La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/01/2004 | FRANCE | N°02/1428

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 06 janvier 2004, 02/1428


ARRET DU 06 JANVIER 2004 CC/SB ----------------------- 02/01428 ----------------------- S.A. ECOLE DE TERSAC c/ Thierry R.C ----------------------- ARRÊT n° COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du six Janvier deux mille quatre par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S. A. ECOLE DE TERSAC 47180 MEILHAN SUR GARONNE Rep/assistant : la SELARL JURI-LAWYERS CONSULTANTS (avocats au barreau de MARMANDE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 03 Septembre 2002 d'une part

, ET : THIERRY R. Comparant en personne assisté de M...

ARRET DU 06 JANVIER 2004 CC/SB ----------------------- 02/01428 ----------------------- S.A. ECOLE DE TERSAC c/ Thierry R.C ----------------------- ARRÊT n° COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du six Janvier deux mille quatre par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S. A. ECOLE DE TERSAC 47180 MEILHAN SUR GARONNE Rep/assistant : la SELARL JURI-LAWYERS CONSULTANTS (avocats au barreau de MARMANDE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 03 Septembre 2002 d'une part, ET : THIERRY R. Comparant en personne assisté de M. Serge X... (délégué syndical ouvrier) INTIME (2ème APPELANT)

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 25 Novembre 2003 sans opposition des parties devant Nicole ROGER, Présidente de chambre et Francis TCHERKEZ, Conseiller, assistés de Solange BELUS, Greffière. Les magistrats rapporteurs en ont, dans leur délibéré, rendu compte à la Cour composée, outre d'eux-mêmes, de Christian COMBES, Conseiller, en application des dispositions des articles 745-1 et 786 du Nouveau Code de Procédure Civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE

Thierry R. a successivement été embauché par la S.A. ECOLE DE TERSAC en qualité de surveillant-conducteur de bus le 15 septembre 1998 pour une durée déterminée dont le terme était fixé au 30 juin 1999, puis du 1er juillet 1999 au 30 juin 2000, date à laquelle il lui a été délivré un certificat de travail indiquant que le contrat n'avait pas été renouvelé pour raison économique. Saisi à la requête du salarié d'une demande portant sur la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée et le paiement d'heures supplémentaires, le Conseil de Prud'hommes de Marmande, par jugement du 3 septembre 2002, a partiellement fait droit à ses demandes en requalifiant le contrat en un contrat à durée indéterminée et en condamnant la S.A. ECOLE DE TERSAC à lui payer : - 24 432.67 ä au titre des heures supplémentaires avec congés payés afférents du 1er septembre 1998 au 30 juin 2000, - 1 087.36 ä à titre d'indemnité pour requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée, - 1

087.36 ä à titre d'indemnité compensatrice de préavis, - 108.74 ä à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, - 1 087.36 ä à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, - 200 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES La S.A. ECOLE DE TERSAC a relevé appel de cette décision dans des formes et des délais qui n'apparaissent pas critiquables en limitant ce recours aux condamnations prononcées au titre des heures supplémentaires et sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile. S'agissant de la première de ces demandes elle en soulève l'irrecevabilité au motif que son adversaire ne fournit aucun décompte hebdomadaire alors qu'il avait été établi un emploi du temps précis ; Thierry R. était uniquement d'astreinte après 21 heures et ne pouvait être appelé que de manière très exceptionnelle, astreinte pour laquelle il était rémunéré sous la forme d'une indemnité forfaitaire équivalente à 5 h 15 de travail par nuit. Elle fait remarquer qu'antérieurement à la loi du 19 février 2000, en aucun cas rétroactive, il n'existait aucune disposition légale applicable et que ce mécanisme est comparable avec ce qui existe dans d'autres établissements et que le salarié avait accepté ; subsidiairement la demande est inexacte et doit être ramenée selon le détail fourni et le calcul opéré à 14 292.33 ä. Répondant ensuite à l'appel incident formé par l'intimé, elle sollicite le rejet de la demande de requalification tout en concluant subsidiairement à la confirmation du montant alloué à ce titre et à celui correspondant à l'indemnité compensatrice de préavis, mais au rejet faute de la démonstration d'un préjudice de la condamnation prononcée pour non respect de la

