ARRÊT DU
18 Mars 2008
J. M. I / S. B
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RG N : 06 / 00095
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(jonction avec les RG : 06 / 00208 et 06 / 00406)
Laurent X...
S. C. P. X...
C /
S. A. R. L. FRANCE TERRAIN INFORMATIQUE exerçant sous l' enseigne FTI
Guy Y...
Marie Françoise Z... épouse Y...
S. A. R. L. GRIFFE C. D. M.
S. C. I. LA TOUR DU DONJON
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ARRÊT no251 / 08
COUR D' APPEL D' AGEN
Chambre Civile
Prononcé à l' audience publique le dix huit Mars deux mille huit, par Thierry LIPPMANN, Conseiller, assisté de Dominique SALEY, Greffier,
LA COUR D' APPEL D' AGEN, 1ère Chambre dans l' affaire,
ENTRE :
Maître Laurent X...
né le 10 Décembre 1962 à AGEN (47000)
Demeurant...
47000 AGEN
S. C. P. X... prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est...
47000 AGEN
représentés par la SCP VIMONT J. ET E., avoués
assistés de Me Georges LURY, avocat
APPELANTS d' un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d' AGEN en date du 15 Décembre 2005
D' une part,
ET :
S. A. R. L. FRANCE TERRAIN INFORMATIQUE exerçant sous l' enseigne FTI, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est 25 Rue de Berne
75008 PARIS
représentée par la SCP Guy NARRAN, avoués
assistée de Me Claude GUERRE, avocat
Monsieur Guy Y...
né le 21 Septembre 1941 à SAINT ARNAUD (ALGERIE)
de nationalité française
Madame Marie Françoise Z... épouse Y...
née le 17 Février 1951 à ALGER (ALGERIE)
de nationalité française
Demeurant ensemble...
Baie de l' Orphelinat
98800 NOUMEA (NOUVELLE CALEDONIE)
représentés par la SCP Henri TANDONNET, avoués
assistés de la SCP TANDONNET- BASTOUL, avocats
S. A. R. L. GRIFFE C. D. M. prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est Passage Garonne
40 Boulevard de la République
47000 AGEN
représentée par la SCP TESTON- LLAMAS, avoués
assistée de Mes GONELLE et VIVIER, avocats
S. C. I. LA TOUR DU DONJON, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est Centre République
44600 SAINT NAZAIRE
représentée par la SCP A. L. PATUREAU et P. RIGAULT, avoués
assistée de Me Jean- Louis LE HAN, avocat
INTIMÉS
D' autre part,
a rendu l' arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 05 Février 2008, devant Jean- Marie IMBERT, Président de Chambre (lequel a fait un rapport oral préalable), Benoît MORNET, Conseiller et Thierry LIPPMANN, Conseiller, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu' il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l' arrêt serait rendu.
* *
*
Guy Y... et son épouse née Marie- Françoise Z... ont signé le 9 août 2000 avec la SCI LA TOUR DU DONJON un compromis de vente portant sur le lot No4 (local commercial) d' un immeuble en copropriété situé à AGEN ;
Ce bien était loué depuis le 20 septembre 1998 à la SARL GRIFFE CDM ;
La vente était soumise à la réalisation de conditions suspensives le 19 septembre 2000 au plus tard et la signature de l' acte authentique devait intervenir dans les 15 jours suivants ;
Le 19 septembre 2000, Maître X..., notaire à AGEN, a dressé un procès- verbal de carence pour défaut des époux Y... ;
Par jugement du 15 décembre 2005, le Tribunal de grande instance d' AGEN :
* a débouté la demanderesse, la SCI TOUR DU DONJON de ses prétentions contre les époux Y..., Maître X... et la SCP X...,
* a débouté Maître X... et la SCP X... de ses appels en garantie à l' encontre de Jean F... et de la SARL FRANCE TERRAIN INFORMATIQUE (FTI), ainsi que de leurs demandes contre la SCI TOUR DU DONJON et les époux Y...,
* a débouté les époux Y... de leurs demandes reconventionnelles à l' encontre de la SCI TOUR DU DONJON et de la SARL GRIFFE CDM,
* a condamné Maître X... et la SCP X... à payer :
- à la SARL GRIFFE CDM la somme de 38. 112, 25 € à titre de dommages et intérêts et celle de 1. 000 € à titre d' indemnité de procédure,
- à la SARL FTI la somme de 455, 82 € à titre de dommages et intérêts et celle de 1. 000 € à titre d' indemnité de procédure,
- aux époux Y... la somme de 1. 500 € à titre d' indemnité de procédure, ainsi qu' aux dépens.
