La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/11/2001 | FRANCE | N°00/01190

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 20 novembre 2001, 00/01190


ARRET DU 20 NOVEMBRE 2001 N.G ----------------------- 00/01190 ----------------------- SMABTP C/ Pierrette X... veuve Y... Vanessa Y... David Y... S.A.R.L. CESCUTTI CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU Z... ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du vingt Novembre deux mille un par Monsieur ROS, Conseiller, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : SMABTP Quartier bouysset BP 696 Allée du Lac Innopole 31319 LABEGE CEDEX Rep/assistant : Me Jean-Claude PRIM (avocat au barreau d'AUCH) APPELANTE d'un jugement d

u Tribunal des affaires de sécurité sociale d'AUCH ...

ARRET DU 20 NOVEMBRE 2001 N.G ----------------------- 00/01190 ----------------------- SMABTP C/ Pierrette X... veuve Y... Vanessa Y... David Y... S.A.R.L. CESCUTTI CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU Z... ----------------------- ARRET N° COUR D'APPEL D'AGEN CHAMBRE SOCIALE Prononcé à l'audience publique du vingt Novembre deux mille un par Monsieur ROS, Conseiller, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : SMABTP Quartier bouysset BP 696 Allée du Lac Innopole 31319 LABEGE CEDEX Rep/assistant : Me Jean-Claude PRIM (avocat au barreau d'AUCH) APPELANTE d'un jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale d'AUCH en date du 15 Juin 2000 d'une part, ET : Madame Pierrette X... veuve Y... 1 Bas mourat 32720 BARCELONNE DU Z... Rep/assistant : Me Michel LAMORERE (avocat au barreau de MONT DE MARSAN) Mademoiselle Vanessa Y... née le 27 Septembre 1980 à AIRE SUR ADOUR (40800) 1 Bas mourat 32720 BARCELONNE DU Z... Rep/assistant : Me Michel LAMORERE (avocat au barreau de MONT DE MARSAN) Monsieur David Y... né le 11 Octobre 1973 à NOGARO (32110) 1 Bas mourat 32720 BARCELONNE DU Z... Rep/assistant : Me Michel LAMORERE (avocat au barreau de MONT DE MARSAN) S.A.R.L. CESCUTTI Résidence Verdi 233 Bd Antoine Lacaze 40000 MONT DE MARSAN Rep/assistant : Me LUNETTA (FIDAL avocat au barreau de DAX) CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU Z... 11 rue de Châteaudun 32000 AUCH NI PRESENTE, NI REPRESENTEE INTIMES :

d'autre part,

DIRECTION REGIONALE DES AFFAIRES SANITAIRES ET SOCIALES MIDI PYRENEES 77Bis, Allées Jean Jaurès 31050 TOULOUSE CEDEX NI PRESENTE, NI REPRESENTEE PARTIE INTERVENANTE : A rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant. La cause a été débattue et plaidée en audience publique le 25 Septembre 2001 devant Monsieur MILHET, Président de Chambre, Madame LATRABE, Conseiller, Monsieur ROS, Conseiller, assistés de Nicole GALLOIS, Greffier et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * *

Monsieur Serge Y..., embauché par la société CESCUTTI le 19 août 1996 était victime d'un accident du travail le 18 septembre 1996 alors qu'il se trouvait sur un échafaudage apposé contre un bâtiment en construction. Chutant d'une hauteur de 7 mètres il subissait de graves blessures.

Par jugement définitif du 7 octobre 1997, monsieur A..., titulaire d'une délégation de pouvoir était déclaré coupable de manquement aux obligations de sécurité ayant involontairement causé une atteinte à l'intégrité physique de monsieur Y... et condamné.

Le 21 août 1997, monsieur Y... saisissait la Caisse primaire d'assurance maladie du Z... dans le cadre d'une action entreprise pour faute inexcusable de l'employeur.

Admis au centre hospitalier de MONT DE MARSAN pour douleurs diffuses en relation avec ses antécédents de traumatisme par chute d'une grue selon le certificat médical établi par le docteur B... le 14 décembre 1998, monsieur Y... traité par produits anti-inflammatoires, décédait le 19 novembre 1998 suite à des complications inhérentes à ce traitement.

