ARRÊT DU 12 FÉVRIER 2008
BM / SB
----------------------- R. G. 06 / 00978-----------------------
Bernard X...
C /
S. A. S. GSN SEMENCES
----------------------- ARRÊT no
COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale
Prononcé à l'audience publique du douze février deux mille huit par Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Nicole CUESTA, Greffière,
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE :
Bernard X... né le 16 Mars 1951 à SAINT MATHURIN (46100)... 32460 LE HOUGA
Rep / assistant : la SCP GUY NARRAN (avoués à la Cour) Rep / assistant : la SELARL CHATEAU LOMBARD (avocats au barreau de NANTES)
APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AUCH en date du 12 Juin 2006 dans une affaire enregistrée au rôle sous le no R. G. 05 / 00039
d'une part,
ET :
S. A. S. GSN SEMENCES en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège Route de Nogaro 32460 LE HOUGA
Rep / assistant : Me Carole MORET de la SELAS BARTHELEMY et ASSOCIES (avocats au barreau de BORDEAUX)
INTIME
d'autre part,
A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 08 Janvier 2008 devant Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, Benoît MORNET, Conseiller, Thierry LIPPMANN, Conseiller, assistés de Nicole CUESTA, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
* * *
EXPOSE DU LITIGE :
Bernard X... a été engagé par la société GRIFFATON le 16 juin 1982 en qualité de Directeur de production et commercialisation de graines de semences potagères.
Courant 1998, la société GRIFFATON a été reprise par le groupe VIVADOUR sous la dénomination GSN SEMENCES.
Dans le cadre de ce rachat, le contrat de travail de Bernard X... a été repris avec maintien de l'ancienneté, pour la fonction de Directeur de GSN SEMENCES, sur le site de Houga (32).
Bernard X... a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable en vue d'un licenciement par courrier du 25 janvier 2005.
Suite à l'entretien préalable, Bernard X... s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 février 2005.
Bernard X... a saisi le Conseil de Prud'hommes d'AUCH afin de voir juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, et obtenir en conséquence diverses sommes.
Par jugement rendu le 12 juin 2006, le Conseil de prud'hommes d'AUCH a dit que Bernard X... a été licencié pour faute grave et l'a en conséquence débouté de l'intégralité de ses demandes.
Bernard X... a relevé appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délais qui n'apparaissent pas critiquables.
Il demande à la Cour de réformer le jugement en décidant que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner en conséquence la société VIVADOUR GSN à lui payer les sommes suivantes :
-4. 098, 53 € au titre du salaire pendant la mise à pied ;-41. 899, 98 € à titre d'indemnité de préavis ;-3. 491, 67 € représentant la moitié du 13ème mois pour le premier semestre 2005 ;-7. 714, 18 € au titre de l'indemnité de congés payés (y compris le préavis) ;-1. 253, 90 € à titre d'indemnité 13ème mois pour 05 / 06 ;-125. 699, 94 à titre d'indemnité légale de licenciement ;-43. 049, 92 € à titre d'indemnité de congés payés entre 2000 et 2004 ;-90. 783, 29 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;-3. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il soutient que s'agissant de ses fonctions, la non conformité des produits vendus ne pouvait incomber à la société GSN et à son directeur, et conteste à cet égard avoir eu connaissance d'une fiche de poste produite par l'employeur.
Il soutient que s'agissant de la première faute alléguée, la vente de l'échalion " cuisse de poulet du Poitou " ne peut lui être imputée puisqu'il a été relaxé par le Tribunal Correctionnel d'AUCH au motif qu'il " n'a pu décider de son propre chef, de la production et de la commercialisation des semences en question, compte tenu de l'unité économique de l'entreprise ".
S'agissant de la vente de graines de haricots " CHOISY ", il soutient que son supérieur au sein du groujpe, Monsieur Y..., était informé de la commercialisation des graines litigieuses, et qu'il avait donné instruction à la société GSN d'apurer le stock restant ;
S'agissant de l'extraction des graines de courgettes sur un site classé, il fait valoir que c'est Monsieur Z..., directeur général du groupe qui a été déclaré coupable par le Tribunal Correctionnel d'AUCH, de sorte qu'on ne saurait aujourd'hui lui en faire le reproche ;
S'agissant de la faute relative à la vente de haricots variété " Djédida ", il prétend que le rapport de Monsieur Y... relatif au mécontement des clients est faux, et que sous la dénomination " Djédida ", ont toujours été livrées des graines de haricot RAFAL, SUNRAY ou VICTOIRE.
