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11/05/2004 | FRANCE | N°03/125

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 11 mai 2004, 03/125


ARRET DU 11 MAI 2004 CA/SB ----------------------- 03/00125 ----------------------- Philippe X... C/ S.A.R.L. FDC. ----------------------- ARRÊT n° COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du onze Mai deux mille quatre par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Philippe X... Rep/assistant : Me LAFAYE loco Me Doriane DUPUY (avocat au barreau de BORDEAUX) APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 19 Décembre 2002 d'une part, ET : S.A.R.L. FDC. PENAUD 47200 VIRAZEIL Rep/assi

stant :

la SCP SOFIRAL (avocats au barreau d'AGEN) I...

ARRET DU 11 MAI 2004 CA/SB ----------------------- 03/00125 ----------------------- Philippe X... C/ S.A.R.L. FDC. ----------------------- ARRÊT n° COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du onze Mai deux mille quatre par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Philippe X... Rep/assistant : Me LAFAYE loco Me Doriane DUPUY (avocat au barreau de BORDEAUX) APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 19 Décembre 2002 d'une part, ET : S.A.R.L. FDC. PENAUD 47200 VIRAZEIL Rep/assistant :

la SCP SOFIRAL (avocats au barreau d'AGEN) INTIMÉE

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 30 Mars 2004 devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Benoît MORNET, Conseiller, Chantal AUBER, Conseillère, assistés de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE

Philippe X..., a été embauché le 3 avril 1978, en qualité de tôlier, par M. Y... exploitant une entreprise de carrosserie automobile. Au mois de janvier 1985, Philippe X... avait la qualification de tôlier niveau 3 coefficient 240.

Le 1er septembre 1996, M. Z... constitué avec M. A.... une société dénommée la S.A.R.L. FDC..

Le contrat de travail de Philippe X... s'est poursuivi et le 21 mars 1997, un contrat écrit a été établi prenant effet au 1er septembre précédent. La qualification du salarié alors indiquée était niveau 2 coefficient 170.

Au mois d'août 2001, le contrôleur du travail a interrogé la S.A.R.L. FDC. sur la situation de certains salariés, parmi lesquels figurait Philippe X..., quant à la reprise de leur contrat de travail lors du rachat de l'entreprise en 1996.

Le même mois, l'employeur a fait porter sur le bulletin de salaire de Philippe X... la qualification suivante :

niveau III échelon1 et le coefficient 215.

Par lettre du 17 décembre 2001, Philippe X... et un représentant de son syndicat ont attiré l'attention de l'employeur sur différentes

irrégularités concernant le contrat de travail et la rémunération.

Le 10 janvier 2002, le contrôleur du travail s'est adressé de nouveau à la S.A.R.L. FDC. en vue de la rectification de la classification du salarié.

Par lettre recommandée du 1er février 2002, Philippe X... a notifié à la S.A.R.L. F.la rupture du contrat de travail en précisant notamment : "je me vois contraint en raison de votre attitude fautive, de cesser le travail et de saisir le conseil de prud'hommes pour qu'il qualifie cette rupture en un licenciement abusif et qu'il se prononce sur mes demandes concernant les sanctions pécuniaires, les congés payés et la déclassification etc..."

Par lettre du 5 février 2002, la S.A.R.L. FDC. a adressé à Philippe X... un bulletin de salaire rectificatif et un chèque de rappel de salaire de 1.410,87 euros.

Le 9 février 2002, Philippe X... a répondu à l'employeur que le courrier du 1er février 2002 signifiait la rupture du contrat de travail qui les liait en raison de son attitude fautive.

Le 12 février 2002, Philippe X... a saisi le conseil de prud'hommes de MARMANDE pour faire prononcer la rupture du contrat de travail en raison de l'attitude fautive de l'employeur.

Par lettre recommandée du 28 février 2002, la S.A.R.L. FDC. a informé Philippe X... que, constatant son absence depuis le 26 février 2002, elle envisageait son licenciement et l'a convoqué à un entretien préalable le 8 mars 2002. Philippe X... ne s'est pas présenté à cet entretien et l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave pour absence injustifiée depuis le 26 février 2002.

