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09/02/2002 | FRANCE | N°00/01719

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 09 février 2002, 00/01719


ARRET DU 19 FEVRIER 2002 ----------------------- 00/01719 ----------------------- X... Y... C/ LA POSTE ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du dix neuf Février deux mille deux par Madame LATRABE, Conseiller, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Monsieur X... Y... 24 Bis avenue du Plessis 92330 SCEAUX Rep/assistant : Me Patrice BUISSON (avocat au barreau de NANCY) APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AGEN en date du 13 Novembre 2000 d'une part, ET : LA POSTE prise en la personne de son r

eprésentant légal actuellement en fonctions domicil...

ARRET DU 19 FEVRIER 2002 ----------------------- 00/01719 ----------------------- X... Y... C/ LA POSTE ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du dix neuf Février deux mille deux par Madame LATRABE, Conseiller, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Monsieur X... Y... 24 Bis avenue du Plessis 92330 SCEAUX Rep/assistant : Me Patrice BUISSON (avocat au barreau de NANCY) APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AGEN en date du 13 Novembre 2000 d'une part, ET : LA POSTE prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège 72 bld Carnot 47915 AGEN CEDEX Rep/assistant : Me Michel EYBERT (avocat au barreau d'AGEN) INTIMEE :

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant. La cause a été débattue et plaidée en audience publique le 15 Janvier 2002 devant Monsieur MILHET, Président de Chambre, Madame LATRABE, Conseiller, Monsieur ROS, Conseiller, assistés de Nicole GALLOIS, Greffier et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * *

Statuant sur l'appel, dont la régularité n'est pas contestée, interjeté par Monsieur Y... X..., d'un jugement en date du 13 novembre 2 000, par lequel le Conseil des Prud'hommes d'AGEN a dit qu'il n'y avait pas eu de contrat de travail entre les parties et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.

Attendu que Monsieur Y... fait grief aux premiers juges de n'avoir pas retenu que la POSTE avait rompu à son égard une promesse d'embauche, une telle rupture étant assimilable à un licenciement abusif.

Qu'il explique qu'après avoir postulé à un emploi de chef des ventes auprès de la POSTE, il a reçu trois convocations émanant de celle ci pour des entretiens de présélection qui se sont tenus les 17 mai, 25 mai et 4 juin 1999 et qu'à la suite du dernier entretien, il a reçu une correspondance en date du 10 juin 1999 ainsi libellée par le Directeur de LA POSTE de LOT et GARONNE : "à la suite de votre entretien de sélection que vous avez passé le 4 juin 1999 pour le poste de chef des ventes, j'ai le plaisir de vous annoncer que votre

candidature a été retenue pour le département du TARN. Afin de constituer votre dossier, vous voudrez bien prendre rapidement contact avec la direction du TARN au 05 63 45 75 00. Je vous présente toutes mes félicitations pour votre réussite".

Qu'il ajoute que par courrier du 16 juin 1999, il a accusé réception de cette missive et a demandé la date de sa prise de fonction, mais que par lettre du 18 juin 1999, la POSTE lui a répondu qu'à la suite d'une erreur de secrétariat, sa candidature ne pouvait en aucun cas être retenue pour le poste souhaité et que des excuses lui étaient présentées.

Qu'il soutient, pour l'essentiel, que le contrat de travail à durée indéterminée n'est soumis à aucune forme particulière et qu'il peut être verbal ou simplement résulter d'une situation particulière et qu'en l'espèce, il y a bien eu rencontre des volontés résultant d'une part de la lettre d'embauche de la POSTE du 10 juin 1999 et d'autre part de son courrier d'acceptation du 16 juin 1999.

Qu'il prétend que les conditions d'embauche lui avaient été clairement définies lors de l'entretien du 4 juin 1999 et que la valeur de la lettre de la POSTE en qualité de lettre d'embauche et non de simples pourparlers ne fait aucun doute puisqu'elle n'était soumise à aucune condition suspensive et que l'intimée reconnaît qu'elle était en réalité destinée à Monsieur Z... lequel était celui retenu pour occuper le poste.

Qu'il fait valoir que le non respect d'un engagement d'embauche imputable à l'employeur constitue un licenciement ouvrant droit à des indemnités au bénéfice du contractant.

Qu'il demande, dès lors, à la Cour d'infirmer la décision du Conseil des Prud'hommes, de constater que la POSTE a rompu une promesse d'embauche et que cela est assimilable à un licenciement abusif, de condamner en conséquence la POSTE à lui payer les sommes de 31 566,66

Francs à titre d'indemnité de préavis, de 3 156,33 Francs à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, de 97 699,98 Francs à titre de dommages intérêts pour licenciement abusif et de 8 000 Francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Attendu que la POSTE demande, au contraire, à la Cour de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions et, en conséquence, de dire que la lettre du 10 juin 1999 ne peut s'analyser en une promesse d'embauche et encore moins en un contrat de travail, rejeter toutes les demandes indemnitaires présentées par Monsieur Y..., dire également que l'erreur de l'intimée n'a pas constitué pour lui une perte de chance susceptible de lui voir attribuer à ce titre des dommages intérêts et condamner l'appelant à lui payer la somme de 15 000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Qu'elle fait valoir pour l'essentiel que :

- la lettre du 10 juin 1999 a été adressée à Monsieur Y... qui avait échoué à la dernière épreuve de sélection, à la suite d'une erreur de secrétariat ; en réalité, ce courrier était destiné à un autre candidat, Monsieur Z... retenu pour occuper ce poste ; consciente de sa méprise, elle a immédiatement contacté téléphoniquement Monsieur Y... les 14 et 15 juin 1999 pour lui présenter ses excuses et lui expliquer la situation soit avant même l'envoi par ce dernier de son courrier du 16 juin 1999.

