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06/12/2022 | FRANCE | N°22VE00756

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 06 décembre 2022, 22VE00756


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2021 par lequel la préfète d'Indre-et-Loire l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2104438 du 2 mars 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa dem

ande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er avril 2022, M. A...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2021 par lequel la préfète d'Indre-et-Loire l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2104438 du 2 mars 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er avril 2022, M. A..., représenté par Me. Ségolène Rouille-Mirza, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète d'Indre-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, au titre des fra is exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- la préfète d'Indre-et-Loire n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions de l'article L.721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est aussi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant tchadien né le 17 novembre 1993, a déclaré être entré régulièrement sur le territoire français le 25 juin 2019, sous couvert d'un visa de court séjour valable du 25 juin 2019 au 8 octobre 2019. Il a sollicité l'asile le 30 juillet 2019 auprès des services de la préfecture du Loiret. Toutefois, l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande par une décision du 14 juin 2021, et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a confirmé cette décision le 2 novembre 2021. Par un arrêté du 8 novembre 2021, la préfète d'Indre-et-Loire l'a ensuite obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, à savoir le Tchad ou tout autre pays où l'intéressé serait légalement admissible. M. A... relève appel du jugement du 2 mars 2022 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté précité.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L.211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L.211-5 de ce même code : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué vise les dispositions sur lesquelles il se fonde, et fait état des éléments relatifs à la situation personnelle de M. A..., notamment quant à ses conditions d'entrée sur le territoire français, aux démarches entreprises ainsi qu'à sa vie privée et familiale. Il s'ensuit que l'arrêté précité comporte les considérations de droit et de fait qui le fondent, de telle sorte que le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

4. En second lieu, il découle des éléments énoncés au point 3 que la préfète d'Indre-et-Loire ne peut être considérée comme n'ayant pas procédé à un examen sérieux et approfondi de la situation personnelle de M. A..., dès lors que la décision attaquée fait mention des éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressé. Par suite, ce moyen doit également être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

5. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". De plus, aux termes de l'article L.721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

6. M. A... fait valoir qu'il serait exposé à des risques de persécutions à raison de ses opinions politiques et religieuses, outre son homosexualité, dans son pays d'origine. Il précise notamment qu'il aurait subi, avant son arrivée en France, de multiples menaces à N'Djamena, sa ville d'origine, et qu'il aurait aussi subi des traitements relevant des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précité, à raison notamment de son adhésion à l'Union nationale pour la démocratie et le renouveau, parti opposant du gouvernement, et de sa participation à une manifestation organisée par ce parti.

7. Toutefois, si M. A... verse aux débats de multiples pièces relatives à son séjour sur le territoire français et à la situation des homosexuels au Tchad, notamment un article de portée générale concernant le refus des autorités d'instaurer le mariage homosexuel, il n'apporte aucun élément de nature à établir son engagement militant et qu'il serait ciblé par les autorités du fait de son engagement, et ne justifie pas non plus de risques encourus personnellement du fait de son orientation sexuelle. Il ressort en outre des pièces du dossier que son récit n'a convaincu ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ni la Cour nationale du droit d'asile, qui ont rejeté sa demande d'asile aux motifs que ses déclarations concernant son militantisme et son orientation sexuelle étaient très imprécises, voire schématiques et stéréotypées.

8. Compte tenu de ces éléments, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le requérant ne démontre pas être exposé à un risque actuel, grave et personnel de subir des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, de telle sorte que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent tous deux être écartés.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Rouille-Mirza.

Copie en sera adresse à la préfète d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président assesseur,

Mme Viseur-Ferré, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 décembre 2022.

Le président-assesseur,

O. MAUNYLe président-rapporteur,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

F. PETIT-GALLAND

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE00756


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE00756
Date de la décision : 06/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : SELARL EQUATION AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-12-06;22ve00756 ?
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