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31/05/2023 | FRANCE | N°22VE02489

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 31 mai 2023, 22VE02489


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2202460 du 12 mai 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2022, Mme A..., représe

ntée par Me Papineau, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2202460 du 12 mai 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2022, Mme A..., représentée par Me Papineau, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, et, dans l'attente, de la munir d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, et ce dans un délai de 8 jours suivant l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Yvelines de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de la munir d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, et ce dans les 8 jours suivant le prononcé de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Concernant la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour l'arrêter ;

- elle est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle méconnait les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle et familiale ;

Concernant la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle, familiale et médicale ;

Concernant la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 mars 2023, le préfet des Yvelines conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 septembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Albertini a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C... A..., ressortissante sénégalaise née le 14 novembre 1966, est, selon ses déclarations, entrée en France le 14 novembre 2018. Elle a obtenu un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " pour soins valable du 17 juillet 2020 au 16 janvier 2021. Elle a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté en date du 21 juin 2021, le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée à l'expiration de ce délai. Mme A... relève appel du jugement du 12 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa requête à l'encontre de cet arrêté.

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté querellé ni de tout autre élément du dossier, que le préfet des Yvelines, qui a visé les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il a fait application et a notamment indiqué que Mme A... ne remplit pas les conditions d'admission au séjour au titre de son état de santé, en ce que l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 17 mai 2021 a estimé que si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut emporterait des conséquences d'une exceptionnelle gravité elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, qu'elle déclare avoir trois enfants majeurs résidant en France, qu'elle n'est pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 52 ans et qu'elle n'établit pas risquer d'être exposée à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, n'aurait pas suffisamment motivé les décisions susvisées ni procédé à un examen approfondi et personnalisé de sa situation personnelle et familiale avant de prendre à son encontre l'arrêté attaqué. Par suite, les moyens tirés d'une motivation insuffisante de ces décisions et d'un défaut d'examen particulier de la situation de Mme A... par l'auteur de la décision attaquée doivent être écartés.

3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".

4. Si Mme A... justifie de la présence régulière en France de trois de ses enfants, dont un chez lequel elle est hébergée, elle ne démontre toutefois ni en quoi sa présence auprès d'eux serait indispensable, ces derniers étant majeurs, ni être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 52 ans, avant de se rendre en France en 2018. Elle justifie en outre de l'exercice de plusieurs activités professionnelles depuis son arrivée sur le territoire, sous couvert de contrats à durée déterminée, mais ces éléments ne sont toutefois pas de nature à caractériser un ancrage suffisamment ancien et intense de ses liens d'ordre privé et professionnel avec la France ainsi que de leur stabilité, eu égard notamment à sa récente date d'entrée sur le territoire français, deux ans avant la date d'édiction de l'arrêté attaqué. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Yvelines a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels les décisions attaquées ont été prises. Un tel moyen doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet des Yvelines aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ces décisions sur la situation personnelle et familiale de Mme A... doit être écarté.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision portant refus de séjour :

5. En premier lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions administratives individuelles défavorables qui constituent une mesure de police, doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

6. La décision attaquée vise les textes dont il est fait application, expose les circonstances de fait propres à la situation personnelle de Mme A... ainsi que les éléments sur lesquels le préfet des Yvelines s'est fondé pour l'arrêter. Ainsi, alors que la décision querellée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.

7. En deuxième lieu, dès lors que le préfet des Yvelines s'est livré, ainsi qu'il l'a été exposé au point 2 du présent arrêt, à un examen approfondi et personnalisé de la situation personnelle et familiale de Mme A..., celle-ci n'est pas fondée à soutenir qu'il se serait cru en situation de compétence liée par l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour arrêter la décision litigieuse. Partant, ce moyen doit être écarté.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ".

9. Il ressort des pièces du dossier que, par un avis émis le 17 mai 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, elle peut effectivement y bénéficier d'un traitement approprié et peut y voyager sans risque. Pour contester cet avis, Mme A... verse au dossier des certificats médicaux qui font état du fait qu'elle souffre d'un diabète et d'une hypertension artérielle et dont l'un d'eux atteste aussi que la prise en charge régulière de sa pathologie ne peut être assurée dans son pays d'origine. Toutefois, ce dernier certificat, non circonstancié, ainsi que l'ensemble des pièces versées au dossier, s'ils attestent bien des pathologies dont souffre Mme A... et pour lesquelles elle bénéficie d'un traitement et d'un suivi régulier, ne permettent pas de rendre compte des soins auxquels elle n'aurait effectivement pas accès dans son pays d'origine pour bénéficier d'un traitement approprié, et ne sont pas, dès lors, de nature à remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 17 mai 2021. Au surplus, l'intéressée n'établit pas qu'elle ne disposerait pas des ressources nécessaires pour bénéficier, dans son pays d'origine, des soins rendus nécessaires par son état de santé. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est en méconnaissance des dispositions précitées que le préfet des Yvelines a arrêté la décision attaquée. Ce moyen doit donc être écarté.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A... n'établit pas que la décision portant refus de séjour est illégale. Dès lors, l'exception d'illégalité de cette décision soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas fondée et doit être écartée.

11. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, Mme A..., dont il n'est pas établi que l'état de santé s'opposerait à tout retour dans son pays d'origine, n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce moyen doit donc être écarté. Il en va de même, pour les mêmes motifs, en ce qui concerne le moyen tiré de ce que le préfet des Yvelines aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à la situation médicale de Mme A....

En ce qui concerne l'autre moyen soulevé à l'encontre de la décision portant fixation du pays de renvoi :

12. Il suit de ce qui précède que Mme A... n'établit pas que la décision portant refus de séjour serait entachée d'illégalité. Elle n'est dès lors pas fondée à demander l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi à raison de cette prétendue illégalité.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Yvelines.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président-assesseur,

Mme Villette, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

Le président-assesseur,

O. MAUNYLe président-rapporteur,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N° 22VE02489 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE02489
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : PAPINEAU CINDIE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-05-31;22ve02489 ?
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