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31/01/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006947075

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 31 janvier 2006, JURITEXT000006947075


ARRÊT DU 31 JANVIER 2006 NR/SBA ----------------------- 04/00700 ----------------------- Jacques X... C/ S.A. SOCIETE LEXISNEXIS anciennement dénommée S.A. EDITIONS DU JURIS-CLASSEUR ----------------------- ARRÊT no 06/66 COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du trente et un janvier deux mille six par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, assistée de Solange BELUS, Greffière, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Jacques X... "Marsan" 47310 MOIRAX Rep/assistant : Me Jean-Loup BOURDIN (avocat au barreau d'AGEN) APPELANT d'un jugemen

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ARRÊT DU 31 JANVIER 2006 NR/SBA ----------------------- 04/00700 ----------------------- Jacques X... C/ S.A. SOCIETE LEXISNEXIS anciennement dénommée S.A. EDITIONS DU JURIS-CLASSEUR ----------------------- ARRÊT no 06/66 COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du trente et un janvier deux mille six par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, assistée de Solange BELUS, Greffière, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Jacques X... "Marsan" 47310 MOIRAX Rep/assistant : Me Jean-Loup BOURDIN (avocat au barreau d'AGEN) APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AGEN en date du 26 avril 2004 d'une part, ET : S.A. SOCIETE LEXISNEXIS anciennement dénommée S.A. EDITIONS DU JURIS-CLASSEUR 141 rue de Javel 75015 PARIS Rep/assistant : Me Jean-Pierre LEMAITRE (avocat au barreau de PARIS) INTIMÉE

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 13 décembre 2005 devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Benoît MORNET, Conseiller, Françoise MARTRES, Conseillère, assistés de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE

Jacques X... né en décembre 1942 a été embauché par les EDITIONS TECHNIQUES, devenues depuis EDITIONS DU JURIS CLASSEUR actuellement LEXISNEXIS, en qualité de secrétaire classeur, rémunéré à l'heure mais avec un statut de VRP.

Le contrat de travail précisait que le salarié devait travailler au moins 40 heures par semaine, effectuer le travail de classement chez les abonnés dans le cadre de tournées préalablement organisées par l'employeur. Outre le classement des mises à jour, la société a confié à Jacques X... la mission de la représenter chez les abonnés qu'il visitait à cette occasion avec le mandat de leur vendre les volumes et certaines collections éditées par l'employeur.

En contrepartie de son travail de classement, Jacques X... percevait une rémunération horaire facturée aux clients, à laquelle s'ajoutait un complément payé par l'employeur sur les ventes. Jacques X... percevait une commission sur les ventes qu'il faisait.

Estimant que le statut de VRP auquel son employeur l'avait fait adhérer lors de son embauche lui imposait en réalité tous les inconvénients d'un travail à poste fixe sur des moyennes de temps hebdomadaires supérieures à 57 heures, sans qu'il ne perçoive jamais d'heures supplémentaires, ni de repos compensateur, ni d'indemnité particulière pour le travail effectué durant les jours fériés, dès lors que les commissions qu'il avait perçues à l'occasion d'ordres pris chez les abonnés avaient disparu au cours de l'année 2002, Jacques X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Agen en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires (majorations) et de repos compensateur y afférent portant sur les années 1997 à 2001 incluse.

Par jugement du 26 avril 2004, le conseil de prud'hommes d'Agen a :

- dit que le statut de VRP dont a bénéficié Jacques X... depuis son embauche par les éditions du Juris-classeur s'est normalement poursuivi jusqu'en 2002,

- requalifié le contrat de travail de Jacques X... en un contrat à caractère salarial à compter de juillet 2002,

- condamné la société Editions du Juris-classeur à payer à Jacques X... :

[* 200 ç à titre de dommages et intérêts pour perte de commissions sur ventes, uniquement à compter de juillet 2002,

*] 350 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- débouté Jacques X... du surplus de ses demandes,

- condamné les parties aux dépens par moitié.

Le 5 mai 2004, Jacques X... a relevé appel de cette décision. MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Au soutien de son appel, Jacques X... fait valoir que

l'employeur n'a pas respecté le principe d'ordre public d'indépendance de la prospection de ses agents qu'il astreint de fait à un lien salarial de subordination directe en éludant le corollaire indispensable qui consiste à devoir les payer conformément à la législation qui réglemente de façon impérative le temps de travail, dès lors qu'il ne relève plus de la réglementation d'exception qui constitue le statut VRP (circulaire des 17 mars 1993 et 3 mars 2000) qui leur est attribuée de façon fictive.

Il expose qu'après avoir vidé le statut de VRP dont il bénéficiait, de l'ensemble de ses avantages, l'employeur lui en a imposé tous les inconvénients, c'est-à-dire qu'il devait travailler à poste fixe sur des moyennes hebdomadaires supérieures à 57 heures sans jamais percevoir ni heures supplémentaires, ni repos compensateur, ni indemnité pour le travail effectué durant les jours fériés.

Il soutient qu'il ne disposait d'aucune autonomie dans l'organisation de son travail, que ce travail se résumait à un travail de documentaliste classeur qui l'a astreint à devoir effectuer un horaire de travail se situant bien au-delà de l'horaire légal des 35 heures et ce au plus grand profit de l'employeur qui a éludé par le biais du statut VRP le règlement des heures supplémentaires et des repos compensateurs.

Il estime, concernant le calcul qu'il a effectué au soutien de sa demande en réajustement de salaire que la cour devra tenir compte de ce que le travail de l'agent classeur se résume uniquement à un travail exécuté sous la subordination directe de l'employeur, et qu'elle devra y rajouter le temps de trajet effectué depuis son domicile jusqu'au site sur lequel le travail est effectué. Il ajoute que si l'agent classeur ne revendique aucune rémunération supplémentaire au titre du temps passé à l'occasion des trajets effectués de son domicile chez les clients, à l'aller comme au

retour, ce temps de trajet doit néanmoins être rajouté au temps de travail effectif, générateur de majoration au titre des heures supplémentaires, des repos compensateurs.

Il souligne qu'il a effectué le calcul de réajustement à partir des horaires figurant sur les relevés qui précèdent et qui ont été établis par l'employeur lui-même. Il ajoute qu'il en a fourni le décompte à l'employeur, qu'ainsi, le montant du réajustement sur les cinq dernières années non prescrites en majoration d'heures supplémentaires (y compris les heures de trajet) et repos compensateurs s'élève globalement à la somme de 87.330 ç selon le détail des calculs annexés à ses conclusions.

Il s'estime fondé à réclamer des dommages et intérêts afférents à la réparation du préjudice qui lui a été causé du fait de la modification de son contrat de travail.

Il fait valoir que le montant des commissions sur vente qu'il aurait dû percevoir sur les cinq dernières années s'élève à la somme de 1181 ç, et qu'il est bien fondé à réclamer une somme de 1.000 ç à titre de dommages et intérêts afférents à cette perte de commissions.

En conséquence, il demande à la cour :

- de requalifier son contrat de travail en un contrat à caractère salarial pur,

- de condamner la société des Editions du Juris-classeur à lui payer les sommes suivantes à titre de réajustement de salaire sur la période non prescrite, soit :

[* 62.567 ç au titre des rappels d'heures supplémentaires,

*] 24.763 ç au titre des repos compensateurs,

- de condamner la société des Editions du Juris-classeur à lui payer la somme de 1.000 ç à titre de dommages et intérêts afférents à la perte de commission,

- de condamner la société des Editions du Juris-classeur à lui payer la somme de 4.000 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens. * * *

La S.A. LEXINEXIS, intimée, réplique qu'il convient de préciser afin de dissiper une confusion volontaire entretenue par Jacques X... et pour clarifier les débats que de tous temps, depuis l'origine de la S.A. Editions du Juris-classeur, deux réseaux commerciaux ont toujours co-existé dans le cadre de son organisation commerciale, soit, un réseau de représentants VRP chargé de vendre exclusivement les encyclopédies Juris-classeur, et un réseau de représentants VRP chargé de vendre exclusivement le reste du catalogue, soit les revues périodiques et les ouvrages brochés (représentants-classeurs autrement intitulés "agents classeurs" outre l'activité de classement des mises à jour des encyclopédies Juris-classeur).

Elle fait valoir que les demandes de l'appelant en requalification de son contrat de travail en un contrat salarial pur et en paiement de la somme de 87.330 ç, en réajustement sur les cinq dernières années non prescrites (1997 à 2001) au titre des majorations d'heures supplémentaires et du repos compensateur sont autant irrecevables que mal fondées, puisqu'elle estime avoir établi, au moyen des pièces versées au débat que les fonctions de Jacques X... depuis 1982 ont toujours été celles définies dans son contrat de travail de représentant de classeur, statut VRP, et de l'additif joint, en date du 30 avril 1982.

Elle souligne qu'il est constant que les fonctions de Jacques X... de 1982 à son départ en retraite en 2003 ont toujours répondu de facto aux conditions légales d'ordre public de statut de VRP auquel le contrat de travail et les annexes qui liaient les

parties font de surcroît contractuellement référence.

Elle soutient également qu'à aucun moment, les organisations syndicales représentatives du personnel de la société n'ont contesté la réalité et la régularité du statut VRP des agents classeurs de ladite société.

Elle soutient que les allégations portées par l'appelant concernant son évolution au sein de la société sont inexactes, puisqu'il a toujours contractuellement été tenu à l'instar de ses collègues d'exercer son activité de démarchage et de représentation commerciale auprès des clients abonnés de son secteur, visité à l'occasion du classement de leurs mises à jour en effectuant le plus de ventes possibles des produits mentionnés dans son contrat de travail. Elle fait valoir qu'à aucun moment, Jacques X... n'a été assujetti à devoir exécuter "un simple travail de classement, à poste fixe", de même qu'à aucun moment ses fonctions de VRP n'ont été vidées de leur contenu.

Elle fait valoir que la prétendue absence d'initiative et l'interdiction de toute prospection indépendante de l'agent classeur invoquée par Jacques X... est infondée, que le contrat originel de l'appelant faisant la loi des parties n'a aucunement subi une quelconque altération de surcroît fondamentale.

Elle soutient que la violation de toute initiative dans la prospection des clients, invoquée par l'appelant est infondée.

Elle explique que le statut de VRP dont bénéficiait Jacques X... dans le cadre de ses fonctions de représentant classeur, tel que défini dans son contrat de travail, statut auquel il avait de surcroît adhéré, n'ayant aucunement été vidé de son contenu de quelque manière que ce soit de 1982 à son départ en retraite en 2003, celui-ci ne saurait en aucun cas utilement prétendre à la requalification de son contrat de travail de représentant classeur

statut VRP en un contrat à caractère salarial pur au titre de sa période d'activité.

Elle fait valoir que l'appelant ayant été mensuellement rémunéré régulièrement durant la période 1997-2001 au titre de l'intégralité des heures de classement qu'il a effectuées auprès des abonnés de son secteur de même qu'au titre des ventes autorisées réalisées par celui-ci, sa demande porte exclusivement sur des rappels de majorations d'heures supplémentaires et le repos compensateur durant cette période.

Elle considère que celui ci ne saurait en aucun cas prétendre au paiement d'un quelconque rappel de majoration d'heures supplémentaire et de repos compensateur au titre de la période concernée, ce alors de surcroît que sa rémunération n'a jamais comporté un quelconque salaire fixe.

Subsidiairement, si par impossible la cour n'estimait pas devoir débouter l'appelant de sa demande en requalification de son contrat de travail en un contrat salarial pur, il escherait de retenir que Jacques X... ne pourrait prétendre pour autant au paiement de la somme de 87.330 ç qu'il réclame en réajustement des majorations d'heures supplémentaires et de repos compensateur au titre de la période non prescrite 1997-2001. Elle ajoute que la demande de ce chef de l'appelant est infondée et erronée en son quantum.

Elle expose que pour déterminer les majorations d'heures supplémentaires et de repos compensateur dont s'agit en application des règles légales en vigueur, elle a pris en compte l'intégralité des heures de travail déclarées par jacques X... telles que figurant sur son propre tableau.

Elle considère que le chef de demandes de l'appelant en paiement de la somme de 1.000 ç à titre de dommages et intérêts afférents à la perte de commissions sur ventes de 1997 à 2001 est irrecevable et mal

fondée, puisque l'appelant a toujours perçu l'intégralité des commissions auxquelles il avait droit en fonction des ventes autorisées qu'il a réalisées.