Maître X... et la SCP X... ont relevé appel de ce jugement le 16 janvier 2006 ; la SARL FTI en a fait de même le 9 février 2006, puis la SCI TOUR DU DONJON le 16 mars 2006 ; les instances ont été jointes par ordonnances du 21 mars et du 23 mai 2006 ;
Aux termes de leurs dernières écritures (No3), Maître X... et la SCP X... font valoir :
- que Maître X... n' a commis aucune faute en sa qualité de notaire chargé d' établir l' acte authentique, la responsabilité de l' échec de l' opération résultant exclusivement de la carence des vendeurs, les époux Y...,
- qu' en effet, ces derniers ont été mis en possession de tous les documents nécessaires à la signature de l' acte, lequel portait non seulement sur le lot No4 mais aussi sur le No36, une cave, mais pour faire suite à leur propre demande, et qu' ils ne pouvaient tirer argument de cet ajout pour ne pas passer l' acte authentique,
- que le projet d' acte à eux transmis par télécopie le 8 septembre 2000 comportait, certes, des blancs correspondant à des mentions relatives à leur situation personnelle, qu' ils devaient communiquer, mais qui ne présentaient aucun risque juridique eu égard à l' objet de la transaction,
- que, compte tenu de leur éloignement géographique (Nouméa), il leur appartenait de régulariser une procuration authentique chez leur notaire local, Maître X... leur ayant fait parvenir ces documents le 8 septembre 2000,
- que la cession n' engendrait pour eux aucune plus value immobilière imposable, de sorte que Maître X... n' était pas tenu de solliciter la nomination d' un représentant du vendeur accrédité en application de la loi fiscale,
- que les conditions suspensives étant réalisées, rien n' empêchait que l' acte soit régularisé le 19 septembre, date retenue par la SCI TOUR DU DONJON, à laquelle il ne pouvait refuser d' instrumenter,
- que, s' agissant du préjudice allégué par la SCI, celui- ci résulte du seul fait de la société qui n' a pas souhaité poursuivre la vente forcée devant le Tribunal et qui a procédé à des travaux en prenant le risque de ne pas attendre la signature de l' acte authentique ; qu' en tout état de cause, elle ne justifie pas d' un quelconque gain manqué,
- que, s' agissant du préjudice allégué par la SARL GRIFFE CDM, qui ne peut consister qu' en une perte de chance, du fait de l' échec de la vente, de céder elle- même son bail, cette cession était suspendue à la vente par acte authentique des locaux eux- mêmes et que Maître X... n' ayant commis aucune faute dans cette opération, ils ne peuvent être tenus pour responsables de la non réalisation de l' opération qui en dépendait ; qu' au demeurant, la SARL a délaissé son bail commercial avant la réalisation des conditions suspensives et ne justifie actuellement d' aucune activité,
- qu' enfin, la demande de la société FTI en paiement de ses honoraires de négociation ne peut prospérer, l' opération ne s' étant pas conclue ;
Ils demandent à la Cour d' infirmer le jugement, de les mettre hors de cause, de débouter la société FTI de ses demandes et de condamner solidairement les époux Y... et la SCI TOUR DU DONJON à leur payer la somme de 7. 537, 40 € au titre de leurs frais et, in solidum avec la SARL GRIFFE CDM, celle de 3. 000 € au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile.
