ARRÊT DU 9 MAI 2006 CC/ SBA
05/ 01936
S. A. ELECTRICITE DE FRANCE (E. D. F.) S. A. GAZ DE FRANCE (G. D. F.)
C/ Thierry Z... et autres
ARRÊT no 226
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Sociale
Prononcé à l'audience publique du neuf mai deux mille six par Nicole ROGER, Conseillère faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Solange BELUS, Greffière,
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE :
S. A. ELECTRICITE DE FRANCE (E. D. F.) 22-30 avenue de Wagram 75017 PARIS S. A.
GAZ DE FRANCE (G. D. F.) 23 rue Philibert Delorme 75017 PARIS Rep/ assistant : la SCP SIMON JOLLY (avocats au barreau de TOULOUSE)
APPELANTES d'une ordonnance du Conseil de Prud'hommes de FIGEAC en date du 8 décembre 2005 d'une part,
ET :
Thierry Z......
et autres
d'autre part,
Syndicat C. G. T. ENERGIE 46 283 avenue Pierre Semard 46000 CAHORS Rep/ assistant : M. Jean-Jacques X... (Délégué syndical ouvrier)
PARTIE INTERVENANTE
A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 4 avril 2006 sans opposition des parties devant Nicole ROGER Conseillère faisant fonction de Présidente de Chambre, et Christian COMBES, Conseillers Rapporteurs, assistés de Solange BELUS, Greffière.
Les magistrats rapporteurs en ont, dans leur délibéré, rendu compte à la cour composée, outre d'eux-mêmes, de Françoise MARTRES, Conseillère, en application des dispositions des articles 945-1 et 786 du nouveau code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
FAITS ET PROCÉDURE
Thierry Z..., et autres, agents statutaires EDF et GDF affectés au Centre EDF LOT et le syndicat CGT ENERGIE 46 ont saisi le conseil de prud'hommes de Cahors d'une demande tendant à obtenir de leur employeur le règlement d'indemnités de déplacement.
Aux termes d'autant de décisions rendues le 8 décembre 2005, le bureau de conciliation a ordonné à EDF-GDF de leur communiquer les bons de travail journaliers de janvier 2001 à décembre 2005 dans le délai d'un mois, dit qu'il appartiendra à EDF-GDF d'informer le conseil de prud'hommes de la date d'exécution de cette obligation et fixé une astreinte de 100 ç par jour de retard à compter du 9 janvier 2006 qu'il s'est réservé la faculté de liquider.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Les S. A. EDF et GDF ont relevé appel-nullité de l'ensemble de ces décisions au motif que le bureau de conciliation a excédé les pouvoirs qui lui sont reconnus par l'article R. 516-18 du Code du travail en assortissant d'une astreinte une mesure d'instruction et de conservation des preuves que n'autorise pas ce texte en ses alinéas 4 et 5 qui énumère de manière limitative les pouvoirs juridictionnels qui lui sont ainsi accordés.
Exposant que l'appel immédiat est en conséquence recevable elles demandent de prononcer la nullité des astreintes ordonnées par les décisions déférées et le remboursement des sommes versées en exécution des ordonnances postérieurement rendues le 16 février 2006 liquidant lesdites astreintes et sollicitent la condamnation in solidum des intimés à leur payer la somme de 3. 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Répondant aux demandes formées par les intimés tendant à obtenir le paiement de dommages et intérêts elles en sollicitent le rejet en raison de leur droit à agir et en l'absence de préjudice démontré et
font observer que le syndicat CGT ENERGIE 46 ne démontre pas la réunion des conditions posées par l'article L. 411-11 du Code du travail.
Thierry Z... et les autres intimés dont le syndicat CGT ENERGIE 46, par des conclusions communes, soulèvent l'irrecevabilité de l'appel en invoquant les dispositions de l'article R. 516-19 du Code du travail et opposent que le bureau de conciliation a pu sans excéder ses pouvoirs faire usage de l'alinéa 2 de l'article R. 516-18 du même code afin de mettre le dossier en état d'être jugé.
