 MARS 2015
MS/ NC
R. G. 14/ 00647
SCEA DOMAINE DE PERREOU En la personne de son représentant légal
C/
Jacques X...
Héléna Y... épouse X...
ARRÊT no121
Prononcé à l'audience publique du dix-sept mars deux mille quinze par Aurélie PRACHE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Nicole CUESTA, Greffière.
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE :
SCEA DOMAINE DE PERREOU En la personne de son représentant légal " La Pélinguette " 32800 CAZENEUVE
Représentée par Me Augustin JOCHAUD DU PLESSIX loco Me Alain NONNON de la SCP NONNON et FAIVRE, avocat au barreau du GERS
APPELANTE d'une ordonnance de référé du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de CONDOM en date du 11 avril 2014 dans une affaire enregistrée au rôle sous le no R. G. 52-14-0001
d'une part, ET :
Jacques X... né le 26 octobre 1937... 32800 CAZENEUVE
Héléna Y... épouse X... née le 18 mars 1948... 32800 CAZENEUVE
Représentés par Me Serge VALETTE de la SCP GOMES VALETTE, avocat au barreau du GERS
INTIMÉS
d'autre part,
A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 2 février 2015, sur rapport de Aurélie PRACHE, devant Aurélie PRACHE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Nicole CUESTA, Greffière, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. Le magistrat rapporteur en a, dans son délibéré, rendu compte à la Cour, composée, outre d'elle-même, de Michelle SALVAN et Christine GUENGARD, Conseillères, en application des dispositions des articles 945-1 et 786 du Code de Procédure Civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus mentionnés.
Le 20 mars 2014, la Scea Domaine de Perreou a saisi le président du tribunal paritaire des baux ruraux de Condom par la voie du référé pour qu'il soit fait interdiction à M. et Mme X... de s'opposer à l'exploitation par la Scea des vignes sises sur des parcelles 1049, 1052, 1054, 1055, 1056 lieu dit ... commune de Cazeneuve (Gers).
Les défendeurs ont objecté qu'il avait été mis fin à la mise à disposition des vignes à la Scea Domaine de Perreou à compter du 31 décembre 2011 et que la Scea Domaine de Perreou n'avait aucun droit d'exploiter.
Par ordonnance de référé du 11 avril 2014, le président du tribunal paritaire des baux ruraux de Condom, considérant l'absence de preuve du droit de la Scea Domaine de Perreou d'exploiter les parcelles litigieuses et la présence d'une contestation sérieuse au fond portant sur l'existence d'un bail rural ou d'un quelconque titre d'exploitation, a débouté la Scea Domaine de Perreou de ses demandes et l'a condamnée au paiement des dépens ainsi que d'une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés.
La Scea Domaine de Perreou est régulièrement appelante de cette décision.
Par voie de conclusions déposées le 1er août 2014 et développées oralement à l'audience de plaidoiries, la Scea Domaine de Perreou demande à la cour d'anéantir l'ordonnance déférée et de :
- faire interdiction à M. et Mme X..., sous astreinte de 1 500 euros par infraction constatée, de s'opposer à l'exploitation par la Scea des Vignes sises sur des parcelles 1049, 1052, 1054, 1055, 1056,
- condamner M. et Mme X... au paiement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. et Mme X... au paiement des dépens.
Il est soutenu en fait, qu'après la vente des parcelles en 2011, la Scea a continué d'exploiter les vignes avec l'accord du propriétaire en 2012 et 2013, le fermage ayant été payé deux années consécutives et les chèques retirés et facturés, que l'interdiction qui lui a été faite de procéder à la taille en mars 2014 constitue une voie de fait qu'il convient de faire cesser.
En droit, il est fait grief au premier juge d'avoir rejeté la demande en raison d'une contestation sérieuse sur le titre de la Scea alors qu'en présence d'un trouble manifestement illicite le juge des référés peut prendre toute mesure même en l'absence de titre. Or, la Scea occupe les vignes paisiblement depuis plusieurs années.
Par conclusions déposées le 9 décembre 2014 et développées oralement à l'audience de plaidoiries, M. et Mme X... demandent à la cour de :
- confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
- condamner la Scea Domaine de Perreou au paiement d'une somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Scea Domaine de Perreou au paiement des dépens.
N'habitant pas sur place, ils ont eu la surprise de constater que les raisins avaient été ramassés alors qu'il a été mis fin à la convention de mise à disposition des terres à la Scea le 31 décembre 2011. A titre de dédommagement, ils ont accepté en 2012 et 2013 deux chèques qui ne constituent en aucun cas le paiement d'un fermage, les factures étant d'ailleurs affectées d'une erreur sur l'orthographe de leur nom.
- MOTIFS :
M. et Mme X... ont fait l'acquisition, le 18 juillet 2011d'une maison et de parcelles en nature de vignes situées à Cazeneuve, lieu dit ... auprès de M. B... et la Sci de Perreou.
La Scea Domaine de Perreou est en possession d'un relevé parcellaire en date du 8 janvier 2014 sur lequel figurent les parcelles litigieuses.
Dès lors, et sans qu'il soit besoin de s'interroger sur l'existence de son titre d'occupation (mise à disposition des terres ou bail à ferme), ce qui relève du juge du fond, la Scea Domaine de Perreou est en droit de se plaindre d'une voie de fait que constitue l'interdiction qui lui est faite par M. et Mme X... d'accéder aux parcelles pour les exploiter.
En effet, comme le fait exactement valoir la partie appelante, une contestation sérieuse sur le fond du droit, et donc sur le titre, n'interdit pas au juge des référés de prendre les mesures prévues à l'article 809 alinéa 1er du code de procédure civile, pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Toutefois, M. et Mme X... sont munis d'une lettre annexée à l'acte authentique de vente, qui a été remise en mains propres à M. Jean Pierre C..., gérant de la Scea Domaine de Perreou par M. Jean-Luc B..., par laquelle M. B... l'informe avoir vendu à M. et Mme X... les parcelles de vigne et indique mettre un terme au bail de fermage avec la Scea Domaine de Perreou au 31 décembre 2011.
Il apparaît que M. B... était associé de la Scea jusqu'au 21 décembre 2012, date de la cession des parts.
La Scea prétend avoir continué après le 31 décembre 2011 d'exploiter paisiblement les terres avec l'accord du nouveau propriétaire, faisant observer que les raisins n'ont pu se développer sans la main de l'homme et que le fermage 2012 et 2013 lui a été payé et facturé par le propriétaire.
Cependant, le nom patronymique figurant sur les factures de fermage de 1 105 euros est orthographié Lemarcham et Lemarchan. et celui du bénéficiaire du chèque du même montant est orthographié Lemarchan.
L'authenticité de ces pièces apparaît donc douteuse.
Il appartiendra à la juridiction paritaire, au besoin, de se prononcer sur le droit de la Scea Domaine de Perreou de continuer à exploiter les parcelles de vigne.
Mais en considération de l'ensemble de ces éléments l'existence d'un trouble manifestement illicite causé à la Scea Domaine de Perreou n'est pas démontrée.
Par ces motifs, substitués à ceux du premier juge, la décision déférée sera confirmée.
- Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Succombant en son appel, la Scea Domaine de Perreou supportera la charge des propres dépens et frais irrépétibles engagés par la partie intimée.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme l'ordonnance déférée ;
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions ;
Condamne la Scea Domaine de Perreou à payer à M. et Mme X... une somme de 700 euros en application de l'article 750 du code de procédure civile ;
Condamne la Scea Domaine de Perreou aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Aurélie PRACHE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre et par Nicole CUESTA, Greffière.