* * *
Guy et Marie- Françoise Y..., domiciliés à Nouméa, font valoir, aux termes de leurs dernières écritures (No2) :
- que le compromis stipulait que l' acquéreur disposait d' un délai de deux mois à compter du 4 octobre 2000 tant pour intenter une action en vente forcée qu' une action en dommages intérêts et que l' action de la SCI TOUR DU DONJON est donc forclose,
- qu' ils étaient dans l' impossibilité matérielle de signer l' acte authentique le 19 septembre 2000, compte tenu de leur éloignement et du fait que rien n' était prêt,
- que la date imposée pour la signature de l' acte était imposée par l' acquéreur et injustifiée puisqu' ils disposaient d' un délai expirant le 4 octobre 2000 et qu' on ne pouvait leur imposer de régulariser l' acte avant cette date,
- qu' il existait une confusion sur l' objet de la vente, le compromis ne portant que sur le lot No4 alors que la vente incluait aussi le lot No 36 (cave),
- qu' ils n' ont jamais reçu les documents établissant la réalisation des conditions suspensives,
- que le notaire ne s' est pas préoccupé des formalités fiscales applicables du fait de leur statut de résidents outre- mer,
- qu' ils considèrent, comme Maître X..., que la SCI ne saurait se prévaloir d' un préjudice résultant en réalité du fait qu' elle a engagé des travaux avant la signature de l' acte de vente,
- que la demande de la SARL FTI en paiement de ses honoraires de négociation ne peut concerner que son mandant,
- que la SARL GRIFFE CDM avait cédé en juin 2000 le bail dont elle bénéficiait dans les locaux à leur insu et en contravention aux clauses du bail et que la Cour, par arrêt du 17 mai 2005, avait jugé qu' il y avait eu résiliation amiable du bail le 30 septembre 2000 ;
Ils demandent à la Cour de déclarer la SCI TOUR DU DONJON (et non la SARL GRIFFE CDM comme indiqué par erreur) forclose en son action en dommages intérêts, subsidiairement de confirmer le jugement en ce qu' il a écarté leur responsabilité dans la non réitération de l' acte authentique, de débouter toutes les parties de leurs demandes à leur encontre et de condamner la SCI TOUR DU DONJON, la SARL GRIFFE CDM, la SARL FTI et Maître X... à leur payer une indemnité de procédure de 4. 000 €.
Aux termes de ses dernières écritures (No3), la SCI TOUR DU DONJON fait valoir qu' elle a subi un important préjudice consistant en divers frais pour
26. 077, 88 F et en un manque à gagner de 370. 890, 66 F soit au total 396. 968, 54 F ou 60. 517, 46 € ; elle reprend les moyens développés par Maître X... sur la carence et la responsabilité des époux Y... qui n' ont pas voulu régulariser la vente et ajoute que le Tribunal a justement retenu une faute du notaire concernant le lot 36 et les délais, ce qui justifie une condamnation in solidum ;
Elle soutient que la clause du compromis dont se prévalent les époux Y... pour conclure à la forclusion de son action ne concerne que la vente forcée et non une action en dommages et intérêts et que leur responsabilité dans l' échec de l' opération s' oppose à ce qu' elle supporte la charge des frais exposés par le notaire ;
Elle demande à la Cour d' infirmer le jugement, de débouter les époux Y..., Maître X... et la SCP X... et la SARL FTI de leurs demandes, et de condamner solidairement les époux Y..., Maître X... et la SCP X... à lui payer la somme de 60. 517, 46 € en réparation de son préjudice et celle de 5. 000 € au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile.
* * *
Dans ses dernières conclusions (No2), la SARL GRIFFE CDM demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu' il a liquidé son préjudice à 38. 112, 25 €, de l' infirmer pour le surplus, de condamner in solidum les époux Y..., Maître X... et la SCP X... à lui payer cette somme, avec intérêts légaux à compter du 25 janvier 2005, et toute partie succombante à lui payer une indemnité de procédure de 2. 000 € ;
Elle fait valoir : que, selon bail commercial du 9 septembre 1998, elle avait loué à Guy Y... un local commercial correspondant au lot No4 objet du compromis litigieux et que, pour compléter sa surface de vente, elle avait conclu avec Monsieur G... un bail précaire portant sur les lots no 2 et 32 ; que les trois lots avaient fait l' objet de deux compromis de vente séparés au profit du même acquéreur, la SCI TOUR DU DONJON, et que dans le prolongement de ces actes, elle avait elle- même signé avec cette SCI une promesse de cession de bail sur le local commercial appartenant aux époux Y... moyennant la somme de 250. 000 F ; qu' elle a libéré les lieux en accord avec eux et qu' en empêchant la cession des murs de se réaliser, ils ont commis une faute à son égard ; que leur responsabilité doit être retenue tout autant que celle du notaire ;
La SARL FTI, qui rappelle qu' elle avait reçu du gérant de la SCI TOUR DU DONJON un mandat de recherches d' un local commercial en centre ville, persiste à faire valoir qu' elle a entièrement rempli sa mission et qu' elle est fondée à obtenir le règlement de la somme de 20. 056, 19 € correspondant à ses commissions, outre celle de 455, 82 € remboursée à une autre agence, soit 20. 512, 01 € et demande à la Cour de réformer le jugement, de condamner les époux Y..., qui supportent la responsabilité de la rupture, ainsi que, subsidiairement Maître X... et la SCP X..., à lui payer cette somme, et tous succombants à lui payer une indemnité de procédure de 3. 000 €.