Poursuivant en tout état de cause la confirmation des décisions déférées, ils sollicitent en raison de la mauvaise foi et de la résistance abusive et dilatoire de leurs adversaires la condamnation de ces dernières à leur payer à chacun les sommes de 3. 000 ç à titre de dommages et intérêts et de 1. 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, de déclarer le syndicat CGT ENERGIE 46 recevable en ses demandes et de condamner les mêmes à lui payer à chacun les sommes de 5. 000 ç à titre de dommages et intérêts et de 1. 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'il convient, en raison du lien qui les unit, d'ordonner la jonction des instances enrôlées sous les numéros 05/ 01936 à 05/ 01951 ;
Sur la recevabilité de l'appel
Attendu que si en vertu de l'article R. 516-19 du Code du travail, les décisions rendues par le Bureau de Conciliation du conseil de prud'hommes prises en application de l'article R. 516-18 du même code ne peuvent faire l'objet d'un recours qu'en même temps que le jugement sur le fond, l'appel immédiat est cependant possible lorsqu'est invoqué comme en l'espèce l'excès de pouvoir qu'aurait commis le bureau de conciliation en statuant en dehors des pouvoirs
juridictionnels reconnus par le second de ces textes ;
Sur la demande de nullité des astreintes prononcées par le bureau de conciliation
Attendu en premier lieu qu'aux termes de l'article R. 516-18 du Code du travail, le bureau de conciliation peut, nonobstant toute exception de procédure et même si le défendeur ne se présente pas, ordonner la délivrance, le cas échéant sous peine d'astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie et de toute pièce que l'employeur est tenu légalement de délivrer, le versement de provisions à valoir sur les salaires, accessoires et certaines indemnités lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable et dans la limite de six mois de salaire, toutes mesures d'instruction même d'office, enfin toutes mesures nécessaires à la conservation des preuves ou des objets litigieux ;
Que la décision critiquée a ordonné à EDF-GDF la communication des bons de travail journaliers pour la période comprise entre les mois de janvier 2001 et de décembre 2005, en fixant à un mois le délai de cette communication et en assortissant cette injonction d'une astreinte que le bureau de conciliation s'est expressément réservé le pouvoir de la liquider ;
Que pour décider de ces mesures celui-ci s'est fondé sur les alinéas 4 et 5 du texte susvisé dont nul ne conteste qu'ils ne prévoient pas littéralement, à la différence de son alinéa 2, la peine d'une astreinte ; et qu'il a rappelé les pouvoirs qui sont les siens en matière de mise de l'affaire en état d'être jugée ;
Attendu en second lieu qu'à la suite du renvoi opéré par l'article 879 du nouveau Code de procédure civile aux articles
Attendu en second lieu qu'à la suite du renvoi opéré par l'article 879 du nouveau Code de procédure civile aux articles R. 516-0 et suivants du Code du travail, la procédure devant les juridictions
statuant en matière prud'homale est régie par les dispositions générales du livre I du nouveau Code de procédure civile, sous réserve des dispositions du Code du travail qui pour l'essentiel tiennent au caractère paritaire et à la fonction spécifique de la juridiction prud'homale, compétente en matière de règlement des différends entre employeur et salarié dans le cadre d'une procédure orale et obéissant à des règles de représentation spécifiques ;
Et attendu qu'en vertu de l'article 33 de la Loi du 9 juillet 1991 tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision ; que la formule ici employée par le législateur est celle qu'il utilise habituellement pour distribuer largement une compétence ou un pouvoir ;
Que si l'application de ces règles au bureau de conciliation conduit à décider que les mesures qui peuvent être ordonnées par ce dernier sont limitativement énumérées par l'article R. 516-18 du Code du travail, ce principe ne concerne toutefois que la nature et la substance de ces mesures, comme les conditions et les limites dans lesquelles elles peuvent être décidées, sans atteindre la disposition actuellement en cause qui ne constitue qu'une modalité concourant à l'efficacité de la décision, concernant toutes les obligations quelle qu'en soit la source et mise à la disposition de tout juge, qui peut l'utiliser d'office, par une disposition d'ordre général, inhérente à son pouvoir juridictionnel et normativement supérieure à la disposition actuellement en cause ;
Qu'il s'ensuit du tout que le bureau de conciliation n'a pas excédé ses pouvoirs en rendant la décision critiquée ;
Et qu'il a pu régulièrement faire usage de la disposition de ce texte figurant in fine prévoyant en outre qu'il peut liquider, à titre provisoire, les astreintes qu'il a ordonnées ;
Attendu que succombant les S. A. EDF et GDF doivent les dépens sans que les intimés ne démontrent toutefois en quoi le comportement de leurs adversaires serait constitutif d'une faute alors que celles-ci ont pu légitimement se méprendre sur l'appréciation de leurs droits ; Qu'ils ont en revanche vocation à recevoir, chacun, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile une indemnité de 100 ç ; qu'intervenant volontairement devant le bureau de conciliation sans que la question de la recevabilité de cette intervention n'ait fait débat, et en toute hypothèse intimé en cause d'appel, le syndicat CGT ENERGIE 46 peut prétendre sur ce même fondement à une indemnité de 500 ç ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Ordonne la jonction des procédures enrôlées sous les no 05/ 1936 à 05/ 1951,
Rejette les demandes formées par les S. A. EDF et GDF
Les condamne aux dépens ainsi qu'à payer à chacun des intimés la somme de 100 ç au titre de l'article 700 nouveau Code de procédure civile et au syndicat CGT ENERGIE 46 celle de 500 ç sur ce même fondement.
Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Conseillère faisant fonction de Présidente de Chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé.