ARRÊT DU 03 Octobre 2007
J.M.I / S. B**
----------------------RG N : 06 / 01188--------------------
Rachid X...
C /
Josette Y...
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Aide juridictionnelle
ARRÊT no
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du nouveau Code de procédure civile le trois Octobre deux mille sept,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur Rachid X...né le 24 Novembre 1941 à BOUGY (ALGERIE) de nationalité française ...
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2006 / 004350 du 13 / 10 / 2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN)
représenté par la SCP VIMONT J. ET E., avoués assisté de la SCPA VALAY-BELACEL, avocats
DEMANDEUR sur assignation en révision en date du 28 juillet 2006 suite à un arrêt rendu par la Cour d'Appel de céans en date du 14 Septembre 2004 No 957 / 04
D'une part,
ET :
Madame Josette Y...née le 16 Avril 1938 à AGEN (47000) ...
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2006 / 003909 du 29 / 09 / 2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN)
représentée par Me Jean-Michel BURG, avoué assistée de la SCPA GOUZES, avocats
DEFENDERESSE
D'autre part,
a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été communiquée au Ministère Public, débattue et plaidée en audience publique, le 05 Septembre 2007, devant Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre, Jean-Marie IMBERT, Président de Chambre (lequel, désigné par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable) et Raymond MULLER, Président de Chambre, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Président, à l'issue des débats, de la date à laquelle l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.
Par arrêt contradictoire du 7 février 2007, auquel il fait référence pour l'exposé des faits et des prétentions initiales des parties, la Cour de ce siège a déclaré recevable le recours en révision formé par Rachid X...contre l'arrêt du 14 septembre 2004 ayant confirmé le jugement rendu le 25 octobre 2002 et rectifié le 25 octobre 2002 par le Tribunal de grande instance de MARMANDE, et a renvoyé l'affaire à la mise en état en invitant les parties à conclure au fond ;
Aux termes de ses dernières écritures, Rachid X...expose :
que Josette Y...soutient que la reconnaissance de dette du 30 juin 1992, d'un montant de 250. 000 F, est dépourvue de cause mais que la nullité pour absence de cause n'est pas une nullité absolue comme le prétend mais une nullité relative, soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du Code civil et qu'il est fondé à lui opposer cette prescription,
que, subsidiairement, étant commerçant depuis 1965, il a cédé le 20 avril 1989 l'un de ses commerces (bar), et a perçu un acompte de 220. 000 F ; qu'en outre, en 1990, il a racheté divers contrats d'assurance d'un montant " non négligeables " ;
que ces fonds ont servi à financer l'achat, en novembre 1991, d'un fonds de commerce au prix de 230. 000 F au nom de Josette Y..., sa compagne, qui était alors sans emploi ; qu'elle soutient que l'achat de ce fonds a été financé à hauteur de 150. 000 F par ses parents, ce qui ne résulte d'aucune pièce du dossier ; qu'il a procédé à cet investissement " sous couvert " de sa compagne car un premier projet d'ouverture de fonds avait été interrompu par la Mairie de MARMANDE et qu'il craignait une nouvelle opposition ;
qu'en contestant la reconnaissance de dette et en déposant une plainte pénale, Josette Y...lui a causé un grave préjudice qui justifie l'allocation de substantiels dommages et intérêts ;
Il demande à la Cour de déclarer bien fondé son recours en révision, de déclarer prescrite l'action en nullité de Josette Y...pour absence de cause, de la condamner à lui verser la somme de 250. 000 F soit 38. 167,93 €, et celle de 10. 000 € à titre de dommages et intérêts, à lui rembourser les dommages et intérêts, les intérêts, les dépens et les frais d'exécution et de lui allouer une indemnité de procédure de 5. 000 € au titre de l'article700 du nouveau Code de procédure civile ;
Josette Y..., aux termes de ses dernières conclusions, fait valoir en réplique :
qu'elle a toujours soutenu que la reconnaissance de dette du 30 juin 1992 était un faux et qu'elle déposé le 28 février 2002 une plainte qui a entraîné l'ouverture d'une information, clôturée le 30 mai 2006 par une ordonnance de non lieu ;
que l'information a permis d'établir la fausseté de certaines allégations de Rachid X...; qu'à ce jour il apparaît qu'il est tout à fait douteux qu'elle ait signé la reconnaissance de dette et que celle-ci n'est pas causée,
que Rachid X...prétend faussement qu'il lui a fourni les fonds nécessaires pour l'acquisition d'un hôtel-restaurant en octobre 1991 ; qu'elle a acheté ce fonds pour la somme de 230. 000 F ; que cette somme provenait de deux prêts de 80. 000 F et de 70. 000 F consentis par ses parents et de fonds propres à hauteur de 10. 000 F et qu'elle a payé le solde de 80. 000 F par des versements mensuels ;
qu'elle a ensuite acquis les murs de l'établissement en mai 1993 grâce à un prêt bancaire de 300. 000 F ;
que, contrairement à ce que soutient Rachid X..., l'absence de cause est sanctionnée non par une nullité relative mais par une nullité absolue, qui peut être invoquée pendant 30 ans et que son action n'est donc pas prescrite ;
Elle demande à la Cour de " confirmer " l'arrêt du 14 septembre 2004, de déclarer son action en nullité recevable, de déclarer la reconnaissance de dette du 30 juin 1992 nulle pour absence de cause et de condamner Rachid X...à lui payer la somme de 2. 000 € au titre de l'‘ article 700 du nouveau Code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR,
