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16/11/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946084

France | France, Cour d'appel d'agen, Ct0002, 16 novembre 2005, JURITEXT000006946084


COUR D'APPEL D'AGEN

No 189 / 2005 CHAMBRE DE L'INSTRUCTION ----------------- Affaire :

Laurent X... PC : CTS Y... Dossier no 05/00179

A R R E T DU 16 NOVEMBRE 2005

------------------------

Composition de la Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel d'AGEN, tenue en Chambre du Conseil lors des débats du 19 octobre 2005 :

Monsieur Jean-Louis BRIGNOL, Président de la Chambre de l'Instruction,

Madame Dominique NOLET, Conseiller,

Monsieur Françis TCHERKEZ, Conseiller

tous trois désignés conformément aux dispositions de l'

article 191 du code de procèdure pénale,

assistés de Madame Brigitte Z..., Greffier,

en présence de Mon...

COUR D'APPEL D'AGEN

No 189 / 2005 CHAMBRE DE L'INSTRUCTION ----------------- Affaire :

Laurent X... PC : CTS Y... Dossier no 05/00179

A R R E T DU 16 NOVEMBRE 2005

------------------------

Composition de la Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel d'AGEN, tenue en Chambre du Conseil lors des débats du 19 octobre 2005 :

Monsieur Jean-Louis BRIGNOL, Président de la Chambre de l'Instruction,

Madame Dominique NOLET, Conseiller,

Monsieur Françis TCHERKEZ, Conseiller

tous trois désignés conformément aux dispositions de l'article 191 du code de procèdure pénale,

assistés de Madame Brigitte Z..., Greffier,

en présence de Monsieur Dominique A..., Substitut Général,

Vu l'information no 1/03/34 suivie au cabinet de Mademoiselle WISZNIAK, B... d'Instruction au Tribunal de Grande Instance d'AGEN, contre :

Laurent X...

né le 15 janvier 1984 à AGEN (47)

de José et de Denise LE HETET

de nationalité française

profession : ouvrier en chaudronnerie

demeurant : 11, rue du Languedoc

47550 - BOE

des chefs d'homicide involontaire et excès de vitesse

Ayant pour conseil Maître GAUTHIER avocat au barreau d'AGEN

- 2 - PARTIES CIVILES :

- Cesario Y...

né le 8 Septembre 1955 à FUENTE SAOUCO (ESPAGNE)

domicilié : 22 bis, rue Pierre de Coubertin

47240 BON ENCONTRE

- Mennie YAIAOUI épouse Y...

domiciliée : 100, boulevard Sylvain Dumon

47000 AGEN

Ayant pour conseil Maître DISSES avocat au barreau d'AGEN

Vu l'ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi devant le Tribunal de Police rendue par Melle WIZSNIAK B... d'Instruction au Tribunal de Grande Instance d'AGEN en date du 13 septembre 2005,

Vu la déclaration au greffe du Tribunal de Grande Instance d'AGEN en date du 21 septembre 2005, par laquelle Maître DISSES avocat des parties civiles a relevé appel de cette décision, notifiée le 13 septembre 2005,

Vu les notifications de la date d'audience adressées le 5 octobre 2005 aux parties et à leurs conseils conformément aux dispositions de l'article 197 du Code de Procédure Pénale.

Vu les réquisitions écrites de Monsieur le Procureur Général en date du 5 Octobre 2005 ;

Vu le mémoire visé au greffe de la Chambre de l'Instruction d'AGEN, le 18 Octobre 2005 à 15 h 40 par Maître DISSES pour les époux Y... ; A cette audience : Monsieur le Président a présenté le rapport oral de l'affaire, Maître DISSES a été entendu pour les parties civiles, Monsieur l'Avocat Général a été entendu en ses réquisitions, Maître DELMOULY a été entendu pour Laurent X... et a eu la parole en dernier

- 3 -

Sur quoi la Cour a mis l'affaire en délibéré.

Et ce jour, 16 Novembre 2005 , après qu'il en a été délibéré conformément à la loi, en Chambre du Conseil, hors la présence de Monsieur l' Avocat Général et du Greffier, la Cour a rendu, en Chambre du Conseil, en présence de l'Avocat Général et de Madame C..., Greffier, l'arrêt dont la teneur suit

A R R E T

-------- Faits et procédure

Le 1er septembre 2002, vers 14 h 20, en agglomération de Bon-Encontre, Laurent X..., circulait au volant de son véhicule NISSAN, sur l'allée de la Vierge, axe prioritaire.

Au moment où le véhicule arrivait au carrefour formé avec la Rue Colette, le cyclomotoriste Jérémie Y... ALMARAZ, 15 ans, traversait la voie prioritaire, sans respecter le panneau STOP.

Laurent X... ne pouvait éviter le choc et le cyclomoteur s'encastrait sous la voiture qui le traînait sur une distance de 79

m, tandis que le cyclomotoriste était projeté dans un arbre avant de retomber sur un véhicule régulièrement garé Allée de la Vierge. Le casque de protection était retrouvé dans un jardin voisin, après avoir franchi un mur de 2 m de haut.