SUR CE, LA COUR,
Attendu que la recevabilité des appels n' est pas mise en cause et qu' aucun élément n' amène la Cour à le faire d' office ;
Attendu que, selon compromis du 9 août 2000, les époux Y... ont vendu à la SCI TOUR DU DONJON le lot No4 (local commercial du Rdc) ainsi que les 5704 / cent millièmes des parties communes, dans un immeuble sis à AGEN, ... pour le prix de 320. 000 F ; que cette vente était subordonnée à la réalisation de diverses conditions suspensives dont la justification devait être fournie au plus tard le 19 septembre 2000 à 17 h, sauf délai particulier, et que la signature de l' acte authentique devait intervenir, au plus tard, dans les 15 jours de l' expiration dudit délai ;
que le local vendu faisait l' objet d' un bail commercial consenti en 1998 à la SARL GRIFFE CDM, que celle- ci devait céder à la SCI TOUR DU DONJON et que la réitération concomitante de cette cession par acte authentique constituait l' une des conditions suspensives de la vente ;
Attendu que, par télécopie du 5 septembre 2000, Maître X..., notaire à AGEN chargé de la vente avec Maître H..., notaire à SAINT NAZAIRE, informa Monsieur Y..., domicilié avec son épouse à Nouméa, que la signature de l' acte authentique était fixée au 8 septembre, sans lui préciser si les conditions suspensives étaient réalisées ; que par télécopie du 6 septembre, Monsieur Y... lui répondit qu' il ne pouvait venir et qu' il convenait de " procéder par procuration " et de reculer la date de signature ;
Que par lettre du même jour, l' agent immobilier informa Maître X... que la vente portait aussi sur le lot no 36 (cave) ;
Attendu que par lettre Chronopost du 6 septembre 2000, Maître X... lui adressa un projet de l' acte de vente et deux procurations sous seing privé à compléter l' une pour la vente du lot et l' autre pour l' intervention à la cession du bail commercial par la SARL GRIFFE CDM ; que par une nouvelle télécopie du 8 septembre 2000, il insista sur le caractère urgent du retour des procurations ;
Attendu que par une nouvelle télécopie du même jour (8 septembre), le notaire, afin d' éviter les aléas du retour du courrier, demanda aux époux Y... de faire établir par leur notaire de Nouméa une procuration authentique, à lui envoyer par fax, en leur envoyant deux modèles de procuration et, à nouveau, un projet de l' acte de vente ; que ce projet comportait divers blancs à compléter : superficie du local vendu, paragraphe relatif au régime fiscal, origine de propriété... ;
que par télécopie du 11 septembre, il demanda à Maître I..., notaire à Nouméa, de lui confirmer par télécopie la signature des procurations, l' acte devant être signé en son étude le 12 septembre ;
Attendu que par acte d' huissier du 14 septembre 2000, la SCI TOUR DU DONJON fit sommation aux époux Y... de se présenter en personne ou par mandataire le 19 septembre 2000 à 14 h 30 en l' étude de Maître X... à AGEN pour la signature de l' acte de vente, en exposant qu' elle devait donner les locaux à bail à une société qui devait y faire sans retard des travaux ;
Que, le même jour, le notaire de Nouméa réclama à Maître X..., au nom des époux Y..., une copie du compromis de vente signé par l' acquéreur, un projet de vente du lot no4 mais aussi du lot no 36 comportant toutes les annexes et " sans les blancs ", et un projet de la cession du bail commercial avec les annexes ;
Que, le 18 septembre,
- Monsieur Y... adressa la même demande au gérant de la SCI,
- Maître X... envoya à Maître I..., par télécopie (39 pages), un nouveau projet d' acte de vente portant sur les lots no4 et 36 et un nouveau projet d' acte de cession de bail commercial, en indiquant que la copie du compromis devait lui être adressée par Maître H... et en lui demandant confirmation du lieu du mariage des époux Y..., du nom du notaire ayant reçu leur contrat de mariage et des sommes éventuellement dues par la SARL GRIFFE CDM au titre du bail commercial ;
Attendu que Maître X... dressa le 19 septembre 2000 un procès- verbal de carence des époux Y... ;
Que, le même jour, il leur transmit ce procès- verbal et leur proposa une nouvelle date, le 21 septembre, pour la signature de l' acte, en leur indiquant qu' à défaut de régularisation, la SCI se réservait le droit de leur demander la somme de 237. 000 F à titre de dommages et intérêts et lui- même celle de 15. 887 F représentant la moitié des émoluments dus ;