Attendu qu'il convient de rappeler que Josette Y...et Rachid X...ont vécu ensemble de 1987 à 1995 ; qu'en 1999, le Juge de l'exécution a autorisé Rachid X...à pratiquer une saisie conservatoire sur le prix d'un immeuble que Josette Y...venait de vendre ; que, par jugement du 6 octobre 2000, le Tribunal de grande instance de MARMANDE a ordonné une expertise graphologique de la reconnaissance de dette de 250. 000 F du 30 juin 1992, expertise confiée à Monsieur Z...; que, selon les conclusions du rapport déposé le 4 septembre 2001, Josette Y...n'était pas l'auteur du texte et de la signature apposée sur la reconnaissance de dette ; que le 28 février 2002, cette dernière a déposé plainte pour usage de faux et qu'une information a été ouverte ;
Attendu que, compte tenu des contradictions apparues lors des auditions, le juge d'instruction ordonna une nouvelle expertise graphologique, confiée à Monsieur A...; qu'aux termes de son rapport déposé le 14 septembre 2005, cet expert conclut qu'il " est logique de déduire que Madame Y...est très vraisemblablement l'auteur de la signature en question " ;
Que devant cette contradiction avec la première expertise, le juge d'instruction a ordonné une troisième expertise, confiée à Madame B...; que cet expert a déposé le 30 novembre 2005 un rapport concluant que Madame Y...était, sans aucun doute, la signataire de la reconnaissance de dette ;
Attendu que, si les trois mesures d'instruction ont été faites par des experts judiciaires, les deux dernières ont été diligentées à l'aide d'éléments de comparaison sensiblement plus nombreux que la première expertise et que toutes deux concluent, l'une très vraisemblablement et l'autre formellement que Josette Y...est l'auteur de la signature apposée sur la reconnaissance de dette du 30 juin 1992 ; qu'il convient de retenir ces conclusions, qui ne font l'objet d'aucune critique circonstanciée de Josette Y..., et de rétracter en conséquence l'arrêt du 14 septembre 2004 ;
Attendu que Josette Y...fait valoir dans ses dernières écritures que la reconnaissance de dette est sans cause et que cette absence de cause constitue une cause de nullité absolue, soumise à la prescription trentenaire ; que Rachid X...réplique que la nullité pour défaut de cause est une nullité relative soumise à la prescription quinquennale et que l'action en nullité est donc prescrite ;
Attendu que la nullité pour défaut de cause ne vise que la protection du seul intérêt particulier de la partie qui l'invoque et constitue une nullité relative ; que, toutefois, la partie qui a perdu, par l'expiration du délai de prescription, le droit d'intenter l'action en nullité peut cependant, à quelque moment que ce soit, se prévaloir de cette nullité contre celui qui prétend tirer un droit de l'acte nul ; que, selon le jugement du 6 octobre 2000, RACHID X...avait obtenu le 28 mai 1999, sur le fondement de la reconnaissance de dette, une ordonnance d'injonction de payer contre Josette Y..., qui avait formé opposition ; que cette dernière est donc recevable à soulever cette exception de nullité perpétuelle ;
Attendu que, selon Rachid X..., les fonds qu'il a remis à Josette Y...avaient pour objet l'acquisition d'un hôtel-restaurant réalisée par acte notarié du 22 novembre 1991, moyennant le prix de 230. 000 F, outre un " dessous de table " de 20. 000 F ; que cet acte précise que ce prix a été payé comptant à hauteur de 150. 000 F, le solde (80. 000 F) étant payable par Josette Y...en 24 mensualités égales ;
Attendu qu'il appartient au souscripteur d'établir l'absence de cause ; qu'il ressort de l'information que Josette Y...a reçu de ses parents le 31 octobre 1991 un chèque de 80. 000 F qu'elle a déposé sur son compte ; qu'elle a encaissé les 8 et 20 novembre deux autres chèques de 61. 000 F et de 25. 000 F mais que l'origine de ces chèques n'a pu être déterminée ;
Attendu qu'il résulte de ces éléments que Josette Y...a payé la partie comptant (150. 000 F) du prix d'achat à hauteur de 80. 000 F grâce aux fonds remis par ses parents, et qu'à l'évidence, le solde de 80. 000 F n'aurait pas été stipulé payable en 24 mensualités si elle avait disposé de cette somme ; que la reconnaissance de dette est ainsi dépourvue de cause à concurrence de 160. 000 F et que l'obligation doit être réduite à la mesure de la fraction subsistante ; que Josette Y...sera donc condamnée à payer la somme de 90. 000 F, soit 13. 720,41 €, à Rachid X...; Attendu que compte tenu de l'issue du recours en révision, la demande en dommages et intérêts de Rachid X...sera rejetée ;
Attendu que les deux parties bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale, il n'a pas lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Vu la communication au Ministère Public,
Rétracte l'arrêt du 14 septembre 2004 ;
Infirme le jugement du 25 octobre 2002, sauf en ce qu'il a ordonné la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée le 19 avril 1999 au préjudice de Josette Y...entre les mains de Maître C..., notaire, et, statuant à nouveau,
Dit que la reconnaissance de dette d'un montant de 250. 000 F en date du 30 juin 1992 est dépourvue de cause à hauteur de 160. 000 F ;
Condamne en conséquence Josette Y...à payer à Rachid X...la somme de 13. 720,41 € (90. 000 F), avec intérêts légaux à compter du 31 janvier 2002, date de la demande ;
Rejette les autres demandes.
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens, étant précisé que chacune des parties est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.
Vu l'article 456 du nouveau Code de procédure civile, le présent arrêt a été signé par Raymond MULLER, Président de Chambre ayant participé au délibéré en l'absence du Président de Chambre empêché et de Dominique SALEY, Greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier, Le Président,