Elle considère que l'indemnité réclamée par Jacques X... au titre de l'article 700 n'a pas lieu d'être, et fait valoir qu'il serait inéquitable de lui laisser supporter les frais irrépétibles qu'il a dû exposer pour assurer la défense de ses droits.erait inéquitable de lui laisser supporter les frais irrépétibles qu'il a dû exposer pour assurer la défense de ses droits.

En conséquence, il demande à la cour :

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a débouté Jacques X... de sa demande en requalification de son contrat de travail en un contrat à caractère salarial pur pour la période allant de son embauche à juillet 2002, ainsi que de ses demandes en paiement de majoration d'heures supplémentaires, de repos compensateur au titre de la période de cinq ans non prescrites à compter de sa demande (soit de 1997 à 2001 inclus) et de dommages et intérêts pour prétendues pertes de commissions au titre de cette même période.

- d'infirmer partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau,

- de débouter Jacques X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner reconventionnellement l'appelant à lui payer la somme de 2.500 ç au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- de condamner l'appelant aux entiers dépens de première instance et d'appel,

- subsidiairement, de dire et juger que Jaques X... ne saurait prétendre qu'aux paiement d'une somme de 25.685,55 ç à titre de

majorations d'heures supplémentaires et de repos compensateur au titre de la période de cinq ans non prescrite à compter de sa demande soit de 1997 à 2001 inclus à l'exclusion de tout autre somme au-delà de ce montant.

- de le débouter au surplus de ses demandes de ces chefs. MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que le fondement de l'action de Jacques X... est l'application d'un contrat de travail salarié sans référence au statut de V.R.P. qui selon lui ne s'applique pas ;

Attendu que la seule volonté des parties est impuissante à soustraire le salarié au statut social qui découle nécessairement des conditions effectives de son activité ;

Attendu qu'il convient en conséquence de rechercher si les conditions dans lesquelles Jacques X... exerçait son activité correspondaient à la définition donnée par les textes applicables, les articles L.751-1 et suivants du Code du travail ;

Attendu que la condition déterminante de l'application du statut est la prospection ;

Que la prospection consiste dans la visite d'une clientèle à l'extérieur de l'entreprise dans le but de prendre ou de provoquer des ordres et suppose une activité de démarchage personnel du représentant auprès de la clientèle, reposant sur ses propres efforts et ses initiatives ;

Attendu que c'est au V.R.P. et non à l'entreprise de rechercher des clients et que ne peut prétendre au statut de V.R.P. un représentant vérifiant des clients conformément à des fiches préétablies ou ne visitant que des clients ayant renvoyé le coupon adressé par l'entreprise dans le cadre d'un mailing ou ayant été préalablement contactés par un service télémarketing ;

Or attendu que tel est bien le cas en l'espèce ; que ses tournées sont préparées par la direction commerciale, qu'il lui est précisé par courrier qu'il ne doit pas intervenir chez les clients sans l'accord de la société et que son activité essentielle n'est pas la prospection mais le classement des mises à jour des différents ouvrages édités par la société employeur ;

Attendu qu'il est précisé dans le contrat de travail que les demandes de classement sont transmises par la société ; que Jacques X... devra travailler au moins 40 heures par semaines et se conformer exclusivement aux directives et instructions de la société ; que c'est seulement à l'occasion de ses visites programmées chez les abonnés qu'il est incité à vendre les ouvrages édités par son employeur ;

Que pour ce travail il perçoit des commissions sur toutes les affaires facturées par son intermédiaire ;

Attendu que force est à la cour de constater que les attestations d'employeur destinées à obtenir la carte d'identité professionnelle de représentant mentionnent que l'occupation effective et habituelle du salarié est le classement des ouvrages ;

Que la même formule est utilisée depuis son embauche jusqu'en 2002 ainsi qu'en témoigne les demandes établies par l'employeur lui-même ; Attendu qu'il résulte en outre des documents produits par le salarié que le salaire ne repose pas sur les commissions mais sur le nombre d'heures exactes passées par le salarié dans le classement des mises à jour chez les abonnés ;

Qu'il est précisé dans son contrat de travail un salaire à l'heure de telle sorte que la rémunération versée par la S.A. LEXISNEXIS n'est que le fruit d'une "traduction" des heures de travail qui ne correspond à aucune réalité et n'est pas conforme au contrat de

travail signé par les parties ;

