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10/11/2008 | FRANCE | N°977

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre civile 1, 10 novembre 2008, 977


ARRÊT DU 10 Novembre 2008

C. A. / I. F. **
--------------------- RG N : 06 / 01027---------------------

Daniel X...
C /
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN
------------------
ARRÊT no 977 / 2008
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le dix Novembre deux mille huit, par Raymond MULLER, Président de Chambre, assisté de Dominique SALEY, Greffier,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Cha

mbre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur Daniel X... né le 24 Juillet 1952 à TOULOUSE (31000) Dem...

ARRÊT DU 10 Novembre 2008

C. A. / I. F. **
--------------------- RG N : 06 / 01027---------------------

Daniel X...
C /
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN
------------------
ARRÊT no 977 / 2008
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le dix Novembre deux mille huit, par Raymond MULLER, Président de Chambre, assisté de Dominique SALEY, Greffier,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur Daniel X... né le 24 Juillet 1952 à TOULOUSE (31000) Demeurant ... 31000 TOULOUSE

représenté par la SCP HENRI TANDONNET, avoués assisté par la SCP NONNON-FAIVRE, avocat

APPELANT d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 26 avril 2006
D'une part,
ET :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Demeurant 6-7 Place Jeanne d'Arc B. P. 325 31005 TOULOUSE CEDEX 6

représentée par Me Jean-Michel BURG, avoué assistée de la SCP DECKER et ASSOCIES, avocats

