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24/06/2003 | FRANCE | N°02/699

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 24 juin 2003, 02/699


ARRET DU 24 JUIN 2003 NR/NG ----------------------- 02/00699 ----------------------- Héléne H. C/ Association A.F.P.A. ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du vingt quatre Juin deux mille trois par Nicole ROGER, Présidente de chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Héléne H. Rep/assistant : Me Pascal NAKACHE (avocat au barreau de TOULOUSE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AUCH en date du 06 Mai 2002 d'une part, ET : Association A.F.P.A. 13 place du Général de Gaulle 9310

8 MONTREUIL Rep/assistant : Me Olivier D'ARDALHON (avocat...

ARRET DU 24 JUIN 2003 NR/NG ----------------------- 02/00699 ----------------------- Héléne H. C/ Association A.F.P.A. ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du vingt quatre Juin deux mille trois par Nicole ROGER, Présidente de chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Héléne H. Rep/assistant : Me Pascal NAKACHE (avocat au barreau de TOULOUSE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AUCH en date du 06 Mai 2002 d'une part, ET : Association A.F.P.A. 13 place du Général de Gaulle 93108 MONTREUIL Rep/assistant : Me Olivier D'ARDALHON (avocat au barreau de TOULOUSE) INTIMEE :

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 27 Mai 2003 devant Nicole ROGER, Présidente de chambre, Catherine LATRABE, Conseillère, Arthur ROS, Conseiller, assistés de Nicole GALLOIS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * *

FAITS ET PROCÉDURE

Hélène H., née le 02 juillet 1959 a été embauchée le 20 août 1996 par L'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES (AFPA) en qualité d'enseignant vacataire chargé de corriger des copies de français pour l'enseignement à distance ; la lettre d'engagement a précisé que " cette activité s'exerçait principalement à domicile et que le salaire brut était constitué par la somme des rémunérations brutes dues pour chaque copie corrigée."

En outre, cette même lettre a stipulé "que la charge de travail variant en fonction du nombre de bénéficiaires s'inscrivant dans le dispositif EAD, ce qui ne peut être déterminé à l'avance, l'association ne peut s'engager à fournir un minimum de travail. Vous reconnaissez avoir été avertie de cet aléa et acceptez les conséquences de cette variabilité."

La rémunération effective de la salariée a varié de 9 832,75 francs pour décembre 1996 à 27,22 francs en mai 2000.

Le 25 octobre 2000, Hélène H. a été placée en arrêt maladie et a perçu des indemnités journalières à hauteur de 262 francs par jour.

Elle avait 4 ans d'ancienneté au moment de son placement en arrêt maladie.

Le 23 avril 2001, la caisse primaire d'assurance maladie et la mutuelle complémentaire lui ont notifié la cessation du versement des indemnités journalières en raison de la non atteinte du quota de 200 heures trimestrielles d'activité.

Le 27 avril 2001, son conseil a écrit par lettre recommandée avec accusé de réception à l'AFPA pour lui faire remarquer les irrégularités de son contrat de travail et pour l'inviter à lui faire part de sa position au plus vite.

Par courrier du 02 août 2001, l'AFPA a signalé que la lettre du 27 juillet 2001 avait été transmise au service juridique de l'AFPA à MONTREUIL.

Consécutivement à une relance par télécopie en date du 26 septembre 2001, l'AFPA a indiqué que le courrier portant position de l'association était en cours de signature par la direction des ressources humaines.

Le 19 octobre 2001,la salariée a saisi le conseil de prud'hommes d'AUCH d'une demande d'allocation à titre de rappel de salaires, outre 10 % de cette somme au titre des congés payés, et d'une somme sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile.

Par conclusions ultérieures, ses demandes ont été majorées et une demande à titre de dommages et intérêts a été présentée.

Par jugement du 6 mai 2002, le conseil de prud'hommes d'AUCH a :

-dit et jugé qu'Hélène H. a été employée par l'AFPA comme travailleur à domicile,

-débouté en conséquence la salariée de la totalité de ses demandes,

-condamné Hélène H. aux entiers dépens et à payer à l'AFPA, au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile un euro

symbolique.

Le 22 mai 2002, Hélène H. a relevé appel de cette décision. MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Au soutien de son appel, Hélène H. fait valoir que l'article 212-4-3 du Code du Travail exige que le contrat à temps partiel soit écrit et mentionne notamment la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire du travail, sa répartition, les conditions éventuelles de cette répartition.