Attendu que la S.A. Editions Juris-Classeur devenue S.A. LEXISNEXIS ne peut se prévaloir de la stipulation expresse prévue aux conditions de l'emploi de Jacques X... en lui allouant le statut de représentant en application de la règle précédemment énoncée ;

Que l'argument selon lequel il a expressément accepté l'intégralité des conditions contractuelles soumises à son agrément dans le cadre de son engagement, soit des fonctions de représentant classeur statut V.R.P. ne peut donc prospérer ;

Par ailleurs attendu que même si les fiches remplies par les clients ont pour unique but de demander à être classées, en dehors de toute intention d'achat des produits dont s'agit, il n'en demeure pas moins que c'est seulement chez les abonnés que Jacques X... était en droit de prospecter, de telle sorte qu'une condition essentielle du statut de V.R.P. n'est pas remplie ;

Attendu que le protocole d'accord signé le 28 novembre 2000 démontre clairement que les agents classeurs sont défavorisés par rapport aux autres catégories de personnel en raison de leur statut qui les exclut de la réglementation de la durée du travail, de la réduction globale de l'activité de classement qui a pour corollaire un risque de diminution de la rémunération ; que dans ce protocole il n'est nullement fait état qu'une activité quelconque de représentation mais seulement d'un statut unilatéralement décidé par l'employeur ;

Attendu que la circonstance que ces agents classeurs soient invités à multiplier les initiatives et actions aux fins de vendre les revues périodiques et ouvrages contractuellement prévus ne contredit en rien la réalité selon laquelle les salariés ne prospectent pas à l'extérieur et à leur seule initiative mais uniquement auprès des clients qui leur sont désignés par leur employeur ;

Attendu quels que soient les arguments développés par la S.A. LEXISNEXIS, aucun d'entre eux ne va à l'encontre de la non application du contrat de travail initialement conclu et de l'absence de conditions réelles d'exercice ouvrant droit au statut de V.R.P. ; Attendu que l'organisation des tournées est sans grand intérêt au regard de l'indépendance du salarié, dès lors qu'elle doit se faire dans un certain ordre conformément au contrat qu'il a signé et dans un délai donné certains clients étant régulièrement mis à jour ;

Attendu qu'il n'existe aucune raison de transformer les horaires de travail en commissions alors que l'employeur avait une parfaite connaissance du nombre exact d'heures de travail lui était communiqué régulièrement et sur la base duquel les mises à jour étaient facturées aux abonnés.

Attendu, que sans qu'il ait lieu d'examiner les circonstances et l'évolution du contrat de travail de Jacques X... il y a lieu de dire et juger que celui-ci en droit de prétendre à la requalification de son contrat de travail de "représentant classeur statut V.R.P." en contrat de travail à caractère salarial pur et simple.

Sur les conséquences

Attendu que la durée du travail effectif est, aux termes de l'article L.212-4 du Code du travail le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;

Que le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérées comme du temps de travail effectif lorsque les critères ainsi définis sont réunis ;

Attendu qu'en l'espèce le salarié se prévaut d'un nombre d'heures très important sans donner aucun élément permettant d'en vérifier la

durée ;

Attendu que s'il peut être considéré que le travail relevé concerne exclusivement les mises à jour chez les abonnés et que la journée de travail de Jacques X... inclut nécessairement des temps de trajets, encore faut-il rechercher quelle est leur durée et dans quelles conditions il les exécutait.

Attendu qu'à défaut de tout élément contenu au dossier, la cour ne peut ni les retenir comme le demande Jacques X... ni les écarter purement et simplement comme le soutient la S.A. LEXISNEXIS ; qu'il convient d'ordonner une expertise afin d'apprécier leur durée au regard des critères posés par l'article L.212-4 du Code du travail ou de la convention collective, si elle existe. PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Dit et juge que la relation de travail qui unissait la S.A. LEXISNEXIS et Jacques X... est un contrat de travail salarial et non un contrat de V.R.P.,

Avant dire droit sur les conséquences de cette requalification,

Ordonne une expertise désigne pour y procéder : Roland REBOIS "Fromental" 46120 LEYME Tél. 05.65.11.21.50 Fax. 05.65.11.21.70 avec la mission contenue aux motifs du présent arrêt.

Dit que cette expertise sera réalisée conformément aux dispositions des articles 232 à 248 et 263 à 284 du nouveau Code de procédure civile,

Dit qu'à cet effet l'expert commis, saisi par le greffe, devra accomplir sa mission contradictoirement en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées, les entendre en leurs observations et déposer rapport de ses opérations avec son avis dans un délai de TROIS MOIS à compter du jour où il aura été saisi de sa mission par le greffe après consignation de la provision, sauf prorogation des

opérations dûment autorisée par le magistrat chargé du contrôle sur demande de l'expert,

Fixe, sous réserve de consignation complémentaire si la provision allouée devient insuffisante, à la somme de 1.500 ç la provision à valoir sur la rémunération de l'expert que la S.A. LEXISNEXIS devra consigner au régisseur de cette cour dans le délai d'un mois à compter du prononcé de la présente décision, à défaut de quoi il sera fait application de l'article 271 du nouveau Code de procédure civile,

Dit que l'expert, si le coût probable de l'expertise s'avère beaucoup plus élevé que la provision fixée devra communiquer à la cour et aux parties l'évaluation prévisible de ses frais et honoraires en sollicitant, au besoin, la consignation d'une provision complémentaire,

Dit que cette expertise sera effectuée sous le contrôle de la Présidente de la chambre sociale à qui il en sera référé en cas de difficulté,

Dit qu'en cas d'empêchement de l'expert, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance présidentielle,

Condamne la S.A. LEXISNEXIS aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé.

LA GREFFIÈRE :

LA PRÉSIDENTE :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947075
Date de la décision : 31/01/2006
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL.

La seule volonté des parties est impuissante à soustraire le salarié au statut social qui découle nécessairement des conditions effectives de son activité. Il convient de rechercher si les conditions dans lesquelles l'appelant exerce son activité correspondait à la définition d'activité de VRP donnée par les textes applicables, les articles L. 751-1 et suivants du code du travail. La condition déterminante de l'application du statut est la prospection. La prospection consiste dans la visite d'une clientèle à l'extérieur de l'entreprise dans le but de prendre ou de provoquer des ordres et suppose l'activité de démarchage personnel du représentant auprès de la clientèle, reposant sur ses propres efforts et ses initiatives. C'est au VRP et non à l'entreprise de rechercher des clients et ne peut prétendre au statut de VRP un représentant vérifiant des clients conformément à des affiches préétablies ou ne visitant que des clients ayant renvoyé le coupon adressé par l'entreprise dans le cadre d'un mayling ou ayant été préalablement contactés par un service télémarketing. Tel est bien le cas en l'espèce. Les tournées de l'appelant sont préparées par la direction commerciale. Il lui est précisé par courrier qu'il ne doit pas intervenir chez les clients sans l'accord de la société et son activité essentielle n'est pas la prospection mais le reclassement des mises à jour des différents ouvrages édités par la société employeur. Il est précisé dans le contrat de travail que les demandes de classement sont transmises par la société. Le salarié devra travailler au moins 40 heures par semaine et se conformer exclusivement aux directives et instructions de la société. C'est seulement à l'occasion de ses visites programmées chez les abonnés qu'il est incité à vendre les ouvrages édités par son employeur. Pour ce travail il perçoit des commissions sur toutes les affaires facturées par son intermédiaire. Force est de constater que les attestations d'employeur destinées à obtenir la

carte d'identité professionnelle de représentant mentionne que l'occupation effective et habituelle du salarié est le classement des ouvrages, formule utilisée depuis son embauche jusqu'en 2002. Il résulte en outre des documents produits par le salarié que le salaire ne repose pas sur des commissions mais sur le nombre d'heures exactes passées par le salarié dans le classement des mises à jour chez les abonnés. Le protocole d'accord signé le 28 novembre 2000 démontre clairement que les agents classeurs sont défavorisés par rapport aux autres catégories de personnel en raison de leur statut qui les exclut de la réglementation de la durée du travail, de la réduction globale de l'activité de placement qui a pour corollaire un risque de diminution de la rémunération. Dans ce protocole il n'est nullement fait état d' une activité quelconque de représentation mais seulement d'un statut unilatéralement décidé par l'employeur.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2006-01-31;juritext000006947075 ?
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