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08/11/2005 | FRANCE | N°04/00856

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 08 novembre 2005, 04/00856


ARRÊT DU 8 NOVEMBRE 2005
04/ 00856
Benjamin X... c/ E. A. R. L....
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Sociale
Prononcé à l'audience publique du huit novembre deux mille cinq par Nicole ROGER, Présidente de Chambre,
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE : Benjamin X... né le 20 janvier 1951 à LOUREDO (PORTUGAL)... 47200 MARMANDE Rep/ assistant : M. Jean-Marie Y... (Délégué syndical ouvrier)
APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 9 avril 2004 d'une part,
ET : E. A. R. L.... ... 47200 MARMANDE Rep/ assi

stant : Me François RABANIER (avocat au barreau de MARMANDE)
INTIMÉE
d'autre part...

ARRÊT DU 8 NOVEMBRE 2005
04/ 00856
Benjamin X... c/ E. A. R. L....
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Sociale
Prononcé à l'audience publique du huit novembre deux mille cinq par Nicole ROGER, Présidente de Chambre,
La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire
ENTRE : Benjamin X... né le 20 janvier 1951 à LOUREDO (PORTUGAL)... 47200 MARMANDE Rep/ assistant : M. Jean-Marie Y... (Délégué syndical ouvrier)
APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 9 avril 2004 d'une part,
ET : E. A. R. L.... ... 47200 MARMANDE Rep/ assistant : Me François RABANIER (avocat au barreau de MARMANDE)
INTIMÉE
d'autre part,
A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 20 septembre 2005 devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Catherine LATRABE, Conseillère, Françoise MARTRES, Conseillère, assistées de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
FAITS ET PROCÉDURE
Benjamin X..., né le 20 janvier 1951, a été embauché à partir du 1er octobre 1979 tout d'abord comme saisonnier puis depuis le 1er janvier 1982 en contrat à durée indéterminée par l'E. A. R. L.... ;
Le 14 février 2003 il a eu une altercation sur le lieu du travail avec son chef d'équipe Aymeric Z... ;
Il a été convoqué le même jour à un entretien préalable à son licenciement fixé au 21 février 2003 avec mise à pied conservatoire par lettre remise en main propre ; son licenciement lui a été notifié le 27 février 2003 dans les termes suivants :
" Vous avez au cours d'une altercation avec votre chef d'équipe Monsieur Aymeric Z..., proféré des insultes et des menaces de mort accompagnées de gestes violents (menaces avec un sécateur) à son encontre, en présence d'un autre salarié.
Je ne peux tolérer plus longtemps votre comportement irrespectueux et violent dans mon entreprise.
La rupture de votre contrat sera effective dès la présentation de cette lettre sans préavis, ni indemnité de rupture ".
Le 9 avril 2003 Benjamin X... a saisi le conseil de prud'hommes de Marmande et par jugement du 9 avril 2004 a été débouté de toutes ses demandes et condamné à verser à l'employeur une somme de 450 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Benjamin X... a relevé appel de cette décision.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Benjamin X... demande à la cour de requalifier son licenciement sur la base d'une cause réelle et sérieuse mais non sur une faute grave ; il fait plaider que les seuls faits à retenir sont des menaces verbales dites dans un contexte de travail tendu et qui sont monnaie courante dans le milieu de l'agriculture ;
Il affirme qu'aucune plainte n'a été portée depuis le jour de l'incident, qu'il n'est pas quelqu'un de violent et qu'il n'aurait jamais mis ses menaces à exécution ; il sollicite en conséquence :
- l'indemnité de licenciement soit
2. 484, 30 euros
-l'indemnité de préavis de deux mois prévue par la convention collective soit
2. 366, 00 euros
-plus les congés payés correspondants
236, 60 euros
-le paiement de la mise à pied du 14 au 26 février 2003 soit
560, 04 euros
-plus les congés payés correspondants
56, 00 euros et un rappel de primes d'ancienneté sur la base d'une ancienneté de 21 ans ; sur ce dernier point il indique que cette prime ne lui a jamais été réglée jusqu'à l'expiration de son dernier mois d'embauche date à laquelle il a perçu une prime qui ne correspond pas à ce qui lui est dû réellement ;
Il sollicite enfin 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
L'employeur réplique que les faits reprochés à Benjamin X... sont gravissimes ; qu'il importe peu de savoir quel était le comportement du salarié par le passé et de tenir compte de la gravité du moment ; l'employeur produit deux attestations dont celle du salarié victime de l'agressivité de Benjamin X... et demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.
S'agissant de la prime d'ancienneté l'employeur affirme que ce n'est qu'à partir d'août 1995 qu'il a été embauché en contrat à durée indéterminée tandis qu'auparavant il venait travailler pour des durées déterminées ; l'employeur ajoute que selon la convention collective nationale la prime d'ancienneté n'est attribuée qu'au salarié titulaire d'un contrat à durée indéterminée de telle sorte qu'il ne pouvait y prétendre qu'à partir du mois d'août 1998, l'employeur a calculé une prime d'ancienneté qui a été réglée à Benjamin X... lors de son départ à 3. 025, 02 euros.
L'E. A. R. L.... conclut au débouté pur et simple de Benjamin X... et à sa condamnation au paiement d'une somme supplémentaire de 450 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'il résulte des documents produits que Benjamin X... a été embauché dès le 1er octobre 1979 comme saisonnier ; qu'à partir du 1er janvier 1982 ainsi que cela figure sur ses bulletins de paye il a été embauché régulièrement et chaque année par l'E. A. R. L.... ;
Attendu qu'à partir du mois d'août 1999 la mention " entré le 1er janvier 1982 " figure sur ses bulletins de salaire ; qu'il apparaît que c'est bien cette ancienneté que l'employeur a reconnue à Benjamin X..., que lors de l'entretien préalable le directeur a bien indiqué que l'ancienneté de Benjamin X... était de 25 ans, que sur l'attestation ASSEDIC la durée d'emploi part du 1er janvier 1982 au 26 février 2003 ; qu'il appartient à l'employeur qui prétend que le salarié ne bénéficie pas de cette ancienneté d'en rapporter la preuve alors qu'il dispose de l'ensemble des documents lui permettant d'établir son ancienneté ;
Attendu par ailleurs qu'il n'est pas contesté que Benjamin X... travaillait tout au long de l'année et ne remplissait donc en aucun cas les conditions d'un contrat de travail à durée déterminée puisque son emploi était destiné à pourvoir un emploi permanent et durable de l'entreprise.
Qu'il convient donc de retenir comme date d'ancienneté le 1er janvier 1982.
Attendu qu'eu égard à cette ancienneté c'est à juste titre que Benjamin X... sollicite un complément de rappel de primes d'ancienneté de 5. 547, 32 euros compte tenu de la somme qu'il a déjà perçue ;
Attendu, sur le licenciement, que l'appréciation de la faute grave doit se faire contrairement à ce qu'indique l'employeur, en tenant compte du comportement général du salarié au sein de l'entreprise et de son ancienneté ;
Qu'un fait unique ne peut à lui seul, à l'exception de faits exceptionnels entraîner le prononcé d'un licenciement pour faute grave.
Attendu qu'il est incontestable que le 14 février 2003 Benjamin X... a eu un comportement menaçant et agressif à l'égard d'Aymeric Z... ; que néanmoins une seule observation de l'autre salarié qui se trouvait en leur compagnie a suffi à faire cesser ce comportement ; qu'il n'est pas contesté qu'il s'agit là d'un fait inhabituel, que l'employeur lors de l'entretien n'a pas contesté qu'il s'agissait habituellement d'un homme calme.
Attendu dès lors que cette faute, si elle est suffisamment grave pour entraîner la sanction suprême qu'est le licenciement, ne justifie pas le prononcé d'une faute grave au sens juridique de ce terme.
Qu'ainsi Benjamin X... est bien fondé à réclamer l'indemnité de préavis et de licenciement et le paiement du salaire pendant la mise à pied.
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge ceux des frais non compris dans les dépens dont il a fait l'avance et que l'employeur devra lui verser à ce titre la somme de 500 euros.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire en dernier ressort,
Réforme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Marmande ;
Dit et juge que le licenciement de Benjamin X... repose sur une faute sérieuse mais non sur une faute grave.
Condamne en conséquence l'E. A. R. L.... à lui payer les sommes suivantes :
- préavis de deux mois :
2. 366, 00 euros
plus les congés payés correspondants :
236, 60 euros
-salaire pendant la mise à pied du 14 au 26 février 2003 :
560, 04 euros
plus les congés payés correspondants :
56, 00 euros
-indemnité de licenciement :
2. 484, 30 euros
Dit et juge que l'ancienneté de Benjamin X... remonte au 1er janvier 1982 et ouvre droit à un rappel de primes d'ancienneté de 5. 547, 32 euros.
Condamne l'E. A. R. L.... à payer à Benjamin X... la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Condamne l'E. A. R. L.... en tous les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'exécution du présent arrêt s'ils s'avèrent nécessaires.
Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé.
LA GREFFIÈRE :
LA PRÉSIDENTE :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 04/00856
Date de la décision : 08/11/2005
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement disciplinaire - Faute du salarié - Appréciation

L'appréciation de la faute grave doit se faire contrairement à ce qu'indique l'employeur en tenant compte du comportement général du salarié au sein de l'entreprise et de son ancienneté. Un fait unique ne peut à lui seul, à l'exception de faits exceptionnels, entraîner le prononcé un licenciement pour faute grave. En l'espèce il est incontestable que le 14 février 2003 Benjamin X... a eu un comportement menaçant et agressif à l'égard de son employeur. Néanmoins, une seule observation de l'autre salarié qui se trouvait en leur compagnie a suffi à faire cesser ce comportement. Il n'est pas contesté qu'il s'agit là d'un fait inhabituel que l'employeur lors d'un entretien n'a pas contesté qu'il s'agissait habituellement d'un homme calme. Dès lors que cette faute, si elle est suffisamment grave pour entraîner la sanction suprême qu'est le licenciement, ne justifie pas le prononcé d'une faute grave au sens juridique de ce terme. Ainsi Benjamin X... est bien fondé à réclamer l'indemnité de préavis et de licenciement et le paiement du salaire pendant la mise à pied


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2005-11-08;04.00856 ?
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