DU 01 Juin 2005 -----------------------
DN/MV L'ASSOCIATION SYNDICALE DU LOTISSEMENT LES DOMAINES C/ Henri X... RG N : 03/01435 - A R R E T No - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique et solennelle du premier juin deux mille cinq, par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : L'ASSOCIATION SYNDICALE DU LOTISSEMENT LES DOMAINES prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Dont le siège social est 103 boulevard de l'Atlantique 33115 PYLA SUR MER représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués assistés de la SCPA R.MAXWELL - F. MAXWELL, avocats DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION ordonné par l'arrêt rendu le 28 mai 2003, cassant et annulant un arrêt de la Cour d'Appel de Bordeaux en date du 27 novembre 2001 sur appel d'un jugement rendu du Tribunal d'Instance d'Arcachon en date du 10 septembre 1999 D'une part, ET : Monsieur Henri X... né le 13 Mars 1929 à BARSAC (33) Demeurant Foren de l'Eden 33115 PYLA SUR MER représenté par la SCP TESTON - LLAMAS, avoués assisté de Me Jean Pierre PUYBARAUD, avocat DEFENDEUR D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique et solennelle tenue en robes rouges, le 11 Mai 2005, devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Bernard BOUTIE et Jean-Louis BRIGNOL Présidents de Chambre, Dominique NOLET, Conseiller et Christophe STRAUDO, Vice Président placé désigné par ordonnance du Premier Président en date du 16 juin 2004 Conseillers, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
Henri X... a fait l'acquisition d'une parcelle située en zone forestière à PYLA SUR MER en 1965.
Le 29 juin 1994 la SNC LES HAUTS D'ARGUIN a acquis une parcelle de terrain sur laquelle elle a créé un lotissement privé.
En juin 1999 l'ASSOCIATION SYNDICALE a achevé de clôturer son domaine en posant une barrière automatique côté Est à l'issue d'un passage qu'utilisait Henri X..., des buses en ciment.
En juillet 1999 Henri X... saisissait alors le Tribunal d'Instance d'Arcachon afin qu'il soit enjoint à l'ASSOCIATION SYNDICALE d'enlever les obstacles matériels dont s'agit et rétablir l'accès aux voies publiques du lotissement.
Le Tribunal d'Instance d'Arcachon par jugement du 10 septembre 1999 a fait droit à sa demande.
La Cour d'Appel de Bordeaux a infirmé cette décision par arrêt du 27 novembre 2001.
La Cour de Cassation par arrêt du 28 mai 2003 a cassé et annulé dans toutes ses dispositions ledit arrêt au motif "qu'en déduisant l'absence de caractère rural du chemin de la seule reconnaissance de l'état d'enclave du fonds d'Henri X..., sans rechercher, comme il le lui était demandé si le chemin était affecté à l'usage du public, la Cour d'Appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
La Cour d'Appel d'Agen désignée cour de renvoi a régulièrement été saisie à la requête de l'ASSOCIATION SYNDICALE le 8 septembre 2003.
L'ASSOCIATION SYNDICALE conclut à la révocation de clôture et à
l'admission du rapport de Patrice de BOURAYNE en date du 1er avril 2005. Au fond, elle conclut à la réformation de la première décision. Subsidiairement elle demande à la Cour de dire qu'en toute hypothèse le dit chemin rural aurait disparu l'ASSOCIATION en ayant acquis la propriété par usucapion. Elle conclut à la condamnation d Henri X... à lui payer la somme de 5.000 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Son adversaire s'oppose à la révocation de l'ordonnance de clôture et demande en application de l'article 24 du Nouveau Code de Procédure Civile que soit ordonnée la suppression de paragraphes estimés injurieux dans les conclusions. Au fond il sollicite la confirmation du jugement entrepris. Il réclame encore la somme de 10.000 ç à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 3.000 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Vu les dernières conclusions de l'ASSOCIATION SYNDICALE en date du 11 mai 2005 sur l'incident et du 21 septembre 2004 ;
Vu les dernières conclusions d'Henri X... en date du 11 mai 2005 sur l'incident et du 21 janvier 2005 ; SUR QUOI SUR LE RABAT DE L'ORDONNANCE DE CLÈTURE
Il résulte des pièces versées au dossier que l'ordonnance de clôture a été prononcée le 22 mars 2005, l'affaire étant contradictoirement fixée pour plaidoirie au 11 mai 2005.
L'ASSOCIATION SYNDICALE par conclusions déposées le 15 avril 2005 a demandé la révocation de l'ordonnance de clôture pour pouvoir verser un rapport technique en date du 1er avril 2005.
Aux termes de l'article 784 du Nouveau Code de Procédure Civile l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.
