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04/03/2003 | FRANCE | N°JURITEXT000006942409

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 04 mars 2003, JURITEXT000006942409


ARRET DU 04 MARS 2003 CC/NG ----------------------- 02/00284 ----------------------- MattéoI. C/ S.A. SUD OUEST SERVICE CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU GERS SMABTP ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du quatre Mars deux mille trois par Christian COMBES, Conseiller, X... COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Mattéo I. Rep/assistant : M. Guy Y... (Délégué FNATH) APPELANT d'un jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale d'AUCH en date du 14 Janvier 2002 d'une part, ET : S.A. SUD OUEST

SERVICE RN 21 32170 MIELAN Rep/assistant : Me Georges CA...

ARRET DU 04 MARS 2003 CC/NG ----------------------- 02/00284 ----------------------- MattéoI. C/ S.A. SUD OUEST SERVICE CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU GERS SMABTP ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du quatre Mars deux mille trois par Christian COMBES, Conseiller, X... COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Mattéo I. Rep/assistant : M. Guy Y... (Délégué FNATH) APPELANT d'un jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale d'AUCH en date du 14 Janvier 2002 d'une part, ET : S.A. SUD OUEST SERVICE RN 21 32170 MIELAN Rep/assistant : Me Georges CATALA (avocat au barreau de TOULOUSE) CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU GERS 11 rue de Châteaudun 32012 AUCH CEDEX NI PRESENTE, NI REPRESENTEE

- 2 - SMABTP Quartier du Lac Rue Théodore Blanc 33081 BORDEAUX CEDEX Rep/assistant : la SCP PRIM - GENY (avocats au barreau d'AUCH) INTIMES :

d'autre part,

DIRECTION REGIONALE DES AFFAIRES SANITAIRES ET SOCIALES MIDI PYRENEES 77Bis, Allées Jean Jaurès 31050 TOULOUSE CEDEX NI PRESENTE, NI REPRESENTEE

PARTIE INTERVENANTE : A rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 28 Janvier 2003 devant Nicole ROGER, Présidente de chambre, Catherine LATRABE, Conseillère, Christian COMBES, Conseiller, assistés de Nicole GALLOIS, Greffière et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE MattéoI., embauché en qualité de façadier le 23 février 1998 dans le cadre d'un contrat à durée déterminée par la SA SUD- OUEST SERVICE a été victime d'un accident du travail le 9

juillet 1998 sur un chantier à Semezies Cachan. Saisi à sa requête, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Gers, par jugement rendu le 14 janvier 2002 l'a débouté de sa demande tendant à voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur et déclaré l'assureur de ce dernier, la SMABTP irrecevable en son intervention. PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES MattéoI. a relevé appel de ce jugement dans des formes et des délais qui n'apparaissent pas critiquables. Il en poursuit la réformation, et s'empare tout d'abord de l'autorité de chose jugée attachée au jugement rendu le 1er juillet 1999 par le Tribunal Correctionnel d'Auch qui a condamné l'employeur pour ces mêmes faits pour soutenir ensuite qu'en qualité de salarié embauché pour une durée déterminée, il n'a pas bénéficié de la formation à la sécurité renforcée prévue par les articles L 213-3-1 et R 231-36 du Code du travail en sorte que la faute inexcusable est présumée en application des dispositions de l'article L 213-8 du même code. En tout état de cause se trouvent réunis en l'espèce les critères exigés pour que soit retenue la faute inexcusable dés lors que l'employeur, débiteur d'une obligation générale de sécurité, avait nécessairement conscience du danger auquel il l'exposait en l'absence du moindre équipement de sécurité. Il sollicite en conséquence la majoration de rente maximum prévue par la loi et, outre l'organisation d'une mesure d'expertise, la condamnation de la société SUD- OUEST SERVICE à lui verser la somme provisionnelle de 1 524.49 ä ainsi que celle de 457.35 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile, de dire la décision opposable à la CPAM du Gers qui fera l'avance des sommes allouées à charge pour elle d'en faire la récupération auprès de la société condamnée, enfin de le renvoyer devant l'organisme compétent pour la liquidation de ses droits. * * * X... SA SUD-OUEST SERVICE soutient que la faute inexcusable ne s'identifie pas à la

faute pénalement sanctionnée et rappelle que le manquement à l'obligation de sécurité de résultat ne présente ce caractère que si l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Or en l'espèce et alors qu'elle a respecté les règles de sécurité applicables à ce genre de chantier, elle relève que MattéoI., uniquement chargé de l'approvisionnement des éléments nécessaires à l'édification de l'échafaudage, a de sa seule initiative décidé d'y monter sur une partie non encore protégée, hors la vue du chef de chantier, lequel était muni des instructions utiles et en charge de la sécurité. Considérant ce comportement anormal et fautif, elle ne pouvait avoir conscience du danger auquel celui-ci s'exposait ainsi. Poursuivant la confirmation de la décision déférée, sauf à soutenir la recevabilité de l'intervention de son assureur, elle sollicite le débouté des demandes formées par son adversaire et sa condamnation au paiement de la somme de 1 219.59 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile. X... Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Lot et Garonne, non comparante, à fait connaître par écrit sa décision de

s'en remettre à justice. MOTIFS - sur l'intervention de l'assureur Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 31 du Nouveau Code de Procédure civile sur lesquelles la SMABTP fonde son intervention, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé; Or attendu que l'intervention de la SMABTP qui ne tend pas à obtenir une décision intéressant les relations entre l'assureur et les parties mais à appuyer les prétentions de son assuré se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant; qu'en effet, les dispositions de l'article L 452-4 du Code de la Sécurité sociale autorisent l'employeur à s'assurer contre les conséquences financières de sa faute inexcusable ; Que l'assureur, qui y a intérêt, est, dès lors, recevable en son intervention ; - sur l'existence d'une faute inexcusable Attendu qu'il résulte de l'enquête de gendarmerie consécutive à l'accident que le 9 juillet 1998 André L., chef de chantier, était occupé à l'installation des échafaudages nécessaires à la réalisation de travaux sur deux des façades d'un immeuble en compagnie de Frédéric C. et de Mattéo I., lorsque ce dernier a fait une chute d'environ 3 mètres depuis le platelage sur lequel il se trouvait occupé à placer un garde-corps ; Que si André L., confirmé en cela par Frédéric C., déclare qu'il était le seul chargé du montage alors que les deux façadiers se cantonnaient à lui apporter le matériel nécessaire et à le lui faire passer, il tombe sous le sens que cette dernière activité impose au fur et à mesure de l'édification de l'échafaudage de gravir celui-ci de manière à faire parvenir au chef de chantier, à chaque étape qui constituent autant de niveaux, les garde-corps, échelles, plateaux et autres éléments nécessaires au montage ; Et que les photographies

tirées de l'enquête permettent de tenir pour constant que le pignon sur lequel étaient occupés les trois ouvriers comportent ainsi trois niveaux ; que Frédéric C. décrit parfaitement la position de chacun, lui étant au sol, André L. en haut, et MattéoI. sur le premier platelage, avant d'indiquer que c'est en marchant sur ce premier platelage en direction de l'autre façade, là où le garde-corps n'était pas encore installé, que son collègue a chuté ; qu'il confirme ainsi que la partie sur laquelle se trouvait MattéoI. était directement accessible comme située au même niveau depuis l'endroit où il aidait auparavant à la manutention des éléments de construction de l'échafaudage ; et que MattéoI. explique qu'à cet instant il finissait de placer à cet endroit des garde-corps avec des tubes en fer ; Attendu qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation présente le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; Or attendu que nul ne conteste que MattéoI. n'était pas alors équipé d'un système d'arrêt de chute, en contravention avec les dispositions de l'article 138 du décret du 8 janvier 1965 qui imposent le port d'un tel système à l'occasion de la construction, du démontage ou de la modification significative d'un échafaudage et ajoute que l'accès des échafaudages en cours de montage ou de démontage n'est autorisé qu'aux travailleurs chargés de ces opérations ; Qu'au cas précis la société SUD-OUEST SERVICE ne peut soutenir son absence de conscience du danger concouru par MattéoI. au motif que seul André L. devait procéder au montage, alors que spécialisée dans les travaux de ravalement et d'isolation des murs par l'extérieur, elle ne pouvait

ignorer que la construction de l'échafaudage préalable à ces travaux impose la participation des façadiers dans les circonstances qu'ils ont eux-mêmes décrites, exposant nécessairement ceux-ci au danger d'une chute alors que n'a été pris aucun des moyens de préservation imposés par la réglementation et bien connus dans le secteur du bâtiment que sont les systèmes d'arrêt de chute ; Qu'il convient en conséquence de ce qui précède de retenir l'existence d'une faute inexcusable à la charge de l'employeur ; Que l'existence d'une telle faute et celle du lien de causalité correspondant découlent au demeurant de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 1er juillet 1999 par le Tribunal correctionnel d'Auch devenu définitif qui a condamné Alain LT., Président-Directeur général de la SA SUD- OUEST SERVICE, pour avoir à Sémézies Cachan, le 9 juillet 1998, en premier lieu employé des salariés sans prendre les mesures de protection qui s'imposaient, destinées à empêcher les chutes de personnes - en l'espèce défaut de système d'arrêt de chute - et en second lieu pendant le temps de travail, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, causé à MattéoI. une atteinte à l'intégrité de sa personne suivie d'une incapacité de travail n'excédant pas trois mois ; que la décision du juge pénal a en effet autorité de la chose jugée à l'égard de tous pour ce qui concerne l'existence du fait incriminé et la culpabilité de celui auxquels ces faits étaient imputés ; Attendu qu'en considération de la gravité de la faute de l'employeur et alors qu'aucune faute ne peut être reconnue à la charge de la victime, il y a lieu de fixer le montant de la majoration au maximum prévu par la loi ; Attendu que Mattéo I. a présenté lors de son admission au Centre hospitalier d'Auch un traumatisme crânien avec perte de connaissance, une plaie profonde au niveau du scalp, une fracture des apophyses transverses