Par jugement du 19 décembre 2002, le conseil de prud'hommes de MARMANDE a :

- jugé que le licenciement de Philippe X... repose sur une faute grave,

- condamné la S.A.R.L. FDC. à payer à Philippe X... les sommes de:

[* 445,15 euros au titre du remboursement des sanctions pécuniaires,

*]1.630,21 euros au titre des congés payés pour la période de référence,

- débouté M. X... de ses autres demandes,

- débouté la S.A.R.L. FDC. de sa demande reconventionnelle,

- partagé les dépens.

Le 6 janvier 2003, Philippe X... a relevé appel de cette décision. PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Philippe X... conclut à la réformation du jugement entrepris et fait valoir que l'employeur a manqué à ses obligations, concernant le paiement des salaires en application du coefficient 240, de la prime de formation-qualification, des jours supplémentaires de congés payés pour fractionnement du congé et l'application de sanctions pécuniaires.

Il soutient par ailleurs que la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur qui a manqué à ses obligations, qu'il était fondé à en prendre acte par lettre recommandée du 1er février 2002 et que cette rupture s'analyse en une mesure de licenciement irrégulière en la forme et abusive au fond.

Il demande donc à la cour de :

1°) condamner la S.A.R.L. FDC. à lui verser les sommes de :

- 1.428,28 à titre de rappel sur prime de formation qualification,

- 142,83 au titre de congés payés au prorata,

- 112,83 au titre des congés supplémentaires de fractionnement,

- 750,05 au titre du remboursement des sanctions pécuniaires,

2°) juger que la rupture du contrat de travail intervenue le 1er février 2002 est imputable à l'employeur et s'analyse en une mesure de licenciement irrégulière en la forme et abusive au fond, et en conséquence, condamner la S.A.R.L. FDC. à lui payer les sommes de :

- 1.410,91 à titre de dommages et intérêts au titre d'un licenciement irrégulier en application de l'article L.122-14-4 du code du travail, - 17.000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif sur le fondement de l'article L.122-14-5 du code du travail,

- 2.821,82 à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 282,18 à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,

- 8.042,26 à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Il sollicite enfin la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il lui a alloué la somme de 1.630,21 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés et demande la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. * * *

La S.A.R.L. FDC. fait valoir que son attitude fautive n'est pas caractérisée, qu'elle a régulièrement répondu aux demandes du contrôleur du travail et a rempli ses obligations, qu'il ne peut pas lui être reproché de ne pas les avoir exécutées puisqu'elle n'avait pas connaissance des anomalies, que Philippe X... n'a pas voulu lui laisser le temps de procéder aux régularisations et qu'il a pris acte de la rupture sans motif.

En ce qui concerne la prétendue déclassification, elle soutient que Philippe X... n'est pas le seul à avoir subi des erreurs au fil des années, que la première omission du coefficient est liée au changement de présentation du bulletin de salaire mais n'a eu aucune incidence sur la rémunération et que lors de la modification intervenue le 1er septembre 1996, le gérant a fait une confusion en procédant comme s'il s'agissait d'une embauche, tout en respectant dans son principe l'article L.122-12 du Code du travail.

Elle précise que lorsque le contrôleur du travail lui a fait part d'un problème, elle a aussitôt régularisé, mais en reprenant un bulletin de 1996 et en ignorant l'existence d'un bulletin antérieur

portant un coefficient différent de celui qu'elle a retenu en août 2001. Elle ajoute que ce n'est que le 10 janvier 2002 qu'elle a compris que la régularisation était inexacte puisqu'un bulletin du 1er janvier 1985 portait la mention niveau III coefficient 240 et que dès cette date, elle a fait le nécessaire pour les salariés concernés et en a averti le contrôleur du travail.

Elle souligne ainsi que dès le 4 février 2002, Philippe X... avait un bulletin de salaire portant rectification du coefficient et règlement du rappel de salaire y afférent, mais que la volonté du salarié était de quitter l'entreprise en prenant prétexte d'une déclassification pour lui rendre la rupture imputable.

Par ailleurs, s'agissant de la prime de formation, elle fait valoir que cette prime est subordonnée à l'accomplissement de stages.

Elle indique avoir réglé les jours de congés de fractionnement et que les deux jours supplémentaires revendiqués ne peuvent être versés pour ne pas porter sur des droits acquis mais éventuels.

Elle conteste avoir effectué des retenues sur salaire ou avoir demandé au salarié de lui verser une somme d'argent à titre de sanctions pécuniaires.

