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07/05/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006940800

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 07 mai 2002, JURITEXT000006940800


ARRET DU 07 MAI 2002 ----------------------- 00/01805 ----------------------- S.A. SIBA MENUISERIES, C/ Jean-Luc X... ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du sept Mai deux mille deux par Monsieur COMBES, Conseiller, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S.A. SIBA MENUISERIES, Ayet 47400 TONNEINS Rep/assistant : la SCP DUPOUY ET ASSOCIES (avocats au barreau de MARMANDE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 14 Novembre 2000 d'une part, ET : Monsieur Jean-Luc X... né le

12 Octobre 1956 à TONNEINS (47400) 14, Rue des Ros...

ARRET DU 07 MAI 2002 ----------------------- 00/01805 ----------------------- S.A. SIBA MENUISERIES, C/ Jean-Luc X... ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du sept Mai deux mille deux par Monsieur COMBES, Conseiller, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S.A. SIBA MENUISERIES, Ayet 47400 TONNEINS Rep/assistant : la SCP DUPOUY ET ASSOCIES (avocats au barreau de MARMANDE) APPELANTE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de MARMANDE en date du 14 Novembre 2000 d'une part, ET : Monsieur Jean-Luc X... né le 12 Octobre 1956 à TONNEINS (47400) 14, Rue des Rosiers 47190 AIGUILLON Rep/assistant : Me Chantal LHEZ-BOUSQUET (avocat au barreau d'AGEN) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 01/40 du 12/01/2001 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AGEN) INTIME :

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant. La cause a été débattue et plaidée en audience publique le 26 Mars 2002 devant Monsieur MILHET, Président de Chambre, Monsieur COMBES, Conseiller, Monsieur ROS, Conseiller, assistés de Nicole GALLOIS, Greffier et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE Jean-Luc X..., embauché en qualité de menuisier au niveau 5 coefficient 185 le 5 février 1985 par la société SIBA MENUISERIES, a fait l'objet d'un licenciement pour faute lourde selon courrier du 4 avril 1997. Saisi à la requête du salarié, le Conseil de Prud'hommes de Marmande, par jugement du 14 novembre 2000, a déclaré ce licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et condamné la société SIBA MENUISERIES à lui payer les sommes de 19 390 francs à titre d'indemnité de préavis, 23 268 francs à titre d'indemnité de licenciement, 22 567.08 francs à titre de rappel de salaire et 5 000 francs à titre d'heures supplémentaires. PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES La société SIBA MENUISERIES a relevé appel de cette décision dans des formes et des délais qui n'apparaissent pas critiquables. Elle rappelle que Jean-Luc X... surpris le 3 octobre 1996 en train d'emporter sans autorisation une porte-fenêtre et qui a affirmé devant témoin souhaiter démissionner a fait l'objet d'une plainte pour ces faits avant d'être condamné par le Tribunal correctionnel de Marmande le 14 mai 1998 dont la décision

a été confirmée en appel. Ces faits justifient le prononcé du licenciement pour faute lourde. S'agissant des heures supplémentaires elle soutient la carence de son adversaire dans l'administration de la preuve, le caractère exceptionnel de telles heures dans l'entreprise et la pratique consistant en pareil cas à les récupérer. Enfin l'activité réellement exercée exclut qu'il puisse être classé au niveau 6 ce qui la conduit, poursuivant en cela la réformation du jugement déféré à conclure au rejet de la totalité des demandes formées par son adversaire. * * * Jean-Luc X... conteste avoir démissionné, explique les circonstances du vol qui lui est reproché et qui n'a entraîné qu'une condamnation extrêmement légère pour conclure à la confirmation de la décision déférée. Il soutient avoir été promu au mois d'août 1985 au coefficient 230 ce qui correspond aux fonctions de chef d'équipe qu'il exerçait effectivement et justifie le montant des sommes alloués. Il demande sur son appel incident de porter à la somme de 10 562.23 francs le montant des heures supplémentaires qui lui sont dues. MOTIFS - sur le licenciement Attendu que la lettre de licenciement du 4 avril 1997 qui fixe les termes du litige forme à l'adresse de Jean-Luc X... deux griefs, l'un portant sur la tentative de vol le 4 octobre 1996 d'une porte-fenêtre et celui d'autres marchandises au cours des mois précédents, l'autre consistant à avoir contesté sa démission devant le Conseil de Prud'hommes afin de percevoir de manière indue des compléments de salaire ; Attendu qu'en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles, étant précisé que si un doute subsiste, il profite au salarié ; Que s'agissant du premier des griefs formés, il apparaît des éléments communiqués que

le 8 octobre 1996 Francis BARTHEROTE, dirigeant de la société SIBA MENUISERIES a déposé plainte pour le vol qu'aurait commis Jean-Luc X... le 3 octobre précédent ; Que de l'enquête de gendarmerie à laquelle il a été procédé comme de l'information ouverte postérieurement il ressort que ce jour là Jean-Luc X... a effectivement été vu en train de charger dans un camion de l'entreprise une porte avec l'aide d'un chauffeur auquel il a donné l'ordre de la livrer à son domicile, reconnaissant avoir agi à l'insu de ses supérieurs ; qu'il a également reconnu avoir emporté deux châssis au mois de septembre précédent ; et que s'il est confirmé la pratique dans l'entreprise de remises gracieuses au personnel de matériel déclassé Jean-Luc X... ne pouvait ici que donner un avis et n'avait pas qualité pour décider du déclassement ; Qu'il a été, en conséquence de la tentative de vol commise le 3 octobre 1997 dont il a été reconnu coupable, définitivement condamné par arrêt de cette Cour le 11 janvier 1999 confirmant le jugement précédemment rendu le 14 mai 1998 ; Attendu que la faute grave est celle résultant d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable personnellement au salarié et constituant une violation d'une obligation contractuelle ou un manquement à la discipline d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que la faute lourde exige la démonstration par l'employeur de l'intention du salarié de lui nuire; Que toutefois la société SIBA MENUISERIES n'a pas tiré cette conséquence des faits portés à sa connaissance dés le lendemain de leur commission en ne procédant pas au licenciement immédiat de Jean-Luc X... ce qu'elle ne fera que cinq mois plus tard le 4 avril 1997, à une époque où ces faits qui constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement avaient perdu leur caractère de gravité ; Qu'elle ne peut sérieusement soutenir l'existence, selon une version d'ailleurs

contestée par l'intéressé, d'une démission reposant sur la déclaration du salarié disant préférer démissionner au vu des faits reprochés et affirmant porter le jour même à 14 heures une lettre de démission qu'il n'a jamais fait parvenir alors qu'il a immédiatement justifié son absence par la production d'un certificat médical ; Que la démission doit en effet résulter d'une manifestation claire et non équivoque du salarié de sa volonté de rompre son contrat de travail qui ne découle en l'espèce, ni de l'envoi d'une lettre, ni d'une annonce verbale qui selon la thèse de l'employeur devait se concrétiser par la remise d'une telle lettre, ni enfin de son comportement ; Et que la matérialité du second des griefs formés n'est en conséquence pas établie, le salarié qui a d'ailleurs obtenu gain de cause devant le juge des référés étant en droit de contester l'interprétation faite par son employeur d'une situation qui n'équivalait pas à celle résultant d'une démission reconnue valable ; et quoique dépourvue au principal de l'autorité de chose jugée l'ordonnance rendue par le Bureau des référés du Conseil de Prud'hommes n'a pas fait l'objet d'un recours, l'employeur prenant alors clairement le parti d'une procédure de licenciement en reconnaissant implicitement que la rupture du contrat de travail n'était pas intervenue du fait du salarié le 7 octobre 1997 ; Que la décision déférée qui a retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement sera en conséquence confirmée, le premier juge ayant tiré l'exacte conséquence de sa décision en allouant à Jean-Luc X... ses indemnités de rupture; - sur le paiement de salaires Attendu que Jean-Luc X..., embauché au coefficient 185, et qui revendique à compter du mois d'août 1995 sa promotion en qualité de chef d'équipe au coefficient 230 a en réalité perçu à compter du mois d'octobre 1995 une prime de responsabilité de 300 francs sans que son contrat de travail ne soit autrement modifié ;