procédure de licenciement. * * * Thierry R. souligne qu'il n'existe pas de convention collective applicable reconnue par l'employeur ou étendue en sorte que le temps de travail effectif doit s'identifier au temps de présence ainsi que le précise l'article L 212-4 du Code du travail ainsi que l'a dit le premier juge. Il conclut de même à la confirmation des dispositions ayant conduit à la requalification du contrat de travail mais relève que le premier juge n'a pas tenu compte de l'incidence des heures supplémentaires en sorte que les diverses indemnités versées doivent l'être sur la base d'un salaire mensuel moyen de 2 144.55 ä, ce qui l'amène à solliciter sur son appel incident que lui soient versées les sommes suivantes : - 2 144.55 ä à titre d'indemnité pour requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée, - 2 144.55 ä à titre d'indemnité compensatrice de préavis, - 214.46 ä à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, - 2 144.55 ä à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, Il réclame enfin la réparation du préjudice né de son licenciement abusif par le versement de la somme de 9000 ä à titre de dommages et intérêts et le paiement de celle de 300 ä au titre de ses frais irrépétibles. MOTIFS - Sur la demande en paiement d'heures supplémentaires : Attendu que si la charge de la preuve des heures de travail effectuées ne pèse spécialement sur aucune des parties, il incombe à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié de telle sorte que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux produits par le demandeur, au besoin après l'organisation d'une mesure d'instruction ; Qu'au cas précis la S.A. ECOLE DE TERSAC ne fournit aucun autre élément que les bulletins de paie constatant l'absence de toute heure supplémentaire, et le courrier du 1er septembre 1998 contenant offre d'embauche et définissant les horaires de travail de

la manière suivante : - surveillance du repas de midi : 12h10 / 13h50 -conduite du bus lors des activités de l'après-midi (environ 1h le mardi/mercredi/jeudi) - surveillance de l'étude de 18h à 19h - surveillance du repas de 19h à 19h30 -surveillance de l'étude de 20h à 21h, et les nuits des lundi, mardi, mercredi et jeudi début du service : le lundi à 18h, fin du service : le vendredi à 8h... dont l'employeur relève dans ses conclusions qu'elles représentent 18 heures par semaine, soit 5 heures pour la surveillance des repas de midi et 2 heures pour ceux du soir, 3 heures pour la conduite du bus, 4 heures et 2 heures pour la surveillance de l'étude, en sorte que les quatre nuits étaient payées forfaitairement sur la base de 5 heures 15 de travail chacune ; Alors que Thierry R. revendique pour sa part un horaire hebdomadaire de 71 heures 50 comprenant en sus de ces 18 heures, celles relatives à la surveillance des activités de l'après-midi soit 2 heures 30 à raison de trois fois par semaine, la demi-heure quotidienne séparant la fin de la surveillance du repas du début de l'étude, et les quatre nuits totalisant 44 heures ; Attendu que le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; Que les parties conviennent qu'aucune convention collective n'était applicable à leurs relations, en sorte que les références que fait désormais l'employeur à des situations régies de manière conventionnelle sont dénuées de pertinence ; Qu'il ne s'évince nullement du contrat de travail ou des autres éléments régulièrement échangés l'existence d'un accord portant sur un système d'équivalence ou un mécanisme de détermination d'heures de présence non actives acceptés d'un commun accord ; Et que le temps d'astreinte se définit selon les critères jurisprudentiels repris dans la définition légale qu'en fait désormais l'article L. 212-4 bis du Code

du travail depuis la loi du 19

janvier

2000 comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité, afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ; Attendu en conséquence de ce rappel que le temps passé l'après-midi après que Thierry R. ait conduit les élèves au golf et avant qu'il ne fasse le trajet retour, à raison de trois fois par semaine, est indissociable du temps de travail effectif dés lors qu'étant en charge du véhicule appartenant à son employeur et demeurant ainsi soumis à la disposition et au pouvoir disciplinaire de ce dernier, dans un lieu isolé et distant d'une heure aller et retour de l'école où il possédait une chambre, il n'est pas admissible de considérer que le salarié ait pu retrouver pendant ce temps la liberté l'autorisant à vaquer à ses occupations ; Qu'il en est de même s'agissant ensuite de la demi-heure séparant la fin de la surveillance du repas du début de l'étude du soir qui correspond à une période de migration des élèves d'un lieu à l'autre et dont la brièveté lui interdisait, s'il l'avait souhaité, de quitter librement l'établissement ; Qu'enfin le temps de présence la nuit sur le lieu de travail constitue du travail effectif dés lors que Thierry R. était tenu de ne pas s'absenter et d'assurer la surveillance des pensionnaires, étant logé sur place dans l'une des chambres attribuées au surveillant dont l'huissier mandaté par l'employeur a constaté que si chacune d'elles était matériellement séparée des dortoirs correspondants, elles étaient situées à proximité immédiate de ces derniers et accessibles par un même couloir, sans que l'on puisse tirer de cette description ainsi qu'y prétend l'employeur, qu'il s'agissait là d'un domicile indépendant ; Que le salarié ainsi tenu de demeurer dans l'entreprise pour répondre