Le jeune Jérémie Y... ALMARAZ décédait sur les lieux.

Son cyclomoteur présentait des traces de choc sur la totalité du côté gauche, alors que la voiture NISSAN était emboutie plein centre avant avec le pare brise brisé.

L'analyse d'alcoolémie était négative sur Laurent X... et impossible sur la victime.

Laurent X... admettait ne pas avoir freiné car il avait "perdu ses moyens" et estimait son temps de réaction à quelques secondes. Après le choc il avait senti que ses roues avant ne répondait plus et qu'il ne pouvait plus contrôler sa voiture. Se trouvant en phase d'accélération, en troisième vitesse il pensait qu'il roulait un peu trop vite, sans pouvoir cependant estimer sa vitesse.

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Le non respect du stop par le cyclomotoriste était confirmé par plusieurs témoins ( D 33, D 36 et D 2/18).

(D 47) L'expertise diligentée sur réquisition du Parquet d'AGEN du 14 octobre 2002, concluait à l'absence de défaillances techniques pour les deux véhicules.

Elle précisait également que la vitesse était de 45 à 50 Km/h pou le

véhicule automobile conduit par Laurent X..., ce qui lui rendait toute manoeuvre d'évitement impossible.

Elle retenait aussi que pour s'être retrouvé si loin et par dessus un mur de clôture, le casque de la victime n'était pas attaché.

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(D 64) Dans ces conditions le Parquet d'AGEN décidait de classer sans suite cette procédure, l'infraction d'homicide involontaire lui paraissant insuffisamment caractérisée.

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Les parents de la victime portaient plainte avec constitution de partie civile le 14 avril 2003 (D 1 à D 3). S'ils admettait la faute de leur fils, ils n'en soutenait pas moins que l'accident était au moins partiellement imputable à Laurent X... qui avait multiplié les infractions : excès de vitesse et franchissement d'une ligne continue et course poursuite avec Samir QARTIT, juste avant l'accident.

Le plaignant précisait en outre que Laurent X... qui était coutumier des comportements à risque sur la route, n'avait nullement changé ses habitudes depuis l'accident.

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Les investigations menées sur commission rogatoire, (D 80) confirmaient l'excès de vitesse de Laurent X... et son franchissement de ligne continue en quittant la RN 113 pour emprunter

l'allée de la Vierge, juste avant l'accident. Cependant sa participation à une course poursuite n'était pas éablie.

- 5 -

Le complèment d'expertise confié à Monsieur D... montrait que : (D 93) - si au moment de l'impact, la vitesse du véhicule conduit par Laurent X... avait été de 50 km/h, le choc avec le cyclomotoriste n'aurait pu être évité : - ce choc n'aurait pu être évité que dans l'hypothèse où Laurent X... aurait roulé à 50 km/h, dès le début de l'Allée de la Vierge, ce qui aurait entraîné l'impossibilité temporelle d'accident entre les deux véhicules.

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Le B... d'Instruction a considéré que si deux manquements à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, en l'espèce un excès de vitesse et un franchissement de

ligne continue, pouvaient être imputés au mis en examen, le lien de causalité entre ces fautes et l'accident n'avait pas été démontré, alors que le lien de causalité, s'il peut être indirect doit néanmoins être certain.

Retenant les conclusions de l'expert qui excluait cette causalité en rappelant d'une part que la faute ayant causé directement l'accident est celle de la victime, qui n'a pas respecté un stop et d'autre part que si le mis en examen avait au moment du choc roulé à la vitesse réglementaire de 50 km/l, il n'aurait cependant pas pu éviter la victime, la B... d'Instruction d'AGEN a rendu, le 13 septembre 2005, sur réquisitions conformes du Ministère Public, une ordonnance de non-lieu partiel (du chef d'homicide involontaire) et de renvoi de Laurent X... devant le Tribunal Police pour circulation à une vitesse supérieure à celle autorisée.

La partie civile a régulièrement relevé appel de cette ordonnance, et demande à la barre et par mémoire régulièrement déposé sa réformation par le renvoi de Laurent X... devant le Tribunal Correctionnel des chefs d'homicide involontaire et d'excès de vitesse.

Elle fait notamment valoir que si le mis en examen avait circulé à la vitesse réglementaire dès son entrée dans l'Allée de la Vierge, l'accident n'aurait pas eu lieu, comme l'a également indiqué l'expert. Ainsi selon les plaignants l'accident et le décès de leurs fils provenaient du cumul des infractions commises par le conducteur du véhicule NISSAN.

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Le Procureur Général a requis la confirmation de l'ordonnance déférée en faisant notamment valoir qu'aucun renvoi devant le Tribunal Correctionnel, ni a fortiori aucune condamnation ne sauraient être fondés sur des probabilités ou de simples possibilités d'un lien de causalité entre la mort de la victime et la ou les fautes du mis en examen.