INTIMEE
D'autre part,
a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 22 septembre 2008, devant Raymond MULLER, Président de Chambre, François CERTNER, Conseiller et Chantal AUBER, Conseiller (laquelle, désignée par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable), assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.
FAITS ET PROCÉDURE
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN a consenti à Monsieur Daniel X... :
- par convention du 18 octobre 1999, une ouverture de crédit en compte courant d'un montant de 250. 000 F, soit 38. 112, 25 €,
- par acte sous seing privé du 10 novembre 1999, un prêt de 77. 000 F, soit 11. 738, 57 €, au taux d'intérêt de 5 %.
Des échéances du prêt étant impayées, la banque s'est prévalue de la déchéance du terme. D'autre part, le compte courant étant débiteur, la banque a adressé à Monsieur X..., par lettre recommandée du 6 février 2001, une mise en demeure de payer le montant du découvert.
Par acte d'huissier du 24 mars 2004, la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE a fait assigner Monsieur Daniel X... pour obtenir sa condamnation au paiement des sommes dues au titre du prêt et du solde débiteur du compte.
Par jugement du 26 avril 2006, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de Grande Instance d'AUCH a :
- condamné Monsieur X... à verser à la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE les sommes de :
* 9. 945, 30 € au titre du prêt P 4670100000 avec intérêts contractuels au taux de 5 % à compter du 6 février 2001,
* 64. 676, 90 € au titre du solde débiteur du compte avec intérêts au taux conventionnel de 9, 15 % à compter du 6 février 2001,
- ordonné la capitalisation des intérêts,
- débouté Monsieur X... de sa demande de délais,
- condamné Daniel X... au paiement de la somme de 1. 000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens.
Monsieur X... a relevé appel de cette décision.
Par décision du 20 novembre 2007, le conseiller de la mise en état a ordonné la production par la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE du détail des opérations effectuées sur le compte 1931 65 53 101 depuis son ouverture au 30 septembre 1999.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 septembre 2008.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Monsieur Daniel X... indique qu'il a fait analyser les relevés de compte de 1990 à 1999 par un expert dont les conclusions versées aux débats font ressortir :
- qu'en octobre 1998, lorsque le découvert a atteint 250. 000 FF, aucune convention de crédit ne semblait avoir été signée et que c'est ensuite, par convention du 18 octobre 1999, que la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE a indiqué les conditions tarifaires d'une ouverture de crédit à concurrence de 250. 000 FF,
- que la banque a décompté des intérêts, cotisations et commissions selon des modalités complexes et peu explicites,
- qu'aucune indication ne lui a été fournie pour lui permettre d'apprécier le taux effectif global réel du concours,
- que la banque n'a pas calculé les intérêts conformément aux dispositions de l'article L 313-1 du Code de la consommation et a méconnu les dispositions de l'article L 313-2 du même code,
- que la banque n'a donc pas respecté les conditions requises pour la validité des intérêts, frais et commissions conventionnels et que le contrat encourt la nullité sur le fondement de l'article 1907 du Code civil et des articles L 313-1 et L 313-2 du Code de la consommation,
- que les valeurs réelles du TEG dépassent à 30 reprises le taux d'usure,
- qu'après calcul des intérêts, non au taux conventionnel, mais au taux légal, il y a des agios excessifs, entre 1997 et décembre 2000, d'un montant de 13. 665, 56 €, le montant des intérêts au taux légal s'élevant à 2. 866 €.
Il fait valoir en conséquence que la banque n'a pas respecté les obligations relatives à l'établissement d'un écrit préalable à l'ouverture d'un découvert en compte courant, qu'elle a failli à son obligation d'information et qu'elle a pratiqué l'usure.
Il soutient que cette pratique dolosive délibérée lui a causé un préjudice dans la mesure où il n'a pu faire face à son obligation de remboursement.
Il demande donc à la cour :
- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- de juger que l'intimée a pratiqué des intérêts non fondés en droit à hauteur de 13. 665, 56 €,
- d'y substituer les intérêts au taux légal en application de l'article L 313-4 du Code de la consommation,
- de condamner la banque au paiement de la somme de 30. 000 € à titre de dommages et intérêts,
- de fixer la créance de la banque et de lui accorder un délai de deux ans pour l'honorer en application de l'article 1244-1 du Code civil.
* * *
La CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE relève qu'aucune contestation n'est émise par Monsieur X... sur les sommes demandées au titre du prêt.
Elle fait valoir, quant au compte courant, que le rapport de l'expert, mandaté par Monsieur X... seul, a été effectué de manière non contradictoire en violation de l'article 16 du Code de Procédure Civile, sans que la banque n'ait été consultée ni associée à cette note technique de sorte que celle-ci doit être écartée avec l'argumentation subséquente.
Concernant les sommes dues au titre du solde débiteur du compte, elle indique qu'elle produit la convention d'ouverture du compte du 1er septembre 1999 et l'ouverture de crédit du 18 octobre 1999 pour un montant de 250. 000 FF au taux d'intérêt annuel de 9, 15 % et au TEG de 9, 70 % hors ADI, que Monsieur X... ne conteste pas avoir reçu les relevés et qu'il n'a émis aucune contestation lors de leur réception.
Elle précise qu'aucune prescription ne peut être opposée à son action au titre du compte courant.
S'agissant des intérêts perçus, elle rappelle que la clôture du compte n'arrête pas le cours des intérêts, conformément à ce qui était prévu dans la convention et elle soutient que les intérêts au taux conventionnel sont dus à compter de la mise en demeure adressée le 13 janvier 2004.