Elle expose que la lettre d'engagement du 20 août 1996 ne comporte aucune mention légale obligatoire.

Elle explique qu'elle a été placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle pourrait travailler chaque mois, et s'est trouvée dans l'obligation de se tenir à la disposition de son employeur, que selon une jurisprudence constante, dès lors qu'un salarié a été mis dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il pourrait travailler chaque mois et se trouve dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de l'employeur, il doit lui être accordé un rappel de rémunération calculé sur la base d'un contrat de travail à temps complet ; qu'en conséquence, elle est fondée à demander la requalification de son contrat de travail et le bénéfice de l'intégralité des dispositions légales et des stipulations conventionnelles applicables aux salariés de l'AFPA.

Elle expose avoir consacré l'intégralité de son temps à accomplir ses obligations, qu'elle tirait l'intégralité de ses ressources de son travail pour le compte de l'AFPA, et ne pas avoir eu, par ailleurs, d'activités libérales extrêmement développées et lucratives.

Elle explique que le rythme de travail auquel elle a été soumise aurait été acceptable s'il avait été constant ; qu'elle a perçu une rémunération fluctuante mais à peu près correcte pendant quelques mois mais qu'elle a soudain vu sa charge de travail et sa

rémunération brutalement chuter constamment en dessous du seuil minimal nécessaire pour assumer ses obligations les plus élémentaires, à partir du mois d'août 1997 et qu'elle a été maintenue dans une situation d'extrême précarité. Elle soutient que dans le même temps, elle était contrainte de rester à la disposition de l'AFPA, et que souhaitant se voir confier de nouvelles missions pour obtenir une rémunération digne de ce nom, elle a proposé ses services à son employeur.

Elle estime que le conseil de prud'hommes d'AUCH ne pouvait fonder sa décision sur les dispositions de l'article 1134 du Code Civil relatives à la liberté contractuelle, puisque selon elle, les dispositions du droit du travail sont d'ordre public et s'opposeraient donc à l'application de cet article.

Elle estime ne pas avoir reçu la somme qu'elle aurait dû percevoir au titre de rappel de salaires, ni au titre de l'indemnité de congés payés ; elle considère qu'il est nécessaire que l'employeur rectifie ses bulletins de salaires pour tenir compte d'un horaire à temps complet de 169 heures par mois, et qu'il les lui remette.

Elle expose avoir subi un préjudice moral important en étant maintenue dans une situation d'extrême précarité compte tenu de la variabilité de sa rémunération, de son obligation de demeurer à la disposition de son employeur qui ne lui a pas permis de s'embaucher ailleurs pour se procurer des ressources supplémentaires ; elle souligne que cette situation s'est dégradée avec son arrêt maladie, qu'elle a été conduite à solliciter le versement du R.M.I, et que cette situation a constitué une atteinte à sa dignité méritant réparation.

Elle s'estime bien fondée à réclamer des dommages et intérêts et une allocation sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A titre subsidiaire, Hélène H. considère que l'AFPA ne pouvait modifier unilatéralement et sans justification, de façon durable, la quantité de travail fourni et la rémunération qui lui ont été accordées ; elle considère que l'employeur n'apporte pas de justification à cette variation de charge de travail, d'autant que l'AFPA dispose d'une clientèle importante et était en mesure de répartir la charge de travail sur l'ensemble des correcteurs.

Elle ajoute que la différence entre les rémunérations perçues et celles qui lui seraient dues pour un temps complet doit être calculée sur la base d'une moyenne horaire de 12,35 euros et de 65 mois de travail, qu'elle est fondée à réclamer à titre de dommages et intérêts 108 236,96 euros, outre 10 823,69 en réparation du préjudice lié à l'absence de congés payés.

En conséquence, Hélène H. demande à la cour :

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et en tout cas mal fondées,

-de réformer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'AUCH le 6 mai 2002 dans toutes ses dispositions,

A TITRE PRINCIPAL

-vu les dispositions de l'article L 212-4-3 du Code du Travail

-vu les dispositions de l'article L 721-6 du Code du Travail

-vu la convention sur le travail à domicile adoptée le 20 juin 1996 par l'organisation internationale du travail,

-vu la lettre d'engagement du 20 août 1996,

-de requalifier son contrat de travail en contrat de travail à temps complet

-de dire et juger expressément qu'elle devra bénéficier de l'intégralité des dispositions légales et des stipulations conventionnelles applicables aux salariés de l'AFPA, pour l'ensemble de la période courant à compter du mois d'octobre 1996,

en conséquence,

-de condamner L'AFPA à lui payer la somme de 108 079 ,06 euros au titre du rappel des salaires,

