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04/06/2013 | FRANCE | N°12/00780

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 04 juin 2013, 12/00780


ARRÊT DU 4 JUIN 2013

BM/ SB

----------------------- R. G. 12/ 00780-----------------------

SAS ELRES venant aux droits de la SOCIÉTÉ AVENANCE ELIOR En la personne de son représentant légal

C/

Patricia X...

SAS COMPASS GROUP FRANCE En la personne de son représentant légal

----------------------- ARRÊT no 186

COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale

Prononcé à l'audience publique du quatre juin deux mille treize par Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, et par Nicole CUESTA, Greffière. >La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE :
SAS ELRES venant aux droits de la SOCIÉTÉ AVENANCE...

ARRÊT DU 4 JUIN 2013

BM/ SB

----------------------- R. G. 12/ 00780-----------------------

SAS ELRES venant aux droits de la SOCIÉTÉ AVENANCE ELIOR En la personne de son représentant légal

C/

Patricia X...

SAS COMPASS GROUP FRANCE En la personne de son représentant légal

----------------------- ARRÊT no 186

COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale

Prononcé à l'audience publique du quatre juin deux mille treize par Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, et par Nicole CUESTA, Greffière.
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE :
SAS ELRES venant aux droits de la SOCIÉTÉ AVENANCE ELIOR En la personne de son représentant légal 61-69, rue de Bercy 75012 PARIS

Rep/ assistant : la SCP CHEBBANI et SOLIGNAC (avocats au barreau de TOULOUSE)

APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'AUCH en date du 4 avril 2012 dans une affaire enregistrée au rôle sous le no R. G. 11/ 00091

d'une part,
ET :
Patricia X...... 32300 MIRANDE

Rep/ assistant : Me Michèle BABERIAN (avocat au barreau de GERS)
SAS COMPASS GROUP FRANCE En la personne de son représentant légal Immeuble Le Carat 200, Avenue de Paris 92326 CHATILLON CEDEX

Rep/ assistant : Me Florence PAUMIER de la SCP MAXWELL-MAXWELL BERTIN (avocats au barreau de BORDEAUX)

INTIMÉES

d'autre part,
A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 23 avril 2013, sur rapport de Benoît MORNET, devant Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, Annie CAUTRES et Aurélie PRACHE, Conseillères, assistés de Nicole CUESTA, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

* * *

- EXPOSÉ DU LITIGE :
Patricia X...a été engagée le 24 mars 2005 par la société Compass en qualité d'employée de restauration, par contrat à durée indéterminée à temps partiel. Elle a par la suite acquis le statut d'agent de maîtrise exerçant en qualité de chef gérante à temps complet moyennant un salaire brut mensuel de 1. 787, 40 euros.
Par courrier du 4 mars 2011 de la communauté de communes Coeur d'Astrac en Gascogne, la société Elres était informée de ce qu'elle reprendrait le marché initialement confié à la société Compass, et ce, à compter du 1er avril 2011.
Le litige naissait sur le point de savoir si le contrat de travail conclu entre Patricia X...et la société Compass a été transféré à la société Elres à l'occasion de la reprise du marché de restauration.
Par jugement rendu le 4 avril 2012, le conseil de prud'hommes d'Auch a notamment condamné la société Elres à rétablir Mme X...dans ses fonctions précédentes qu'elle avait au sein de la société Compass, à lui payer la somme de 17. 870 euros en paiement des salaires depuis le 1er avril 2011, ainsi que la somme de 1. 787 euros au titre des congés payés, à lui payer la somme de 10. 000 euros à titre de dommages et intérêts, et a débouté Mme X...de sa demande fondée sur les heures RTT.
La société Elres a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui n'apparaissent pas critiquables. La société Compass a relevé appel incident.
La société Elres demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré en prononçant sa mise hors de cause, de débouter Mme X...en ce que ses demandes sont irrecevables et mal fondées, de débouter la société Compass de ses demandes, et de condamner cette dernière à lui payer une indemnité de 4. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que le transfert du contrat de travail de Mme X...qui avait le statut d'agent de maîtrise était soumis à deux conditions prévues par l'article 3 de la convention collective, à savoir : l'obligation pour la société Compass de démontrer qu'elle a tenté préalablement d'affecter la salariée à un poste équivalent sans qu'il en résulte une modification du contrat de travail, et l'obligation pour la salariée d'exprimer de façon explicite sa volonté de voir son contrat transféré auprès du repreneur, et que ces conditions n'étaient pas réunies dans le délai prescrit par la convention collective. Elle précise que si les conditions du transfert étaient réunies, le refus d'exécuter le contrat s'analysait en une rupture à l'initiative de l'employeur ; elle a ajouté oralement à l'audience qu'en aucun cas il n'était possible de prononcer l'intégration ou la réintégration de la salariée comme l'a fait le conseil de prud'hommes.