Le conseil du mis en examen a demandé à la barre la confirmation de l'ordonnance du 13 septembre 2005. MotifsMotifs

La faute de la victime, caractérisée par le non respect du panneau "stop" est établie. L'excès de vitesse imputable à Laurent X..., l'est tout autant, puisque celui-ci qui conteste la vitesse de 90 à 97 km/h retenue par l'expertise ne conteste cependant pas avoir circulé en excès de vitesse et avoir franchi une ligne continue en quittant la R.N. 113 pour s'engager dans l'Allée de la Vierge.

Selon l'ordonnance déférée, un lien de causalité certain entre les fautes de conduite commises par Laurent X... et l'accident n'a pu être démontré, car les conclusions de l'expert excluent cette causalité en retenant d'une part que la faute ayant causé directement

l'accident est celle de la victime et d'autre part que si Laurent X... avait roulé à une vitesse réglementaire de 50 km/l au moment du choc, il n'aurait cependant pas pu éviter la victime.

Cette hypothèse, retenue par l'expert à la demande de la B... d'Instruction, est toute théorique, tant il est impossible qu'un véhicule circulant sur l'Allée de la Vierge à une vitesse située entre 90 et 97 km/l, ne décélère instantanément pour se retrouver à 50 km/l au point de choc.

Cette hypothèse ne correspond à aucune réalité et est même démentie par les données objectives du dossier, puisque pour se retrouver à la vitesse déterminée par l'expert au point de choc, le véhicule NISSAN devait avoir parcouru les 200 mètres de l'Allée de la Vierge à une vitesse largement supérieure à celle autorisée et le mis en examen a lui-même précisé qu'il se trouvait en phase d'accélération.

Il a d'ailleurs également concédé au magistrat instructeur, qu'en conduisant à une vitesse réglementaire dès son entrée dans l'Allée de la Vierge, il ne serait pas entré en collision avec le cyclomotoriste (D 99).

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C'est ce qu' a également retenu l'expert dans son complément d'expertise (D 93) en précisant, qu'en roulant à 50 km/h en espace temps, c'est à dire, depuis le début de son entrée dans l'Allée de la Vierge, le véhicule NISSAN se serait trouvé à 44,48 mètres en amont du point d'impact au même moment où le cyclomotoriste se serait trouvé au point de choc, sans avoir marqué l'arrêt au "STOP". Dans ces conditions l'accident n'aurait pas eu lieu.

Il en résulte que l'excès de vitesse imputable au mis en examen a assurément participé à la réalisation du choc, dont il a de plus forcément aggravé les conséquences.

Ainsi si l'accident provient de la conjonction des infractions commises par la victime et par le mis en examen, il n'en reste pas moins que la vitesse manifestement excessive de Laurent X..., proche du double de celle autorisée, est dans un rapport certain de causalité avec le choc, même si elle n'est pas exclusive.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'instruction a établi contre Laurent X... des charges suffisantes d'avoir causé le délit d'homicide involontaire et la contravention d'excès de vitesse, justifiant son renvoi devant le Tribunal Correctionnel.

La décision déférée sera donc réformée. PAR CES MOTIFS LA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION

Après en avoir délibéré conformément à l'article 200 du Code de Procédure Pénale,

Statuant en Chambre du Conseil,

Vu les articles 177, 176, 199, 207 et 213 du Code de Procédure Pénale,

Réforme l'ordonnance déférée. I) Dit que de l'information résulte charge suffisante contre Laurent X... d'avoir le 1er septembre 2002, à BON-ENCONTRE (47) :

1o) par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le réglement, causé la mort de Jérémie Y... ALMARAZ,

Fait prévus et réprimés par les articles 221-6, 221-8, 222-10 du Code Pénal

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2o) circulé en agglomération à une vitesse supérieure à celle autorisée, soit à une vitesse acquise entre 90 et 97 km/h, au lieu de 50 km/h.

Contravention de 4ème classe prévue et réprimée par les articles R 413-3 ;

R 413-14 du Code de la Route. II) Ordonne en conséquence le renvoi de l'affaire devant le Tribunal Correctionnel d'AGEN pour être jugée conformément à la loi.

Et ordonne que le présent arrêt soit notifié et signifié conformément à l'article 217 du code de procédure pénale ; Ainsi fait et jugé les jour, mois et an susdits. LE GREFFIER :

LE PRESIDENT : N. C...

J.L. BRIGNOL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Ct0002
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946084
Date de la décision : 16/11/2005

Analyses

HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES - Lien de causalité - Cause certaine

Il résulte de l'information des charges suffisantes pour retenir le délit d'homicide involontaire réprimé à l'article 221-6 du Code pénal dans la mesure où, si l'accident provient de la conjonction des infractions commises par la victime et par le mis en examen, il n'en reste pas moins que la vitesse manifestement excessive proche du double de celle autorisée est dans un rapport certain de causalité avec le choc, même si elle n'est pas exclusive


Références :

Code pénal, article 221-6

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2005-11-16;juritext000006946084 ?
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