Que, le même jour (19 septembre), Maître I... indiqua à Maître X... que, les époux Y... étant domiciliés en Nouvelle- Calédonie, il importait que, compte tenu de la plus- value résultant de l' acte de vente, qu' ils fussent assistés d' un mandataire garant du paiement de cette plus- value, et que le projet d' acte de cession du bail commercial ne mentionnait pas le lot 36 (cave) ;
Que les époux Y... ne se présentèrent pas le 21 septembre 2000 ;
Qu' aucun document postérieur n' est versé aux débats ; que la SCI TOUR DU DONJON assigna les époux Y... le 5 décembre 2000 ;
Attendu que les époux Y... soutiennent que l' action de la SCI TOUR DU DONJON est forclose, mais que la clause de l' acte stipulant que " si le vendeur ne voulait ou ne pouvait pas passer l' acte, l' acquéreur pourra l' y contraindre en déposant les présentes conventions au rang des minutes du notaire et intenter les poursuites judiciaires en vue de la réalisation définitive de la vente dans les deux mois de l' expiration dudit délai, (et que) passé cette date, il ne pourra plus poursuivre le vendeur " interdit seulement à l' acquéreur de les contraindre judiciairement à vendre l' immeuble et ne lui interdit pas de présenter une demande de dommages et intérêts ; que l' action de la SCI n' est donc pas forclose ;
Attendu que, contrairement à ce qu' a considéré le premier juge, la date du 19 septembre 2000 était la date limite pour justifier de la réalisation des conditions suspensives et celle du 4 octobre la date limite pour la signature de l' acte authentique et que cette signature pouvait intervenir plus tôt si les conditions suspensives étaient réalisées ;
Attendu que Maître X... avait fait parvenir le 18 septembre 2000 par télécopie aux époux Y... les pièces nécessaires ; que les quelques blancs dans le projet d' acte concernaient des précisions étrangères à l' objet de la transaction ; que si la date du 19 septembre retenue pour la signature était trop proche, eu égard notamment au décalage horaire, celle du 21 septembre ne l' était pas ; que, le 19 septembre, Maître X... avait indiqué aux époux Y... que les conditions suspensives étaient réalisées et que les actes étaient prêts à la signature ; que les époux Y... auraient dû aussitôt signer les procurations authentiques et demander à Maître I... de les envoyer à Maître X... ; qu' ils ne pouvaient se retrancher derrière les motifs énoncés par Maître I... dans sa télécopie du 19 septembre ; que, d' une part, le sort de l' incidence fiscale d' une éventuelle plus- value immobilière ne constituait pas une condition suspensive et qu' au demeurant, la cession n' engendrait aucune plus- value immobilière imposable, ce que les époux Y..., qui avaient " déjà traité des affaires immobilières en métropole sans aucunes difficultés particulières " (courrier du 18 septembre), pouvaient aisément vérifier grâce à leur titre de propriété ; que, d' autre part, le bail commercial de 1998 ne portait que sur le lot no4 et que le lot no 36 (cave) n' avait donc pas à être mentionné dans le projet de cession de ce bail ; qu' ils ne se sont plus manifestés ni avant ni après le 4 octobre 2000 ;
Attendu que les époux Y... ont ainsi manqué à leurs obligations et doivent réparation du préjudice subi par la SCI TOUR DU DONJON ; que celle- ci est fondée à réclamer remboursement des frais de son notaire (10. 041, 07 F soit 1. 530, 75 €), des frais de communication, évalués à 100 €, des seuls frais de déplacement liés à la signature de l' acte soit 2. 506 F ou 382, 04 €, mais non des frais de sommation et du procès- verbal de carence du 19 septembre pour les motifs sus- énoncés, des autres frais de déplacement (antérieurs à la signature du compromis ou non datés) et des frais consécutifs à la mise en oeuvre anticipée de travaux avant le transfert de propriété ; que la SCI, qui avait trouvé un locataire, a subi un manque à gagner égal à la perte de bénéfices qu' il aurait tirés de la location pendant la durée nécessaire pour trouver un autre local, qui peut, au vu des pièces produites, être évalué à 20. 000 € ; que les époux Y... seront donc condamnés à lui payer la somme totale de 22. 012, 79 € ;
Qu' ils seront également condamnés à payer à Maître X... la somme de 2. 421, 97 € (15. 887, 10 F) x 2 = 4. 843, 95 € représentant ses débours selon sa lettre du 19 septembre 2000.
