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11/02/2003 | FRANCE | N°02/30

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 11 février 2003, 02/30


ARRET DU 11 FEVRIER 2003 NR/NG ----------------------- 02/00030 ----------------------- David X... Yannick GUGUEN ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de M. et Mme Y... X... Z.../ Anne-Marie A... X.D. épouse L. B... épouse C... ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du onze Février deux mille trois par Nicole ROGER, Présidente de chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : David X... D.../assistant : Me RUMMENS loco Me Frédérique LANDREAUD (avocat au barreau d'AGEN

) Yannick GUGUEN ès qualités de mandataire liquidateur à la...

ARRET DU 11 FEVRIER 2003 NR/NG ----------------------- 02/00030 ----------------------- David X... Yannick GUGUEN ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de M. et Mme Y... X... Z.../ Anne-Marie A... X.D. épouse L. B... épouse C... ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du onze Février deux mille trois par Nicole ROGER, Présidente de chambre, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : David X... D.../assistant : Me RUMMENS loco Me Frédérique LANDREAUD (avocat au barreau d'AGEN) Yannick GUGUEN ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de M. et Mme X... Y... 22 bd St Cyr 47304 VILLENEUVE SUR LOT D.../assistant : la SCP ROINAC - ROUL (avocats au barreau de MARMANDE) APPELANTS d'un jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de MARMANDE en date du 26 Octobre 2000 d'une part, ET : Anne-Marie A... D.../assistant : Me Ludovic VALAY (avocat au barreau de MARMANDE) X.D. épouse L. D.../assistant : Me Ludovic VALAY (avocat au barreau de MARMANDE) B... épouse C... D.../assistant : Me Ludovic VALAY (avocat au barreau de MARMANDE) INTIMEES :

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 14 Janvier 2003 sans opposition des parties devant Nicole ROGER, Présidente de chambre, et Christian COMBES, Conseiller, assistés de Nicole GALLOIS, Greffière. Les magistrats rapporteurs en ont, dans leur délibéré, rendu compte à la Cour composée, outre eux-mêmes, de Philippe LOUISET, Conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 786 du nouveau code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCEDURE

Y... X... était titulaire d'un bail sur les terres appartenant à Anne Marie A... depuis le 20 janvier 1993 pour une durée de 9 ans.

Il a été mis en liquidation judiciaire par le Tribunal de grande instance de MARMANDE selon jugement du 18 septembre 1998 ; les époux X..., agriculteurs, ont été autorisés à poursuivre leur activité jusqu'au 30 décembre 1998.

David X..., fils d'Antoine X..., a demandé à Me GUGUEN son accord pour reprendre les terres du fermage ; le 9 novembre 1998, Me GUGUEN lui a adressé une lettre ainsi libellée : "Je ne vois aucun inconvénient à

ce que preniez la suite du fermage précédemment consenti à votre père, et ce, à compter du 1er janvier 1999."

Le 4 novembre 1998, l'avocat d'Anne Marie A... a demandé à Me GUGUEN confirmation qu'elle pouvait disposer des terres objet du fermage avec Y... X... ; le 25 novembre 1998 en guise de réponse, Me GUGUEN a envoyé copie de la lettre de David X... lui demandant son accord pour reprendre les terres et sa réponse du 9 novembre 1998.

David X... est entré sur les terres à partir du 1er janvier 1999.

Le 25 mai 1999, l'avocat d'Anne Marie A... a écrit à Y... X... que la demande de cession du bail au profit de son fils était refusée ; après une sommation de quitter les lieux du 30 août 1999, la bailleresse a assigné David X... en référé, puis au fond, et par jugement du 26 octobre 2000, le Tribunal paritaire des baux ruraux de MARMANDE a jugé qu'aucune cession n'avait été consentie par le bailleur à David X... et a condamné ce dernier à payer 20. 000 francs au bailleur.

Le même jugement a estimé que Me GUGUEN avait commis une faute vis à vis de David X... et l'a condamné à lui payer 50. 000 francs de dommages et intérêts et 3. 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

David X... et Me GUGUEN ont relevé appel de cette décision. MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

David X... fait, tout d'abord, plaider qu'il y a bien eu autorisation tacite de cession du bailleur, procédé admis en jurisprudence ; qu'en effet, les consorts A... ayant interrogé Me GUGUEN aux fins de savoir s'ils pouvaient disposer des terres, Me GUGUEN leur a répondu en les informant de son accord de lui céder le bail ; que ce n'est que six mois plus tard, le 25 mai 1999, que Madame A... a informé Y... X... qu'elle refusait la cession de bail.

Selon David X..., ce silence n'a d'autre explication que leur accord.

Subsidiairement, David X... demande, dans l'hypothèse où la cour considérerait qu'il n'y a pas eu autorisation tacite de cession de lui accorder son autorisation d'une telle cession ; il fait valoir que le refus opposé par le bailleur est injustifié, qu'il n'a en effet d'autre motif que celui de la liquidation judiciaire d'Antoine X..., ajoute que la loi n'attache pas d'effet de résiliation à la liquidation judiciaire et qu'en vertu des dispositions du Code rural il n'existe que deux façons de résilier un tel bail, soit amiable, soit judiciaire ;

Qu'aucune résiliation n'étant intervenue en l'espèce puisqu'il n'a pas existé d'accord entre les précédents preneurs et les bailleurs sur la résolution et qu'aucune procédure n'a été diligentée en vue de la résolution judiciaire du bail ;

A titre tout à fait subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour confirmerait le jugement et maintiendrait son expulsion, David X... demande la confirmation des dispositions relatives à l'indemnisation par Me GUGUEN.

Me GUGUEN, après avoir rappelé la procédure fait observer qu'à la lettre qui lui a été adressée le 28 avril 1999 par le conseil de Madame A..., il a répondu le 5 mai 1999 : "il est bien évident que cette cession au fils ne peut se faire qu'avec l'accord du bailleur." Me GUGUEN présente des observations sur l'incidence de la procédure collective d'Antoine X... sur le bail litigieux, dont il déduit que le bail à ferme se poursuit en l'absence de résiliation du bail de telle sorte que la cession paraissait et paraît encore possible.

Il rappelle ensuite les positions prises par les parties et en tire la conséquence que, premièrement, il n'était pas opposé au projet de cession présenté par David X... et a rappelé que la cession du bail ne pouvait se faire qu'avec l'accord du bailleur ; il estime, donc,

qu'il ne peut lui être reproché une faute, que David X... est juridiquement fondé à solliciter la cession du bail dont demeure titulaire son père présentée par lui-même dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ;

Que le refus clairement exprimé par le bailleur de consentir à ladite cession conduit nécessairement à évoquer le recours à une cession judiciaire et qu'il appartient à David X... de justifier qu'il satisfait aux critères légaux de ladite attribution.

Il rappelle qu'il n'a commis aucune faute, que les deux autres éléments susceptibles de mettre en jeu son éventuelle responsabilité, à savoir l'existence d'un dommage générateur d'un préjudice indemnisable et d'un lien de causalité nécessaire entre le préjudice et la faute démontrée, n'existent pas.

Il conclut, en conséquence, au débouté de toutes les demandes présentées à son encontre. [*

Mesdames C... et L. font valoir qu'elles n'ont pas de droits indivis sur les terres objet de la procédure et se désistent de leur appel. *]

Anne Marie A... rappelle qu'Antoine X... ne bénéficiait d'une autorisation d'exploitation que jusqu'au 31 décembre 1998 ; qu'ainsi, à compter du 1er janvier 1999, les terres se trouvaient sans exploitant, que la cour ne peut considérer que le bail a été valablement cédé ou, à défaut, faire droit à l'autorisation judiciaire de David X...