La société Compass demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté le transfert du contrat de travail de Mme X...au sein de la société Elres, de prononcer sa mise hors de cause et de condamner la société Elres à lui payer une indemnité de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que les conditions exigées par l'article 3 de la convention collective étaient réunies, en ce qu'elle n'a pas été en mesure d'affecter Mme X...sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail, et en ce qu'elle a fait connaître à la société Elres la volonté de Mme X...de voir son contrat de travail transféré dans le délai minimum de 15 jours au moins avant le démarrage du contrat.
Mme X...demande à la Cour de désigner la société Elres en qualité d'employeur de Mme X..., et à défaut la société Compass, d'ordonner son intégration ou sa réintégration chez cet employeur, à son ancien poste de chef gérante, de condamner son employeur au paiement des salaires depuis le 1er avril 2011, soit une somme brut de 42. 888 euros, outre 4. 288 euros au titre des congés payés, d'ordonner la remise des bulletins de salaires depuis le 1er avril 2011 et la régularisation de la situation de la salariée sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de condamner l'employeur à lui payer la somme de 130. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les préjudices financier et moral subis, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 10. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient principalement que les conditions du transfert du contrat de travail étaient réunies et que la société Elres ne pouvait pas refuser ce transfert de contrat de travail. Elle soutient subsidiairement que la société Compass est restée son employeur, de sorte que celle-ci lui devrait l'intégralité des salaires.
Elle ajoute que le non paiement des salaires lui a causé un préjudice moral et financier justifiant l'octroi d'une somme de 130. 000 euros à titre de dommages et intérêts.

- MOTIFS DE LA DÉCISION :

I-Sur le transfert du contrat de travail :
Au moment de l'attribution à la société Elres du marché retiré à la société Compass, Patricia X...avait le statut d'agent de maîtrise ; il convient en conséquence de retenir les dispositions de la convention collective applicables aux agents de maîtrise.
Si l'avenant no 3 du 26 février 1986 pose le principe du maintien du contrat de travail entre le personnel de statut " agent de maîtrise " et l'ancien employeur en cas d'attribution d'un marché à une nouvelle entreprise prestataire, l'article 3c de l'avenant no 2 du 27 mai 2009 précise que si le cédant n'est pas en mesure, dans le délai d'un mois et au plus tard 15 jours avant le démarrage effectif de l'exploitation par le repreneur, de les affecter sur un poste équivalent n'entraînant pas de modification du contrat de travail ou de dépassement de temps de trajet initial dont l'importance induirait un déménagement, les salariés de statut " agent de maîtrise ", qui en exprimeront la volonté de manière explicite, seront transférés chez le successeur sans que celui-ci puisse s'y opposer.
En l'espèce, la société Compass produit aux débats un courrier du 14 mars 2011 adressé à la société Elres (à l'époque Avenance) dans lequel elle écrit notamment : " Nous vous informons que Madame Patricia X..., chef gérante de statut Maîtrise, nous a d'ores et déjà informés qu'elle souhaitait voir son contrat transféré à votre société. Nous ne manquerons pas de vous adresser son courrier dès réception ".

Par courrier du 18 mars 2011, la société Elres écrivait à la société Compass que n'ayant pas reçu de courrier de la part de Mme X..., elle ne reprenait pas le contrat de travail de cette salariée.