Attendu qu'en cas de différend sur la catégorie professionnelle qui doit être attribuée à un salarié le juge doit rechercher la nature de l'emploi effectivement exercé par le salarié ; Que la différence entre les niveaux en concours qui concernent la classification des techniciens et agents de maîtrise tels qu'ils résultent de la convention collective applicable porte sur un degré plus ou moins important de responsabilité, d'autonomie, d'initiative et de polyvalence ; Qu'à ce titre le niveau VI revendiqué concerne les emplois pour lesquels sont définis des objectifs à atteindre par la mise en oeuvre de moyens comprenant notamment des fonctions de contrôle et d'encadrement, le coefficient 230 correspondant à un salarié exerçant la responsabilité de l'exécution de travaux diversifiés ainsi que l'encadrement du personnel correspondant ; Que s'il n'est pas contesté que Jean-Luc X... ait eu selon les déclarations mêmes de son employeur la responsabilité d'une équipe de quatre personnes au sein de l'unité de fabrication bois, ce critère n'est pas en soi déterminant dés lors que les fonctions cotées au coefficient 185 prévoient également la possibilité de fonctions d'encadrement ; Qu'en revanche les travaux réalisés par le salarié n'apparaissent pas aussi diversifiés que l'exigerait le coefficient revendiqué puisqu'il ne s'occupait sous l'autorité du chef d'atelier que du secteur de fabrication des portes tandis que rien n'établit qu'il ait été astreint à un objectif et que s'agissant du contrôle de la fabrication il ressort de l'enquête pénale qu'il n'avait pas vocation à décider du déclassement éventuel des menuiseries réalisées ; Qu'il s'ensuit le rejet de la demande formée à ce titre par l'appelant ; - sur le paiement d'heures supplémentaires Attendu que si la charge de la preuve des heures de travail effectuées ne pèse spécialement sur aucune des parties, le salarié ayant seulement l'obligation d'établir la vraisemblance de ce qu'il affirme, il

incombe à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par celui-ci de telle sorte que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux produits par le demandeur, au besoin après l'organisation d'une mesure d'instruction ; Qu'au cas précis le salarié produit un état manuscrit détaillé faisant ressortir chacune des journées concernées avec en regard le nombre d'heures supplémentaires qu'il indique avoir effectuées ; Que de son coté l'employeur verse les attestations émanant de deux salariés certifiant le caractère occasionnel ou exceptionnel du nombre d'heures supplémentaires effectuées dans l'entreprise qui ne concernent que très peu de salariés et sont récupérées sous forme de jours de repos ; Que pour autant l'existence même d'heures supplémentaires n'est pas niée quand bien même l'employeur qui dispose nécessairement de ces informations n'en apporte aucune permettant d'inclure ou non l'intéressé parmi les salariés concernés alors que les bulletins de salaire font état d'un horaire mensuel de 169 heures et ne mentionnent pas de jours de congés excédant le nombre des congés légaux pouvant correspondre à des journées de récupération ; Et qu'il ne produit ainsi aucun autre élément justifiant les horaires effectivement accomplis par le salarié ni ne démontre à une exception près l'inexactitude du décompte des horaires établi par ce dernier ; Qu'au résultat de cet examen et sans qu'apparaisse nécessaire l'organisation d'une mesure d'instruction il y a lieu d'accueillir la demande formée sous réserve d'en exclure la réclamation portant sur 2 heures le 29 février 1994 en raison de l'erreur justement relevée, ce qui ramène la somme accordée à 10 475.83 francs (10 562.23 - 86.40) ; Attendu que les dépens sont à la charge de l'appelant qui succombe pour l'essentiel. PAR CES MOTIFS LA COUR Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Déclare les appels tant Déclare

les appels tant principal qu'incident recevables en la forme, Confirme le jugement déféré hormis en ses dispositions relatives au paiement de salaires et d'heures supplémentaires, Le réformant et statuant à nouveau sur ces chefs de demande, Condamne la société SIBA MENUISERIES à payer à Jean-Luc X... la somme de 10 475.83 francs, soit 1 597.03 euros au titre des heures supplémentaires, Déboute Jean-Luc X... du surplus de ses demandes, Rejette comme inutiles ou mal fondées toutes demandes plus amples ou contraires des parties, Condamne la société SIBA MENUISERIES aux dépens.

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,

N. GALLOIS

A. MILHET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006940800
Date de la décision : 07/05/2002
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse

La lettre de licenciement qui fixe les termes du litige forme à l'adresse de l'intimé le grief de tentative de vol dont il a finalement été reconnu coupable et condamné de ce chef. La faute grave est celle résultant d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables personnellement au salarié et constituant une violation d'une obligation contractuelle ou un manquement à la discipline d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la dure du préavis. Toutefois, la société appelante n'a pas tiré cette conséquence des faits portés à sa connaissance dès le lendemain de leur commission en ne procédant pas au licenciement immédiat de l'intimé, ce qu'elle ne fera que cinq mois plus tard, à une époque où ces faits qui constituaient une cause réelle et sérieuse de licenciement avaient perdu leur caractère de gravité. La décision déférée qui a retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement sera en conséquence confirmé


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2002-05-07;juritext000006940800 ?
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