Anne Marie A... rappelle que le courrier du 24 novembre 1998 ne peut laisser supposer un instant qu'elle ait eu l'intention de céder le bail au fils de son fermier.

Que celui-ci, par l'effet de la liquidation judiciaire était dessaisi de l'administration et de la gestion de ses biens et ne pouvait céder ou disposer des contrats dont il était bénéficiaire et qu'Anne Marie

A... ne pouvait donc autoriser l'exploitation des terres par David X... lequel ne s'est manifesté physiquement qu'en mars 1999 lorsqu'il est venu labourer.

Elle rappelle qu'elle a fait saisir, à nouveau, Me GUGUEN le 28 avril 1999 et lui a fait savoir son refus de la cession.

S'agissant de la demande d'autorisation judiciaire, Anne Marie A... fait plaider que la cour ne peut statuer sur cette demande sauf à violer le principe du double degré de juridiction ; qu'au surplus la cour n'est pas compétente pour donner une telle autorisation à David X... au motif que la juridiction compétente est représentée par le juge commissaire à la liquidation judiciaire d'Antoine X...; Anne Marie A... fait valoir que David X... n'a jamais justifié d'une expérience professionnelle de cinq ans ni d'une situation financière lui permettant de faire face aux engagements souscrits ; elle demande, en conséquence, à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé l'expulsion de David X... des terres occupées.

Sur les comptes entre les parties, Anne Marie A... fait valoir qu'elle a été dans l'impossibilité de jouir des terres pendant quatre ans, soit durant les années 1999, 2000, 2001 et 2002.

Se référant au prix de base du loyer annuel, elle sollicite la somme de 8. 537, 14 euros représentant le montant de son préjudice et demande à la cour de fixer, en outre, une indemnité d'occupation courant au-delà de l'année culturale 2002 d'un montant de 2. 200 euros et 1. 000 euros d'astreinte par mois à compter de l'arrêt à intervenir.

Anne Marie A... demande, encore, la condamnation de David X... au paiement de la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour les frais exposés tant en référé que devant le juge du fond puis en appel. MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il y a lieu de donner acte à Mesdames C... et L. de leur désistement d'instance ;

Qu'il convient, ensuite, de se prononcer au fond :

Attendu que, contrairement à ce qu'affirme la bailleresse dans sa sommation du 30 août 1999, la résiliation du bail n'est pas survenue de plein droit du fait de la liquidation judiciaire d'Antoine X... ; qu'il ne peut, davantage, s'agir d'une résiliation tacite ainsi qu'elle l'indique dans ses conclusions ; que faute d'une résiliation amiable ou prononcée judiciairement, il convient de considérer que le bail se poursuit au bénéfice d'Antoine X... et que David X... se trouve dans les conditions légales pour bénéficier d'une cession de ce bail ;

1°) Sur l'autorisation tacite invoquée :

Attendu que c'est à juste titre que les premiers juges ont statué ainsi qu'ils l'ont fait ; que David X... ne peut se prévaloir d'aucune autorisation tacite à son endroit et qu'il convient, sur ce point, de reprendre purement et simplement la motivation des premiers juges qui a répondu à chacun des arguments soutenus par David X... ;

2°) Sur l'autorisation judiciaire :

Attendu qu'Anne Marie A... fait valoir, tout d'abord, qu'il s'agit d'une demande nouvelle et devant une juridiction qui est incompétente pour en connaître ; attendu que c'est à tort que la bailleresse fait valoir que la juridiction compétente pour donner l'autorisation à David X... serait représentée par le juge commissaire à la liquidation judiciaire d'Antoine X... ;

Attendu qu'il appartient au bailleur et à lui seul de donner l'autorisation de cession lorsqu'elle lui est demandée ;

Que Me GUGUEN qui gère et administre les biens d'Antoine X... n'avait pas compétence pour donner cette autorisation et que le juge commissaire de sa liquidation n'a pas davantage compétence pour le

faire ;