Elle fait valoir par ailleurs que même s'il était démontré que le taux d'intérêt a été usuraire, la sanction encourue n'est pas la nullité du contrat mais la réduction du taux d'intérêt au montant du plafond par la suppression de la partie usuraire des intérêts et le calcul des intérêts par application de l'article L 313-4 du Code de la consommation.
Elle souligne de plus qu'aucune contestation ne peut être soulevée sur la perception des intérêts à l'expiration d'un délai de prescription de 5 ans et que selon la jurisprudence, en cas d'ouverture de crédit en compte courant, la réception de chacun des relevés indiquant ou devant indiquer le taux effectif global appliqué constitue le point de départ du délai de cette prescription.
Or elle relève que Monsieur X... a été informé de la variation du taux d'intérêt par les relevés bancaires qui n'ont jamais fait l'objet de contestation de sa part et par l'affichage du taux dans les agences.
Elle s'oppose enfin à la demande de délais de paiement de Monsieur X... qui ne fournit pas de justificatif de sa situation financière et qui n'a effectué aucun règlement depuis la mise en demeure.
Elle demande en conséquence à la cour :
- d'écarter de débats la note technique de la société A2C du 29 février 2008,
- de débouter Monsieur X... des fins de son appel non injustifié et non fondé,
- de confirmer le jugement déféré quant aux condamnations de Monsieur X... au paiement des sommes de 9. 945, 30 € au titre du prêt avec intérêts contractuels au taux de 5 % à compter du 6 février 2001 et de 64. 676, 90 € au titre du solde débiteur du compte avec intérêts au taux conventionnel de 9, 15 % à compter du 6 février 2001 et quant à la capitalisation des intérêts,
- de condamner Monsieur X... à lui payer la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Monsieur X... n'émet aucune contestation sur les condamnations prononcées à son encontre par les premiers juges au titre du prêt P 467010000 qui lui a été consenti par un acte sous seing privé du 10 novembre 1999, qui est versé aux débats comme les mises en demeure adressées au débiteur.
Il y a donc lieu de confirmer les dispositions du jugement déféré en ce qu'elles ont condamné, à ce titre, Monsieur X... au paiement de la somme principale de 9. 945, 30 € avec intérêts contractuels de 5 % à compter du 6 février 2001.
En ce qui concerne le compte courant no 19316553101, Monsieur X... n'invoque plus la prescription de l'action de la CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE. Il conteste en revanche les intérêts pratiqués par la banque en invoquant ses manquements à ses obligations en matière de validité du taux effectif global (TEG).
Il produit à l'appui de ses demandes deux notes techniques établies par un expert du cabinet A2C, concernant l'audit des conditions pratiquées au titre de l'ouverture de crédit par découvert consenti par le CRÉDIT AGRICOLE.
Il est constant que Monsieur X... a seul mandaté cet expert dont les rapports ne constituent pas des expertises judiciaires. Ces notes ont cependant été régulièrement communiquées à la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE, selon bordereaux du 24 avril 2007 et du 11 mars 2008, et la banque a eu la possibilité de s'expliquer sur ces documents avant l'ordonnance de clôture intervenue le 9 septembre 2008.
Or, les seules critiques soulevées par la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE à l'encontre de ces notes techniques consistent à soutenir qu'elles ne présentent pas un caractère contradictoire et qu'elles lui sont inopposables dans la mesure où elles ont été effectuées sans qu'elle puisse faire valoir ses observations en violation de l'article 16 du Code de Procédure Civile.
Toutefois, son argumentation et la jurisprudence citée par elle concernent les règles applicables à l'expertise judiciaire qui est soumise au principe de la contradiction pendant son déroulement à peine de nullité de la mesure d'instruction. En revanche, les expertises extra-judiciaires, officieuses et unilatérales peuvent être prises en considération comme des éléments d'information et de preuve dès lors que les rapports ont été soumis à la discussion et à la contradiction des parties. Tel est le cas en l'espèce car la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE a bien été en mesure de faire valoir son point de vue sur le contenu de ces notes techniques versées aux débats. Or, elle se borne à demander qu'elles soient écartées des débats sans émettre la moindre critique ou observation sur les constatations et analyses de l'expert mandaté par Monsieur X.... En outre, si la banque reproche à l'appelant de ne pas avoir sollicité la désignation d'un expert judiciaire, elle ne formule pas elle-même de demande en ce sens alors que la preuve de sa créance lui incombe et qu'elle a intérêt à répondre aux moyens soulevés sur la validité des taux d'intérêts qu'elle a pratiqués.
Il y a lieu de plus de constater que les notes produites par Monsieur X... ne consistent pas en un simple avis subjectif, mais que l'analyse et les conclusions du Cabinet A2C sont fondées sur un rappel des lois et réglementations applicables en la matière et sur l'examen des documents bancaires et relevés du compte litigieux. Ces notes sont donc étayées par des éléments objectifs et elles sont ainsi de nature à permettre à la cour de vérifier le caractère justifié de la créance de la banque. Il n'y a donc pas lieu de les rejeter, mais il convient de les retenir comme des éléments de preuve utiles à la solution du litige.
Monsieur X... reproche à la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE, d'une part, la violation des articles 1907 du Code civil et L 313-1 et L 313-2 du Code de la consommation et, d'autre part, la pratique de l'usure.
Aux termes de l'article 1907 du Code civil, le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit.