-de condamner l'AFPA à lui payer la somme de 10 807,89 euros au titre de l'indemnité de congés payés,

-de condamner l'AFPA à rectifier ses bulletins de salaires sur la base d'un temps complet et à les lui remettre,

-de condamner l'AFPA à lui payer la somme de 15 244,90 euros à titre de dommages et intérêts,

-de condamner l'AFPA à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

A TITRE SUBSIDIAIRE

-de dire et juger qu'en modifiant unilatéralement et sans justification, de façon durable la quantité de travail qui lui a été fournie et la rémunération qui lui a été versée, l'AFPA a manqué à ses obligations contractuelles et commis une faute de nature à engager sa responsabilité,

-de dire et juger en conséquence que l'AFPA est responsable du préjudice par elle subi,

-de condamner en conséquence L'AFPA à lui payer la somme de 108 236,96 euros à titre de dommages et intérêts, outre 10 823,69 euros en réparation du préjudice lié à l'absence de congés payés,

-de dire et juger expressément que l'AFPA devra lui faire bénéficier de l'ensemble des dispositions légales et conventionnelles applicables aux autres salariés,

-de condamner l'AFPA à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance. * * *

L'Association nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes

(AFPA) réplique que l'appelante exerçait une activité professionnelle libérale et indépendante en tant que sociologue, comme elle l'a affirmé dans son curriculum vitae, et qu'elle s'est proposée de réaliser la correction de copies à domicile pour le compte de l'AFPA en qualité de vacataire dans le but d' améliorer ses revenus.

Elle ajoute qu'Hélène H. a signé et accepté la lettre d'engagement en connaissance de cause, que le libellé de cette dernière était clair sur le caractère incertain et variable du travail, et donc de la rémunération ainsi que sur le fait qu'il s'agissait d'un travail à domicile.

Elle fait valoir que le contrat de travail de la salariée était d'abord un contrat soumis, comme tous les contrats à l'application de l'article 1134 du Code Civil auquel sont attachées, en matière de droit du travail, des dispositions d'ordre public ; elle estime que l'argumentation d'Hélène H. à ce sujet manque de pertinence.

Elle souligne qu'il s'agissait d'un travail à domicile, régi par les articles L 721-1 et suivants du Code du Travail et non d'un travail à temps partiel régi par les articles L 212-4-2 et suivants du même code, ce qui exclut toute possibilité de requalification du contrat de travail.

Elle rappelle que selon un arrêt de 1999 de la cour d'appel de GRENOBLE ainsi qu'un arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE du 29 août 2002, le travail à temps partiel ne s'applique pas aux travailleurs à domicile.

Elle considère que la salariée a prétendu agir sous couvert d'un temps partiel alors qu'elle ne le justifie en aucune manière, que le temps qu'elle a pu mettre pour établir ses corrections et effectuer son travail dans le cadre d'un travail à domicile est incontrôlable, rendant de facto, ses demandes incohérentes ; elle ajoute que

l'appelante n'a pas démontré qu'elle se serait trouvée dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de son employeur.

Elle estime que rien ne justifie,( ni la logique, ni les faits, ni l'opportunité et encore moins le droit), que le jugement entrepris soit réformé de quelconque manière et que l'appelante devra être déboutée de ses demandes indemnitaires rocambolesques.

Elle fait valoir que la modification dans la quantité de travail fournie avait été expressément prévue et acceptée par Hélène H. dès l'origine de la relation de travail ; elle considère que les demandes subsidiaires de la salariée sont sans fondement et que sa demande de dommages et intérêts dont le calcul s'avère tout aussi fantaisiste qu'à titre principal n'a pas lieu d'être.