En l'espèce l'instance a débuté devant le Tribunal d'Instance
d'Arcachon en 1999, depuis plus de cinq ans les parties échangent des pièces et Henri X... a lui-même fournit un rapport technique régulièrement communiqué à ses adversaires le 9 novembre 2004. Il n'est fait la démonstration d'aucune cause grave ayant interdit à l'ASSOCIATION de produire avant l'ordonnance de clôture le rapport litigieux dont la Cour ignore d'ailleurs à quelle date il a été commandé à l'expert. L'ASSOCIATION note qu'elle n'a pas été le maître de la date de rédaction de ce rapport. La Cour relève quant à elle que le problème soulevé par ce chemin rural existe depuis des années et a notamment été souligné par la Cour de Cassation depuis le mois de mai 2003.
Il n'y a donc pas lieu, aucune cause grave ne s'étant révélée depuis l'ordonnance de clôture, de la révoquer. SUR LA SUPPRESSION DES PARAGRAPHES LITIGIEUX
L'ASSOCIATION ne répond pas sur ce point.
La Cour relève que l'ASSOCIATION a usé de son droit de se défendre comme elle l'entendait, et même si Henri X..., Maître PUYBARAUD et Jean BAURE estiment qu'il a été porté des allégations de nature à porter atteinte à la considération qui leur était dûe la Cour ne relève pas des manquements graves permettant de déclarer ces allégations calomnieuses. Il ne sera pas fait droit à ce chef de demande. AU FOND
Aux termes des articles 2283 du code civil et 1264 du Nouveau Code de Procédure Civile les actions possessoires sont ouvertes à ceux qui possèdent ou détiennent paisiblement. Henri X... revendique une servitude de passage sur un chemin rural. L'action en réintégrande est ouverte à une personne privée dépossédée à la suite d'une voie de fait.
Les propriétaires riverains d'un chemin public peuvent exercer une action possessoire dans leur intérêt privé en cas de trouble apporté
dans leur usage par des particuliers. Henri X... doit donc faire la démonstration qu'il utilisait publiquement et paisiblement un chemin rural et d'autre part qu'il en a été violemment dépossédé.
L'EXISTENCE D'UN CHEMIN AFFECTE A L'USAGE DU PUBLIC
Il convient tout d'abord d'indiquer qu'il n'appartient pas à la Cour de se prononcer sur le fond du droit mais de savoir si Henri X... avait l'habitude d'utiliser un chemin dont il a été dépossédé par la pose de barrière électrique et de buses.
Il est produit plusieurs témoignages dont il résulte que depuis plus d'une année Henri X... et ses amis ont toujours utilisé pour se rendre à sa villa le chemin forestier situé entre super Pyla et la chapelle Forestière. Monsieur Y... atteste que depuis 1983 il accède à la villa de Monsieur X... par ce chemin. Le docteur Z... atteste utiliser depuis des années ce chemin. Madame A... déclare que plusieurs fois par an elle utilise ce chemin.
Jean BAURE, géomètre expert demeurant à Arcachon précise que "dès son enfance il a toujours connu le chemin qui, à flanc de dune partait du pied de la propriété X... actuelle, pour rejoindre les propriétés Bordes où ont été aménagés les lotissements Super Pyla 1 et 2, Haut Pilat et maintenant le Domaine. Par la suite depuis que je me suis établi en 1962 j'ai toujours connu ce chemin qui permettait aux Testerins d'aller faire pacager leurs bestiaux dans le bas de Pilat." Ce chemin est d'ailleurs répertorié depuis une délibération du conseil municipal de la Teste en date du 20 juin 1846 au numéro 14 sous le nom de chemin du Pilat situant son point de départ au chemin de Braouet et débouchant sur le rivage de la mer.
La municipalité de La Teste de Buch a toujours reconnu qu'il
s'agissait d'un chemin affecté à l'usage du public et l'a d'ailleurs écrit à deux reprises à Henri X...
Le 16 septembre 1992 " concernant le chemin d'accès situé à l'Ouest de votre propriété et aboutissant entre la Chapelle Forestière et Super Pyla, je veillerai personnellement, au cas où de nouvelles constructions verraient le jour, à ce que cet itinéraire soit conservé". Ceci fut d'ailleurs matériellement concrétisé par les services municipaux qui décollèrent trois bordures de trottoir et firent un apport de grave minière afin de faciliter l'accès à Henri X... entre les lots 57 et 58.
Un rapport de la police municipale de Pyla relate que le travail effectué en janvier 1999 par le Centre Technique a totalement disparu du fait des travaux effectués dans le Lotissement. Le maire de la Teste écrivait le 30 janvier 2001 à Henri X... " que la ville de La Teste n'envisage pas d'aliéner ce chemin no 14".