L'article L 313-1 du Code de la consommation dispose dans son premier alinéa que : " Dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du TEG pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations, correspondent à des débours réels. "
L'article L 313-2 précise que : " le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L 313-1 doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section " (relative aux taux d'intérêts).
L'obligation de fixer par écrit le TEG est d'application générale et concerne notamment les intérêts afférents au solde débiteur d'un compte courant.
En l'espèce, il résulte des éléments du dossier que Monsieur X... était titulaire depuis de nombreuses années, auprès de la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN, d'un compte courant no 19316553 101 et qu'une convention de compte a été matérialisée le 1er septembre 1999.
Puis, par convention du 18 octobre 1999, la banque a consenti à Monsieur X... une ouverture de crédit en compte courant d'un montant de 250. 000 FF, soit 38. 112, 25 €, d'une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction.
Cette convention mentionnait un taux d'intérêt annuel à ce jour de 9, 15 % et un taux effectif global avec ADI de 10, 22 % et prévoyait notamment que le taux d'intérêt était susceptible de variation par suite de changement du taux maximum fixé par arrêté ministériel ou par la CAISSE NATIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE. Elle indiquait aussi qu'en cas de débit en compte supérieur au plafond de l'ouverture de crédit, l'emprunteur serait tenu, sans mise en demeure, de payer au prêteur une majoration d'intérêt de dépassement de plafond calculée sur le montant du dépassement. Des " commissions de confirmation " et de " plus fort découvert " étaient en outre stipulées à la charge de l'emprunteur.
Il est constant et établi par les relevés de compte que le montant de cette ouverture de crédit a été largement dépassé, de sorte que, par lettre recommandée du 6 février 2001, la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE a mis en demeure Monsieur X... de régler la somme de 424. 235, 56 FF, soit 64. 674, 29 €, au titre du compte débiteur, majorée des intérêts, frais et accessoires à venir et lui a demandé la restitution des moyens de paiement mis à sa disposition.
Il ressort de l'examen des documents susvisés :
- que l'indication du taux effectif global du découvert du compte no 19316553 101 a été mentionnée sur la convention d'ouverture de crédit du 18 octobre 1999 ;
- qu'antérieurement à cette convention, la mention du TEG n'avait pas été portée sur un document écrit préalable à la perception d'intérêts débiteurs ; dès lors, les agios n'étaient dus qu'à compter de l'information régulièrement reçue valant seulement pour l'avenir ;
- que les relevés périodiques du compte comportent, en débit, des sommes prélevées avec l'indication : intérêts débiteurs (pour une période déterminée) et la mention du taux effectif global.
La CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE relève ainsi que Monsieur X... a été informé de la variation du taux d'intérêt par les relevés bancaires qu'il recevait et par l'affichage de ce taux dans les agences.
Les notes techniques du Cabinet A2C, produites par Monsieur X..., font cependant apparaître :
- que l'ouverture de crédit du 18 octobre 1999 comporte un TEG qui ne tient pas compte de la commission d'assiette " jours de valeur " ni de la commission de plus fort découvert, de sorte qu'il n'a aucune valeur indicative et n'est pas conforme aux dispositions de l'article L 313-1 du Code de la consommation ;
- que la banque n'a pas pallié cette mauvaise information préalable comme elle aurait pu le faire à l'issue de chaque période mensuelle car si les relevés de compte comportent la mention d'un TEG, les valeurs affichées omettent de prendre en compte l'incidence de la commission de découvert, de la commission de confirmation, de la commission d'assiette " jours de valeur " et des cotisations ADI ;
- que la comparaison entre les valeurs du TEG déterminée conformément à l'article L 313-1 du Code de la consommation et les valeurs affichées par la banque fait ressortir des écarts importants (par exemple, au titre du mois d'avril 2000, la valeur du TEG s'établit à 13, 50 % l'an, alors que le TEG affiché par la banque sur le relevé de compte lors de la perception des agios est de 10, 23 %) ;
- qu'ainsi, le TEG affiché chaque mois par la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE est erroné et il en résulte qu'elle n'a pas respecté les conditions requises pour la validité de la stipulation d'intérêts.
En outre, selon la détermination du TEG effectuée par le Cabinet A2C, les valeurs réelles du TEG ont dépassé à 30 reprises le seuil de l'usure.
Le Cabinet A2C a constaté que les agios prélevés au titre de l'ouverture de crédit entre le mois d'octobre 1997 et le mois de décembre 2000 s'établissent à la somme de 13. 665, 56 €. Il a procédé pour la même période à un calcul du montant des intérêts au taux légal qui s'élèvent à 2. 866, 57 € et il a ainsi relevé un écart de 10. 798, 99 €.
Pour les motifs déjà énoncés, la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE ne conteste pas, même à titre subsidiaire, l'analyse effectuée par le Cabinet A2C qui repose pourtant sur un examen précis des documents bancaires, sur les éléments de calcul du TEG pour chaque arrêté de compte de la période analysée avec chacun des éléments entrant dans sa composition et sur des comparaisons explicites, sous forme de tableaux, entre les TEG indiqués, les TEG réels et les seuils de l'usure.
La CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE se borne à rappeler que même s'il était démontré que le taux d'intérêt pratiqué est usuraire, la sanction encourue serait la réduction du taux d'intérêt au montant du plafond par la suppression de la partie usuraire des intérêts et le calcul de ces derniers par application de l'article L 313-4 du Code de la consommation.