* * *
Attendu que le Tribunal a considéré que Maître X... avait commis une faute en établissant un procès- verbal de carence le 19 septembre 2000 mais que cette faute n' avait causé aucun préjudice à la SCI TOUR DU DONJON, qu' il a déboutée de sa demande ;
Mais attendu qu' il ressort des pièces produites que la SCI a voulu signer l' acte authentique dans les meilleurs délais ; qu' elle a d' abord souhaité signer le
8 septembre ; qu' ensuite, dans sa télécopie du 8 septembre 2000, le notaire précisa aux époux Y... que la SCI renoncerait à l' acquisition si l' acte n' était pas signé le 12 septembre ; que c' est elle- même qui, le 14 septembre 2000, fit sommation par huissier aux époux Y... de se présenter en personne ou par mandataire le 19 septembre en l' étude de Maître X... ; que c' est à sa demande que le notaire établit le 19 septembre un procès- verbal de défaut ; que c' est encore à sa demande que le 19 septembre, le notaire informa les époux Y... que, faute par eux de se présenter le 21 septembre en son étude, la SCI se réservait le droit de leur réclamer des dommages et intérêts ; que le notaire n' a fait que prêter son concours à la SCI qui l' avait
requis ; qu' aucune faute ne peut lui être reprochée et que le jugement sera confirmé en ce qu' il a rejeté la demande de la société à son encontre ;
Que Maître X... sera, tout autant, débouté de sa demande en paiement de frais dirigée contre la société, à l' encontre de laquelle aucune faute n' est établie.
* * *
Attendu que le Tribunal a condamné Maître X... et la SCP X... à payer à la SARL GRIFFE CDM la somme de 38. 112, 25 € correspondant au prix de cession de son droit au bail, dont il a considéré que la perte était imputable au
notaire ; qu' en cause d' appel, la société conclut à la condamnation in solidum du notaire et des époux Y... à lui payer cette somme ;
Attendu que le bail commercial consenti le 9 septembre 1998 à la SARL a fait l' objet le 22 juin 2000 d' une cession sous diverses conditions suspensives, devant être réalisées le 19 septembre 2000 au plus tard, au profit de la SCI TOUR DU DONJON, moyennant le prix de 250. 000 F (38. 112, 25 €) ; que l' une des conditions stipulées était la réitération par acte authentique, dans les 15 jours, de la vente du local par les époux Y... à la SCI TOUR DU DONJON, concomitamment avec celle de la cession du bail ; que les époux Y... ont été informés de cette cession, mentionnée dans le compromis du 9 août 2000, et l' avaient acceptée ; que la SARL, qui devait quitter les lieux, a alors cherché et trouvé un nouveau local à proximité immédiate ; qu' elle était à jour du paiement de ses loyers lorsqu' elle a quitté les lieux en octobre 2000 ;
Attendu que, comme exposé précédemment, les conditions suspensives de la vente du local étaient remplies et que c' est par la faute des époux Y... que la vente et la cession concomitante du bail n' ont pas été régularisées le 21 septembre 2000 ; que c' est en raison de ce défaut de régularisation que le bail s' est poursuivi et que le Tribunal de grande instance d' AGEN, par jugement du 9 décembre 2003 confirmé en appel, a constaté que ce bail avait été résilié à l' amiable le 30 septembre 2000 ; que cette résiliation postérieure n' interdit pas à la SARL GRIFFE CDM d' obtenir réparation du préjudice consécutif à la perte du prix de cession par la faute des époux Y... ; qu' il ne peut lui être reproché de ne pas avoir poursuivi la réalisation de la cession de bail dès lors que la SCI TOUR DU DONJON ne pouvait acquérir les
murs ; que, par ailleurs, aucune faute professionnelle n' est retenue à la charge du notaire ; que, par voie de réformation, les époux Y... seront, seuls, condamnés à payer à la société la somme de 38. 112, 25 €, avec intérêts légaux à compter du 26 janvier 2005, date de son intervention volontaire.