à un appel de son employeur en cas de difficulté affectant la santé ou la sécurité d'un pensionnaire sous sa garde, peu important qu'il s'agisse de cas d'urgence, et qui ne peut en conséquence vaquer librement à ses occupations, est en période de travail et non en situation d'une astreinte dont la rémunération correspondante n'aurait d'ailleurs au cas précis été ni conventionnellement fixée ni contractuellement convenue ; Qu'au résultat de ce qui précède et sans qu'apparaisse nécessaire l'organisation d'une mesure d'instruction, il y a lieu de confirmer la décision entreprise qui a admis la réclamation formée sur la base de 71 heures 50 ainsi qu'il découle de ce qui précède, sans que le calcul réalisé subsidiairement par l'employeur puisse être retenu dés lors qu'il est basé en ce cas sur un horaire hebdomadaire de 62 heures et prend en compte la déduction d'un avantage en nature sans que l'y autorise la convention liant les parties ; - Sur la requalification du contrat de travail : Attendu que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et ne peut, hormis les cas prévus par l'article L. 122-2 du Code du travail, être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans l'un des cas de recours limitativement énumérés par la loi, en particulier pour des emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ; Que si l'enseignement figure au nombre de ces secteurs d'activité, seuls les emplois qui correspondent à un enseignement limité à une fraction d'année scolaire, ou à un enseignement non permanent dans l'établissement, peuvent donner lieu

à la conclusion de contrats au titre des usages et non ceux qui ne relevant pas de l'enseignement proprement dit, sont seulement liés à son organisation, tel en l'occurrence l'emploi de conducteur de car scolaire ou de surveillant ; Qu'il s'ensuit en application de l'article L 122-3-12 du Code du travail la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée et l'allocation au profit du salarié d'une indemnité qu'il convient de porter en l'occurrence à la somme de 2 144.55 ä, représentant un mois de salaire évalué en intégrant l'horaire effectivement réalisé en conséquence de ce qui précède ; - Sur la rupture des relations de travail : Attendu que le contrat ne pouvait en conséquence être rompu pour le motif tiré de la survenance du terme en sorte que la rupture imputable à l'employeur produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ce qui justifie l'allocation d'une indemnité qu'il convient de fixer à la somme de 4 000 ä, en réparation du préjudice directement subi par un salarié âgé de 44 ans confronté aux difficultés matérielles liées à une recherche d'emploi ; Qu'il lui est également du l'indemnité de préavis, soit 2 144.55 ä et celle prévue pour non respect de la procédure de licenciement que les éléments soumis à l'appréciation de la Cour autorisent celle-ci à fixer à 2 144.55 ä ; Attendu que les dépens sont à la charge de l'appelant qui succombe qui sera tenu de verser à son adversaire une indemnité de 300 ä en raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel. PAR CES MOTIFS LA COUR Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Déclare les appels tant principal qu'incident recevables en la forme, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a requalifié le contrat en un contrat à durée indéterminée et condamné la S.A. ECOLE DE TERSAC à payer à Thierry R. la somme de 24 432.67 ä au titre des heures supplémentaires avec congés payés afférents du 1er septembre 1998 au 30 juin 2000, L'infirmant pour le surplus et statuant à

nouveau, Condamne la S.A. ECOLE DE TERSAC à payer à Thierry R. les sommes suivantes : - 4 000 ä à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, - 2 144.55 ä à titre d'indemnité pour requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée, - 2 144.55 ä à titre d'indemnité compensatrice de préavis, - 214.46 ä à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, - 2 144.55 ä à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, - 300 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile. Rejette toute autre demande et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties, Condamne la S.A. ECOLE DE TERSAC aux dépens. Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé. LA GREFFIÈRE,

LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02/1428
Date de la décision : 06/01/2004
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Cas de recours autorisés

Le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour effet ni pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et ne peut, hormis les cas prévus par l'article L 122-2 du Code du Travail, être conçu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans l'un des cas de recours limitativement énumérés par la loi, en particulier pour des emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par voie d'accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. Si l'enseignement figure au nombre des secteurs d'activité, seuls les emplois qui correspondent à un enseignement limité à une fraction d'année scolaire ou à un enseignement non permanent dans l'établissement peuvent donner lieu à la conclusion de contrats au titre des usages. Ne sont pas concernés les emplois qui, ne relevant pas de l'enseignement proprement dit, sont seulement liés à son organisation, tel en l'occurrence l'emploi de conducteur de car scolaire ou celui de surveillant. Il s'ensuit, en application de l'article L 122-3-12 du Code du Travail, la requalification du contrat à durée indéterminée et l'allocation d'une indemnité au profit du salarié.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2004-01-06;02.1428 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award