L'alinéa 1er de cet article dispose en effet que lorsqu'un prêt conventionnel est usuraire, les perceptions excessives au regard des articles L 313-1 à L 313-3 sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital de la créance. Et l'article L 313-3 précise préalablement que constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit pour des opérations de même nature comportant des risques analogues, telles que définies par l'autorité administrative après avis du conseil national du crédit.
En outre, la sanction du non-respect des conditions requises par les articles 1907 du Code civil et L 313-2 du Code de la consommation pour la validité des intérêts conventionnels n'est pas la nullité du contrat, comme mentionné dans les conclusions de Monsieur X..., mais la substitution du taux légal au taux d'intérêt conventionnel.
Or, il y a lieu de constater que même lorsque le taux pratiqué par la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE n'était pas supérieur au seuil de l'usure, celle-ci n'a pas satisfait aux exigences légales relatives à l'indication du taux effectif global et qu'elle a porté à la connaissance de son client un TEG erroné. Dès lors, la mention d'un TEG erroné équivalant à une absence de mention écrite du taux pratiqué, il y a lieu à application du taux d'intérêt légal.
La CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE se prévaut cependant de la prescription qui interdit de contester la perception des intérêts à l'expiration d'un délai de cinq ans.
Toutefois, en cas de mention d'un taux effectif global erroné, le délai de la prescription de l'action en annulation des intérêts litigieux ne commence à courir qu'à compter de la révélation à l'emprunteur d'une telle erreur.
En l'espèce, la simple réception par Monsieur X... des relevés de compte comportant la mention d'un taux effectif global ne lui permettait pas de savoir que le taux ainsi affiché était erroné. Il n'a pu en réalité avoir la révélation de cette erreur qu'en faisant analyser ces relevés par un expert qui, après calculs, a constaté des écarts entre les valeurs du TEG déterminé conformément à l'article L 313-1 du Code de la consommation et les valeurs affichées par la banque.
Il y a lieu dans ces conditions de retenir que la prescription n'a pas pu commencer à courir avant le dépôt des notes techniques établies par le Cabinet A2C et que, dès lors, la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE n'est pas fondée à s'en prévaloir.
En conséquence, l'écart constaté entre, d'une part, les agios prélevés entre le mois d'octobre 1997 et le mois de décembre 2000 et, d'autre part, le montant des intérêts au taux légal pour la même période étant de 10. 798, 99 €, cette somme doit être déduite de la créance de la banque.
Dès lors, le solde débiteur du compte arrêté au 31 décembre 2000 s'établissant (selon le relevé correspondant) à 418. 956, 87 FF, soit 63. 869, 56 €, il y a lieu, après déduction de la somme précitée de 10. 798, 99 €, de condamner Monsieur X... au paiement de la somme de 53. 070, 57 € qui sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure du 6 février 2001 et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts.
Par ailleurs, le préjudice invoqué par Monsieur X... est compensé par la substitution des intérêts au taux légal aux intérêts prélevés par la banque et il n'est pas démontré que la pratique de la banque lui a causé un préjudice supplémentaire. La demande de dommages et intérêts de l'appelant sera donc rejetée.
Enfin, si Monsieur X... sollicite l'octroi d'un délai de deux ans en raison de la diminution de ses revenus, il ne produit aucun document justificatif de sa situation et ne formule aucune proposition de règlement échelonné des sommes dues. Il ne peut ainsi qu'être débouté de sa demande qui n'est pas étayée.
Chacune des parties succombant partiellement dans ses demandes, il convient de partager les dépens de première instance et d'appel par moitié entre elles et il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Confirme le Jugement rendu le 26 avril 2006 par le Tribunal de Grande Instance d'AUCH, en ses dispositions :
- qui ont condamné Monsieur Daniel X..., au titre du prêt P 467010000, au paiement de la somme principale de 9. 945, 30 € avec intérêts contractuels de 5 % à compter du 6 février 2001,
- qui ont ordonné la capitalisation des intérêts,
- qui ont débouté Monsieur X... de sa demande de délais,
Infirmant le jugement pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne Monsieur Daniel X... à payer à la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN, au titre du solde débiteur du compte courant no 19316553101, la somme de 53. 070, 57 € avec intérêts au taux légal à compter du 6 février 2001,
Déboute Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés pour moitié par chacune des parties et qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile,
Le présent arrêt a été signé par Raymond MULLER, Président de Chambre et Dominique SALEY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 977
Date de la décision : 10/11/2008
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Intérêts - Taux - Taux effectif global - Mention - Mention erronée - Sanction - Détermination - / JDF

La sanction du non respect des conditions requises par les articles 1907 du code civil et L 313-2 du code de la consommation pour la validité des intérêts conventionnels n'est pas la nullité du contrat, comme mentionné dans les conclusions de l'appelant, mais la substitution du taux légal au taux d'intérêt conventionnel. En l'espèce, le taux pratiqué par le prêteur n'était pas supérieur au seuil de l'usure mais celui-ci n'a pas satisfait aux exigences légales relatives à l'indication du taux effectif global et a porté à la connaissance de son client un TEG erroné. Dès lors, la mention d'un TEG erroné équivalant à une absence de mention écrite du taux pratiqué, il y a lieu à application du taux d'intérêt légal


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Auch, 26 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2008-11-10;977 ?
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