S'agissant enfin de la faute relative à la commercialisation sous la dénomination de " Super Kelvedon " d'un pois de variété " Twincle " et facturé comme un pois de variété " Java ", il conteste être à l'origine de cette initiative au motif qu'il ne pouvait intervenir au stade des instructions de livraisons.
La société G. S. N. SEMENCES conclut à la confirmation du jugement et sollicite la condamnation de Bernard X... à lui payer une indemnité de 3. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle soutient que Bernard X... occupait le poste de Directeur de la société G. S. N. SEMENCES et qu'il avait en conséquence le plus haut niveau de responsabilité au sein de cette société.
Elle prétend rapporter la preuve des fautes graves qu'elle reproche à Bernard X... et qui justifient le licenciement.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
I-Sur la cause du licenciement
Il résulte du contrat de travail conclu entre la société G. S. N. SEMENCES et Bernard X... que celui-ci était engagé comme " directeur " à compter du 15 avril 1999, moyennant une rémunération mensuelle brut de 41. 067, 30 F payée 13 fois.
Il n'était donc pas seulement, contrairement à ce qu'il prétend, directeur commercial, fonction plus restrictive que la fonction de " Directeur " qui correspond au poste le plus élevé de la société.
La fiche de poste " Directeur " versée aux débats par la société G. S. N. SEMENCES, dont Bernard X... prétend ne pas avoir eu connaissance, a été établie en août 1999, ce qui correspond à la période à laquelle il prenait ses nouvelles fonctions de directeur ; cette fiche de poste n'a donc pas été établie pour les besoins de la cause, contrairement à ce que prétend Bernard X....
Par ailleurs, cette fiche de poste correspond parfaitement aux attributions et aux responsabilités dévolues à cette fonction, outre les spécificités particulières liées à l'activité de la société.
Bernard X... n'apporte d'ailleurs aucun élément susceptible de démontrer qu'au sein de la société G. S. N. SEMENCES, il aurait pu avoir un supérieur hiérarchique.
Il résulte surtout d'une note rédigée par Bernard X... le 7 août 2000 qu'il visitait les champs d'essais et qu'il déterminait les nouveaux produits en fonctions des résultats agronomiques, ce qui démontre qu'il déterminait et pilotait les axes de recherche, comme cela apparaît dans la fiche de poste.
Il résulte également d'une note rédigée par Bernard X... le 23 décembre 2004 à ses collaborateurs, et des courriers électroniques de diffusion de tarifs, de consignes de vente, de gestions des stocks et frais fixes, ou des préconisations techniques, qu'il était autonome en terme de tarif clients, gammes, délai de livraison, ce qui correspond également aux fonctions décrites dans la fiche de poste.
Il apparaît en conséquence qu'en sa qualité de Directeur occupant le poste le plus élevé de la société G. S. N. SEMENCES, et au regard des documents dont il vient d'être fait état, il exerçait l'ensemble des responsabilités mentionnées dans la fiche de poste dont il prétend ignorer l'existence.
La lettre de licenciement rappelle, au sujet de la première faute invoquée, relative aux pois variété " super kelvedon " :
" Ce pois de la variété " java " est commercialisé par G. S. N. SEMENCES en Algérie depuis 2001 sous la dénomination " Super Kelvedon ".
Au cours d'un déplacement en Algérie du 3 au 9 décembre dernier, Bernard Y... a constaté que cette variété, semée le 23 septembre en irrigation (deux irrigations) était non conforme aux attentes des clients algériens (gousse trop courte pas présentable, 3 à 4 grains par gousse).
Après vérification des ordres de conditionnement, il s'avère qu'en août 2004, sans avertir le client et sans s'être assuré au préalable de l'adaptation de la variété aux conditions locales, vous avez donné l'ordre de commercialiser sous la même dénomination de " Super Kelvedon " un pois d'une autre variété et d'un phénotype différent (variété " twinkle ").