Monsieur B... dans son ouvrage "La Teste de Buch racontée par ses rues et lieux dits" relève que "cet itinéraire forestier apparaît sur divers plans topographiques, sur les cartes établies par l'IGN, ainsi que par la Société Scientifique d'Arcachon, lesquels plans portent témoignage de l'existence de ce chemin rural sur les deux derniers siècles écoulés". Monsieur B..., dans une attestation très circonstanciée du 24 janvier 2004 précise clairement d'ailleurs la situation de ce chemin.
Enfin sur le fait que ce chemin no 14 est bien le chemin utilisé par Henri X... il convient de se rapporter à l'attestation de
Monsieur C... qui atteste " que le chemin rural no14 figurant sur l'état général des chemins ruraux de la commune approuvé par délibération du conseil municipal du 20 juin 1846 ... passe bien au Sud de la propriété X..., gravit la dune de Pissens par un terrassement existant et ancien pour aboutir sur le boulevard de l'Atlantique dans le lotissement le Domaine" et au mémoire de Jean BAURE, géomètre-expert en date du 15 décembre 2003.
Il est versé aux débats par Henri X... de nombreux documents faisant état de l'existence de ce chemin depuis plus d'un siècle. Le seul fait que l'Association produise certaines cartes n'en faisant pas état ne permet pas de contredire sa démonstration Monsieur B... précisant d'ailleurs sur le plan Rebsamen produit qu'il existe bien un "renforcement en trait noir" cachant un chemin allant du Braouet au sommet de la dune de Pissens. De nombreuses autres cartes notamment la carte IGN de 1935 mise à jour en 1957 et la carte de la DFCI en prouvent l'existence. Toutefois, il n'appartient pas à la Cour en l'espèce de statuer sur le fond du droit mais de s'en tenir à la stricte demande de protection possessoire d'Henri X... qui fait la preuve de l'existence d'un chemin rural, que lui même et d'autres utilisent de façon publique et paisible depuis plus d'un an, par les documents et témoignages versés plus haut.
Subsidiairement l'Association demande à la Cour de dire que si ce chemin existe elle en fait l'acquisition par usucapion. Une fois encore cet argument ne peut prospérer dans une instance possessoire,
de l'appel ni l'existence d'un préjudice supérieur à celui inhérent à l'exercice de toute action en justice, ils ne seront donc pas accordés. PAR CES MOTIFS des photographies versées au débat et du procès verbal de constat établi par huissier le 18 août 1999 que Henri X... a été brutalement dépossédé par l'Association de l'usage de ce chemin forestier en juin 1999, celle-ci ayant creusé une énorme excavation interdisant l'accès à tout véhicule, posé trois buses en béton au milieu du chemin et ayant par ailleurs fait implanter une barrière électrique en travers de la route. L'Association ne conteste d'ailleurs pas ces faits mais elle revendique le droit de se clore.
Enfin, le fait qu'une précédente procédure ayant un autre objet, relativement à un autre projet, ait reconnu l'état d'enclave ou non du fond d'Henri X... est sans intérêt sur la solution du présent litige.
Dès lors Henri X... ayant fait la preuve qu'il utilisait paisiblement et publiquement depuis au moins un an un chemin rural affecté à l'usage du public et qu'il a été dépossédé de l'usage de ce chemin à la suite d'une voie de fait c'est à juste titre que le premier juge a enjoint l'Association d'enlever tous les obstacles matériels placés sur le chemin forestier permettant à Henri X... de rejoindre le Boulevard de l'Océan à Pyla sur Mer à travers la forêt et de lui confier une télécommande lui permettant d'actionner la barrière placée en travers de la route. Cette décision sera confirmée.
Sur les dommages-intérêts, il n'est pas démontré une faute dans l'exercice de la voie de l'appel ni l'existence d'un préjudice supérieur à celui inhérent à l'exercice de toute action en justice, ils ne seront donc pas accordés. PAR CES MOTIFSPAR CES MOTIFS LA
COUR,
Statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 28 mai 2003,
Dit n'y avoir lieu à rabat de l'ordonnance de clôture,
Rejette la demande sur le fondement de l'article 24 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Au fond, confirme le jugement rendu le 10 septembre 1999 par le Tribunal d'Instance d'Arcachon,
Y ajoutant,
Rejette la demande de dommages-intérêts
Condamne l'ASSOCIATION SYNDICALE DU LOTISSEMENT LE DOMAINE aux dépens et autorise les avoués à les recouvrer conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamne L'ASSOCIATION SYNDICALE DU LOTISSEMENT LE DOMAINE à payer à Henri X... la somme de 3.000 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente et par Dominique SALEY, Greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier
La Présidente
Dominique SALEY
Nicole ROGER