Attendu qu'il convient de déclarer recevable la demande d'autorisation judiciaire formulée expressément devant la cour par David X... ; que la recevabilité d'une telle demande n'est pas subordonnée par l'article L 411-35 du Code rural à une demande d'autorisation amiable ;

Attendu, en outre, que le bailleur ne soulève pas l'absence de caractère préalable de cette demande d'autorisation et ne l'a jamais soulevé ; qu'il ne saurait s'agir d'une demande nouvelle en appel, dans la mesure où elle tend à écarter la demande en expulsion formée par la bailleresse ;

Attendu qu'il convient, en conséquence, de déclarer cette demande recevable et de rechercher si le cessionnaire présente les garanties voulues pour assurer la bonne exploitation du fonds et si, la cession constituant une faveur pour le preneur titulaire originaire du bail, celui-ci a bien satisfait à toutes les obligations nées de son bail ; attendu que non seulement aucun reproche n'a été formulé par le bailleur à l'égard d'Antoine X... mais encore qu'il indique expressément qu'il n'avait pas à introduire une procédure de résiliation de bail, aucune cause antérieure au jugement de liquidation ne pouvant être invoquée ;

Attendu, s'agissant des garanties présentées par le cessionnaire, que David X... a acheté le matériel de son père afin d'exploiter les terres objet du bail; qu'il affirme qu'il est titulaire d'un brevet de technicien agricole sans être contredit sur ce point et, qu'en conséquence, il convient d'autoriser la cession des terres précédemment louées à Y... X... à son fils David X... ;

Attendu que David X... devra régler le fermage des années 1999, 2000, 2001 et 2002 sur la base du fermage en vigueur lors de son entrée dans les lieux; que le fermage pour l'année 1998 doit rester au

compte d'Antoine X... et être acquitté par les organes de la liquidation judiciaire ;

Qu'il convient d'observer que le bail a commencé à courir le 1er janvier 1993 pour finir théoriquement le 1er janvier 2002 ; que faute d'avoir été rompu il doit se poursuivre jusqu'au 1er janvier 2011 ;

3°) Sur l'indemnisation par Me GUGUEN :

Attendu que Anne Marie A... ne conclut pas contre Me GUGUEN ;

Que David X... qui obtient l'autorisation judiciaire de cession ne subit aucun préjudice ; qu'il convient, en conséquence, de réformer sur ce point le jugement entrepris et de mettre Me GUGUEN hors de cause tout en observant une négligence dans sa réponse du 9 novembre 1998 ; qu'il aurait dû, en effet, indiquer de manière précise à David X... qu'il devait obtenir l'autorisation du bailleur avant de prendre la suite du fermage de son père ;

Que David X..., qui n'est pas un spécialiste, a pu tenir cette lettre pour une autorisation qui n'était pas valable ; que cette erreur est de la seule responsabilité de Me GUGUEN ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Réformant le jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de MARMANDE du 26 octobre 2000,

Dit injustifié le refus d'Anne Marie A... de consentir à la cession du bail d'Antoine X... à son fils David ; valide ladite cession conformément à l'article L 411-35 du Code rural,

Condamne David X... à payer les fermages pour les années précédentes à partir du 1er janvier 1999 pendant quatre années sur la base du bail cédé,

Prononce la mise hors de cause de Me GUGUEN,

Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens,

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de chambre, et par Nicole GALLOIS, Greffière présente lors du prononcé. LA GREFFIERE,

LA PRESIDENTE, N. GALLOIS

N. ROGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02/30
Date de la décision : 11/02/2003
Type d'affaire : Sociale

Analyses

BAIL RURAL - Bail à ferme - Résiliation - Causes

Le prononcé de la liquidation judiciaire d'un preneur à bail rural n'entraînant pas de plein droit la résiliation du bail, les enfants du preneur sont recevables à demander judicairement la cession du bail à leur profit


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2003-02-11;02.30 ?
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