* * *
Attendu que le Tribunal a condamné Maître X... et la SCP X... à payer à la société FTI, (agence Agen Action Immobilier) la somme de 455, 82 € au titre des frais qu' elle avait engagés mais a rejeté sa demande en paiement de la somme de 20. 056, 19 € correspondant à la commission prévue par le mandat qu' elle avait signé avec la SCI TOUR DU DONJON ; qu' elle persiste à demander en cause d' appel la condamnation des époux Y... et, subsidiairement celle de Maître X... et de la SCP X... au paiement de cette somme ;
Attendu, certes, que selon l' article 6 alinéa 3 de la loi du 2 janvier 1970, aucune commission ni somme d' argent ne peut être exigée par l' agent immobilier ayant concouru à une opération qui n' a pas été effectivement conclue ; que, toutefois, la demande tend à l' octroi de dommages et intérêts, sur le fondement de l' article 1382 du Code civil ; que l' agent immobilier a rempli sa mission et que les conditions suspensives ont été réalisées ; que l' absence de régularisation de la vente par acte authentique est imputable aux vendeurs et que la société FTI est fondée à leur demander réparation du préjudice que cette faute lui cause ; que, par voie de réformation, les époux Y... seront condamnés à payer à la société la somme de 20. 000 € à titre de dommages et intérêts ; que, de même, le paiement de la somme de 455, 82 € représentant les frais qu' elle a avancés pour l' établissement du certificat de mesurage, du rapport de constat parasitaire et de diagnostic amiante pour le compte des époux Y... sera mis à leur charge ;
Attendu que les époux Y..., qui succombent, seront condamnés aux dépens et à verser une indemnité de procédure de 2. 000 € à la SCI TOUR DU DONJON, à Maître X..., à la SARL GRIFFE CDM et de 1. 500 € à la société FTI, et seront déboutés de ce chef de demande.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare les appels recevables ;
Confirme le jugement en ce qu' il a débouté la SCI TOUR DU DONJON de ses demandes à l' encontre de Maître X... ;
L' infirme pour le surplus et, statuant à nouveau,
Dit que l' action de la SCI TOUR DU DONJON n' est pas forclose ;
Condamne Guy et Marie- Françoise Y... à payer :
- à la SCI TOUR DU DONJON la somme de 22. 012, 79 € et celle de 2. 000 € au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- à Maître X... la somme de 4. 843, 95 € et celle de 2. 000 € au titre du même article,
- à la SARL GRIFFE CDM la somme de 38. 112, 25 €, avec intérêts légaux à compter du 26 janvier 2005, et celle de 2. 000 € au titre du même article,
- à la société FTI la somme de 20. 455, 82 € et celle de 1. 500 € au titre du même article ;
Rejette les demandes plus amples ou contraires ;
Condamne Guy et Marie- Françoise Y... aux entiers dépens, dont distraction, pour ceux d' appel, au profit de la SCP PATUREAU RIGAULT, de la SCP VIMONT et de la SCP TESTON LLAMAS, avoués, conformément aux dispositions de l' article 699 du nouveau Code de procédure civile.
Vu l' article 456 du nouveau Code de procédure civile, le présent arrêt a été signé par Thierry LIPPMANN, Conseiller ayant participé au délibéré en l' absence du Président de Chambre empêché et par Dominique SALEY, Greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier, Le Conseiller,