En conséquence, l'Association nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes demande à la cour :

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et en tout cas mal fondées,

-de débouter Hélène H. de l'intégralité de ses demandes à titre principal comme à titre subsidiaire,

-de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

-de condamner l'appelante au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

1°) Sur le statut d'Hélène H. :

Attendu qu'Hélène H. travaille avec l'AFPA dans le cadre d'un contrat de travail à domicile ;

Attendu, sur les règles applicables à cette forme de contrat, qu'en application de l'article L 721-6, les travailleurs à domicile

bénéficient des dispositions législatives et réglementaires applicables aux salariés ;

Qu'ils bénéficient, également, des dispositions conventionnelles liant le donneur d'ouvrage sauf stipulation contraire dans les conventions ... en cause ;

Attendu que, destinée à protéger le salarié, la législation du travail s'analyse comme un minimum auquel il n'est pas possible de déroger ni par convention collective ni par contrat ;

Attendu qu'il apparaît, en conséquence, que la réglementation, sauf exception, et les conventions collectives, sauf exclusion, s'appliquent aux travailleurs à domicile;

Attendu que le droit du travail déroge aux règles générales des contrats et notamment à l'article 1134 du Code civil en application du principe : "speciala generalibus derogant" ; attendu, en conséquence, que l'argument développé par Hélène H. selon lequel le droit du travail est un droit d'ordre public auquel les parties ne sauraient déroger en aucune manière ne constitue pas, comme le prétend l'AFPA, un argument "aussi singulier que vide de sens" ; que cet argument doit être retenu ;

Attendu, encore, que, contrairement à ce qu'affirme l'employeur, l'article L 721-6 pose une présomption légale d'applicabilité des règles du droit du travail et que si certaines de ces dispositions ne sont pas applicables aux travailleurs à domicile, l'exclusion doit résulter d'une dispositions spéciale, législative, réglementaire ou conventionnelle ;

Attendu que les dispositions réglementant le temps partiel ne comportent aucune exclusion des travailleurs à domicile et visent, au contraire, les associations de quelque nature que ce soit dont les travailleurs à domicile ne sont pas exclus ;

Attendu, de même, que la convention collective de l'AFPA n'exclut en rien les travailleurs à domicile, de telle sorte que le contrat de travail ne pouvait en écarter l'application à Hélène H. ;

Qu'il convient de considérer que l'ensemble des règles du droit du travail qui ne sont pas incompatibles et exclues expressément par la loi ou la convention collective s'appliquent à la situation d'Hélène H., y compris les dispositions concernant le travail à temps partiel ;

Mais attendu qu'Hélène H. n'établit pas avoir travaillé à temps complet et ne peut donc solliciter la requalification d'un contrat de travail à temps partiel, dont l'existence n'est pas établie, en temps complet ;

Attendu que les autres dispositions du Code du travail sont applicables aux travailleurs à domicile telle que l'allocation spécifique de chômage partiel prévue par l'article L 351-25 du Code du travail ; que de même, les travailleurs à domicile bénéficient de la rémunération mensuelle minimale prévue par les articles L 141-10 et suivants si leurs contrats de travail comportent un horaire au moins égal à la durée légale hebdomadaire du travail, ce qui est le cas, puisque l'employeur conteste l'existence d'un temps partiel, ce qui a pour conséquence nécessaire l'existence d'un temps plein ;

Mais attendu qu'aucune demande n'est formulée à ce titre ;

Qu'il convient d'examiner la demande d'Hélène H. sur le second fondement qu'elle présente à la cour ;

Attendu que l'emploi d'un travailleur à domicile n'est pas incompatible avec la stipulation contractuelle d'une durée minimale de travail ;

Que l'AFPA, par la clause de variabilité contenue dans le contrat de travail, s'affranchit de toute règle et notamment celle consistant pour l'employeur dans l'obligation de fournir un travail et de le

rémunérer ;

Mais attendu que le volume de travail fourni ne peut résulter de la décision unilatérale et arbitraire de l'employeur en l'absence de toute justification objective ; que les clauses contractuelles par lesquelles l'employeur se réserve le droit d'agir à sa guise sont nulles ; que cette clause doit être déclarée nulle ;

Que le contrat de travail, constitué par la lettre d'engagement du 1er septembre 1996, qui déclare inapplicable à la salariée la convention collective de l'AFPA, qui se réserve le droit de fournir au salarié selon son bon plaisir un volume de travail inférieur au minimum, s'affranchissant ainsi de l'obligation contractuelle de fournir du travail au salarié, constitue une violation aux règles légales et conventionnelles applicables à l'espèce ;

Attendu que l'AFPA, qui fait appel à la sous-traitance et se considère comme le premier organisme de formation en France et en Europe, ne peut alléguer aucun argument justifiant la diminution du volume de travail qu'elle pouvait, à son gré, répartir entre les différents correcteurs ;