Elle conclut donc à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté Philippe X... de ses demandes et à sa réformation pour la condamnation au paiement de 445,15 au titre du remboursement des sanctions pécuniaires. Elle demande acte de la régularisation effectuée au titre des jours de fractionnement (564,13 bruts), du rappel de salaire au titre du coefficient 240 niveau III (1.123,33 bruts) et de la prime de formation-qualification (175,66 ) sur le mois de janvier 2002 et encaissés par Philippe X... Elle demande enfin la condamnation de ce dernier au paiement de la somme de 1.000 au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les obligations de l'employeur 1) sur les salaires correspondant au coefficient 240 :

Attendu qu'il n'est pas contesté que Philippe X... a une qualification de niveau III coefficient 240 ;

Attendu qu'à partir de 1996, la S.A.R.L. FDC. ne lui a pas appliqué ce coefficient ; que cependant l'employeur a régularisé la situation le 5 février 2002 en adressant à Philippe X... un bulletin de salaire rectificatif et un rappel de salaire de 1.123,33 bruts ; 2) sur le paiement de la prime de formation-qualification :

Attendu que les premiers juges ont rejeté la demande présentée à ce titre en retenant que la prime formation qualification ne peut être octroyée que si le salarié a effectué des formations, ce qui n'était pas le cas de Philippe X... ;

Attendu que par avenant du 2/05/1988 à la convention collective nationale des services de l'automobile, une prime de formation-qualification a été instituée à compter du 1/07/1988 au bénéfice des salariés ayant suivi des stages de formation professionnelle et ce, dans les conditions prévues à l'article 2.05 de la convention collective ;

Attendu que ce texte précise que la prime de formation-qualification peut être constituée par la valeur de la prime d'ancienneté acquise par le salarié au 30/06/1992 s'il en bénéficiait à cette date ; qu'il ajoute que la valeur de la prime d'ancienneté au 30/06/1992, ainsi que les points de formation-qualification sont définitivement acquis ;

Attendu que les modalités de transfert de la prime d'ancienneté dans la prime de formation-qualification ont prévu que le montant de la prime d'ancienneté acquise au 30/06/1992 est traduit en points de formation-qualification, en le divisant par la valeur du point de formation-qualification en vigueur au 1/07/1992 ;

Attendu que la S.A.R.L. FDC. indique avoir procédé ainsi à cette époque;

Mais attendu que Philippe X... lui reproche de lui avoir payé, à compter d'octobre 1995, la prime d'ancienneté sous l'appellation de prime formation-qualification, en maintenant le même montant depuis 1995, soit 1.152,23 Y..., alors que, selon lui, la prime aurait dû augmenter selon les variations de la valeur du point ;

Attendu que l'employeur soutient au contraire que le calcul de Philippe X... est erroné car une telle prime est subordonnée à l'accomplissement de stages ;

Attendu que cet argument est contradictoire puisqu'il est constant que Philippe X... n'a pas effectué de stage et qu'il résulte cependant de ses bulletins de salaire que l'employeur lui a payé la prime formation-qualification après le transfert de la prime d'ancienneté ; qu'en outre, les points de formation-qualification sont définitivement acquis ;

Attendu que le montant de cette prime, traduit en points de formation-qualification, aurait dû varier en fonction de l'évolution de la valeur du point ;

Attendu que compte tenu du montant de la prime versée par l'employeur (1.152,23 Y...), le nombre de points attribués au salarié était de 89 et que la valeur du point était de 13 Y... en 1995, de 14 Y... au 1/10/1996, de 14,30 Y... au 1/7/1997 et de 15 Y... au 1/3/1999 ;

Qu'en fonction de ces chiffres, le salarié aurait dû percevoir :

- de février 1997 à juin 1997 :

1.246 Y... par mois

- de juillet 1997 à février 1999 :

1.272 Y... par mois

- de mars 1999 à décembre 2001 :

1.335 Y... par mois

- en janvier 2002 :

203,52 ; qu'il a subi un manque à gagner d'un montant total de 1.428,28 ; que la S.A.R.L. FDC. doit donc être condamnée à lui payer cette somme de 1.428,28 et celle de 142,83 au titre de l'indemnité de congés payés y afférente ; 3) sur les jours de congés payés supplémentaires :

Attendu qu'en application de l'article L.223-8 du code du travail, il est attribué au salarié deux jours ouvrables de congés supplémentaires lorsque le nombre de jours de congés pris en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre est au moins égal à 6 ;

Attendu que la S.A.R.L. FDC. a reconnu devoir à Philippe X..., au titre du fractionnement des congés, la somme de 564,13 qui a été payée avec le bulletin rectificatif du mois de janvier 2002 ;

Attendu que le salarié demande deux jours supplémentaires pour la période 2000/2001 soit 112,83 et que l'employeur estime au contraire qu'ils ne sont pas dus pour ne pas porter sur des droits acquis mais éventuels ;

Or, attendu que selon un décompte établi par le comptable de l'employeur le 28/01/2002, la somme de 3.700,48 Y..., soit 564,13 , est due pour la période de1995/1996 à 1999/2000, que dès lors, la fin des relations de travail étant intervenue en février 2002, Philippe X... a droit à deux jours de congés de fractionnement au titre de la période 2000/2001 ; que la S.A.R.L. FDC. sera donc condamnée au paiement de la somme de 112,83 ; 4) sur les sanctions pécuniaires :

Attendu qu'aux termes de l'article L122-42 du code du travail, les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites ;

Attendu que les documents manuscrits produits montrent que des sanctions pécuniaires ont été appliquées à Philippe X... pour certaines réparations, pour un total de 2.920 Y..., soit 445,15 ; qu'en revanche, il n'est pas démontré que le salarié ait dû payer la somme de 304,90

pour le remplacement du radiateur d'un fourgon, le devis produit à ce sujet ayant été établi pour une somme différente de 64,58 et étant daté du 18 février 2002, époque à laquelle le salarié avait déjà pris acte de la rupture du contrat de travail ;

Attendu que c'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a condamné la S.A.R.L. FDC. à payer à Philippe X... la somme 445,15 en restitution de sommes indûment prélevées au titre de malfaçons et qu'il a écarté la somme de 304,90 ; que la décision entreprise sera donc confirmée sur ce point et que Philippe X... sera débouté pour le surplus de sa demande ;

Sur la rupture des relations de travail

Attendu que les parties sont en désaccord sur l'imputabilité de la rupture du contrat de travail, Philippe X... soutenant que la rupture est imputable à l'employeur pour manquement à ses obligations et la S.A.R.L. FDC. affirmant avoir régularisé les erreurs relevées dès qu'elle en a eu connaissance ;

Attendu qu'il convient de rappeler que Philippe X... a été embauché par M. B..., en qualité de tôlier à compter du mois d'avril 1978, sans contrat écrit ;

Qu'au mois de janvier 1985, son bulletin de paie mentionnait la qualification suivante : niveau 3 coefficient 240 ;

Attendu que le 21 mars 1997, un contrat de travail à durée indéterminée a été signé entre la S.A.R.L. FDC. et Philippe X..., aux termes duquel celui-ci était engagé en qualité de tôlier niveau 2 au coefficient 170 à compter du 1er septembre 1996;

Que les bulletins de salaire du salarié relatifs à la période de 1997 au mois de juillet 2001 mentionnent la qualification niveau II et le coefficient 170 ;

Attendu que par courrier du 27 août 2001, le contrôleur du travail a fait part à la S.A.R.L. FDC. de ses observations, notamment sur la

situation de certains salariés, parmi lesquels Philippe X..., qui ne lui paraissait "pas évidente, eu égard à leur reprise de leur contrat de travail en cours lors du rachat de l'entreprise en 1996 (classification, modification du nombre d'heures de travail, etc...)" ; qu'afin d'éclaircir ce point, le contrôleur du travail a demandé à l'employeur de lui adresser le contrat initial des salariés (du temps de M. Y...), des bulletins de salaire correspondant à cette période, leur nouveau contrat et leurs trois derniers bulletins de salaire ;

Attendu qu'à la suite de ces observations, à compter du mois d'août 2001 jusqu'en décembre 2001, les bulletins de salaire de Philippe X... ont porté la qualification : niveau III échelon1 et le coefficient 215 ;

Attendu que par lettre du 11 décembre 2001, Philippe X... a demandé à la S.A.R.L. FDC. d'assurer un chauffage convenable dans l'atelier ;

Attendu que par lettre du 17 décembre 2001 signée par Philippe X..., le service juridique de la CFDT a fait connaître à la S.A.R.L. FDC. que de nombreuses et graves irrégularités avaient été relevées à l'examen du dossier de Philippe X..., concernant :

- les sanctions pécuniaires sous forme de retenues de primes et d'heures supplémentaires en contrepartie de malfaçons,

- les déclarations d'accidents du travail,

- la déclassification du salarié du niveau III coefficient 240 au niveau II coefficient 170,

- la prime formation-qualification sans aucune actualisation au cours des 7 dernières années,

- les jours de congés payés supplémentaires au titre du fractionnement non accordés ;

Qu'il était demandé à l'employeur de régulariser la situation dans les meilleurs délais ;

Attendu que par courrier du 10 janvier 2002, le contrôleur du travail

a informé la S.A.R.L. FDC. que la classification initiale du salarié devait être portée sur le bulletin de salaire, que le salaire devait être revu et que s'il y avait eu une perte de salaire, une régularisation devrait être opérée dans les meilleurs délais ;

Attendu que le 22 janvier 2002, l'employeur a indiqué au contrôleur du travail qu'il avait remis à son service comptable ses observations concernant la situation des salariés et leur contrat de travail ; que le 24 janvier le contrôleur lui a répondu qu'il restait en attente de la finalité de ces dossiers ;

Attendu que le 1er février 2002, Philippe X... a adressé à la S.A.R.L. FDC. une lettre recommandée reçue le 4 février 2002 dans laquelle il lui précisait :

"Depuis mon courrier du 17 décembre 2001 récapitulant les nombreuses et graves irrégularités au regard de mes droits sociaux, aucune action de régularisation n'a été engagée.

En guise de réponse, vous avez multiplié les menaces et le harcèlement pour que je renonce...

La pression morale est telle qu'un médecin m'a prescrit un arrêt de travail...

Aussi je me vois contraint en raison de votre attitude fautive, de cesser le travail et de saisir le conseil de prud'hommes pour qu'il qualifie cette rupture en un licenciement abusif et qu'il se prononce sur mes demandes concernant les sanctions pécuniaires, les congés payés et la déclassification etc..."

Attendu que par lettre en réponse du 5 février 2002, la S.A.R.L. FDC. a rappelé à Philippe X... qu'elle lui avait expliqué que son cabinet comptable avait été saisi dès qu'elle avait eu connaissance de ce problème et procédait au calcul de rappel de rémunération, qu'il n'y avait jamais eu de rétrogradation, mais qu'il s'agissait d'un report d'erreurs matérielles sur son bulletin et qu'elle profitait de ce

courrier pour lui adresser un bulletin de salaire rectificatif et le chèque de rappel ; qu'étaient joints à cette lettre un bulletin de salaire portant la qualification niveau III échelon 3 et le coefficient 240 et un chèque de 1.410,87 euros ;

Attendu que l'analyse de cette chronologie des faits démontre :

- que de 1997 à 2001, l'employeur n'a pas tenu compte de la qualification antérieure de Philippe X... ;

- que la première régularisation n'est intervenue qu'au mois d'août 2001, après réception d'un courrier du contrôleur du travail ; que de plus, cette régularisation a été incomplète puisque le coefficient 215 a été retenu au lieu de celui de 240 ;

- que l'employeur a laissé sans réponse la lettre du 17 décembre 2001 lui demandant de régulariser la situation ;

- que la rectification du coefficient du salarié et l'envoi d'un bulletin de salaire rectificatif et d'un chèque de rappel de salaire ne sont intervenus que postérieurement à la lettre de l'inspecteur du travail du 10 janvier 2002 et aussitôt après réception de la lettre de Philippe X... informant son employeur de sa décision d'arrêter le travail et de saisir le conseil de prud'hommes ;

Attendu que si la S.A.R.L. FDC. invoque de simples erreurs, il y a lieu de constater que celles-ci se sont prolongées durant plusieurs années et qu'elles n'ont pas été totalement rectifiées après la première intervention des services de l'inspection du travail ; que les explications de l'employeur selon lesquelles il a fallu attendre le 10 janvier 2002 pour comprendre que la régularisation était inexacte au vu d'un bulletin de salaire de 1985 portant le coefficient 240, ne peuvent pas être retenues ; qu'en effet, il appartenait à la S.A.R.L. FDC., de maintenir les contrats de travail en cours en 1996 et d'effectuer toutes les vérifications nécessaires pour reconnaître aux salariés leur véritable qualification ;