Les ayants droit reprenaient, dans ce contexte, la procédure devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale pour obtenir indemnisation de leur préjudice moral et la majoration de leur pension de rente à 100 %.

Par jugement du 24 février 2000, le Tribunal des affaires de sécurité sociale d'AUCH a : - dit que l'accident dont monsieur Serge Y... a été victime le 18 septembre 1996 est imputable à la faute inexcusable de son employeur, la société CESCUTTI, - dit que les droits à indemnisation des ayants droit de monsieur Y... seront minorés de 25 % en raison de l'imprudence de la victime, - dit que le décès de monsieur Y... est en relation directe avec les blessures subies lors de cet accident du travail, - dit que les rentes accident du travail auxquelles peuvent prétendre Madame Pierrette Y... et mademoiselle Vanessa Y... sont majorées de 75 %, - condamné la société CESCUTTI et la Compagnie SMABTP à payer à chacun de Madame Pierrette Y..., Mademoiselle Vanessa Y... et Monsieur David Y... la somme de 90. 000 francs en réparation de leur préjudice moral outre 5. 000 francs

en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - débouté les parties de leur demande plus ample, - et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Dans des conditions non critiquées la SMABTP a relevé appel de cette décision et conclut, à titre principal, à l'absence de faute inexcusable de l'employeur et, à titre subsidiaire, constatation faite de la faute commise par monsieur Y..., à la réduction de la majoration de rente d'au moins de moitié, à ce qu'il soit constaté que les demandes concernant le préjudice moral ne peuvent se cumuler avec l'octroi d'une rente, au débouté des demandes de leurs prétentions formées au titre du pretium doloris et du préjudice esthétique subi par monsieur Serge Y... et de les condamner à 10. 000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SARL CESCUTTI poursuit la réformation du jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale, le débouté des ayants droit de monsieur Y... et leur condamnation à 10. 000 francs pour frais irrépétibles. La Caisse primaire d'assurance maladie s'en est remise à l'appréciation de la Cour.

Les consorts Y... forment appel incident demandant la réformation du jugement ayant retenu la responsabilité partielle de monsieur Y... dans la réalisation de l'accident, la majoration de la rente, la condamnation de la société CESCUTTI et de la SMABTP à payer à chacun d'eux 120. 000 francs pour préjudice moral, 30. 000 francs à Vanessa et David Y... au titre des préjudices personnels subis par leur père et 10. 000 francs pour frais irrépétibles. MOTIFS DE LA DECISION

Vu les moyens et prétentions des parties tels qu'exprimés dans leurs conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample informé ;

Sur le lien entre l'accident et le décès de Monsieur Serge Y... :

Attendu qu'il résulte clairement du certificat médical établi par le docteur B... que monsieur Y... a été hospitalisé en son service suite à des douleurs diffuses en relation avec ses antécédents de traumatisme par chute ; que ce diagnostic ne peut être sérieusement remis en cause par le docteur C... non présent au moment de l'admission de monsieur Y... qu'il n'a pas examiné et uniquement sur l'absence de détails concernant les dites douleurs dont il admet au demeurant l'existence;

Attendu que si, par ailleurs, le docteur C... indique que le choix d'anti-inflammatoires non stéro'diens pour traiter des douleurs n'est pas le seul possible, il ne démontre pas objectivement que ce choix thérapeutique n'était pas le seul adapté à la situation médicale de monsieur Y... ;

Attendu que les deux praticiens s'accordent sur la cause du décès de monsieur Y..., soit une complication des anti-inflammatoires non stéro'diens ; que ce traitement a été ordonné suite aux douleurs dont souffrait monsieur Y... ; que ces douleurs avaient pour origine les traumatismes consécutifs à l'accident du travail du 18 septembre 1996 ; que l'ensemble de ces éléments conduit la Cour à constater que le décès de monsieur Y... dû à un aléa thérapeutique né de son hospitalisation pour douleurs diffuses occasionnées par sa chute de l'échafaudage est en relation avec l'accident précité ;

Sur la faute inexcusable de l'employeur :

Attendu qu'il est constant que monsieur Y... n'a pas bénéficié d'une formation à la sécurité de par le fait de son employeur lequel ne peut s'abriter derrière la haute qualification de la victime pour s'entendre exonérer d'une responsabilité lui incombant et non contestée ;

Attendu que tout travail en hauteur présente un risque de chute ce

que ne pouvait ignorer l'employeur en raison de son professionnalisme ; que tout autant la possibilité d'une chute à l'aplomb direct de la trémie était d'autant plus prévisible qu'il entrait dans l'activité normale des ouvriers de se déplacer le long de l'échafaudage ; qu'ainsi le platelage de la trémie était le complément indispensable du garde-corps l'entourant ; que cette nécessité ne pouvait échapper à l'employeur car en relation directe avec la protection due aux salariés travaillant en hauteur ;

Que la condamnation pénale de l'employeur pour non respect des règles relatives à la sécurité implique nécessairement qu'il a eu conscience du danger encouru par ses employés de par l'absence de couverture de la trémie ;

Qu'il résulte, ainsi, de tout ce qui précède qu'en omettant volontairement de faire procéder au platelage de la trémie au-dessus de laquelle évoluait une équipe de salariés au nombre desquels se trouvait monsieur Y..., l'employeur, conscient du danger qu'il faisait ainsi courir, a commis une faute d'une exceptionnelle gravité constitutive d'une faute inexcusable qui s'est révélée déterminante dans la réalisation de l'accident;

Sur le comportement imprudent de monsieur Y... :

Attendu qu'il résulte du témoignage de monsieur D... que monsieur Y... souhaitant traverser l'échafaudage de part en part a mis un pied dans une brouette se trouvant au milieu pour passer cet obstacle, perdant ainsi l'équilibre et basculant dans le vide ; qu'en agissant de la sorte, le salarié a commis une imprudence ayant concouru à la réalisation de l'accident ne pouvant toutefois s'analyser en une faute inexcusable dès lors que l'employeur ne justifie pas avoir interdit la présence d'une brouette sur un échafaudage, obstacle empêchant la circulation normale des salariés ; qu'ainsi par son comportement imprudent, monsieur Y... a engagé sa

responsabilité à proportion de 25 % comme justement apprécié par le premier juge ;

Sur les préjudices :

Attendu qu'au contraire de ce que prétend l'appelante, il résulte de la combinaison des articles L 434-7 à L 434-14 et L 452-3 al 2 qu'en cas d'accident suivi de mort les ayants droit de la victime (conjoint survivant, enfants et ascendants) ont vocation à solliciter non seulement une rente mais également réparation de leur préjudice moral ; que par voie de conséquence les prétentions des appelants incidents concernant l'octroi de dommages et intérêts résultant du pretium doloris et du préjudice esthétique subis par monsieur Y... sont irrecevables, aucun élément nouveau autre que ceux soumis au premier juge ne permettant à la Cour de porter à 120. 000 francs la réparation du préjudice moral établi ;

Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que succombant en leurs prétentions la SMABTP et la société CESCUTTI ne peuvent prétendre à l'octroi de frais irrépétibles au contraire des consorts Y... auxquels il convient de condamner la SMABTP à leur payer la somme globale de 6. 000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Confirme la décision déférée,

Déboute la SMABTP et la société CESCUTTI de leur demande de frais irrépétibles,

Les condamne à payer aux consorts Y... la somme de 6. 000 francs (soit 914,69 Euros) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne la SMABTP et la société CESCUTTI aux dépens. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, N. GALLOIS

A. MILHET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00/01190
Date de la décision : 20/11/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Conditions - Conscience du danger - Risques liés au poste de travail - Mesures de protection nécessaires - Défaut - /

En omettant volontairement de faire procéder au paletage de la trémie au-des- sus de laquelle évoluait une équipe de salariés - au nombre desquels se trouvait la victime - et dont l'activité normale était de se déplacer le long de l'échafaudage, l'employeur, conscient du danger qu'il faisait ainsi courir, a commis une faute d'une exceptionnelle gravité constitutive d'une faute inexcusable qui s'est révélée déterminante dans la réalisation de l'accident


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2001-11-20;00.01190 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award