Attendu qu'il résulte d'une étude des salaires versés à la salariée depuis le mois d'octobre 1996, que celle-ci est passée d'une moyenne mensuelle de 6. 282 francs à 4. 182 francs en 1997, 3. 650 francs en 1998, 2. 999 francs en 1999 et 2. 670 francs en l'an 2000 ;

Que non seulement son salaire a été inférieur au SMIC à plusieurs reprises mais encore qu'il a pu s'élever à des sommes dérisoires telles que 215, 09 francs, ou même 27, 02 francs en application d'une clause de variabilité dont la nullité vient d'être prononcée ;

Qu'il résulte, en outre, des documents produits et spécialement des documents prévoyant le fonctionnement du dispositif d'enseignement à distance que l'affectation d'un correcteur à un bénéficiaire est effectuée par le responsable de relais à partir d'une liste de

correcteurs habilités à corriger le cours considéré, de telle sorte qu'il appartient à l'employeur et à lui seul de déterminer le nombre de copies à corriger ;

Attendu que même s'il est exact qu'un employeur n'a pas l'obligation, sauf disposition conventionnelle ou contractuelle contraire, de fournir un volume de travail constant au travailleur à domicile, il ne peut, cependant, modifier unilatéralement et sans justification de façon durable la quantité de travail fournie et la rémunération ;

Que la diminution importante de la rémunération d'Hélène H. depuis 1996 n'est justifiée par aucun élément avancé par l'employeur dont la santé économique ne fait pas l'objet de la moindre observation ;

Que cette diminution résulte d'une volonté arbitraire de l'employeur et constitue une faute causant à Hélène H. un grave préjudice ; qu'il résulte, en effet, des documents produits par la salariée que celle-ci n'avait d'autre source de revenus que la correction des copies pour l'AFPA ; qu'elle a demandé, à plusieurs reprises, à cet organisme d'augmenter le volume de travail qui lui était attribué ; qu'il ne semble pas qu'elle ait reçu de réponse positive, puisque son salaire n'a fait que diminuer au cours des années ; qu'il convient de considérer que l'AFPA a méconnu ses obligations contractuelles et légales et a causé à la salariée un grave préjudice dont elle doit réparation ;

Attendu que durant toutes ces années, Hélène H. s'est trouvée dans une situation d'une précarité extrême, le volume de travail fourni et par suite la rémunération qu'elle percevait subissant des variations considérables ; qu'il convient de fixer le montant des dommages et intérêts qui lui sont dus ; que la cour trouve en l'espèce les éléments lui permettant de fixer à 25. 000 euros le montant des dommages et intérêts que l'AFPA devra lui verser en réparation de son préjudice ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge d'Hélène H. ceux des frais non compris dans les dépens dont elle a fait l'avance ; qu'il convient de lui allouer sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile la somme de 2. 000 euros ;

Que L'AFPA devra, en outre, supporter la charge des dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Réforme en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de prud'hommes d'AUCH,

Déclare nulle la clause de variabilité contenue dans le contrat de travail d'Hélène H.,

Dit et juge que l'ensemble des règles du droit du travail et la convention collective de l'AFPA sont applicables à la situation de la salariée,

Dit et juge que l'AFPA a violé ses obligations légales et contractuelles à l'égard d'Hélène H. en lui faisant signer un contrat comportant une clause nulle et en diminuant sans raison le volume du travail qui lui était attribué,

Dit et juge que cette faute a causé un grave préjudice à Hélène H.,

Condamne, en conséquence, l'AFPA à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 25. 000 euros outre celle de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne l'AFPA en tous les dépens de première instance et d'appel,

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de chambre, et par Nicole GALLOIS, Greffière présente lors du prononcé. LA GREFFIERE,

LA PRESIDENTE, N. GALLOIS

N. ROGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02/699
Date de la décision : 24/06/2003
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Travailleur à domicile - Statut

L'appelante travaille avec l'association intimée dans le cadre d'un contrat de travail à domicile. En application de l'article L 721-6 du Code du travail, les tra- vailleurs à domicile bénéficient des dispositions législatives et réglementaires applicables aux salariés ainsi que des dispositions conventionnelles liant le donneur d'ouvrage, sauf stipulation contraire dans les conventions en cause. La législation du travail, destinée à protéger le salarié, s'analyse comme un mi- nimum auquel il n'est pas possible de déroger, ni par convention collective, ni par contrat. En conséquence, il apparaît que la réglementation, sauf exception, et les conventions collectives, sauf exclusion, s'appliquent aux travailleurs à domicile


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2003-06-24;02.699 ?
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