droites de L1-L2 et L3 et une fracture de la 11ème cote droite ; Qu'il convient préalablement à l'évaluation de son préjudice de désigner un médecin expert afin de déterminer les préjudices à caractère personnel et professionnel dont il se trouve en droit de demander réparation en vertu des dispositions de l'article L 452-3 du Code de la Sécurité sociale, la Cour disposant dés à présent des éléments nécessaires à l'allocation d'une provision de 1 000 ä au paiement de laquelle seront condamnés in solidum l'employeur et son assureur ; Qu'il lui sera de même alloué une indemnité de 450 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile. PAR CES MOTIFS X... COUR Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, Déclare l'appel recevable en la forme, Infirme le jugement déféré, Et statuant à nouveau, Accueille l'intervention de la SMABTP, Dit que l'accident survenu à MattéoI. est dû à la faute inexcusable de son employeur, Fixe le montant de la majoration de rente en découlant au maximum prévu par la loi, Avant-dire droit sur la réparation des préjudices éprouvés par la victime, ordonne une expertise, Désigne pour y procéder le Docteur Patrick X..., ou à défaut le Docteur Jean-Luc Z..., Clinique Saint-hilaire, rue du Docteur et Madame Delmas A... 19, 47000 AGEN, qui aura pour mission, après avoir convoqué les parties, avoir entendu tous sachants et s'être fait communiquer tous documents utiles, notamment les documents médicaux et rapports d'information, d'évolution ou de suivi concernant MattéoI. de : - décrire les lésions imputées à l'accident et dire si celles-ci sont en relation directe et certaine avec celui-ci, en préciser l'évolution, - fixer la date de consolidation de ces blessures et décrire les séquelles qui subsistent en précisant s'il existait un état antérieur, - dire quelle a été la durée de l'incapacité de travail, totale ou partielle, - dire s'il résulte des lésions constatées une incapacité

permanente et dans l'affirmative chiffrer le taux du déficit physiologique existant au jour de l'examen, - dire si cette incapacité est susceptible d'amélioration ou au contraire d'aggravation, - dire si la victime est au plan médical physiquement et intellectuellement apte à reprendre dans les conditions antérieures ou autres l'activité qu'elle exerçait lors de l'accident et donner généralement toutes indications sur l'incidence professionnelle de l'accident en précisant notamment s'il en résulte une perte ou une diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, - qualifier la nature, l'intensité et la durée des souffrances physiques et morales endurées, - qualifier la nature et l'importance du préjudice esthétique compte tenu notamment de l'age de la victime, de son sexe et de sa condition sociale et professionnelle, - dire s'il existe un préjudice d'agrément, - fournir à la Cour tous autres éléments utiles à la solution du litige, Condamne in solidum la société SUD-OUEST SERVICE et la SMABTP à payer provisionnellement à MattéoI. la somme de 1 000 ä à valoir sur la réparation de son préjudice, Dit que la CPAM du Gers versera directement cette somme à MattéoI. et qu'elle en récupérera le montant sur l'employeur et son assureur, Condamne in solidum la société SUD-OUEST SERVICE et la SMABTP à payer à MattéoI. la somme de 450 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile, Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de chambre, et par Nicole GALLOIS, Greffière présente lors du prononcé. X... GREFFIÈRE,

X... PRÉSIDENTE, N. GALLOIS

N. ROGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006942409
Date de la décision : 04/03/2003
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Obligations de l'employeur - Obligation de sécurité de résultat.

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail. Le manquement à cette obligation présente le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Or, nul ne conteste que l'appelant n'était pas alors équipé d'un système d'arrêt de chute, en contravention avec les dispositions de l'article 138 du décret du 8 janvier 1965 qui imposent le port d'un tel système à l'occasion de la construction, du démontage ou de la modification significative d'un échafaudage et ajoute que l'accès des échafaudages en cours de montage ou de démontage n'est autorisé qu'aux travailleurs chargés de ces opérations. Au cas précis, la société intimée ne peut soutenir son absence de conscience du danger concouru par son salarié au motif que seul le chef de chantier devait procéder au montage, alors que, spécialisée dans les travaux de ravalement et d'isolation des murs par l'extérieur, elle ne pouvait ignorer que la construction de l'échafaudage préalable à ces travaux impose la participation des façadiers dans les circonstances qu'ils ont eux-mêmes décrites, exposant nécessairement ceux-ci au danger d'une chute alors que n'a été pris aucun des moyens de préservation imposés par la réglementation et bien connus dans le secteur du bâtiment que sont les systèmes d'arrêt de chute.

Il convient en conséquence de ce qui précède de retenir l'existence d'une faute inexcusable à la charge de l'employeur.


Références :

Article 138 du décret du 8 janvier 1965

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2003-03-04;juritext000006942409 ?
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