- Monsieur Z... n'a pas été engagé sur simple présentation de cette lettre mais par la conclusion d'un contrat écrit conformément aux dispositions de la convention de LA POSTE.

- la correspondance du 10 juin 1999 envoyée par méprise à Monsieur Y... et qui ne contient pas les mentions obligatoires telles qu'édictées par l'article L 121-1 du Code du Travail ne constitue ni lettre d'embauche ni contrat de travail ni même promesse ferme d'embauche ; elle ne vaut tout au plus que comme acceptation de principe de la candidature de Monsieur Y... au poste pour lequel il a concouru.

- en tout état de cause, Monsieur Y... n'a subi aucun préjudice du fait de l'erreur de LA POSTE.

SUR QUOI :

Attendu que le contrat de travail suppose un accord des parties sur les modalités déterminées de la tâche à accomplir et sur sa rémunération.

Qu'il est soumis aux règles du droit commun ; que le consentement, élément essentiel du contrat, caractérisé par l'accord de volonté des parties a deux composantes, l'offre et l'acceptation.

Attendu que l'offre complète, claire et précise de l'employeur de recruter une personne déterminée caractérise la promesse ferme d'embauche ; que dès lors, qu'une telle offre est acceptée par son destinataire, le non respect de celle ci, du fait de l'employeur, s'analyse en un licenciement.

Que l'offre susceptible d'acceptation est celle qui précise les éléments essentiels du contrat.

Qu'il s'ensuit que ne constitue pas une promesse ferme d'embauche la lettre qui, comme en l'espèce, faisant suite à une candidature et à des entretiens de sélection, se borne à aviser l'intéressé que " sa candidature a été retenue pour le département du TARN", sans

comporter la moindre précision relative au montant de la rémunération, à la date d'entrée en fonction et au lieu précis de l'activité.

Qu'ainsi, le courrier litigieux de LA POSTE du 10 juin 1999 qui ne fait aucune référence aux éléments susvisés lesquels caractérisent pourtant les clauses essentielles de tout contrat de travail, ne constitue pas, faute de préciser les éléments essentiels de cette convention, une offre susceptible d'acceptation et ne saurait, par voie de conséquence, créer les obligations légales ou conventionnelles attachées à un tel contrat.

Qu'un tel courrier ne peut s'analyser que comme une acceptation de principe de candidature, ne pouvant, dès lors, s'inscrire que dans le cadre de simples pourparlers.

Attendu que la rupture brutale de tels pourparlers faisant suite à une annonce erronée de succès aux épreuves de sélection a nécessairement causé un préjudice à Monsieur Y..., lequel justifie de surcroît avoir avisé, dès le 14 juin 1999, suite à la réception du courrier litigieux, son employeur de l'époque, la société ARO FRANCE INC, de son projet de démission et avoir effectivement quitté cette entreprise à la date du 30 juin 1999, l'intéressé ayant, par ailleurs, retrouvé un emploi auprès de la société PREST SERVICES, à compter du 10 août 1999.

Que ces circonstances justifient l'octroi d'une somme de 2 286 Euros à Monsieur Y..., à titre de dommages intérêts.

Attendu que dans ces conditions, il convient de débouter Monsieur Y... du surplus de ses demandes, de sorte que la décision déférée qui n'a pas retenu l'existence d'un contrat de travail entre les parties, sera confirmée de ce chef.

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Attendu que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par moitié par chacune des parties.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Reçoit l'appel jugé régulier en la forme,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle n'a pas retenu l'existence d'un contrat de travail entre les parties,

Et y ajoutant,

Condamne LA POSTE à payer à Monsieur Y... la somme de 2 286 Euros à titre de dommages intérêts pour rupture fautive des pourparlers,

Rejette comme inutiles ou mal fondées toutes demandes plus amples ou contraires des parties,

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par moitié par chacune des parties.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, N. GALLOIS

A. MILHET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00/01719
Date de la décision : 09/02/2002
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Accord de volonté des parties - Etendue - Preuve

Le contrat de travail suppose un accord des parties sur les modalités déterminées de la tâche à accomplir et sur sa rémunération. Il est soumis aux règles du droit commun. Le consentement, élément essentiel du contrat, caractérisé par l'accord de volonté des parties a deux composantes, l'offre et l'acceptation. L'offre complète, claire et précise de l'employeur de recruter une personne déterminée caractérise la promesse ferme d'embauche. Dès lors qu'une telle offre est acceptée par son destinataire, le non respect de celle ci, du fait de l'employeur, s'analyse en un licenciement. L'offre susceptible d'acceptation est celle qui précise les éléments essentiels du contrat.Il s'ensuit que ne constitue pas une promesse ferme d'embauche la lettre qui, comme en l'espèce, faisant suite à une candidature et à des entretiens de sélection, se borne à aviser l'intéressé que "sa candidature a été retenue pour le département", sans comporter la moindre précision relative au montant de la rémunération, à la date d'entrée en fonction et au lieu précis de l'activité. Ainsi, le courrier litigieux de l'intimée qui ne fait aucune référence aux éléments susvisés - lesquels caractérisent pourtant les clauses essentielles de tout contrat de travail -, ne constitue pas faute de préciser les éléments essentiels de cette convention, une offre susceptible d'acceptation et ne saurait, par voie de conséquence, créer les obligations légales ou conventionnelles attachées à un tel contrat. Un tel courrier ne peut s'analyser que comme une acceptation de principe de candidature, ne pouvant, dès lors, s'inscrire que dans le cadre de simples pourparlers dont la rupture brutale a nécessairement causé un préjudice au candidat


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2002-02-09;00.01719 ?
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