Attendu qu'il est ainsi établi que l'employeur a commis un manquement grave et renouvelé à ses obligations ;

Attendu en conséquence que le 1er février 2002, Philippe X... était en droit de prendre acte de la rupture du contrat de travail en raison des faits reprochés à son employeur ;

Attendu que cette rupture aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que la S.A.R.L. FDC. ne pouvait pas, à posteriori, engager une procédure de licenciement pour faute grave du salarié ;

Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail

Attendu que la rupture du contrat de travail est irrégulière dès lors que la procédure de licenciement n'a pas été observée et que la règle relative à l'assistance du salarié par un conseiller, prescrite par l'article L 122-14 alinéa 2, n'a pas été respectée ;

Attendu qu'en vertu des dispositions combinées des articles L.122-14, L.122-14-4 et L.122-14-5 du code du travail, l'inobservation de cette règle donne droit au salarié à une indemnité qui, selon l'article L.122-14-4, ne peut être supérieure à un mois de salaire; qu'à ce titre, il sera alloué à Philippe X... la somme de 1.410,91 ;

Qu'en outre la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié a droit à la réparation de son préjudice ; qu'au jour de la rupture, Philippe X... avait une ancienneté de plus de 23 ans dans l'entreprise, qu'il a cependant occupé un nouvel emploi dès le mois de mars 2002 ; qu'au vu de ces circonstances, la cour dispose d'éléments d'appréciation permettant de fixer à la somme de 12.000 le montant des dommages et intérêts que la S.A.R.L. FDC. devra lui payer ;

Attendu qu'en application de la convention collective nationale des services de l'automobile, l'indemnité de licenciement due à Philippe X... est égale à 2/10 de mois par année d'ancienneté dans l'entreprise

+ 1/10 de mois par année au delà de 15 ans; que la S.A.R.L. FDC. doit lui verser à ce titre la somme de 7.618,90 ;

Attendu que par ailleurs une indemnité de préavis de 2.821,82 est due à Philippe X..., outre les congés payés y afférents, soit 282,18 .

Attendu qu'en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de congés payés, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a alloué au salarié la somme de 1.630,21 ; * * *

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à Philippe X... la charge des frais qu'il a exposés dans cette procédure ; qu'il y a lieu de lui accorder la somme de 1.000 en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; que la S.A.R.L. FDC., qui succombe, ne peut prétendre au bénéfice de ce texte et sera condamnée aux dépens ; PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de MARMANDE du 19 décembre 2002, en ce qu'il a condamné la S.A.R.L. FDC. à payer à Philippe X... la somme 445,15 au titre des sanctions pécuniaires et la somme de 1.630,21 au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne la S.A.R.L. FDC. à payer à Philippe X... : - la somme de 1.428,28 au titre du rappel de prime de formation-qualification, - la somme de 142,83 au titre de l'indemnité de congés payés y afférente, - la somme de 112,83 au titre des congés payés de fractionnement.

Dit que la rupture du contrat de travail intervenue le 1er février 2002 est imputable à la S.A.R.L. FDC. et qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne en conséquence la S.A.R.L. FDC. à payer à Philippe X... : - la somme de 1.410,91 pour licenciement irrégulier, - la somme de 12.000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - la somme de 7.618,90 au titre de l'indemnité de licenciement - la somme de 2.821,82 au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 282,18 correspondant aux congés payés y afférents,

Condamne la S.A.R.L. FDC. à payer à Philippe X... la somme de 1.000 en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires.

Condamne la S.A.R.L. FDC. aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé.

LA GREFFIÈRE :

LA PRÉSIDENTE :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03/125
Date de la décision : 11/05/2004
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Imputabilité - Imputabilité à l'employeur - Inexécution par l'employeur de ses obligations

Les erreurs de l'employeur relatives à la classification du salarié dont dépend sa rémunération qui se sont prolongées durant plusieurs années, même après la première intervention des services de l'Inspection du travail, suffisent à caractériser un manquement grave et renouvelé à ses obligations de la part de l'employeur. En conséquence, le salarié était en droit de prendre acte de la rupture du contrat de travail en raison des faits reprochés à son employeur. Cette rupture aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la société ne pouvant pas, a posteriori, engager une procédure de licenciement pour faute grave du salarié


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2004-05-11;03.125 ?
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