Au cours de ces vérifications sur d'autres ventes de " Super Kelvedon " il a été révélé :
qu'un ordre de conditionnement du 19 août 2003 mentionne d'utiliser la variété " twinkle " pour facturer la variété " java ". Le bon de préparation relatif à cette expédition porte la même information. Le client a pourtant reçu par fax une note de votre main mentionnant l'expédition de pois " java " ;
que l'ordre de conditionnement du 28 juillet 2004 mentionne d'utiliser la variété " twinkle " pour facturer la variété " Super Kelvedon ". Ceci est confirmé par le bon de préparation du 28 juillet 2004 qui mentionne d'utiliser, suite à votre appel téléphonique, la variété " twinkle " pour facturer sous la dénomination " Super Kelvedon ". G. S. N. doit donc annuler cette facture, soit un préjudice de l'ordre de 17. 000 €. "
L'employeur reproche donc à Bernard X... d'avoir substitué des pois de variété " twinkle " alors que le client avait commandé et pensait recevoir des pois de variété " java " dénommés dans les relations commerciales " Super Kelvedon ", et donc d'avoir trompé le client sur la marchandise vendue.
L'employeur verse aux débats un ordre de conditionnement portant la mention manuscrite " rectificatif du 19 / 08 / 03 " sur lequel il apparaît de manière manuscrite que la variété " twinkle " est substituée à la variété " java " initialement prévue, cette substitution étant confirmée par la production aux débats du " bon de préparation semences ".
L'employeur verse en outre aux débats l'attestation de Agnès A... qui précise avoir elle-même apporté cette modification manuscrite en exécution des ordres de Monsieur X... dont elle était la responsable de l'administration des ventes.
L'employeur rapporte ainsi la preuve que Bernard X... a donné des instructions tendant à tromper un client.
L'employeur verse encore un ordre de conditionnement du 28 juillet 2004 duquel il résulte que la variété " twinkle " a été substituée à la variété " super kelvedon ", autre dénomination de la variété " java ".
Le " bon de préparation commande ", versé aux débats, montre que dans un premier temps, il avait été prévu de préparer du pois " java " conformément à la commande ; ce bon porte ensuite la mention manuscrite " Annulée, suite tél. BLC le 28 / 07 / 04 ; prendre sur twinkle ". " BLC " sont les initiales de Bernard Lucien X....
L'employeur démontre ainsi que Bernard X... a de nouveau donner l'instruction de substituer des pois " twinkle " à des pois " java " ou " super kelvedon " sans en informer le client, en le trompant ainsi sur la nature des marchandises.
La société GSN SEMENCES verse enfin aux débats le document annulant la facture correspondant à la commande du 28 juillet 2004 et constituant un avoir de 15. 443 € au profit du client.
Ces tromperies sont particulièrement graves, compte tenu des fonctions de directeur exercées par Bernard X..., en raison des répercussions négatives de l'image de l'entreprise et de la perte de confiance induites chez les clients, et rendaient en conséquence impossible le maintien des relations de travail.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que, pour reprendre les termes de la lettre de licenciements, les " tromperies délibérées des clients de GSN par la vente et la livraison de variétés ne correspondant pas aux commandes et non conforme aux attentes des clients " sont établies et constituent des fautes graves justifiant, à elles seules et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres fautes alléguées, le licenciement de Bernard X..., directeur de la société GSN SEMENCES.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré.
II-Sur les dépens et les demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Bernard X... succombant à l'instance, il en supportera les dépens.
Il convient également de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Bernard X... à payer à la société GSN SEMENCES une indemnité de 1. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire en dernier ressort :
Déclare recevable l'appel formé contre le jugement rendu le 12 juin 2006 par le Conseil de Prud'hommes d'AUCH ;
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Condamne Bernard X... aux dépens de l'instance et dit n'y avoir lieu à condamnation complémentaire au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le présent arrêt a été signé par Catherine LATRABE, Conseillère, faisant fonction de Présidente de Chambre, et par Nicole CUESTA, Greffière.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE