La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946230

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 28 juin 2005, JURITEXT000006946230


ARRÊT DU 28 JUIN 2005 CL/SBE ----------------------- 04/00443 ----------------------- S.A.R.L. GEMO SERVICES C/ Juanita RODRIGUEZ épouse X... ----------------------- ARRÊT no COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du vingt huit Juin deux mille cinq par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S.A.R.L. GEMO SERVICES 49111 ST PIERRE MONTLIMART CEDEX Rep/assistant : la SCP FIDAL TOULOUSE (avocats au barreau de TOULOUSE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AUCH en date du 03 Mars 2004 d'un

e part, ET : Juanita RODRIGUEZ épouse X... née le 28 ...

ARRÊT DU 28 JUIN 2005 CL/SBE ----------------------- 04/00443 ----------------------- S.A.R.L. GEMO SERVICES C/ Juanita RODRIGUEZ épouse X... ----------------------- ARRÊT no COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du vingt huit Juin deux mille cinq par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S.A.R.L. GEMO SERVICES 49111 ST PIERRE MONTLIMART CEDEX Rep/assistant : la SCP FIDAL TOULOUSE (avocats au barreau de TOULOUSE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AUCH en date du 03 Mars 2004 d'une part, ET : Juanita RODRIGUEZ épouse X... née le 28 Décembre 1964 à AIRE SUR ADOUR (40800) "Las Bourdettes" 32500 STE RADEGONDE Rep/assistant : Me Alain MIRANDA (avocat au barreau d'AGEN) INTIMÉE

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 24 mai 2005 devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Catherine LATRABE, Conseillère, Francis TCHERKEZ, Conseiller, assistés de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE

Juanita X..., née le 28 décembre 1964, a été embauchée à compter du 8 janvier 1997 par la S.A.R.L. GEMO SERVICES en qualité d'employée de rayon, d'abord suivant contrats de travail à durée déterminée puis à compter du 1er septembre 1998, elle a bénéficié d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel sur la base de 30 heures par semaine, l'intéressée étant affectée au magasin d'Auch.

Par courrier recommandé en date du 20 mars 2002, Juanita X... a fait état à la directrice de son magasin, Sylvie Y..., de ce que début février, elle lui a demandé deux jours de congés pour le 6 avril et le 27 avril qui ont été accordés par cette dernière puis refusés le 16 mars, ajoutant que le délai de prévenance n'ayant pas été respecté de sa part, elle maintenait son jour de congé pour le 6 avril et qu'elle renouvelait sa demande pour le 27 avril, devant accompagner son fils à un examen.

Par courrier recommandé du 2 avril 2002, la S.A.R.L. GEMO lui a répondu que si effectivement, elle avait pu solliciter Sylvie Y..., au cours du mois de février, pour bénéficier de deux jours de congés,

les samedi 6 et 27 avril 2002, cette dernière n'avait pu donner de suite favorable à sa demande, compte tenu de l'activité du magasin et avait, toujours, refusé cette absence ; la S.A.R.L. GEMO a informé, en outre, la salariée de ce que, si elle maintenait sa position consistant à imposer ses dates de congés, elle serait contrainte d'en tirer les conséquences sur leurs relations contractuelles.

Par courrier recommandé du 5 avril 2002, Juanita X... a maintenu que Sylvie Y... lui avait oralement accordé les deux jours de congés litigieux avant de changer d'avis le 16 mars "alors qu'il n'y avait aucun caractère exceptionnel de nécessité de sa présence" et que du fait de l'accord de sa responsable, elle avait pris certaines dispositions, devant accompagner ses enfants mineurs, le 6 avril, à Cahors et le 27 avril, un de ses fils à un examen.

Le 9 avril 2002, la S.A.R.L. GEMO a convoqué Juanita X... à un entretien préalable au licenciement fixé au 18 avril 2002.

Suivant courrier recommandé en date du 29 avril 2002, l'employeur lui a notifié, en ces termes, son licenciement avec dispense d'exécution du préavis :

".... Cette décision est motivée par votre absence injustifiée de votre poste de travail du samedi après midi, 6 avril 2002.

Cette absence vous avait été refusée à plusieurs reprises, notamment par lettre recommandée du 2 avril 2002 (AR du 4 avril 2003) adressée à votre domicile et confirmée lors d'un entretien avec Mademoiselle Y..., le jeudi 4 avril 2002.

Malgré nos multiples mises en garde, vous avez pourtant décidé de ne pas venir travailler, ce qui est totalement inacceptable et constitue un refus de travail."

Contestant ce licenciement, Juanita X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Auch le 12 mai 2003.

Suivant jugement en date du 3 mars 2004, cette juridiction a qualifié le licenciement de Juanita X... de dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné la S.A.R.L. GEMO SERVICES à payer à cette dernière les sommes de 8.681,40 ç au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 2.214,10 ç à titre de complément de salaire R.T.T. et de 400 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et a rejeté les autres chefs de demandes.

La S.A.R.L. GEMO SERVICES a relevé appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées. MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La S.A.R.L. GEMO SERVICES soutient, pour l'essentiel, qu'elle n'a jamais autorisé la salariée à s'absenter à la date du 6 avril 2002 alors, au surplus, que cette date concernait un samedi ce qui constitue très exactement le jour où l'activité du magasin est la plus dense, de sorte que, compte-tenu de ce calendrier, la présence de Juanita X... était nécessairement requise.

Elle prétend, en outre, que l'argumentation et les pièces produites par cette dernière afin de justifier d'une autorisation d'absence sont inopérantes.

Elle en déduit qu'en l'absence de son accord, la salariée ne saurait légitimer son absence du 6 avril 2002 et ce d'autant plus qu'il résulte de la teneur des courriers établis par l'intéressée que celle-ci a, en réalité, passé outre au refus de son employeur.

Elle considère, dès lors, que le licenciement repose bien sur une cause réelle et sérieuse et qu'en tout état de cause, la salariée ne justifie pas de son préjudice.

Elle ajoute que s'agissant d'une salariée à temps partiel dont la durée contractuelle de travail est restée inchangée, le bénéfice de

la loi du 19 janvier 2 000 ne saurait s'appliquer à Juanita X... de sorte que cette dernière ne saurait prétendre à un complément de salaire R.T.T.

Elle estime, enfin, que l'intéressée dont les fonctions ne supposaient aucune communication avec les clients ne peut pas davantage prétendre à une majoration salariale pour pratique d'une langue étrangère, le magasin d'Auch où elle travaillait ne connaissant pas, au surplus, particulièrement une clientèle étrangère et la seule connaissance d'une langue étrangère ne permettant pas de se prévaloir de la majoration prévue.

Elle demande, par conséquent, à la Cour de réformer la décision déférée, de dire que le licenciement de Juanita X... repose sur une cause réelle et sérieuse, de dire que l'intéressée ne saurait prétendre aux indemnités sollicitées au titre du complément de salaire R.T.T., de confirmer la décision du conseil des prud'hommes en ce qu'elle a débouté Juanita X... de la demande qu'elle formulait au titre de la majoration pour pratique d'une langue vivante, en tout état de cause de la débouter de l'ensemble de ses prétentions et de la condamner au paiement de la somme de 2.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. * * *

Juanita X... demande, pour sa part, à la Cour de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ce qu'elle a condamné la S.A.R.L. GEMO SERVICES à lui payer les sommes de 2.214,10 ç à titre de complément de salaire R.T.T. et de 400 ç au titre de frais irrépétibles, de l'infirmer pour le surplus et de condamner la S.A.R.L. GEMO SERVICES à lui payer les sommes de 11.575,20 ç à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de 4.120,68 ç au titre de la majoration langue vivante et enfin, de la condamner au

paiement de la somme complémentaire de 1.500 ç sur le fondement de l'article 700 précité.

Elle considère qu'elle n'a pas refusé de travailler et que son absence le 6 avril 2002 n'était pas non plus injustifiée alors qu'au contraire, elle bénéficiait d'un jour de congé à cette date que son employeur, moins d'un mois avant celle-ci ne pouvait modifier de sorte que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ce qui doit lui ouvrir droit à des indemnités et ce d'autant plus qu'elle a peu d'espoir de retrouver un travail alors qu'elle a trois enfants mineurs à charge.

Elle estime, par ailleurs, avoir droit à un complément de salaire RTT ainsi qu'à une majoration de 10 % de sa rémunération au regard de la convention collective qui lui est applicable et ce, pour pratique de la langue espagnole. MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que tout licenciement doit être fondé sur une cause à la fois réelle, c'est-à-dire établie, objective et exacte, et sérieuse, c'est-à-dire rendant impossible la continuation du travail sans dommages pour l'entreprise.

Que l'administration de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'incombe particulièrement ni à l'une ni à l'autre des parties.

Que, par ailleurs, et conformément aux dispositions de l'article L.122-14-3 du Code du travail, si un doute subsiste, il profite au salarié.

Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que Juanita X... a sollicité, au cours du mois de février 2002, de la directrice de son magasin, deux jours de congé, aux dates des 6 et 27 avril 2002.

Que les dires de Juanita X... tels qu'ils sont affirmés dès sa lettre recommandée en date du 20 mars 2002 selon lesquels Sylvie Y... lui avait d'abord accordé ces congés avant de revenir

brusquement sur sa décision à la mi mars 2002 sont confortés par les attestations établies par deux salariées du magasin d'Auch, Diane GRIHARD en contrat à durée déterminée du 17 septembre 2001 au 13 avril 2002 et Sylvie RUFFIER, sous contrat de travail à durée indéterminée, qui certifient, en outre l'une et l'autre, avoir vu lesdits congés portés sur le calendrier affiché dans le bureau de la directrice ; que ces pièces par leur précision et leur concordance ne sauraient être sérieusement combattues par la seule production aux débats par la S.A.R.L. GEMO de l'attestation contraire établie dans le cadre de la présente procédure par Sylvie Y..., directement impliquée dans le conflit opposant Juanita X... à son employeur. Qu'il s'ensuit que le départ en congé de la salariée à la date du 6 avril 2002 qui doit, par conséquent, être considérée comme initialement fixée, nonobstant l'absence d'autorisation écrite de l'employeur, ne constitue pas une faute susceptible de justifier une mesure de licenciement dès lors que la S.A.R.L. GEMO a, en violation des dispositions de l'article L.223-7 du Code du travail, modifié la date de départ moins d'un mois avant celle initialement prévue, sans justifier de circonstances exceptionnelles, que la salariée qui était en poste dans l'entreprise depuis janvier 1997 n'avait fait l'objet jusqu'alors d'aucun avertissement ni d'aucune mesure disciplinaire et qu'il n'est justifié d'aucune incidence négative sur la bonne marche de l'entreprise, le chiffre d'affaires afférent au 6 avril 2002 représentant selon l'employeur qui n'évoque aucune baisse significative par rapport aux autres samedis, plus de 32 % du chiffre d'affaires de la semaine enregistré par le magasin d'Auch.

Attendu que le licenciement de Juanita X... a, donc, été jugé à bon droit comme ne procédant pas d'une cause réelle et sérieuse.

Attendu que l'absence de cause réelle et sérieuse ouvre droit au

bénéfice de la salariée à une indemnité.

Que suite à ce licenciement, Juanita X... a subi incontestablement un préjudice qui, au regard des circonstances de l'espèce et notamment de son âge, de son ancienneté dans l'entreprise et de la longue période de chômage qui a suivi la rupture du contrat de travail, l'intéressé se trouvant toujours au chômage au mois de mars 2005, doit être réparé par l'allocation d'une somme de 9.646 ç. Attendu que Juanita X... dont la durée de travail contractuellement fixée à 30 heures n'a pas été réduite lors de la réduction de la durée légale du travail de 39 à 35 heures ne peut bénéficier du complément de salaire R.T.T. qu'elle réclame.

Attendu, enfin, que Juanita X... qui ne justifie pas de la pratique courante d'une langue étrangère et qui exerçait les fonctions d'employée de rayon ne peut bénéficier de la majoration salariale telle que prévue par l'article 42 de la convention collective des employés des entreprises à succursales du commerce de détail de la chaussure.

Attendu, par conséquent, qu'il convient de réformer la décision déférée seulement sur le montant de l'indemnité due au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur l'allocation, à Juanita X..., d'un complément de salaire R.T.T. ; que cette décision sera, par contre, confirmée en toutes ses autres dispositions.

Attendu que les dépens de l'appel seront mis à la charge de la S.A.R.L. GEMO SERVICES qui succombe pour l'essentiel, laquelle devra également verser au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel la somme de 1.500 ç à Juanita X... PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Reçoit l'appel jugé régulier en la forme,

Au fond,

Réforme la décision déférée seulement sur le montant de l'indemnité due au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur l'allocation, à Juanita X..., d'un complément de salaire R.T.T., Et statuant à nouveau,

Condamne la S.A.R.L. GEMO SERVICES à payer à Juanita X... la somme de 9.646 ç à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,s cause réelle et sérieuse,

Déboute Juanita X... de sa demande de complément de salaire R.T.T.,

Confirme la décision déférée en toutes ses autres dispositions,

Et y ajoutant,

Condamne la S.A.R.L. GEMO SERVICES à payer à Juanita X... la somme de 1.500 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Rejette comme inutile ou mal fondée toutes demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne la S.A.R.L. GEMO SERVICES aux dépens de l'appel.

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé.

LA GREFFIÈRE :

LA PRÉSIDENTE :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946230
Date de la décision : 28/06/2005
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses

Le départ en congé de la salariée à la date prévue d'avril qui doit, par conséquent, être considérée comme initialement fixée, nonobstant l'absence d'autorisation écrite de l'employeur, ne constitue pas une faute sus- ceptible de justifier une mesure de licenciement dès lors que la société appe- lante employeur a, en violation des dispositions de l'article L.223-7 du Code du Travail, modifié la date de départ moins d'un mois avant celle initialement pré- vue, sans justifier de circonstances exceptionnelles. Et ce, d'autant que la sa- lariée, ayant plus de six ans d'ancienneté dans l'entreprise, n'avait fait l'objet jusqu'alors d'aucun avertissement ni d'aucune mesure disciplinaire et qu'il n'est justifié d'aucune incidence négative sur la bonne marche de l'entreprise, le chiffre d'affaires correspondant au jour de congé litigieux n'affichant aucune baisse significative par rapport aux autres samedis de la même période. Le licenciement de l'intimée a, donc, été jugé à bon droit comme ne procédant pas d'une cause réelle et sérieuse et ouvre ainsi droit à une indemnité


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2005-06-28;juritext000006946230 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award