Par courrier du 21 mars 2011, la société Compass adressait un nouveau courrier à la société Elres par lequel elle " confirmait " que Madame Patricia X...souhaitait que son contrat de travail soit transféré et transmettait le courrier manuscrit de Mme X....
Il résulte de ces éléments qu'en informant la société Elres dès le 14 mars 2011 du souhait de Patricia X...de voir son contrat de travail transféré, la société Compass transmettait à la société Elres l'expression de sa volonté de manière explicite de voir son contrat de travail transféré.
La société Elres ne peut, sans ajouter aux exigences textuelles de la convention collective, prétendre avoir en sa possession un courrier manuscrit de la salariée, l'expression de sa volonté pouvant parfaitement être transmise par l'employeur cédant le marché.
Le seul fait de n'avoir reçu le courrier manuscrit de Patricia X...que le 23 mars 2011 ne modifiait en rien la connaissance qu'avait la société Elres, depuis le 14 mars, de sa volonté exprimée de manière explicite de voir son contrat de travail transféré.
La société Compass produit également aux débats un état des sites dans lesquels elle a un établissement ; ce document établit que chaque établissement situés à Auch, Mirande et Montréal-du-Gers avait déjà un chef gérant, ce qui démontre qu'elle n'avait pas la possibilité d'affecter Patricia X...à un poste équivalent dans le département du Gers, alors qu'une affectation en dehors de ce département aurait entraîné un dépassement du temps de trajet dont l'importance aurait induit un déménagement.
Il résulte de ces éléments que la société Compass (cédant) n'était pas en mesure d'affecter Patricia X...sur un poste équivalent sans modification du contrat de travail ou dépassement du temps de trajet entraînant un déménagement, et que la société Elres avait connaissance, dès le 14 mars 2011, de la volonté de Patricia X...de voir son contrat de travail transféré, de sorte que la société Elres ne pouvait pas s'y opposer.
Patricia X...produit aux débats un constat d'huissier démontrant que la société Elres a refusé de prendre en compte le transfert du contrat de travail de Patricia X... ; le contrat de travail ayant été transféré, ce refus s'analyse en une rupture du contrat de travail aux torts de la société Elres, c'est à dire en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
II-Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail aux torts de la société Elres :
1- Sur la demande de réintégration :
Il résulte de l'article L. 1235-3 du code du travail qu'en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, si l'employeur s'oppose à la réintégration du salarié, le juge octroie une indemnité au salarié.
En l'espèce, la société Elres s'oppose à la réintégration de Patricia X.... Il convient en conséquence d'infirmer le jugement de ce chef et de débouter Patricia X...de cette demande.
2- Sur la demande en paiement des salaires depuis avril 2011 :
Le contrat de travail ayant été rompu au 1er avril 2011, aucun salaire n'est du depuis cette date de sorte que le jugement sera infirmé de ce chef et que Patricia X...sera déboutée de cette demande.

3- Sur la demande en dommages et intérêts :

La demande en dommages et intérêts de Patricia X...tend à réparer le préjudice résultant de la rupture du contrat de travail et s'analyse en une demande d'indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Agée de 52 ans et bénéficiant de 6 ans d'ancienneté au moment du licenciement, il convient d'allouer à Patricia X..., outre la somme de 3. 574, 80 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 357, 48 euros au titre des congés payés afférents, une somme de 21. 444 euros correspondant à 12 mois de salaire, à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
III-Sur les dépens et les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile :
La société Elres succombant à l'instance, elle en supportera les dépens et devra payer à Patricia X...une indemnité de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande en revanche de débouter la société Compass de cette demande.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel interjeté contre le jugement rendu le 4 avril 2012 par le conseil de prud'hommes d'Auch ;
Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :
Dit que le contrat de travail de Patricia X...a été transféré de la société Compass à la société Elres ;
Dit que le contrat de travail de Patricia X...a été rompu aux torts de la société Elres le 1er avril 2011 et que cette rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Déboute Patricia X...de sa demande de réintégration et de sa demande en paiement des salaires depuis avril 2011 ;
Condamne la société Elres à payer à Patricia X...la somme de 3. 574, 80 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 357, 48 euros au titre des congés payés afférents, et une somme de 21. 444 euros correspondant à 12 mois de salaire, à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société Elres aux dépens de l'instance, à payer à Patricia X...une indemnité de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et déboute la société Compass de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, et par Nicole CUESTA, Greffière.
LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00780
Date de la décision : 04/06/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2013-06-04;12.00780 ?
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